Rapport intérimaire sur la plainte du public déposée par le président concernant le décès par balle de Valeri George à Buick Creek (C. B.)

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Liens connexes

Loi sur la Gendarmerie royale du Canada
paragraphe 45.59(1)

Plaignant
Président intérimaire de la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du Canada

No de dossier : PC-2009-2863

Table des matières

Introduction

Plainte déposée par le président

Examen par la Commission des faits liés aux événements

Analyse des interactions de la GRC avec M. George du 26 au 30 Septembre 2009

Caractère adéquat des politiques, procédures et lignes directrices

Conclusion

Introduction

[1] Le 26 septembre 2009, le détachement de la GRC de Fort St. John, en Colombie-Britannique, a reçu un appel d'un membre du public à propos d'un incident impliquant Valeri George et sa famille. Il a été signalé que M. George avait fait s'arrêter un véhicule à bord duquel se trouvaient son épouse et ses enfants, qui se rendaient à un mariage dans une autre ville, et qu'il avait tiré sur deux des pneus avec une carabine. Le conducteur du véhicule a été en mesure de se rendre à une résidence située tout près, mais M. George les a suivis et a tiré sur les deux autres pneus. M. George a fini par regagner son domicile après avoir tenté à plusieurs reprises, en vain, de parler à sa famille et de faire en sorte qu'elle revienne à la maison. Sa famille s'est rendue au mariage et est restée en dehors de la ville jusqu'à ce que l'affaire soit réglée, selon les conseils de la GRC. Les membres du détachement de Fort St. John ont tenté de parler avec M. George, mais il ne coopérait pas et insistait pour que sa famille lui soit rendue.

[2] Le Groupe tactique d'intervention du district Nord (GTIDN) de la GRC a finalement été mobilisé et, le 30 septembre 2009, il a été déployé dans le secteur de la résidence de M. George pour exécuter un mandat d'arrestation le visant. Après que la GRC a fait de nombreuses tentatives pour communiquer avec M. George en vue de négocier sa reddition, M. George a quitté son allée à bord de son véhicule en roulant à toute vitesse et en portant une arme. Le GTIDN avait bloqué la sortie de la propriété de M. George, et il semble que ce dernier était sur le point d'emboutir la barricade, pouvant ainsi blesser grièvement ou tuer au moins un membre du GTIDN. Les membres du GTIDN ont fait feu sur le véhicule et sur M. George, qui a été mortellement touché.

Plainte déposée par le président

[3] Le 6 octobre 2009, le président de l'époque de la Commission des plaintes du public contre la GRC (maintenant la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du CanadaNote de bas de page 1, ci-après la « Commission ») a déposé une plainte (annexe A) sur la conduite des membres de la GRC ou d'autres personnes nommées ou employées en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (la « Loi sur la GRC ») en cause dans l'incident dont il est question et au sujet de situations d'ordre général de même nature, plus précisément celles où le Groupe tactique d'intervention de la GRC est déployé, pour déterminer notamment :

  1. si les membres de la GRC ou toute autre personne nommée ou employée en vertu de la Loi sur la GRC en cause dans les événements survenus du 26 au 30 septembre 2009, soit du premier contact jusqu'au décès de M. George, ont agi conformément à la formation, aux politiques, aux procédures, aux lignes directrices et aux exigences législatives pertinentes en ce qui concerne le recours à la force;
  2. si les politiques, procédures et lignes directrices de la GRC, établies à l'échelle nationale, à l'échelle de la Division « E » et à l'échelle du détachement, et s'appliquant à l'incident en cause et aux situations où le Groupe tactique d'intervention de la GRC est déployé, sont adéquates.

[4] Aux termes de la Loi sur la GRC, la plainte a fait l'objet d'une enquête par la GRC, qui a fourni à la Commission un rapport daté du 11 juin 2012, joint en tant qu'annexe B. En résumé, la GRC a conclu que les membres du GTIDN avaient agi de façon appropriée, que le recours à la force mortelle était nécessaire et raisonnable et que les politiques, procédures et lignes directrices s'appliquant à l'incident en cause étaient adéquates.

[5] Conformément à l'alinéa 45.71(3)a) de la Loi sur la GRC, la Commission doit établir un rapport écrit énonçant ses conclusions et recommandations relativement à son examen de la plainte. Ce rapport constitue l'enquête menée par la Commission sur les questions soulevées dans la plainte, ainsi que les conclusions et recommandations connexes. Un résumé des conclusions et des recommandations de la Commission figure à l'annexe C.

Examen par la Commission des faits liés aux événements

[6] Il convient de signaler que la Commission est un organisme du gouvernement fédéral, distinct et indépendant de la GRC. Lorsqu'elle examine une plainte déposée par le président, la Commission ne représente ni le plaignant ni les membres de la GRC. Le rôle du président consiste à tirer des conclusions après un examen objectif de la preuve et, s'il y a lieu, à formuler des recommandations relativement aux mesures que la GRC peut prendre pour améliorer ou corriger la conduite de ses membres.

[7] Il faut aussi souligner que les conclusions et les recommandations formulées par la Commission ne sont pas de nature criminelle pas plus qu'elles ne visent à évoquer une quelconque culpabilité criminelle. Une enquête sur une plainte du public concernant le recours à la force fait partie du processus quasi judiciaire, dans le cadre duquel on tient compte des éléments de preuve selon la prépondérance des probabilités. Même si certains des termes utilisés dans le présent rapport peuvent aussi être utilisés dans un contexte criminel, leur utilisation ne vise aucunement les exigences du droit pénal en ce qui a trait à la culpabilité, à l'innocence ou à la norme de preuve.

[8] Les circonstances entourant le décès de M. George ont également été passées en revue dans le cadre d'un examen par un agent indépendant (EAI), qui a été mené par l'inspecteur Jeffrey Hunter de la GRC. Il a produit un rapport final daté du 2 septembre 2011. L'EAI est un examen administratif interne. L'objectif principal de l'EAI est de procéder à une enquête de recherche de faits pour s'assurer, entre autres, qu'une enquête adéquate a été effectuée; que la formation des agents et leurs compétences sont adéquates et que les procédures, tactiques et politiques sont aussi adéquates et ont été respectées; que les membres se sont conduits en conformité avec la Loi sur la GRC; et que tout problème ayant entraîné l'incident ou y ayant contribué est cerné et régléNote de bas de page 2. Dans son rapport à la Commission, la GRC a indiqué qu'elle s'était appuyée en grande partie sur les conclusions de l'EAI. Quand elles s'appliquent aux questions examinées par la Commission, les conclusions et recommandations de l'EAI seront mentionnées dans le cadre du présent rapport.

[9] Mes conclusions, détaillées ci-dessous, s'appuient sur un examen approfondi des documents suivants : le rapport d'enquête établi par la Section des crimes graves de la Division « E » de la GRC et les documents à l'appui, y compris des déclarations, des notes, des rapports et des éléments de preuve photographique et vidéo; les documents pertinents divulgués par la Division « E »; le rapport découlant de l'EAI; le rapport final de la GRC à la Commission; et d'autres documents pertinents.

[10] Le compte rendu des événements qui suit provient des déclarations des témoins faites au cours de l'enquête de la police. La Commission présente ces faits soit parce qu'ils sont incontestés, soit parce que, selon la prépondérance de la preuve, la Commission les admet comme étant une version fiable de ce qui s'est produit. Il importe de mentionner qu'il n'y avait que des divergences mineures entre les déclarations des témoins, notamment celles reçues par de nombreux membres de la famille et amis de M. George et celles fournies par les membres de la GRC concernés. Par ailleurs, les déclarations des témoins correspondent généralement aux éléments de preuve matérielle. Une liste des principaux membres de la GRC en cause dans l'incident est présentée à l'annexe D. Globalement, la Commission conclut que le déroulement des événements au cours des quatre jours précédant le décès par balle de M. George et le jour de son décès est peu contesté.

Contexte

[11] Valeri George était un immigrant germanophone et russophone du Kazakhstan. Il habitait avec sa femme, Irina George, et 11 enfants, sur une ferme isolée dans la région de Buick Creek, près de Fort St. John (Colombie-Britannique). Un autre de ses enfants était marié et avait quitté la maison familiale. Selon Mme George, la famille était établie au Canada depuis quatre ans. M. George avait de la difficulté avec l'anglais, et il était donc ardu pour lui de trouver du travail. Il parlait de retourner en Allemagne, mais Mme George lui disait qu'elle préférait le Canada. Elle a mentionné qu'ils avaient une bonne relation et que M. George traitait bien leurs enfants.

[12] Le 26 septembre 2009, Jack Thiessen a signalé les événements suivants à la GRC : des membres de la famille de M. George étaient en route vers Dawson Creek, quand M. George s'est mis à leur poursuite dans un autre véhicule. M. George aurait utilisé son véhicule pour obliger le véhicule dans lequel se trouvait sa famille à s'immobiliser. M. George a par la suite utilisé une carabine pour tirer sur deux des pneus et a exigé le retour à la maison de sa famille. Le conducteur du véhicule (un ami de la famille) a été en mesure de partir avec la voiture tandis que les pneus se dégonflaient pour se rendre à la résidence d'un voisin, qui était la maison du cousin de M. George, Jakob George. M. George les a suivis, a tiré sur les deux autres pneus du véhicule et a encore une fois exigé le retour à la maison de sa famille. M. George est parti et est revenu à la résidence plusieurs fois avant de rentrer chez lui. La famille s'est rendue à Dawson Creek en utilisant un véhicule différent, et, M. Thiessen, qui était arrivé à la résidence de Jakob George pendant l'incident, a appelé la GRC pour signaler l'affaire.

[13] Les détails suivants de ces événements ont été relatés par des personnes présentes, notamment Mme George et plusieurs de ses enfants, les membres de la famille Simon (qui conduisaient la famille George à Dawson Creek), Rudi, Jakob et Paul George (qui vivaient dans la demeure où la famille George a cherché refuge après que M. George a tiré sur les pneus de la fourgonnette) et Jack Thiessen, le voisin ayant signalé l'affaire à la GRC.

[14] Selon toutes les personnes concernées, M. George ne souhaitait pas assister au mariage à Dawson Creek, mais il avait donné la permission à Mme George et aux enfants de s'y rendre et de s'y faire conduire par la famille Simon. De nombreux témoins ont confirmé que M. George avait donné sa permission. Les membres de la famille Simon ont expliqué que, le 26 septembre 2009, vers 9 h, ils ont emprunté l'allée de la résidence des George et laissé la barrière ouverte lorsqu'ils sont venus chercher les membres de la famille George. Quand ils ont tenté de quitter la propriété avec Mme George et les enfants, ils ont vu que la barrière avait été fermée, probablement par M. George. Un des enfants de la famille George est sorti du véhicule et a ouvert la barrière, puis ils sont partis pour aller au mariage.

[15] Peu après qu'ils ont quitté la propriété des George, M. George est arrivé derrière eux dans son propre véhicule, les a dépassés et les a coupés, les obligeant à arrêter leur véhicule. M. George est sorti de son véhicule avec une carabine et a adressé la parole au conducteur de la fourgonnette – Johan Simon. M. George lui a demandé où il allait avec sa famille. M. Simon lui a répondu qu'ils allaient au mariage. M. George lui a demandé les clés du véhicule, et M. Simon lui a dit [traduction] « Quoi, qu'est-ce que tu veux? » M. George a ensuite tiré sur deux des pneus du véhicule, apparemment pour tenter d'empêcher la famille de poursuivre son chemin, mais les pneus ont simplement commencé à se dégonfler lentement, et les occupants ont été en mesure de se rendre à la propriété de Jakob George, à deux ou trois kilomètres de là. Au dire de Mme George, il a d'abord semblé que M. George retournait à la maison. Elle a déclaré que M. George croyait qu'ils ne pourraient plus utiliser le véhicule, mais les pneus n'étaient pas encore complètement à plat, et ils ont pu poursuivre leur chemin. M. George a ensuite fait demi-tour pour les suivre jusqu'à la propriété de Jakob George.

[16] Après qu'ils se sont arrêtés à la résidence d'un voisin, M. George est sorti de son véhicule et a tiré sur les deux autres pneus du véhicule conduit par M. Simon. Ce dernier s'est dirigé vers M. George, qui lui a demandé s'il voulait se battre. M. Simon a répondu par la négative et demandé à M. George de se calmer. Il a dit n'avoir jamais vu M. George dans un tel état auparavant. Plusieurs personnes présentes ont affirmé que Mme George et les enfants étaient bouleversés et qu'ils souhaitaient entrer dans la maison, ce qu'ils ont fait. M. George était clairement en colère et agité. Il est parti de la propriété de Jakob George et y est revenu à un certain nombre de reprises, et quelqu'un a déclaré que, à un certain moment, pendant que M. George exigeait le retour de sa famille, il tenait à la main un couteau à beurre.

[17] M. Thiessen, qui connaissait M. George, mais qui avait de la difficulté à communiquer avec lui en raison d'un problème de langue, est arrivé à la résidence de Jakob George à un certain moment après la première fois où M. George a quitté la propriété. Quand il s'est approché de la maison, il a constaté que les quatre pneus d'une grande fourgonette (le véhicule qu'avaient emprunté les familles Simon et George) étaient dégonflés. Jakob George a informé M. Thiessen du fait que M. George avait tiré sur les pneus. Pendant qu'ils tenaient cette conversation, M. George est revenu et était très agité. Par l'entremise d'un interprète (les fils de Jakob George), M. George lui a dit qu'une famille était venue lui voler sa famille et qu'il devait aller la sauver. M. Thiessen a dit à M. George qu'il comprenait qu'il était en colère parce que quelqu'un avait volé sa famille, mais que tirer sur les pneus d'un véhicule n'était pas la bonne façon de ravoir sa famille. M. Thiessen lui a également dit de se calmer et de changer d'attitude, faute de quoi il communiquerait avec la GRC. M. George a immédiatement répondu que, s'il appelait la GRC, il se joignait à l'ennemi et lui et toute sa famille iraient en enfer. M. George a ensuite quitté les lieux dans son véhicule.

[18] M. Thiessen a par la suite déclaré que M. George était revenu cinq minutes plus tard. Pendant que M. George discutait avec Jakob George, M. Thiessen a fouillé rapidement le véhicule de M. George pour récupérer l'arme à feu, mais il ne l'a pas trouvée. Quand M. George a vu ce qu'il faisait, il s'est mis en colère et a brandi le poing vers M. Thiessen, qui l'a repoussé. Ils ont échangé quelques mots avant que M. George reparte.

[19] M. Thiessen est entré dans la maison avec la famille George. Pendant qu'ils étaient à l'intérieur, M. George est revenu et a tenté d'entrer, mais la porte était verrouillée. Selon M. Thiessen, ils ont aperçu M. George qui passait d'une fenêtre à l'autre, et les enfants tentaient de ne pas se faire voir par lui. M. Thiessen a mentionné qu'il était clair que toutes les femmes dans la maison étaient très bouleversées. Jakob George est allé à la porte, et M. George est entré, tandis que la famille s'est rendue à l'étage supérieur. M. Thiessen est resté dans l'escalier et a empêché M. George d'aller à l'étage. M. George était clairement agité, il criait et proférait des jurons à haute voix. M. George a parlé avec M. Simon et il lui aurait dit qu'il avait volé les membres de sa famille, qu'ils devaient revenir à la maison immédiatement et qu'ils n'avaient pas demandé à aller au mariage. Il est par la suite reparti.

[20] Entre-temps, un autre ami est arrivé avec un autre véhicule pour que les familles Simon et George puissent se rendre au mariage, et elles sont parties. M. Thiessen les a suivies jusqu'à Buick pour s'assurer qu'elles étaient en sécurité avant de téléphoner à la GRC pour signaler l'incident.

[21] M. Thiessen a par la suite déclaré que, selon les personnes qui lui avaient servi d'interprètes (des membres de la famille de Jakob George qui étaient présents à ce moment-là), M. George avait dit que la fuite de sa famille entraînerait des conséquences. Il percevait que la situation était très tendue et potentiellement dangereuse, et il a donc décidé d'appeler la GRC. Quand Mme George est partie avec les enfants, il lui a dit de ne pas revenir jusqu'à ce que la situation soit réglée.

Participation initiale de la GRC

[22] Dans son appel initial à la GRC, M. Thiessen a déclaré les renseignements suivants : il souhaitait parler à quelqu'un au sujet d'un problème familial impliquant un voisin. L'épouse et les enfants voulaient assister à un mariage, mais le mari n'avait pas envie de les y amener. Une autre famille est venue les chercher, mais le mari [traduction] « est devenu très violent, a pris sa carabine de calibre .22 et a fait feu ». Il y avait deux heures que l'incident était survenu, et M. Thiessen n'avait pas été témoin des tirs, mais il a vu les trous de balle dans les pneus et quelques balles que M. George avait échappées au sol, qu'il a ramassées. M. Thiessen a informé le répartiteur de ce qui suit : [traduction] « Il revenait sans cesse à la maison, est devenu très violent et était sur le point de me battre. Parce que j'avais fouillé son véhicule. Je voulais confisquer la carabine si j'arrivais à la trouver [...] » Ils ont fini par sortir la famille de là et l'amener à un endroit où M. George ne pourrait la trouver. M. Thiessen a mentionné que M. George ne parlait pas l'anglais et que la GRC aurait besoin d'un interprète.

[23] Les dossiers montrent que les renseignements ont été transmis à la gendarme Krystal Moren du détachement de la GRC de Fort St. John dans les minutes ayant suivi l'appel de M. Thiessen. La gendarme Moren a parlé avec M. Thiessen au téléphone et pris en note les éléments suivants :

  • M. Thiessen avait appelé pour signaler une dispute conjugale entre M. George et sa femme dans le cadre de laquelle M. George a fait feu sur les pneus d'un véhicule tandis qu'elle tentait de s'en aller.
  • À l'heure actuelle, Mme George et ses enfants étaient en sécurité à Dawson Creek.
  • Un ami était venu chercher Mme George et ses enfants pour les conduire à un mariage, et M. George est devenu en colère et les a suivis, pour finalement tirer sur les quatre pneus du véhicule qu'ils avaient emprunté.
  • Mme George et les enfants ont cherché refuge dans la maison d'un voisin, où M. Thiessen est arrivé et a discuté avec M. George.
  • Mme George et les enfants ont été en mesure de partir à bord d'un autre véhicule.
  • Les enfants de la famille George avaient peur et pleuraient.
  • Mme George ne voulait pas qu'il appelle la police, car elle s'inquiétait du fait que M. George pourrait aller en prison.
  • M. George ne parlait pas anglais.
  • M. Thiessen avait peur de ce qui pourrait arriver à Mme George quand elle retournerait à la maison.
  • M. Thiessen a indiqué que de la violence conjugale entre M. George et son épouse avait été rapportée, mais que la collectivité refuserait de dire quoi que ce soit à la police.
  • M. Thiessen a fouillé le véhicule de M. George dans l'espoir de récupérer l'arme à feu, mais il n'a pas été capable de la trouver.
  • M. Thiessen a accepté de rencontrer les gendarmes Moren et Josh Martyn à la maison de Jakob George.

[24] Les gendarmes Moren et Martyn sont arrivés à la maison de Jakob George au milieu de l'après-midi, le 26 septembre 2009, et y ont appris ce qui suit (avec l'aide d'un ami de la famille, Jakob Dick, qui traduisait, au besoin) :

  • Vers 9 h ce matin-là, il a été réveillé par l'arrivée de Johan Simon, qui avait emprunté son allée avec Mme George et ses enfants.
  • M. George avait fait feu sur les pneus du véhicule conduit par M. Simon, et il pouvait entendre l'air s'échapper des pneus.
  • M. George était en colère parce que sa femme était partie même s'il le lui avait interdit.
  • M. George brandissait le fusil dans tous les sens, mais il ne menaçait personne et ne pointait pas l'arme à feu vers qui que ce soit.
  • M. George a quitté sa maison et Mme George et les enfants ont été en mesure de partir.
  • M. George se comporte parfois bizarrement, mais on ne l'a jamais vu afficher un tel comportement.
  • M. George n'écoutera personne.

[25] Pendant ce temps, M. Thiessen a remis aux membres plusieurs balles qu'il avait ramassées au sol, qui auraient été échappées par M. George. Après discussion, MM. Thiessen et Dick ont accepté d'aider les membres à faire en sorte que M. George parle avec eux. Les membres ont adopté une approche consistant à dire à M. George qu'il ne serait pas arrêté pour l'instant, mais qu'ils souhaitaient lui parler et récupérer l'arme à feu. La gendarme Moren a mentionné dans son rapport qu'ils ignoraient si M. George ferait feu sur les membres quand il les verrait, car il pourrait croire qu'ils étaient là pour procéder à son arrestation.

[26] Lorsque les membres se sont présentés à l'adresse de M. George, ils ont constaté que les barrières de métal étaient verrouillées de l'intérieur. Les appels téléphoniques à la résidence sont restés sans réponse. MM. Thiessen et Dick n'étaient pas préoccupés par le fait que M. George pourrait se faire du mal à ce moment-là, et M. Thiessen a indiqué que la barrière n'était jamais verrouillée et a considéré que cela signifiait qu'il ne voulait parler à personne. Ils sont tous retournés à la résidence de Jakob George, où M. Dick a été en mesure de parler avec Mme George au téléphone. Mme George a dit qu'elle et les enfants resteraient à Dawson Creek et qu'ils parleraient de l'incident à la GRC locale, dans la maison de sa fille. Elle a ajouté qu'elle soupçonnait que M. George était à la maison et qu'il avait verrouillé la barrière.

[27] Plus tard en soirée, la gendarme Moren a parlé avec M. Thiessen, qui lui a dit que M. George était retourné à la résidence de Jakob George après le départ des membres. Il semblait s'être calmé, mais était encore en colère parce que sa femme était allée au mariage contre son gré. M. Thiessen lui a dit qu'il croyait que M. George [traduction] « s'occuperait » de sa femme quand elle retournerait à la maison et qu'il avait pressé cette dernière de ne pas y retourner. M. Thiessen a ajouté qu'il croyait que ce n'était pas le premier acte de violence perpétré par M. George à l'endroit de sa femme.

[28] Cette même soirée, les membres du détachement de la GRC de Dawson Creek ont recueilli des déclarations de Mme George et de sa fille aînée. On a décidé de s'occuper de M. George le lendemain, car les autres membres de la famille George étaient en sécurité pour la nuit. On réévaluerait la situation le lendemain.

[29] Le 27 septembre 2009, les membres ont confirmé que la famille George était demeurée dans un endroit sécuritaire, mais ils ont dû répondre à d'autres appels pendant la majeure partie de la journée. En soirée, les membres ont obtenu d'autres renseignements par téléphone de la famille et auprès de membres de la collectivité. Ils ont appris que, la soirée précédente, le voisin qui avait initialement donné l'arme à feu à M. George avait été informé de l'incident et avait tenté de récupérer l'arme auprès de M. George. Cependant, ce dernier lui a dit que la carabine se trouvait maintenant à Wonowon. Il s'agissait apparemment d'un mensonge, car la personne à qui M. George a dit avoir remis la carabine se trouvait à Dawson Creek au mariage auquel assistait la famille George. Personne n'a vu M. George cette journée-là. Des déclarations enregistrées ont été recueillies auprès de M. Thiessen et du propriétaire de la carabine.

[30] Très tôt le 28 septembre 2009, une demande de transfert de dossier a été préparée, avec les instructions suivantes :

  • Trouver un traducteur allemand qui sera en mesure de parler avec M. George par téléphone. M. George doit savoir qu'il sera arrêté pour avoir tiré sur les pneus, qu'il doit coopérer et qu'il ne doit pas être nerveux.
  • Trouver M. George et procéder à son arrestation pour usage négligent d'une arme à feu et méfait. Si M. George coopère, obtenir l'arme à feu.

    (Remarque : On a ajouté un avertissement énonçant certains renseignements sur M. George, y compris le fait qu'il croit que la police est extrêmement corrompue et qu'il pourrait considérer qu'elle représente pour lui une grande menace. Il est peut-être aux prises avec une maladie mentale non diagnostiquée, et son comportement pourrait s'aggraver, car sa femme n'est pas retournée à la maison. On ignorait s'il ferait feu sur la police ou s'enfuirait. Il pourrait aussi se barricader dans sa maison pour ne pas être arrêté, car il croit peut-être qu'il ira en prison pour longtemps. M. George est en possession d'une carabine de calibre .22 à un coup.)

  • Présenter à Mme George un bilan de la situation (par l'entremise d'un membre de la famille) et s'assurer qu'elle ne retourne pas à la maison.

[31] Un membre germanophone du détachement de la GRC de Castlegar – le gendarme Dirk Finkensiep – a été mobilisé pour parler avec M. George par téléphone. Il a discuté avec M. George après avoir tout d'abord parlé avec Mme George cette soirée-là. Plus tôt en après-midi, les membres ont commencé à surveiller la propriété des George pour déterminer où se trouvait M. George et être en position pour l'appréhender si le gendarme Finkensiep réussissait à le convaincre de se rendre à la police. Malheureusement, M. George a refusé de communiquer avec le gendarme Finkensiep et n'a pas répondu aux appels subséquents. Le gendarme Finkensiep a également fait appel à un responsable de l'église et ami de M. George, mais cela n'a pas porté fruit. Les membres sont restés à la propriété, mais ils avaient pour instruction de seulement observer et de ne pas tenter d'immobiliser le véhicule ou de confronter M. George s'il tentait de partir.

[32] Le 29 septembre 2009, le gendarme Finkensiep a continué de collaborer avec le responsable de l'église et ami pour tenter d'entrer en communication avec M. George. Ce dernier continuait de refuser de parler à la police et souhaitait que sa famille lui soit rendue. L'ami a déclaré que M. George savait qu'il avait mal agi et qu'il craignait ce qui allait lui arriver. Le gendarme Finkensiep a tenté à nouveau de communiquer avec M. George, mais ses appels sont restés sans réponse.

[33] Plus tard en après-midi le 29 septembre 2009, les membres ont aperçu une fourgonnette blanche au bout de l'allée de M. George (qui arrivait de la résidence, qu'ils ne pouvaient pas voir de leur position). Le conducteur a rebroussé chemin lorsqu'il a vu le véhicule de police identifié. À ce moment-là, le GTIDN avait été mis sur pied et était en route vers Fort St. John.

État d'esprit de M. George

[34] Dans les heures et les jours suivant l'incident initial, il est devenu apparent que M. George se comportait de façon anormale, mais ce n'était pas la première fois qu'il se comportait étrangement depuis quelques mois. Presque tous les gens qui ont parlé de M. George à la GRC se sont dits préoccupés par son état de santé mentale. Le jour de l'incident, un témoin a signalé que M. George lui avait dit que le président de la Russie était allé chez lui. M. George a parlé avec un certain nombre de personnes par téléphone parce qu'il ignorait où se trouvait sa famille et semblait être convaincu que la police l'avait enlevée.

[35] Mme George a déclaré qu'elle souhaitait retourner à la maison, mais que la police lui avait dit de ne pas y aller et de ne pas appeler son mari. Les membres de sa famille refusaient également qu'elle y retourne. Elle a ajouté que les membres de sa famille croyaient que la police parlerait avec M. George et que ce dernier irait consulter un médecin. Mme George a mentionné que son mari avait toujours eu peur de la police et des médecins.

Propriété de la famille George

[36] Après le 26 septembre 2009, M. George est resté à la propriété familiale, montrée dans les photos ci-dessous. Comme il a été mentionné précédemment, la maison est éloignée de la route, et on y accède par une allée fermée par une barrière. Cet éloignement a présenté un certain nombre de difficultés pour les membres, en ce qui a trait aux négociations avec M. George et à la capacité de l'approcher afin de l'arrêter.


Photo 1 : Résidence des George, dépendances et zone agricole.


Photo 2 : Aperçu plus vaste de la propriété des George, y compris la résidence, les dépendances, la zone agricole et la lagune.


Photo 3 : Photo aérienne de la propriété des George, y compris tous les bâtiments et l'allée menant à la route principale.

Mise sur pied et déploiement du Groupe tactique d'intervention du district Nord

[37] Comme les efforts visant à convaincre M. George de coopérer avec la police n'avaient pas porté fruit et qu'il était encore armé et imprévisible sur le plan émotionnel, le GTIDN a été mis sur pied le 29 septembre 2009. Les membres du GTIDN suivants ont finalement été déployés :

  • Inspecteur Patrick Egan – Chef des interventionsNote de bas de page 3
  • Caporal Richard Brown – Chef d'équipe du GTIDNNote de bas de page 4
  • Caporal Ryan Arnold – Commandant en second du GTIDN
  • Gendarme Colin Warwick – Membre du GTIDN et des Services cynophiles
  • Gendarme Matthew Shaw – Membre du GTIDN
  • Gendarme Martin Degen – Membre du GTIDN
  • Gendarme Brian Merriman – Membre du GTIDN
  • Gendarme Colin Atkinson – Membre du GTIDN
  • Gendarme Nathan Poyzer – Membre de réserveNote de bas de page 5

[38] Ils ont été appuyés par les membres suivants :

  • Sergent Mike Stevenson – Négociateur
  • Caporale Claudette Garcia – Négociatrice
  • Ryan Schaefer – Technicien radio
  • Membre civil Shirley Hogan – Préposée au registre des communicationsNote de bas de page 6
  • Membre civil Don McKelvie – Répartiteur
  • Membre civil Nicholas Chapman – Répartiteur en formation
  • Membre civil Greg Melson – Technicien radio

[39] À l'arrivée du groupe, un membre s'est secrètement introduit à pied sur la propriété familiale des George pour prendre position à un endroit où il pourrait observer la résidence et surveiller les déplacements de M. George et de quiconque se trouverait dans la propriété. Le membre a transmis ces renseignements par radio au chef des interventions et à d'autres membres du groupe. Tout au long de la matinée, M. George entrait dans sa résidence et en sortait avec la carabine et a par la suite été aperçu au volant d'une fourgonnette blanche avec la carabine, conduisant à vive allure dans l'allée et la musique à tue-tête. Il est retourné à la résidence avec le véhicule et est rentré à l'intérieur, toujours en possession de la carabine. Il a plus tard repris le volant du véhicule et a conduit de façon capricieuse et à grande vitesse sur la propriété. On a également aperçu M. George déambulant avec la carabine et la pointant de façon aléatoire à différents endroits dans les buissons.

[40] Chaque fois qu'on signalait que M. George se trouvait dans sa résidence, les membres de l'Équipe de négociation en situation de crise (ENSC) tentaient de le joindre par téléphone. Il y a eu une seule réponse, mais la ligne a immédiatement été coupée; les autres appels sont restés sans réponse. (Les enquêteurs ont plus tard découvert que M. George avait apparemment débranché le téléphone.)

[41] Les membres du GTIDN ont assuré le contrôle du périmètre au bout de l'allée pour tenter d'empêcher M. George de quitter la propriété. À un certain moment, on a aperçu M. George chargeant la carabine et marchant dans l'allée avec ses quatre chiens. L'inspecteur Egan a demandé aux membres d'interpeller verbalement M. George. En allemand, on lui a ordonné de s'immobiliser, mais il a fait fi des ordres et a continué d'aller et venir en criant, accompagné de ses chiens. Il s'est ensuite redirigé vers sa résidence.

[42] Après cette rencontre, les membres ont pris position dans les environs de la barrière, où ils ont installé la barricade, à une certaine distance de la route. Le GTIDN a garé un autre véhicule à l'extérieur de la barrière pour fortifier la barricade. On a aperçu M. George mettant du carburant dans sa fourgonnette blanche; il a ensuite récupéré sa carabine dans la fourgonnette et est entré à nouveau dans la résidence.

[43] M. George a par la suite été aperçu sortant de sa résidence avec la carabine. Il a fait démarrer un véhicule tout-terrain (VTT), mais le moteur a étouffé. Toujours en possession de la carabine, il s'est ensuite introduit dans la fourgonnette blanche et a emprunté l'allée à vive allure, se dirigeant vers les membres du GTIDN. Tandis qu'il approchait de la barrière, les membres ont fait feu sur la fourgonnette. La fourgonnette s'est immobilisée, et M. George en est sorti avec la carabine. D'autres coups de feu ont été tirés par les membres du GTIDN, et M. George s'est effondré dans l'allée. Les membres se sont approchés et ont commencé à prodiguer les premiers soins. Une ambulance est arrivée sur les lieux, et les efforts se sont poursuivis; cependant, le décès de M. George a finalement été prononcé sur place. M. George avait quatre blessures par balle, dont deux au torse ayant causé une importante hémorragie interne, ce qui a provoqué son décès.

Analyse des interactions de la GRC avec M. George du 26 au 30 Septembre 2009

Comme il a été mentionné précédemment, les questions à examiner dans le cadre de la plainte déposée par le président sont les suivantes :

  1. si les membres de la GRC ou toute autre personne nommée ou employée en vertu de la Loi sur la GRC en cause dans les événements survenus du 26 au 30 septembre 2009, soit du premier contact jusqu'au décès de Valeri George, ont agi conformément à la formation, aux politiques, aux procédures, aux lignes directrices et aux exigences législatives pertinentes en ce qui concerne le recours à la force;
  2. si les politiques, procédures et lignes directrices de la GRC, établies à l'échelle nationale, à l'échelle de la Division « E » et à l'échelle du détachement, et s'appliquant à l'incident en cause et aux situations où le Groupe tactique d'intervention de la GRC est déployé, sont adéquates.

Dans sa réponse à la plainte déposée par le président, la GRC a mentionné qu'elle était satisfaite de la conduite de ses membres et que les politiques, procédures et lignes directrices applicables étaient adéquates. La réponse de la GRC aux recommandations formulées à la lumière de l'enquête du coroner de la C.-B. et de l'EAI de la GRC sont mentionnés lorsqu'ils s'appliquent à l'examen de la question par la Commission.

Conduite des membres de la GRC avant la mise sur pied du GTIDN

a) Intervention et enquête initiales

[44] La police (y compris la GRC) a le devoir de faire enquête sur les plaintes d'activités criminelles lorsqu'il y a un motif raisonnable de soupçonner un acte répréhensible. L'alinéa 18a) de la Loi sur la GRC établit que les membres ont le devoir :

18a) de remplir toutes les fonctions des agents de la paix en ce qui concerne le maintien de la paix, la prévention du crime et des infractions aux lois fédérales et à celles en vigueur dans la province où ils peuvent être employés, ainsi que l'arrestation des criminels, des contrevenants et des autres personnes pouvant être légalement mises sous garde.

[45] Par ailleurs, la politique de la GRC établit que toute plainte de violence dans les relations doit faire l'objet d'une enquête et doit être documentéeNote de bas de page 7. Les membres du détachement de la GRC de Fort St. John avaient le devoir de faire enquête sur l'appel de M. Thiessen concernant les actes perpétrés par M. George à l'endroit des membres de sa famille.

[46] Les membres ont parlé avec M. Thiessen et d'autres personnes présentes pendant l'incident et ont déterminé que Mme George et ses enfants étaient en sécurité à l'extérieur de la ville. Au besoin, les membres ont utilisé des membres de la famille ou des amis à titre d'interprètes. M. Thiessen et les autres ont accepté de participer aux tentatives d'entrer en communication avec M. George, même si leurs appels à la résidence sont restés sans réponse. Les membres ont parlé par téléphone avec Mme George, qui a confirmé qu'elle resterait à l'extérieur de la ville jusqu'à ce que l'affaire soit réglée. Des dispositions ont été prises pour que Mme George et une de ses filles aînées fournissent des déclarations à un membre du détachement de la GRC de Dawson Creek.

[47] Quand les membres ont rencontré pour la première fois M. Thiessen, il leur a remis deux balles non utilisées que M. George avait apparemment échappées dans la cour pendant l'incident. Les membres se sont rendus à la résidence de M. George, mais les barrières de métal étaient verrouillées de l'intérieur. Personne ne craignait que M. George se fasse du mal à ce moment-là. M. Thiessen a dit aux membres que la barrière n'était jamais verrouillée et que cela signifiait, selon lui, que M. George ne souhaitait parler à personne.

[48] Dans les jours qui ont suivi, et comme il a déjà été mentionné en détail dans le présent rapport, les membres ont déployé des efforts concertés pour obtenir de plus amples renseignements sur M. George et ses antécédents et habitudes, et ils ont tenté à maintes reprises de parler directement avec lui pour régler la situation et procéder à une arrestation pacifique. Ils ont également pris des mesures pour recueillir d'autres éléments de preuve matérielle pour soutenir les accusations et une demande de mandat, lorsqu'il a été déterminé que cela pouvait être nécessaire.

[49] L'inspecteur Egan, dans son rôle d'officier responsable du détachement de la GRC de Fort St. John, a mentionné qu'il avait parlé à l'inspecteur Ray Fast, agent des opérations du district Nord, tard dans la journée du 28 septembre 2009, au sujet de son évaluation de la situation. Ils ont décidé que, tant qu'ils pouvaient confirmer que M. George se trouvait à sa maison et qu'ils pouvaient communiquer par téléphone avec lui (ce qui avait été fait pendant la journée), ils ne déploieraient pas le GTI. Les actes de M. George étaient troublants, mais l'inspecteur Egan estimait que la situation pouvait être réglée grâce à un dialogue et qu'elle était suffisamment atténuée par le positionnement des membres sur la propriété et le fait que Mme George et les enfants étaient en sécurité à l'extérieur de la ville. Il a mentionné que, même si la situation pouvait s'aggraver, pour l'instant, la famille de M. George était en sécurité.

[50] Selon la Commission, les membres du détachement de la GRC de Fort St. John qui ont participé à l'intervention et à l'enquête initiales ont pris des mesures raisonnables pour enquêter sur l'affaire et assurer la sécurité de la famille George. Les membres ont déterminé de façon raisonnable que, à ce moment, M. George ne représentait pas un danger immédiat pour autrui, tandis qu'ils continuaient de recueillir des renseignements et des éléments de preuve matérielle et de surveiller les déplacements de M. George. Cette évaluation a changé au fil du temps, et il en sera question plus loin dans le présent rapport.

Conclusion : Les membres de la GRC avaient le devoir de faire enquête sur les actes de M. George qui avaient été signalés.

Conclusion : Les membres de la GRC ont pris des mesures raisonnables pour enquêter sur l'incident.

Conclusion : Les membres de la GRC ont pris des mesures appropriées pour assurer la sécurité des membres de la famille de M. George jusqu'à l'arrestation de ce dernier.

b) Motifs de l'arrestation de M. George

[51] Tôt pendant l'enquête sur la présente affaire, il est devenu évident que M. George serait arrêté en raison de la gravité de ses actes qui avaient été signalés. Au moment d'évaluer la décision d'un membre de procéder à une arrestation et de porter des accusationsNote de bas de page 8, il est important de se rappeler que son rôle ne consiste pas à déterminer si le suspect est coupable ou innocent – il n'agit pas en tant que juge et jury. Le but d'une enquête est de déterminer s'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été commise.

[52] Les accusations initiales envisagées par les membres étaient l'usage négligent d'une arme à feu et méfait, comme l'a confirmé la demande de transfert de dossier de la gendarme Moren, qui a été présentée en détail plus tôt dans le présent rapport. Ces infractions sont définies de la façon suivante dans le Code criminel du Canada :

86. (1) Commet une infraction quiconque, sans excuse légitime, utilise, porte, manipule, expédie, transporte ou entrepose une arme à feu, une arme prohibée, une arme à autorisation restreinte, un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées d'une manière négligente ou sans prendre suffisamment de précautions pour la sécurité d'autrui.

430. (1) Commet un méfait quiconque volontairement, selon le cas :
a) détruit ou détériore un bien;
b) rend un bien dangereux, inutile, inopérant ou inefficace;
c) empêche, interrompt ou gêne l'emploi, la jouissance ou l'exploitation légitime d'un bien;
d) empêche, interrompt ou gêne une personne dans l'emploi, la jouissance ou l'exploitation légitime d'un bien.

430. (2) Est coupable d'un acte criminel et passible de l'emprisonnement à perpétuité quiconque commet un méfait qui cause un danger réel pour la vie des gens.

[53] Selon la Commission, une preuve accablante étayait les accusations mentionnées précédemment contre M. George par rapport à l'incident de tir. De nombreux témoins ont vu les agissements de M. George et ils ont tous présenté aux enquêteurs des déclarations uniformes soutenues par les éléments de preuve matérielle. De plus, M. George n'a pas nié ce qu'il avait fait quand il discutait de l'incident avec les membres de sa famille et ses amis. Selon la Commission, il est clair que les membres avaient des motifs raisonnables de croire que de multiples infractions avaient été commises par M. George.

[54] Cependant, même dans les cas où la police a des motifs raisonnables de croire qu'une personne a commis une infraction, une arrestation ne s'ensuit pas automatiquement. La décision de procéder à une arrestation sans mandat nécessite de tenir compte des exigences énumérées à l'article 495 du Code criminel et de l'exercice du pouvoir discrétionnaire.

[55] Quand on croit qu'une personne a commis un acte criminel, comme ce qui est énoncé au paragraphe 430(2) du Code criminel (mentionné ci-dessus), elle peut être arrêtée sans mandat. Il n'y a pas d'autres exigences établies dans le Code criminel. Quand une personne a commis ce qui est appelé une infraction mixte – c.-à-d. que la partie poursuivante peut procéder par l'entremise d'une mise en accusation ou d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire, et comme il est prévu à l'article 86 du Code criminel –, un agent de police peut arrêter cette personne sans mandat pour :

  1. dentifier la personne;
  2. recueillir ou conserver une preuve de l'infraction ou une preuve y relative;
  3. empêcher que l'infraction se poursuive ou se répète, ou qu'une autre infraction soit commiseNote de bas de page 9.

[56] Les membres craignaient clairement que l'infraction ne soit répétée ou qu'une autre infraction ne soit commise à l'endroit de Mme George ou d'autres membres de cette famille. Selon Mme George, les membres de la GRC et de sa famille ne voulaient pas qu'elle retourne à sa résidence jusqu'à ce que l'affaire soit réglée. Les amis de la famille George ont dit aux membres qu'ils étaient préoccupés par ce qu'il arriverait à Mme George à son retour. Selon la Commission, les membres croyaient raisonnablement qu'il était nécessaire d'arrêter M. George pour assurer la sécurité de sa famille, et ils ont satisfait à l'exigence établie à l'article 495 du Code criminel.

[57] Cela dit, l'article 495 du Code criminel est permissif. Il n'oblige pas la police à procéder à une arrestation simplement parce qu'on croit que quelqu'un a commis une infraction. Le pouvoir d'arrestation est un pouvoir discrétionnaire. De par sa nature, le pouvoir discrétionnaire fait en sorte que les gens l'exerceront différemment dans des circonstances semblables. Il permet à un agent de police de prendre des décisions selon son évaluation des circonstances au moment où elles sont survenues et selon un éventail de résultats acceptables. Par conséquent, les décisions concernant l'exercice du pouvoir discrétionnaire ont droit à un certain degré de déférence.

[58] Ces décisions sont prises en fonction des circonstances de chaque cas. Cependant, il existe également des considérations stratégiques, surtout dans les cas de violence conjugale. La politique de la GRC insiste sur l'importance de la sécurité des victimes et du fait que les interventions et les actes de la police doivent en tenir compteNote de bas de page 10. Elle renvoie également à la politique du ministère de la Sécurité publique et du Solliciteur général de la C.-B. sur la violence contre les femmes dans les relations et souligne l'accent qu'elle met sur le fait qu'il faut procéder à une arrestation proactive et porter des accusations quand des motifs existentNote de bas de page 11. Mme George et sa famille sont restées loin de leur maison en raison du danger perçu. La sécurité des victimes est d'une importance capitale au moment de déterminer s'il faut ou non exercer le pouvoir discrétionnaire de procéder à une arrestation. En tous les cas, la Commission est convaincue que la décision d'arrêter M. George sans mandat était raisonnable.

Conclusion : Les membres de la GRC avaient des motifs raisonnables de croire que M. George avait commis de multiples infractions aux termes du Code criminel.

Conclusion : Les membres de la GRC avaient des motifs d'arrêter M. George sans mandat en raison de l'incident avec sa famille.

Conclusion : La décision des membres de la GRC de procéder à l'arrestation de M. George sans mandat découlait d'un exercice raisonnable du pouvoir discrétionnaire.

c) Demande de mandat

[59] Les jours ont passé sans que M. George soit arrêté, et les membres ont décidé qu'un mandat permettant de l'arrêter dans sa maison (appelé mandat Feeney) pourrait être nécessaire. Le 29 septembre 2009, les membres ont demandé et obtenu un mandat Feeney pour les infractions au Code criminel suivantes :

  • méfait causant un danger réel pour la vie des gens (paragraphe 430(2));
  • usage d'une arme à feu lors de la perpétration d'une infraction (alinéa 85(1)a));
  • conduite dangereuse (paragraphe 249(1)); port d'arme dans un dessein dangereux (article 88);
  • possession non autorisée d'une arme à feu (paragraphe 92(1));
  • intimidation en recourant à la violence (paragraphe 423(1)).

[60] Le mandat a été délivré par un juge de paix judiciaire de la province de la Colombie-Britannique le 30 septembre 2009, à 0 h 50. Le mandat autorisait la police à entrer dans la résidence de M. George pour l'arrêter sans préavis. Le délai d'exécution du mandat allait de 7 h le 30 septembre 2009 à 23 h 59 le 2 octobre 2009.

[61] La Commission n'est pas chargée d'évaluer la validité du mandat, car il a été délivré par la cour, laquelle a déterminé que la demande de mandat établissait des motifs raisonnables de croire que les infractions mentionnées précédemment avaient été commises. Les décisions de la cour ne peuvent être contrôlées par la Commission. Cependant, cette dernière peut évaluer les actes des membres de la GRC en ce qui a trait à la véracité et à l'exactitude de la demande de mandat, vu le dossier d'enquête, ainsi qu'au caractère raisonnable du pouvoir discrétionnaire exercé pour décider de procéder à l'arrestation au moment où les membres l'ont fait.

[62] La demande de mandat a été produite et présentée à la cour par la gendarme Jessica Veysey. Avant la demande de mandat, les membres n'avaient pas cherché à arrêter M. George dans sa demeure; ils cherchaient plutôt à ce que M. George se rende volontairement. Quoique cela ait continué d'être l'objectif même après la mise sur pied et le déploiement du GTIDN, il était évident que M. George pourrait ne pas coopérer et que les membres pourraient être tenus de s'introduire dans sa maison pour procéder à son arrestation. Selon la Commission, il était raisonnable et nécessaire à cette étape de l'enquête de demander un mandat Feeney. Après avoir passé en revue le contenu de la demande de mandat et du dossier d'enquête de Fort St. John, la Commission conclut que la demande contenait une description raisonnablement complète et exacte des éléments de preuve recueillis jusqu'à ce moment-là.

Conclusion : Il était raisonnable et nécessaire pour les membres de demander un mandat visant l'arrestation de M. George dans sa maison au cas où les négociations échoueraient.

Conclusion : La demande de mandat contenait une description raisonnablement complète et exacte des éléments de preuve.

d) Communications

[63] Comme il a été mentionné précédemment dans le présent rapport, les membres n'ont pas tenté d'approcher M. George sur sa propriété pour les raisons suivantes : a) il avait fermé et verrouillé la barrière (laissant savoir qu'il ne voulait pas de visiteurs), b) ils ont été informés du fait que M. George ne réagirait pas bien à l'intervention de la police, et c) M. George était en possession d'une arme à feu qu'il avait déjà utilisée pour perpétrer une infraction criminelle. Du 26 au 28 septembre 2009, les membres avaient fait appel à la famille et aux amis pour communiquer avec M. George et tenter de faciliter sa reddition à la police.

[64] Les communications étaient d'autant plus difficiles que M. George ne parlait pas ou ne comprenait pas l'anglais. Les membres ont tenté de faire appel aux services d'un interprète pour les aider à communiquer avec M. George; cependant, cette tentative a été infructueuse. Le 28 septembre 2009, on a appris que le gendarme Finkensiep du détachement de la GRC de Castlegar était germanophone, et on lui a demandé de l'aide.

[65] Le gendarme Finkensiep a tout d'abord parlé par téléphone avec Mme George pour s'assurer qu'il était capable de communiquer avec elle et qu'il aurait la capacité de communiquer avec M. George ainsi que pour obtenir de plus amples renseignements sur M. George. Les membres du détachement de la GRC de Fort St. John lui ont remis un questionnaire de deux pages, qu'il a utilisé quand il discutait avec Mme George. Cette conversation a été enregistrée et fait partie du dossier d'enquête.

[66] Vers 18 h 30 le 28 septembre 2009, le gendarme Finkensiep a par la suite appelé à la résidence des George et a parlé avec un homme disant être M. George. Le gendarme Finkensiep a tenté de lui parler de ce qui était arrivé et de la possibilité de se rendre à la police, mais M. George a dit qu'il ne souhaitait pas parler avec la police et a raccroché. M. George n'a pas répondu aux autres appels du gendarme Finkensiep. Cette conversation a également été enregistrée. Au moment de l'appel, les membres se trouvaient au bout de l'allée de M. George afin de l'appréhender s'il acceptait de se rendre.

[67] Les membres ont fait appel à Jakob Remple père, ami de M. George et responsable de l'église respecté dans leur collectivité. M. Remple père avait communiqué avec M. George au cours des jours qui ont suivi l'incident. Joint au téléphone par M. Remple le 29 septembre 2009, M. George lui a dit qu'il ne parlerait pas avec la police et qu'il ne se présenterait pas à la police et il a exigé le retour de sa famille. M. George a avoué avoir endommagé les pneus et a dit qu'il les rembourserait, mais il avait peur de ce qui arriverait avec la police.

[68] Le matin du 29 septembre 2009, le gendarme Finkensiep a encore une fois fait appel à M. Remple père. On a demandé à ce dernier d'appeler M. George. Le gendarme Finkensiep lui a dit de demander à M. George de parler avec les agents de police, car ils souhaitaient que la situation se règle, vu qu'elle n'allait pas tout simplement se volatiliser. M. Remple père a dit qu'il avait parlé à M. George deux fois cette journée-là. Il continuait de refuser de parler avec la police et a dit qu'il ne lui parlerait pas avant que sa famille lui soit rendue. Quand M. George lui a dit que les Simon avaient emmené sa femme et ses enfants sans sa permission, M. Remple père lui a rappelé qu'il avait été témoin de la conversation dans laquelle M. George avait convenu que sa famille se rende au mariage. M. Rempel père a affirmé avoir dit à M. George que les agents de police faisaient preuve de prudence, car il était en possession d'un fusil et qu'ils voulaient qu'il sorte pour discuter avec eux. M. Remple père a tenté de convaincre M. George de se rendre à la police en lui disant que tout allait se dérouler de façon pacifique. Cependant, M. George était convaincu que la police allait s'en prendre à sa famille.

[69] Le gendarme Finkensiep a tenté deux autres fois de joindre M. George par téléphone, mais les appels sont restés sans réponse. Aucune autre tentative n'a eu lieu jusqu'à la mise sur pied et au déploiement du GTIDN.

[70] De vastes efforts ont été déployés pour communiquer avec M. George dans une langue qu'il comprenait. L'incapacité de M. George de communiquer en anglais constituait une difficulté, mais les membres ont pris des mesures pour obtenir les services d'un interprète et recouru à la famille et aux amis jusqu'à ce qu'ils puissent trouver un membre germanophone pouvant entamer la discussion. Je souligne que, après l'enquête du coroner, une recommandation a été formulée selon laquelle tous les détachements de la GRC devraient déterminer la langue seconde principale dans leurs collectivités et compter sur un agent local maîtrisant cette langue. Dans sa réponse à la plainte déposée par le président, la GRC a dit que la recommandation était impossible à mettre en œuvre, mais que d'autres stratégies étaient en place, notamment la capacité de recourir, au besoin, à des agents de police capables de traduire/maîtrisant la langue et le recours à des services de traduction. Cependant, le quartier général de la Division « E » envisageait de créer une base de données contenant le nom des membres parlant une langue autre que l'anglais.

[71] En plus des problèmes de langue, M. George faisait partie d'une petite collectivité qui, selon les renseignements disponibles, préférait régler ses problèmes à l'interne, et il est devenu évident que M. George ne faisait pas confiance à la police pour des raisons culturelles. Par conséquent, les membres ont recouru à la famille et aux amis pour favoriser les communications, et des directives ont été fournies à ces personnes pour faciliter la reddition de M. George à la police. Les choses étaient encore plus compliquées en raison de l'état mental apparent de M. George.

[72] La politique de la GRC indique que les membres ne sont pas qualifiés pour établir un diagnostic de troubles mentaux, mais qu'ils doivent être capables de reconnaître lorsque le comportement d'une personne présente des signes de troubles mentauxNote de bas de page 12. Elle reconnaît qu'une communication claire s'avère efficace pour désamorcer une situation faisant intervenir une personne pouvant être atteinte de troubles mentaux et laisse entendre que le membre peut, après avoir bien évalué les risques, demander de l'aide à un ami proche, à un membre de la famille, à un chef religieux ou spirituel ou à un professionnel de la santé mentale quand les circonstances le justifientNote de bas de page 13.

[73] Du 26 au 28 septembre, les amis et membres de la famille ont fait rapport des conversations qu'ils ont eues avec M. George, même si, règle générale, la GRC ne leur avait pas demandé de tenir de telles conversations. Quand il est devenu clair que M. George n'était pas réceptif à l'idée de parler avec la GRC, les membres ont tenté de le joindre par l'entremise d'un ami et responsable de l'église respecté. M. Remple père avait parlé régulièrement à M. George au cours des jours ayant suivi l'incident, à l'initiative de M. George, qui cherchait sa famille. Le fils de M. Remple était marié à la fille aînée de M. George, et les membres de la famille de M. George se trouvaient à sa maison à Dawson Creek. Selon la Commission, il était raisonnable pour les membres de chercher à obtenir une telle aide de la part de M. Remple père, et des directives adéquates ont été fournies à ce dernier relativement aux messages qu'il devait transmettre à M. George.

[74] À la lumière de la déclaration de l'inspecteur Egan, les membres ont envisagé de faire appel à Mme George pour joindre son mari. Cependant, cette idée a été rejetée pour les trois raisons suivantes : M. George pourrait chercher à se venger de Mme George pour avoir contribué à son arrestation s'ils se réconciliaient; si l'approche était infructueuse, le comportement de M. George pourrait devenir plus instable; et cela pourrait rendre Mme George vulnérable à une autre victimisation. L'inspecteur Egan a déclaré que, à ce moment-là, il était clair qu'il serait difficile de parler avec M. George et que d'autres tentatives infructueuses pourraient perturber M. George et mener à un affrontement. Par conséquent, il a décidé de consulter l'inspecteur Fast au sujet du déploiement du GTI. Selon la Commission, la décision de l'inspecteur Egan de ne pas demander à Mme George d'entrer en communication directe avec son mari était raisonnable.

[75] On a su rapidement qu'il pourrait être difficile de communiquer avec M. George. Son état mental apparent – qui comprenait des signes de paranoïa et de délire – peut avoir contribué à ces difficultés. Le rôle des professionnels de la santé mentale, les cas dans lesquels on devrait faire appel à eux dans le cadre d'incidents de nature criminelle et la manière de procéder font l'objet de nombreuses discussions au sein des services de police. Dans la présente affaire, rien ne montre que les membres ont envisagé de demander l'aide d'un professionnel de la santé mentale. Même si M. George n'avait pas reçu de diagnostic de troubles mentaux, il était clair au dire de tous qu'il pouvait être aux prises avec de tels troubles et que cela avait une certaine incidence sur son comportement du moment. La Commission encourage les membres de la GRC à envisager le recours à des professionnels de la santé mentale rapidement en cas d'incident et en conformité avec la politique de la GRC mentionnée ci-dessus. Si M. George avait accepté de parler avec la police, un professionnel de la santé mentale aurait pu fournir des commentaires sur son comportement et des techniques pour contribuer aux négociations visant sa reddition.

Conclusion : Les membres de la GRC ont fait des tentatives raisonnables pour communiquer avec M. George afin de négocier une reddition pacifique.

Conclusion : Les membres de la GRC ont pris des mesures raisonnables pour veiller à ce qu'ils puissent communiquer avec M. George dans une langue qu'il comprenait.

Conclusion : La décision des membres de la GRC de demander l'aide de M. Remple père pour communiquer avec M. George après qu'il a refusé de parler avec les membres était raisonnable.

Conclusion : L'inspecteur Egan a raisonnablement décidé que le fait de demander à Mme George de communiquer avec son mari était inapproprié dans les circonstances.

Mise sur pied du GTIDN

[76] Les tentatives de communication continues auprès de M. George n'ayant pas porté fruit, l'inspecteur Egan a consulté l'inspecteur Fast au sujet de la mise sur pied du GTIDN. Selon la politique de la GRC, toute décision consistant à mettre sur pied un GTI est généralement prise par un officier responsable des enquêtes criminelles formé. La politique de la GRC indique que l'officier responsable des enquêtes criminelles ou son représentant peut mettre sur pied un GTI sous la direction d'un chef des interventionsNote de bas de page 14. À la lumière des notes de l'inspecteur Egan, à 11 h 55, le 29 septembre 2009, l'inspecteur Fast a autorisé le recours au GTI et il a nommé l'inspecteur Egan chef des interventions.

[77] Au moment de l'incident, la politique nationale de la GRCNote de bas de page 15 prévoyait qu'un GTI pouvait être mis sur pied pour assurer un soutien armé tactique dans le but suivant :

  • arrêter ou neutraliser des personnes armées ou barricadées avec ou sans otages;
  • aider à arrêter des suspects ou des personnes déséquilibrées;
  • immobiliser ou prendre d'assaut des véhicules à risque élevé.

[78] Une version plus récente de la même politique prévoit également le fait d'effectuer de la surveillance rurale lorsqu'une compromission risque d'entraîner de la violence à l'égard de la police ou qu'une formation et de l'équipement spécialisés sont nécessaires en raison des conditions environnementalesNote de bas de page 16. Les membres du GTI sont utilisés dans de telles situations, parce qu'ils ont la formation et l'équipement spécialisés nécessaires. Si on affecte des membres réguliers d'un détachement à ce qui sera essentiellement une confrontation prolongée, cela peut constituer un fardeau pour les ressources de police locales.

[79] L'inspecteur Egan a déclaré que, après avoir reçu un bilan dans la matinée du 29 septembre 2009, il était clair pour lui qu'il serait difficile de parler à M. George et que d'autres tentatives infructueuses le perturberaient et forceraient un affrontement. C'est pour ce motif qu'il a consulté l'inspecteur Fast au sujet du déploiement du GTI, et une décision a été prise. Malgré les meilleurs efforts, les membres du détachement de la GRC de Fort St. John n'arrivaient pas à faire en sorte que M. George coopère, et un affrontement était probable si les communications continuaient d'être infructueuses. De l'avis de la Commission, la décision de mettre sur pied le GTIDN pour contribuer à l'arrestation de M. George était raisonnable et conforme à la politique de la GRC. À ce moment-là, M. George restait dans sa résidence, mais il continuait de constituer une menace pour sa famille, et il était nécessaire de l'appréhender pour assurer la sécurité de cette dernière.

Conclusion : La décision prise le 29 septembre 2009, consistant à mettre sur pied et à déployer le GTIDN pour contribuer à l'arrestation de M. George, était raisonnable et conforme à la politique de la GRC.

Personnel du GTIDN

[80] Le GTIDN est un GTI à temps partiel, c'est-à-dire que ses membres sont titulaires de postes à temps plein au sein de la GRC en plus de participer au GTI. Au moment où l'indicent est survenu, tous les postes du groupe étaient dotés sur une base volontaire à temps partiel. Les membres à temps partiel doivent avoir les mêmes compétences et avoir suivi les mêmes formations que les membres à temps plein, et la politique de la GRC établit qu'une intervention du GTI doit prendre le pas sur toute autre fonctionNote de bas de page 17. En septembre 2009, le poste de chef d'équipe était un poste à temps partiel occupé par le caporal Richard Brown du détachement de la GRC de Fort St. James. En 2014, le poste de chef d'équipe est devenu un poste à temps plein, occupé par le caporal Ryan Arnold, qui était commandant en second au moment où l'incident s'est produit.

[81] Les membres du GTIDN sont affectés à des détachements partout dans le district Nord, tandis que l'équipement est entreposé à Prince George, qui se trouve à environ six heures de Fort St. John. Le détachement de la GRC de Fort St. John répond aux appels provenant de Buick Creek, ville située à 70 kilomètres au nord.

[82] À la lumière de la réponse de la GRC à la plainte de la Commission, tous les membres du GTIDN ayant participé à l'intervention relativement à l'incident étaient à jour quant à leur formation sur le GTI et aux qualifications annuelles concernant les armes à feu. Comme il a été mentionné ci-dessus, le gendarme Poyzer était un membre de réserve qui n'assumait pas de capacité opérationnelle au sein du GTIDN, car il n'avait pas encore suivi la formation requise. Le gendarme Colin Warwick, qui était membre du GTIDN ainsi que des Services cynophiles, était également à jour en ce qui a trait à la formation sur les Services cynophiles.

[83] Les membres de l'Équipe de négociation en situation de crise étaient également à jour par rapport à la formation, sauf la caporale Garcia, qui n'avait pas encore suivi de cours de recyclage, ce qui est requis tous les cinq ans conformément à la politique de la GRC. La GRC n'a pas expliqué pourquoi elle n'avait pas encore suivi de cours de recyclage. Il a été mentionné que la caporale Garcia avait une expérience considérable en tant que négociatrice en situation de crise et qu'elle avait pris part à de nombreux séminaires et ateliers connexes, surtout concernant des questions liées à la santé mentale.

[84] L'inspecteur Egan avait terminé le cours pour les commandants des interventions, qui était offert antérieurement par le Collège canadien de police et qui avait depuis été remplacé par un autre cours qu'il n'avait pas encore suivi au moment de l'incident. Cependant, la GRC a souligné que l'inspecteur Egan et tous les chefs des interventions critiques du district Nord sont maintenant à jour par rapport à la formation. L'inspecteur Egan avait pris part à un scénario de formation du GTI au cours des six mois précédents, conformément à la politique sur les chefs des interventions.

[85] La GRC a reconnu que la préposée au registre des communications à laquelle elle a fait appel dans le cadre de l'incident n'avait pas été officiellement formée pour assumer cette fonction, mais a fait remarquer que, avant septembre 2009, il n'existait pas de cours officiel obligatoire. Pendant l'enquête criminelle, l'inspecteur Egan a dit que, après l'incident, il avait formulé des préoccupations concernant les lacunes dans les notes prises, et c'est à ce moment-là seulement qu'il a appris que le membre en question n'avait pas suivi de cours de formation pour les préposés au registre des communications. Il importe toutefois de mentionner que la politique obligeant les préposés au registre des communications à suivre une formation officielle à cet égard est seulement entrée en vigueur plusieurs mois après l'incident. La politique actuelle oblige maintenant les préposés au registre des communications à recevoir une accréditation, ce qui exige de réussir un des trois cours connexesNote de bas de page 18.

Conclusion : Les membres du GTIDN ayant participé à l'intervention dans le cadre de l'incident étaient à jour par rapport à leur formation.

Conclusion : La caporale Garcia n'avait pas suivi de cours de recyclage destiné aux négociateurs, comme l'exigent les directives de la GRC.

Recommandation : Que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que tous les membres assumant des rôles dans le cadre d'incidents critiques satisfassent aux exigences continues en matière de formation.

Conclusion : Même si cela n'était pas exigé à l'époque, l'inspecteur Egan ne respectait pas la norme de cours actuelle pour les chefs des interventions.

Recommandation : Que la GRC s'assure que tous les membres du GTIDN, les chefs des interventions et tout autre employé de soutien suivent, en temps opportun, une formation sur les nouvelles normes.

Conclusion : La préposée au registre des communications relevant du chef des interventions n'avait pas suivi le cours lié à ce poste, mais cela n'était pas obligatoire à l'époque. La politique actuelle exige dorénavant qu'une telle formation soit suivie.

Compte rendu du GTIDN

[86] Avant la mise sur pied du GTIDN, mais en prévision d'une telle éventualité, le caporal Brown, chef d'équipe, a discuté avec le gendarme Camil Coutney du détachement de la GRC de Fort St. John. Le gendarme Coutney a fourni certains détails de la situation et a demandé quelles seraient les attentes du GTIDN envers les membres du détachement en cas d'intervention. Le caporal Brown a dit qu'ils [traduction] « devraient obtenir une photo du suspect, des renseignements sur ses condamnations et accusations actuelles au criminel, des cartes de la région, notamment celles fournies par Google Earth, des plans de la résidence du suspect et de l'information sur les chiens et les autres animaux sur les lieux ».

[87] Après la mise sur pied du GTIDN le 29 septembre 2009, et avant de partir de Prince George avec le reste du groupe, le caporal Brown a de nouveau discuté avec le gendarme Coutney, qui lui a dit qu'ils avaient obtenu des cartes, des photos et une vidéo de la région. Le caporal Brown a demandé que les plans soient obtenus. Selon les notes du caporal Brown, il a posé des questions au gendarme Coutney au sujet de la présence de chiens, des véhicules et des sentiers qui menaient à la propriété.

[88] Le 29 septembre 2009, le GTIDN a quitté Prince George vers 14 h 45 et est arrivé à Fort St. John vers 20 h. Un compte rendu a été présenté peu après l'arrivée du groupe et a duré un peu moins d'une heure. Il a été donné par les membres de la Section des enquêtes générales de Fort St. John qui avaient fait enquête sur l'incident. Pendant le compte rendu, les membres du GTI se sont vu remettre une photo de M. George, un sommaire écrit des événements jusqu'à maintenant, une carte de la propriété et un imprimé des prévisions météorologiques. Par ailleurs, le gendarme Coutney a fourni des photos et une vidéo de la propriété.

[89] Selon les déclarations et les notes des membres du GTIDN, le compte rendu comprenait des renseignements sur les infractions présumées commises par M. George et l'état mental de ce dernier (notamment le fait qu'il aurait eu des hallucinations, comme voir le président de la Russie ainsi que des loups et des panthères noires dans sa cour) ainsi que des renseignements selon lesquels M. George prenait les médicaments d'un de ses enfants parce qu'il ne faisait pas confiance aux médecins; des amis avaient tenté de faciliter sa reddition; les tentatives de communication avec M. George par un membre germanophone n'avaient pas porté fruit; et il refusait de parler à la police et exigeait le retour de sa famille. Selon les voisins, M. George prendrait la fuite ou combattrait la police. Un membre assurant la sécurité des lieux aurait vu M. George au volant de la camionnette se diriger vers lui dans l'allée, s'arrêter à la vue du véhicule de police et retourner vers la résidence. Les membres ont également abordé la présence de chiens sur la propriété, l'expérience militaire antérieure, les croyances religieuses, la méfiance de M. George envers la police et ses compétences linguistiques. Ils ont également discuté du type d'arme à feu que M. George avait apparemment en sa possession, soit une carabine à levier de calibre .22.

[90] Après avoir pleinement examiné les résultats de l'enquête des membres de Fort St. John et tous les dossiers relatifs au compte rendu, la Commission estime que le compte rendu était raisonnablement complet et exact. Les membres du détachement de la GRC de Fort St. John ont déployé des efforts bien à l'avance pour s'assurer que les membres du GTIDN étaient bien informés et à jour sur l'incident initial impliquant M. George, les événements qui ont suivi et les renseignements supplémentaires que les enquêteurs avaient recueillis au sujet de M. George, ses habitudes et ses comportements.

Conclusion : Le compte rendu du GTIDN préparé et fourni par les membres du détachement de la GRC de Fort St. John était raisonnablement complet et exact.

Déploiement du GTIDN

[91] La politique de la GRC prévoit que seul le commandant des interventions peut déployer un GTI et autoriser le recours à la forceNote de bas de page 19. Le fardeau et les responsabilités que doit assumer un commandant des interventions en cas d'incident critique sont lourds et vastes. Pour remplir ces exigences, la GRC choisit, forme et encadre des commandants des interventions afin de leur fournir les connaissances, les compétences et l'expertise nécessaires. Au moment de l'incident, l'inspecteur Egan était l'officier responsable du détachement de la GRC de Fort St. John. Il avait pris part à un certain nombre d'interventions réussies du GTI, y compris une intervention menée un an auparavant impliquant un alcoolique chronique schizophrène en possession d'une carabine qui avait fait feu sur le personnel d'un détachement.

[92] Le GTIDN a été mis sur pied le 29 septembre 2009, mais il n'a été déployé à la résidence de M. George que le matin suivant. Au moment de décider s'il fallait déployer le groupe le 29 septembre 2009 en soirée ou plutôt le 30 septembre 2009 au matin, l'inspecteur Egan a choisi la deuxième option pour les raisons suivantes :

  1. Il considérait qu'il serait plus sécuritaire d'effectuer un déploiement à la lumière du jour, car les membres ne connaissaient pas l'environnement local.
  2. Il s'attendait à ce que les membres restent en position longtemps, et, comme le GTIDN et le personnel de soutien avaient été sur la route pendant six heures dans de mauvaises conditions météorologiques pour se rendre à Fort St. John, il a déterminé qu'il serait mieux s'ils étaient bien reposés.
  3. Le chef d'équipe du GTIDN, le caporal Brown, et lui ont convenu que le plan consisterait à assurer le contrôle du périmètre et à effectuer des négociations, ce qui avait été une approche fructueuse dans une autre intervention menée plus tôt au cours de l'année et à laquelle avaient participé bon nombre des mêmes membres du personnel.

[93] Rien n'indiquait que M. George quitterait sa résidence pendant la nuit, et les membres avaient été positionnés autour du périmètre au cas où il tenterait de s'en aller. À ce moment-là, l'inspecteur Egan croyait raisonnablement que les négociations seraient longues et que les membres du GTIDN déployés à la propriété des George y resteraient peut-être longtemps. Par conséquent, compte tenu des risques existants et vu toutes les circonstances, la décision d'attendre jusqu'au matin pour déployer le GTIDN à la propriété des George était raisonnable.

Conclusion : La décision de l'inspecteur Egan de reporter le déploiement du GTIDN à la propriété des George jusqu'au matin du 30 septembre 2009 était raisonnable dans les circonstances.

Plan opérationnel

[94] Le Manuel des opérations tactiques de la GRC établit que, à moins que l'urgence de la situation ne l'en empêche, le chef d'équipe GTI doit veiller à ce qu'un plan opérationnel écrit soit élaboré dans les plus brefs délais possibles lors de tout déploiement et à ce qu'il soit approuvé et paraphé par le commandant des interventions avantNote de bas de page 20.

[95] Dans sa déclaration, le caporal Brown a mentionné que, après le compte rendu, il a discuté de la préparation du plan opérationnel avec le chef des interventions, l'inspecteur Egan, et lui a dit que le plan qu'il proposait consistait à aborder la situation lentement et à recourir à la négociation pour un règlement en toute sécurité. L'inspecteur Egan était d'accord et lui a dit qu'ils pouvaient attendre que la situation se déroule [traduction] « pendant longtemps ». Le caporal Brown a passé du temps à discuter avec les autres membres du GTIDN des tactiques et de la logistique et à visionner la vidéo des lieux.

[96] Plus tard en soirée, le caporal Brown a rédigé le plan opérationnel. Il prévoyait un contrôle du périmètre de base ainsi que l'introduction secrète sur la propriété d'un membre du GTI (le gendarme Shaw) pour recueillir des renseignements sur la propriété et les activités de M. George (pour qu'ils puissent réagir en conséquence) tandis qu'un membre des Services cynophiles/du GTIDN (le gendarme Warwick) assurerait une couverture à l'arrière de la maison. Le plan consistait à mettre l'accent sur la négociation, avec l'aide d'un ami de la famille comme interprète.

[97] Les dossiers confirment que les plans opérationnels ont été élaborés par le caporal Brown et signés par l'inspecteur Egan, comme l'exige la politique de la GRC. L'« objectif » du plan était de [traduction] « régler pacifiquement la situation par l'entremise de la négociation avant de prendre toute mesure délibérée ». Le plan de reddition consistait à utiliser des négociateurs qui, par l'entremise d'un ami de la famille/interprète, diraient à M. George par téléphone ce qu'il devait faire tandis qu'un membre germanophone du GTIDN (le gendarme Degen) donnerait des ordres sur place afin que les membres du GTIDN puissent l'arrêter de façon sécuritaire. Si M. George s'enfuyait à pied, les membres le confronteraient, lui diraient d'arrêter et utiliseraient les options d'intervention adéquates (selon la formation).

[98] En prévision d'une évasion par véhicule, le plan consistait à bloquer l'allée. La piste de VTT serait couverte, mais pas bloquée physiquement. Des plans supplémentaires ont été élaborés au cas où M. George se rendrait compte que des membres se trouvaient sur sa propriété et se barricaderait dans sa résidence. Tous les plans ont été présentés aux membres du GTI le matin du 30 septembre 2009 après qu'ils ont eu reçu une copie signée d'un mandat Feeney pour la résidence de M. George.

[99] La Commission souligne que, même si le plan prévoyant une évasion de M. George par véhicule supposait qu'une barricade soit dressée au bout de l'allée, aucun autre plan n'a été élaboré au cas où M. George réussirait à franchir la barricade. Avant de dresser la barricade, que l'on a finalement déplacée dans l'allée (ce qui sera abordé ultérieurement dans le présent rapport), on prévoyait vraisemblablement que M. George serait incapable de la franchir. Selon la Commission, il s'agissait d'une évaluation raisonnable en fonction des éléments connus au moment d'élaborer les plans. On ignorait que M. George tenterait en fait de quitter la propriété à maintes reprises même si la police était présente, puisqu'il avait déjà reculé à la vue d'un véhicule de la police, et qu'il le ferait en possession de son arme à feu. (Les membres du GTIDN, après le décès par balle de M. George, ont fourni dans leurs déclarations aux enquêteurs différents points de vue sur la possibilité de franchir facilement la barricade telle qu'elle existait au moment de la fusillade. L'efficacité de la barricade sera abordée dans une section ultérieure.)

Conclusion : Les plans opérationnels ont été préparés et signés par le chef d'équipe et le chef des interventions avant le déploiement du GTIDN à la propriété des George, conformément à la politique de la GRC.

Conclusion : Les plans opérationnels étaient raisonnablement complets et adéquats au moment de leur élaboration, selon les circonstances connues des membres.

Observation de M. George

[100] Le 30 septembre 2009, vers 9 h, le gendarme Shaw et le caporal Arnold se sont introduits sur la propriété à pied afin d'établir un poste d'observation près de la résidence des George, ce qui leur a pris environ une heure. Dans sa déclaration écrite, le gendarme Shaw a expliqué aux enquêteurs qu'il avait pris position à environ 70 mètres du côté nord de la résidence des George et qu'il était en mesure d'observer un certain nombre de véhicules, la résidence et les dépendances. Il n'avait pas la capacité d'observer l'entrée principale de la résidence, mais pouvait voir le porche de l'entrée principale et l'intérieur de la résidence par une grande fenêtre panoramique située du côté nord. À partir de cette position, le gendarme Shaw a fourni au GTI des renseignements sur la propriété et les bâtiments, et le caporal Arnold est retourné au poste de commandement.

[101] Vers 10 h 38, en utilisant une lunette d'observation, le gendarme Shaw a confirmé que M. George était dans la résidence. Rien n'indiquait que quelqu'un d'autre se trouvait dans la propriété, outre M. George et ses quatre chiens. Le gendarme Shaw était en mesure d'observer M. George sans se faire voir. Il a continué d'observer M. George pendant environ deux heures et demie, transmettant ses observations au poste de commandement et aux membres du groupe par radio. Pendant ce temps, il a vu M. George entrer dans sa maison et en sortir un certain nombre de fois, généralement en possession de sa carabine. Il a vu M. George marcher en rond dans la cour ou se rendre à un des véhicules garés dans la cour, habituellement la fourgonnette blanche Pontiac Montana. Selon le gendarme Shaw, il agissait de façon [traduction] « très bizarre et imprévisible ».

[102] Conformément au plan opérationnel, le gendarme Warwick, accompagné de son chien de police, et le gendarme Atkinson ont tenté de prendre position à proximité de la résidence. Cependant, ils se sont aperçus que la zone était couverte de broussailles épaisses et qu'ils devaient encore parcourir 1,5 kilomètre environ pour arriver à la résidence quand M. George a pour la première fois été aperçu par le gendarme Shaw entrant dans son véhicule avec une carabine. Les membres ont donc reçu comme instruction de se repositionner dans l'allée de M. George afin de pouvoir prêter main-forte en cas d'affrontement.

[103] Le gendarme Shaw a vu M. George conduire de façon capricieuse sur la propriété, allant et venant dans l'allée à vitesse élevée et la musique à tue-tête. M. George aurait effectué de telles sorties sur la propriété à de nombreuses reprises pour ensuite retourner à la résidence, verrouiller le véhicule, entrer dans la résidence, sortir à nouveau et effectuer une routine semblable une minute plus tard. Les communications radio du gendarme Shaw avec les membres du groupe faisant état des agissements de M. George ont été enregistrées et versées au dossier d'enquête.

[104] À un moment donné, M. George est sorti de sa résidence avec la carabine et a commencé à la pointer à différents endroits dans les buissons, pour ensuite l'abaisser. Il a effectué ce geste un certain nombre de fois et a pointé la carabine en direction du gendarme Shaw à un certain point, quoique le gendarme Shaw ait mentionné qu'il était persuadé que M. George ne pouvait le voir.

[105] À un autre moment, M. George marchait dans l'allée avec la carabine dans les mains, accompagné de ses quatre chiens. Tandis qu'il passait à moins de 25 mètres du gendarme Shaw, ce dernier l'a vu charger sa carabine. Il est ensuite sorti de l'angle de vue du gendarme Shaw, et peu après le gendarme Shaw a clairement entendu les autres membres crier « Polizie, Halt ». Quelques minutes plus tard, M. George est retourné à la résidence à pied avec ses chiens et la carabine dans les mains.

[106] Environ deux heures après avoir commencé son observation, le gendarme Shaw a vu M. George garer son véhicule devant la résidence, entrer dans la maison et enlever sa veste. M. George marchait dans sa résidence, gesticulant avec les mains et parlant comme s'il tenait une conversation animée avec quelqu'un d'autre. Cependant, il semblait n'y avoir personne avec M. George. M. George est par la suite sorti de la résidence et a versé dans le réservoir de sa fourgonnette blanche ce qui semblait être de l'essence. M. George n'avait pas la carabine avec lui à ce moment-là, mais il se trouvait à seulement 12 mètres environ du porche avant de la résidence, soit le dernier endroit où le gendarme Shaw l'avait vu en possession de la carabine.

[107] Selon le gendarme Shaw, cette information a été transmise au caporal Brown, et ils ont tenté de déterminer si le gendarme Shaw ne devrait pas foncer sur M. George vu qu'il utilisait ses deux mains pour manier le bidon d'essence. Le problème tenait au fait que le gendarme Shaw était seul et que l'aide était trop loin. Il était également préoccupé par le fait que les chiens révéleraient sa présence s'il s'approchait davantage. Dans un tel cas, M. George aurait le temps de récupérer son arme à feu.

[108] M. George a par la suite été aperçu retournant à la résidence et en sortant avec la carabine. Il a tenté de faire démarrer un VTT, mais a abandonné, car le moteur avait calé après une courte distance. M. George aurait repris le volant de la fourgonnette blanche et accéléré dans l'allée jusqu'à atteindre une grande vitesse, estimée à 70 à 80 kilomètres à l'heure par le gendarme Shaw, et à être hors de la vue du gendarme Shaw. Quelques instants plus tard, le gendarme Shaw a dit avoir entendu ce qui semblait être des tirs. Il est resté dans sa position jusqu'à ce que les autres membres du groupe se rendent à la résidence à pied.

Conclusion : Le gendarme Shaw a pris position près de la résidence des George et a transmis par radio ses observations de façon continue et détaillée.

Actions de l'Équipe de négociation en situation de crise du GTIDN

[109] La politique de la GRC établit que le déploiement d'une équipe de négociation en situation de crise (ENSC) doit être envisagé quand on déploie un GTINote de bas de page 21. Dans le cas présent, on a décidé de déployer une telle équipe avec le GTIDN. L'objectif d'une ENSC dans le cadre d'un tel incident consiste à négocier la capitulation des contrevenants en toute sécurité sans qu'il y ait de décès ou de blessuresNote de bas de page 22. Les tactiques et stratégies de négociation sont approuvées par le chef des interventionsNote de bas de page 23. L'équipe était composée du caporal Stevenson, qui assumait le rôle de négociateur principal, et de la caporale Garcia, à titre de négociatrice secondaire.

[110] Selon la politique de la GRC, une équipe complète est composée de quatre postes : un chef d'équipe, un négociateur principal, un négociateur secondaire et un préposé au registre des communications. La politique prévoit également que, lorsque l'urgence de la situation l'exige, un négociateur peut entamer les négociations sans l'équipe complète. Au nombre des considérations à prendre en compte, mentionnons la disponibilité des négociateurs en cas de situation de crise, le délai d'intervention, la durée prévue de l'incident et le type d'incident. Dans sa réponse à la plainte de la Commission, la GRC a dit que, à l'époque, il était pratique courante que le district Nord ne compte que sur deux négociateurs pour répondre à la plupart des appels et prenne des dispositions pour obtenir des ressources supplémentaires, au besoin. Cette pratique avait été adoptée en raison de l'éloignement de la région et de la disponibilité d'un nombre suffisant de négociateurs pour couvrir une vaste région. La caporale Garcia a dit aux enquêteurs que le district ne peut pas toujours trouver quatre négociateurs, mais il en utilise toujours au moins deux.

[111] En réponse à une recommandation formulée dans le cadre de l'EAI, la GRC a affirmé que le chef des interventions doit faire tout son possible pour compter sur une équipe complète et que l'équipe complète doit intervenir, sauf en cas d'urgence. La GRC a expliqué que la pratique actuelle du district Nord consiste à déployer trois négociateurs lorsque cela est possible et pratique, et un quatrième en cas de besoin. Selon la Commission, cette pratique est conforme à la politique et aux considérations établies dans celle-ci au sujet des équipes incomplètes.

[112] Les membres de l'équipe de négociation ont pris part au compte rendu du GTIDN tenu la veille. Le lendemain matin, ils ont installé leur équipement au poste de commandement pour tenter d'entrer en communication avec M. George par téléphone une fois que le GTIDN était en position. Comme il a été mentionné précédemment, les agissements de M. George observés par le gendarme Shaw étaient signalés au poste de commandement par radio. Cette information a permis à l'inspecteur Egan de décider du meilleur moment pour que l'ENSC tente d'entrer en communication. L'inspecteur Egan a déclaré que, chaque fois qu'il était informé du fait que M. George se trouvait dans la maison, un appel était fait. Cependant, M. George a immédiatement raccroché quand il a répondu à un des appels; autrement, il ne répondait pas du tout au téléphone. Cela est confirmé par les dossiers d'enquête, qui indiquent que près de 40 tentatives d'appel ont été effectuées de 11 h 41 à 12 h 58 le 30 septembre 2009.

[113] La caporale Garcia a dit que, pendant le compte rendu, les membres ont appris que M. George avait possiblement une maladie mentale non diagnostiquée, car il voyait certaines choses, comme des panthères et des loups, qu'il n'avait pas confiance en la police en raison de l'environnement dans lequel il avait grandi en Russie; et qu'il parlerait probablement seulement à un homme. Elle a conclu qu'ils auraient à le calmer et à l'informer du fait que la police au Canada n'était pas mauvaise, qu'elle était là pour l'aider, que sa famille était en sécurité mais qu'elle ne se trouvait pas avec la police et qu'il devrait venir parler à la police afin de pouvoir être réuni avec sa famille.

[114] Comme il a été mentionné précédemment dans le présent rapport, l'ENSC a rencontré les mêmes difficultés linguistiques que celles auxquelles avaient été confrontés les membres ayant mené l'enquête initiale. Aucun des négociateurs ne maîtrisait l'allemand ou le russe, et M. Rempel père n'était pas disponible le 29 septembre 2009. Après quelques difficultés pour obtenir de l'aide, ils ont pu bénéficier des services de Jakob Dick, qui maîtrisait l'anglais, l'allemand et le russe. Ils lui ont remis des questions manuscrites au cas où il réussirait à entrer en communication avec M. George. Le scénario remis à M. Dick comportait les énoncés suivants :

  • Ils sont là pour l'aider et assurer la sécurité de tout le monde, y compris la sienne.
  • Il n'a rien fait de grave, ses enfants et sa femme sont en sécurité et ils ne sont pas avec la police.
  • Il se trouve au Canada, et les choses se passent différemment au pays.
  • Personne ne veut voir quelqu'un être blessé.
  • Ils sont là pour le faire sortir et pour que l'affaire se règle en toute sécurité.

[115] Après l'incident, M. Dick a déclaré aux enquêteurs qu'il n'était pas sûr que M. George l'écouterait en raison de leur différence d'âge et de l'endroit d'où ils venaient, expliquant que, en Russie, lorsqu'on est arrêté, cela signifie généralement une peine d'emprisonnement à perpétuité, peu importe si on est innocent ou non.

[116] M. Dick a dit qu'il avait parlé avec les négociateurs de leur rôle et qu'on lui avait remis une liste de choses à dire à M. George s'il répondait au téléphone. Les directives qu'il a reçues consistaient à rassurer M. George en lui disant qu'il n'avait rien fait de grave (c.-à-d. qu'il ne passerait pas le restant de sa vie en prison); que sa famille et ses enfants étaient en sécurité et qu'ils n'étaient pas avec la police (M. Dick a cru comprendre que M. George croyait qu'ils étaient entre les mains de la police); qu'il n'a pas à avoir peur, qu'il doit laisser le fusil derrière lui et se rendre à la police; que la police ne veut pas que quelqu'un soit blessé, y compris les agents et M. George lui-même; que la police tente de régler la situation en toute sécurité et de s'assurer que tout le monde est en sécurité; que la police souhaite la réunification de la famille et aider; et que la famille a besoin du père.

[117] Malheureusement, comme M. George n'a pas répondu au téléphone et qu'il était en possession d'une arme à feu, les membres n'ont pu s'approcher, et les négociateurs n'ont pu mettre en œuvre leurs plans. Cependant, même si l'ENSC n'a pas finalement eu l'occasion de communiquer avec M. George, la Commission a cerné plusieurs problèmes relatifs au processus de communication et de négociation prévu.

[118] Tout d'abord, il n'est pas clair si les membres de l'ENSC ont été informés ou ont tenu compte du fait que M. Dick craignait que M. George ne l'écouterait peut-être pas en raison de leur différence d'âge et de facteurs culturels. Il a été difficile d'obtenir l'aide de quelqu'un ayant la capacité de communiquer avec M. George, mais il n'est pas clair si des tentatives ont été faites pour évaluer pleinement s'il était adéquat de recourir à M. Dick ou si une personne plus convenable était disponible. La question n'a pas été abordée précisément dans le cadre de l'enquête de la GRC, et les notes et déclarations des membres de l'ENSC ne fournissent pas de tels détails. Les membres de l'ENSC doivent s'assurer que les détails de telles conversations avec des tiers utilisés pour négocier avec un sujet sont bien documentés.

[119] Par ailleurs, il n'est pas clair si les membres de l'ENSC ont envisagé de continuer de faire appel aux services du gendarme Finkensiep. Si à tout moment M. George avait été disposé à parler avec la police, le gendarme Finkensiep aurait pu permettre une communication plus contrôlée en raison de sa formation et de son expérience en tant qu'agent de police (évidemment avec l'aide et selon les directives de l'ENSC). L'inspecteur Egan a affirmé avoir dit à la caporale Garcia de communiquer avec le gendarme Finkensiep pour qu'il aide aux négociations, lorsqu'aucun interprète n'était encore disponible. Cependant, il semble qu'une fois qu'on a eu recours à M. Dick, on n'a pas considéré obtenir d'autre aide de la part du gendarme Finkensiep.

Conclusion : L'ENSC n'était pas complète, ce qui était toutefois raisonnable dans les circonstances.

Conclusion : Les membres de l'ENSC ont déployé des efforts pour trouver des personnes qui pouvaient communiquer avec M. George en leur nom en raison d'un obstacle linguistique.

Conclusion : À la lumière du dossier, il n'est pas clair si les membres de l'ENSC ont évalué pleinement les limites et les capacités du tiers qu'ils comptaient utiliser pour communiquer avec M. George ou si d'autres options existaient.

Recommandation : Que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que les membres de l'ENSC prennent des notes détaillées sur l'évaluation et la participation de tout tiers dans le cadre du processus de négociation.

Conclusion : À la lumière du dossier, il n'est pas clair si les membres de l'ENSC ont envisagé de recourir au gendarme Finkensiep pour communiquer avec M. George dans le cadre du déploiement du GTIDN.

Recommandation : Que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que tous les membres participant à des déploiements du GTI envisagent de recourir à des membres aux services généraux lorsqu'une compétence ou une expertise particulière (comme la capacité de parler une langue étrangère) est requise.

Affrontement initial entre le GTIDN et M. George

[120] La Commission doit évaluer la conduite des membres en fonction de ce que ces derniers croyaient raisonnablement au moment où les événements se sont produits, compte tenu des renseignements dont ils disposaient et vu toutes les circonstances auxquelles ils faisaient face à la lumière des politiques applicables et des formations en vigueur au moment de l'incident. Comme il a été mentionné ci-dessus, le gendarme Shaw observait M. George dans sa résidence et aux alentours et signalait ses agissements au groupe et au poste de commandement. Les membres du GTIDN recevaient ces rapports et effectuaient leurs propres observations quand M. George approchait de la section de l'allée la plus près de la route.

[121] Peu après que le gendarme Shaw et le caporal Arnold ont pris position près de la résidence de M. George, le caporal Arnold est retourné au poste de commandement. Le caporal Brown avait l'intention d'envoyer le gendarme Degen rejoindre le gendarme Shaw en raison de sa maîtrise de l'allemand et dans l'espoir qu'il puisse favoriser le dialogue avec M. George, au besoin. Comme l'a mentionné le caporal Arnold dans sa déclaration, la capacité de communiquer avec M. George, [traduction] « contribuerait à ce qu'il obéisse et renforcerait sa sécurité ». Cependant, avant que cela ne se produise, le gendarme Shaw a signalé que M. George avait quitté sa résidence en possession d'une carabine et qu'il prenait le volant de son véhicule, comme il a été expliqué en détail antérieurement dans le présent rapport et comme il le sera de façon plus approfondie ci-dessous.

[122] À la lumière des enregistrements radio, le gendarme Shaw a dit que M. George écoutait de la musique à tue-tête dans le véhicule et s'éloignait à toute vitesse de la résidence, ayant emprunté l'allée en direction de la route. Un membre aux services généraux qui bloquait le bout de l'allée grâce à un camion de police identifié et à un hérisson a déclaré qu'il semblait que M. George avait arrêté le véhicule et fait demi-tour. Le gendarme Shaw a par la suite mentionné que M. George était retourné à la résidence et qu'il conduisait dans tous les sens. Il a fini par quitter le véhicule et a commencé à errer sans but dans la cour. Le gendarme Shaw a à maintes reprises signalé par radio que M. George agissait de façon bizarre et qu'il faisait les cent pas.

[123] M. George a ensuite repris le volant du véhicule et l'a encore une fois conduit à grande vitesse, comme le gendarme Shaw l'a signalé par radio. Le gendarme Shaw a perdu de vue M. George tandis qu'il s'éloignait de la résidence. Un membre aux services généraux qui avait été posté au bout de l'allée entendait le véhicule s'approcher, mais ne l'a pas vu. Le gendarme Shaw a dit que M. George était retourné à la résidence, avait appliqué les freins, avait conduit un peu partout sur la pelouse et avait continué de faire vrombir le moteur avant de retourner vers l'allée. M. George aurait fait des dérapages en cercle dans la clairière avant de retourner devant la résidence.

[124] Selon les enregistrements radio, M. George est sorti du véhicule en tenant l'arme à feu et il a commencé à marcher en pointant au hasard la carabine à différents points dans les buissons. Le caporal Brown a dit par radio que les membres du GTIDN se chargeraient d'assurer le contrôle du périmètre au bout de l'allée au cas où M. George tenterait de s'enfuir par l'allée. Les caporaux Brown et Arnold ainsi que les gendarmes Merriman, Degen et Poyzer se sont donc rendus au bout de l'allée de M. George. Le gendarme Poyzer a réaffecté hors de cette zone le membre aux services généraux. Les autres ont pris position au bout de l'allée. Le caporal Brown a ordonné aux gendarmes Warwick et Atkinson de rester en place jusqu'à ce qu'ils reçoivent d'autres directives.

[125] À ce moment-là, le gendarme Shaw a signalé que M. George avait emprunté l'allée en compagnie de ses quatre chiens et qu'il avait chargé la carabine. Les enregistrements radio confirment que le caporal Brown a informé le poste de commandement que les membres se trouvaient à pied au bout de l'allée et voulaient savoir s'ils devaient se déplacer ou confronter M. George à cet endroit. Le répartiteur a confirmé qu'ils devaient confronter M. George à cet endroit. Le caporal Brown a par la suite ordonné aux gendarmes Warwick et Atkinson de venir le rejoindre au bout de l'allée. Avant qu'ils puissent s'y rendre, les membres déjà présents au bout de l'allée ont aperçu M. George qui marchait en leur direction et se trouvait à une distance d'environ 200 à 300 mètres. Voici le récit des événements présenté par le gendarme Degen :

[traduction]
J'ai aperçu dans l'allée un homme qui marchait en notre direction. Il se trouvait sur ma droite et était accompagné de trois chiens. Il tenait dans sa main droite une arme à canon long. Je me suis mis à crier « Halt Polizei! », ce qui veut dire en allemand « Arrêtez, police! ». J'ai crié cet ordre aussi fort et aussi clairement que je le pouvais. Le caporal BROWN criait « Arrêtez, police! ». Peu de temps après, j'ai entendu le caporal ARNOLD crier « Halt Polizei! ». Nous avons tous crié plusieurs fois « Halt Polizei! ». Par ailleurs, j'ai donné à répétition à l'homme l'ordre « Hande Hoch! », ce qui en allemand veut dire que j'ordonnais à M. GEORGE de lever les mains en l'air. À un moment, j'ai vu M. GEORGE s'arrêter et regarder dans notre direction, sans toutefois indiquer qu'il allait déposer l'arme. Il se déplaçait de façon relativement calme.

M. GEORGE est finalement retourné sur ses pas dans l'allée, suivi par ses chiens. J'ai été passablement perturbé par la réaction de M. GEORGE. Selon mon expérience, toute personne qui est confrontée par des agents de police armés criant à tue-tête obtempérera vraisemblablement aux ordres des agents ou se montrera au moins quelque peu surprise.

M. GEORGE a fini par disparaître de mon champ de vision [...]

[126] Tous les récits montrent clairement que M. George se dirigeait vers la route en possession d'une arme à feu et qu'on craignait raisonnablement que M. George ne tente de quitter la propriété avec l'arme à feu. M. George s'était approché à bord de son véhicule à maintes reprises, le matin même et la journée précédente, mais était retourné sur ses pas. La tentative qu'il avait faite la journée précédente semble montrer qu'il savait que la police était présente au bout de son allée. Il était également clair que M. George ne souhaitait pas communiquer avec les membres par téléphone, car il avait déjà dit à la police et aux amis de la famille qu'il ne voulait pas leur parler et ne répondrait pas aux appels continus de l'ENSC. Selon la Commission, il était raisonnable pour les membres du GTI de confronter M. George à ce moment-là et de lui ordonner d'arrêter et de lever les mains en l'air afin de faciliter sa reddition en toute sécurité.

[127] À la lumière du dossier d'enquête, la Commission est convaincue que M. George a vu les membres pendant cette rencontre et qu'il a sûrement entendu les ordres d'arrêter, qui ont été principalement formulés en allemand. Cependant, les déclarations des membres montrent clairement que plusieurs d'entre eux criaient des ordres semblables et donnaient des directives à M. George en même temps. Dans toutes les communications avec un sujet, surtout s'il pourrait être aux prises avec des problèmes de santé mentale, on conseille de formuler les ordres de façon claire et compréhensible. Nous ne saurons jamais ce que M. George a entendu ou compris de ces communications, mais des ordres criés par divers membres de façon simultanée ou provenant de multiples directions peuvent semer la confusion ou se perdre. Je reconnais que la situation était de nature dynamique et qu'elle s'est déroulée rapidement. Cependant, il aurait été préférable qu'il y ait une approche coordonnée entre les membres du GTIDN en ce qui concerne la façon de communiquer avec M. George afin d'optimiser sa capacité d'entendre et de comprendre les instructions.

Conclusion : Il était raisonnable pour les membres de confronter M. George quand il s'est approché d'eux à pied au bout de l'allée en possession d'une carabine, surtout compte tenu du fait que les membres étaient visibles.

Conclusion : Les membres ont donné leurs ordres à M. George dans une langue qu'ils savaient qu'il comprenait.

Repositionnement tactique après l'affrontement initial entre le GTIDN et M. George

[128] Le repositionnement tactique est une situation dans laquelle la police évite de confronter le suspect en attendant d'avoir un meilleur avantage tactique. Au moment de l'affrontement initial, les membres du GTIDN avaient pris position au bout de l'allée de M. George, à une distance estimée à 150 mètres de la barrière verrouillée de la propriété. Après l'affrontement, le caporal Arnold a suggéré au caporal Brown de déplacer le groupe plus près de la barrière et de garer leurs véhicules sur la route à cet endroit.

[129] Selon le caporal Arnold, la position au bout de l'allée était dangereuse pour le public, comme l'accès à la route n'avait pas été bloqué, et, si des coups de feu étaient tirés, les membres du public à proximité courraient un plus grand risque. Par ailleurs, la courbe de l'allée commençait à la barrière et, si les membres du GTIDN se déplaçaient vers la barrière, ils pourraient voir M. George arriver de plus loin, leur donnant plus de temps pour réagir.

[130] Le gendarme Degen a affirmé que le camion de police identifié n'était pas assez large pour bloquer M. George s'il tentait de fuir dans son propre véhicule et que, s'ils se positionnaient au bout de l'allée, ils ne seraient pas suffisamment couverts au cas où M. George ferait feu. Par la suite, un camion de police identifié et le véhicule du GTIDN ont été garés dans l'allée, près de la barrière, et un hérisson a été installé. On a ensuite ajouté un autre véhicule pour mieux couvrir l'allée. Le caporal Brown a déclaré qu'il avait initialement demandé une pièce de machinerie lourde pour renforcer le barrage, mais une telle machine n'était pas accessible.

[131] Les enquêteurs ont questionné les caporaux Brown et Arnold au sujet du positionnement du barrage et de la possibilité d'établir deux barrages, le premier à la barrière des George, puis, derrière, le deuxième, formé de véhicules et de hérissons. Le caporal Brown a affirmé qu'il ne croyait pas que cela aurait empêché M. George de quitter la propriété ou que la police aurait eu plus de temps pour tenter de négocier avec lui. On a envisagé d'approcher davantage le hérisson de la propriété, de l'autre côté de la barrière de métal. Cependant, l'inspecteur Egan et le caporal Brown ont expliqué que le groupe aurait été exposé aux tirs et que la zone ouverte en faisait une tactique peu judicieuse.

[132] Dans le cadre de l'enquête menée par la GRC sur la plainte, un autre problème cerné par rapport à la manière dont la barricade a été construite était le fait que, même si les trois véhicules de police présents étaient munis de feux d'urgence et que la possibilité que des membres soient blessés si M. George franchissait la barricade était très réelle, les feux n'ont pas été utilisés pour indiquer à M. George d'immobiliser son véhicule. Comme aucun membre du GTIDN n'a été chargé précisément de tenter d'indiquer à M. George d'immobiliser son véhicule, supposément parce que le fait de signaler le positionnement exact des membres à quelqu'un qui semble vouloir emboutir une barricade et qui est en possession d'une carabine présente de multiples dangers, tout signal accessible permettant d'ordonner au suspect d'arrêter aurait dû être utilisé.

Conclusion : La décision de déplacer la barricade de la police près de la barrière et de la fortifier était raisonnable.

Conclusion : La décision de ne pas déplacer le hérisson plus près de la propriété était raisonnable compte tenu du risque pour les membres.

Conclusion : Les feux d'urgence auraient dû être utilisés à la barricade de la police en tant que moyen supplémentaire de signaler à M. George d'arrêter.

Conclusion : On aurait dû envisager de bloquer les routes entourant la propriété des George au cas où M. George aurait réussi à franchir la barricade de la police au bout de l'allée.

Recommandation : Que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que suffisamment de ressources soient accessibles pour bloquer les routes publiques lorsqu'il y a un risque pour le public dans le cadre d'un incident critique.

Positionnement du caporal Arnold

[133] Les caporaux Arnold et Brown ont pris position près de la barrière et du barrage, tandis que les autres membres du groupe se sont positionnés près des buissons, formant une longue ligne le long de l'allée, le gendarme Warwick étant celui qui était le plus avancé dans la propriété. Le caporal Arnold se trouvait à proximité d'une colonne d'alimentation à plusieurs pieds de la barrière, position qui lui conférait une « longue couverture » (c.-à-d. qu'il pouvait voir beaucoup plus loin dans l'allée). Avant d'adopter cette position, le caporal Arnold se trouvait à la limite des arbres. À partir de cet endroit, quand M. George s'est approché à bord de son véhicule à quelques centaines de mètres de la barrière, le caporal Arnold pouvait entendre la musique du véhicule, mais il ne pouvait pas voir M. George ou ce qu'il faisait. M. George était également hors de la vue du gendarme Shaw à ce moment-là.

[134] M. George a continué de se comporter de façon bizarre : il a mis du carburant dans son véhicule, il entrait dans la maison et en sortait, il a changé de vêtements et il semblait se parler à lui-même. C'est à ce moment-là que le troisième véhicule a été ajouté pour couvrir l'allée. Les caporaux Arnold et Brown ont ensuite discuté de tactiques, et c'est là que le caporal Arnold a demandé s'il devrait se positionner à un endroit plus sécuritaire et plus éloigné de l'allée. Il craignait d'être blessé si M. George fonçait dans la barricade.

[135] Le caporal Arnold croyait que le poteau de la barrière était peut-être rouillé et qu'il suffirait d'une force minimale pour le briser. Il a ajouté qu'il croyait également qu'il y avait suffisamment d'espace entre le véhicule le plus près de lui et la colonne d'alimentation à côté de laquelle il se trouvait pour que le véhicule de M. George puisse y passer. Il a envisagé de se tenir debout afin d'être en meilleure position pour pouvoir se repositionner rapidement; cependant, il a déterminé qu'il risquait d'être vu et qu'il ne pourrait pas tirer avec autant de précision à partir de cette position. Le hérisson a été déplacé pour couvrir l'espace entre la colonne d'alimentation et le véhicule le plus près, mais cela n'a pas éliminé le risque qu'il soit blessé ou tué s'il était frappé par le véhicule de M. George ou des débris. Il a donc discuté du problème avec le caporal Brown. Il a dit à ce dernier que, si M. George s'approchait de la barrière et que rien ne montrait qu'il arrêterait ou ralentirait, il ferait feu sur M. George lorsqu'il se trouverait à moins de 100 mètres pour se protéger.

[136] Voici ce que le caporal Arnold a écrit dans sa déclaration :

[traduction]

  • Selon mon évaluation du risque menée à ce moment-là, si M. George empruntait la portion en gravier de l'allée en s'approchant de la barrière, son intention serait de frapper de plein fouet le barrage routier.
  • Si le suspect fonçait sur la barrière, je croyais que je serais frappé par son véhicule et des débris et que serais brièvement blessé, voire tué. Par conséquent, j'étais d'avis que j'aurais à tirer sur le conducteur de la camionnette afin de l'immobiliser simplement pour me protéger.

    [...]

  • J'ai informé le caporal BROWN que, selon mon évaluation du risque, si le suspect empruntait la route avec sa camionnette et sa carabine, son intention ne serait vraisemblablement pas de se rendre et qu'il y aurait probablement un échange de tirs s'il entrait en collision avec la barrière.
  • J'ai également exprimé ma crainte selon laquelle, si le suspect était en mesure de franchir la barricade, de nombreuses autres personnes risquaient d'être blessées grièvement ou tuées.

[137] Selon le caporal Brown, le groupe devait compter sur quelqu'un qui pourrait voir une grande portion de l'allée afin d'être en mesure d'observer si M. George allait s'approcher tranquillement à pied et surprendre le groupe sur son flanc. Si le caporal Arnold se déplaçait de l'autre côté de l'allée, il y aurait une possibilité de tir croisé advenant que M. George s'approcherait de la barrière. S'il reculait, d'autres membres du groupe pourraient se trouver dans son arc de tir, et cela n'assurerait pas de couverture ni de dissimulation adéquates. Le caporal Brown a affirmé qu'il croyait que la configuration qu'ils avaient adoptée était la plus sécuritaire et la plus efficace dans les circonstances. Après leur discussion, les caporaux Arnold et Brown ont conclu que la position du caporal Arnold était la meilleure position possible sur le plan tactique.

[138] Dans le cadre de l'EAI, à la GRC, on s'est penché sur la décision du caporal Arnold de prendre position près de la barrière. On a conclu que, vu les agissements de M. George, [traduction] « permettre au sujet de quitter la propriété n'était tout simplement pas une option » et qu'il s'agissait d'une position judicieuse sur le plan tactique. Les véhicules ont été bien positionnés pour freiner toute tentative de M. George de fuir la police, et le caporal Arnold se trouvait [traduction] « au meilleur endroit possible, puisqu'il offrait la meilleure [...] ligne de visée et évitait une situation de tir croisé avec les autres membres du groupe ». À la suite de l'EAI, on a conclu qu'[traduction] « il s'agissait d'un risque nécessaire de rester à cet endroit, et je crois que les personnes sur place en ont tenu compte de façon diligente ».

[139] Il importe de mentionner que les membres se sont positionnés sur la propriété de M. George à son insu, mais il convient également de dire que M. George semblait en général conscient de leur présence. M. George a été confronté par les membres du GTIDN environ 90 minutes avant la fusillade mortelle. Par ailleurs, des véhicules de police identifiés étaient visibles à la barrière de son allée, et il avait aperçu un véhicule de police identifié au bout de son allée dès la soirée précédente, ce qui l'avait fait revenir sur ses pas. La Commission est convaincue que, selon la prépondérance des probabilités, M. George était conscient de la présence des membres, voire de leur position précise au moment de la fusillade.

[140] Il est également pertinent de mentionner que le mandat obtenu par la GRC permettait aux membres d'entrer sans préavis, ayant convaincu la cour que les membres seraient autrement exposés à des lésions corporelles imminentes ou à la mortNote de bas de page 24. Le risque lié à l'arrestation de M. George – qui, au moment où la décision a été prise par les caporaux Arnold et Brown, refusait d'interagir avec la police, était en possession d'une carabine, avait montré qu'il était apte et disposé à utiliser l'arme à feu, n'avait pas confiance en la police, agissait de façon bizarre et avait choisi d'ignorer la police même si des agents tentaient continuellement de communiquer avec lui et étaient présents sur la propriété – est une considération importante.

[141] Le travail des policiers est dangereux en soi. Il ne faut jamais oublier l'importance de la sécurité des agents lorsqu'on évalue leurs actes, particulièrement lorsqu'il y a présence d'armes à feu. La GRC enseigne à ses membres que la sécurité des agents est essentielle pour la sécurité publique. Certaines des mesures prises par les membres pour réduire au minimum les risques qu'ils courent peuvent accroître les risques pour un sujet. Le caractère raisonnable variera selon les circonstances. Par exemple, le but d'un « mandat de perquisition sans annonce ni avertissement » est d'assurer la protection des membres, mais l'élément de surprise peut provoquer une réaction violente du sujet et entraîner des résultats indésirables. Cependant, il existe de nombreuses situations dans lesquelles la loi et les cours considèrent cette protection comme nécessaire.

[142] De même, le positionnement tactique du caporal Arnold fournissait aux membres un avertissement essentiel concernant le fait que M. George approchait, mais représentait un risque de blessure pour le caporal si M. George décidait d'emboutir la barricade. La Commission est convaincue que les caporaux Arnold et Brown ont tenu adéquatement compte de tous les risques et conclu raisonnablement qu'il était nécessaire de conserver l'avantage tactique.

Conclusion : Les caporaux Arnold et Brown ont tenu adéquatement compte de tous les risques liés au maintien de la position du caporal Arnold près de la barrière, y compris le risque de blessure ou de décès qui pouvait justifier le recours à une force mortelle contre M. George, et ont conclu raisonnablement qu'il était nécessaire de conserver l'avantage tactique.

Communication de la position du caporal Arnold

[143] En réponse à des questions de suivi posées par les enquêteurs, le caporal Brown a expliqué qu'il n'avait pas informé précisément le chef des interventions de la discussion et de la décision concernant la position du caporal Arnold. L'inspecteur Egan s'est vu demander s'il aurait dû être informé de la discussion au sujet des risques liés à la position du caporal Arnold et du fait que le recours à une force mortelle était une possibilité s'il craignait d'être tué ou blessé grièvement et s'il aurait autorisé le recours à une force mortelle. Voici la réponse de l'inspecteur Egan :

[traduction]
Je ne peux répondre à cette question, car je ne sais pas quand cette décision a été prise. Il aurait fallu que cette décision me soit présentée avec beaucoup plus de détails afin que je puisse juger s'il s'agissait d'une tactique judicieuse. Cela aurait pu inclure les transcriptions avec l'enregistrement audio des déclarations formulées par les membres. Je présume que la décision de se positionner à cet endroit permettant la couverture et la dissimulation était fondée sur des considérations tactiques ou stratégiques. Je présume que les caporaux BROWN et ARNOLD considéraient qu'il était essentiel de maintenir le suspect dans le périmètre, à la lumière de leurs observations sur les lieux et de renseignements fournis pendant le compte rendu.

i. Je m'appuie sur le fait que le suspect a rempli le réservoir de son véhicule, ce qui donnait l'impression qu'il comptait conduire longtemps.
ii. M. George savait probablement où se trouvaient sa femme et ses enfants à Dawson Creek.
iii. M. George avait apporté une arme à feu.
iv. M. George avait exigé le retour de sa femme et de ses enfants.
v. M. George conduisait de façon de plus en plus capricieuse, appuyant l'idée selon laquelle il avait l'intention de foncer dans la barricade.

Si M. George avait réussi à franchir la barricade, je crois qu'il l'aurait fait dans l'intention de tuer sa femme et peut-être ses enfants. Il aurait pris la fuite, conduisant de façon capricieuse et posant un grave risque pour les membres du public. Nous n'avons jamais eu le contrôle de ses actes à l'intérieur du périmètre établi, mais nous pouvions contrôler l'incidence de ces actes sur le public [...]

[...]

[...] le caporal BROWN communiquait avec moi, en tant que chef des interventions, de façon régulière, efficace et exhaustive. Je n'ai pas l'habitude de me mêler de l'urgence tactique d'une situation. Il ne serait pas pratique qu'un chef des interventions agisse ainsi. Si le temps le permet, les communications et mises à jour sont fréquentes. Les décisions tactiques concernant le choix des positions de couverture et de dissimulation et des avantages tactiques sont prises par le chef d'équipe du GTI. Je n'ai pas mon mot à dire sur le moment où un membre choisit de recourir à une force mortelle. Je suis d'avis que la décision prise par les caporaux BROWN et ARNOLD m'aurait été transmise, comme bien d'autres décisions, si la situation n'avait pas pris une tournure si dramatique ni empiré si rapidement.

[144] Dans le cadre de l'EAI, à la GRC, on s'est penché sur cette question et on a conclu que, même si la décision prise par les caporaux Arnold et Brown était judicieuse et justifiée, les résultats finaux de la discussion auraient dû être transmis au chef des interventions. La réponse officielle de la GRC à la plainte de la Commission n'a pas abordé cette question.

[145] La politique de la GRC prévoit que le chef d'équipe dirige les manœuvres après le déploiement du GTINote de bas de page 25. Cela dit, le chef des interventions assume la responsabilité générale relative à l'incident critiqueNote de bas de page 26 et est responsable d'« évaluer toutes les options en matière de manœuvres lors du déploiementNote de bas de page 27 ». Même si l'inspecteur Egan avait raison de dire qu'il n'est pas pratique qu'un chef des interventions se mêle de l'urgence tactique d'une situation, il est évident qu'il a discuté continuellement des tactiques, comme la possibilité d'utiliser un téléphone portable ou un mégaphoneNote de bas de page 28 et de rendre inutilisable le véhicule de M. George à proximité de la résidence.

[146] À la lumière des transmissions radio du GTIDN, le caporal Arnold a appelé le caporal Brown à l'endroit où il se trouvait vers 12 h 21. Le caporal Brown a expliqué que le caporal Arnold l'avait appelé à l'endroit où il se trouvait pour discuter de tactiques, et c'est à ce moment-là qu'ils ont discuté de sa position. Des communications continuelles ont eu lieu entre le caporal Brown et le poste de commandement, de ce moment-là jusqu'à la rencontre mortelle survenue à 12 h 59, notamment pour confirmer la position des membres du groupe vers 12 h 46. Selon la Commission, le caporal Brown a eu suffisamment de temps pour informer l'inspecteur Egan des risques liés à la position du caporal Arnold et de leur décision de maintenir la position vu les circonstances, ce qu'il aurait dû faire.

Conclusion : Le caporal Brown aurait dû informer l'inspecteur Egan de sa discussion avec le caporal Arnold au sujet des risques liés à sa position et de leur décision de maintenir la position.

Recommandation : Que la GRC passe en revue le présent rapport avec le caporal Brown pour s'assurer qu'il est conscient de la nécessité de communiquer les décisions tactiques et les risques courus par les membres du GTI au chef des interventions, lorsque le temps le permet.

Affrontement final et recours à une force mortelle

[147] Une plainte du public concernant une allégation de force excessive fait partie du processus quasi judiciaire, dans le cadre duquel la preuve est appréciée selon la prépondérance des probabilités. La Commission est habilitée à présenter des conclusions et à formuler des recommandations concernant les allégations de recours à la force excessive. La Commission n'a pas le pouvoir de déterminer si un membre de la GRC est auteur de voies de fait aux termes du Code criminel; ce sont les tribunaux qui se penchent sur cette question. L'enquête criminelle a conclu que les membres, en utilisant une force mortelle à l'égard de M. George, n'avaient pas commis d'infraction criminelle. Le rôle de la Commission consiste à examiner le recours à la force selon la loi et les politiques et la formation applicables de la GRC.

[148] Dans l'exercice de leurs fonctions, les policiers sont fondés à employer la force nécessaireNote de bas de page 29comme le prévoit le Code criminel. Ils doivent cependant s'appuyer sur des motifs raisonnables. Au moment de déterminer si la force employée par l'agent était nécessaire, il convient d'examiner les circonstances au moment de l'incident. Les tribunaux ont été clairs : on ne peut pas s'attendre à ce que l'agent mesure avec exactitude la force employéeNote de bas de page 30.

[149] Le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents (MIGI) de la GRCNote de bas de page 31, qui est utilisé pour former et orienter les membres sur la question du recours à la force, préconise l'évaluation du risque et décrit les divers niveaux de résistance et d'intervention raisonnable. Le guide recommande le recours aux interventions verbales dans la mesure du possible, à la fois pour désamorcer des situations potentiellement explosives et pour encourager le recours à une attitude professionnelle, polie et respectueuse dans toute interaction. Selon ces lignes directrices, le membre doit tenir compte de tous les facteurs d'une situation pour déterminer s'il doit recourir à la force et le degré de force à utiliser, le cas échéant. Les principes fondamentaux du MIGI de la GRC sont les suivants :

  1. La responsabilité première de tout agent de la paix consiste à préserver et à protéger la vie.
  2. Le principal objectif de toute intervention est la sécurité publique.
  3. La sécurité de l'agent de la paix est essentielle à la sécurité publique.
  4. Le MIGI a été élaboré en tenant compte des lois fédérales et de la jurisprudence de common law; il ne remplace pas la loi, ni ne s'y ajoute.
  5. Le modèle d'intervention doit toujours être appliqué dans le contexte d'une évaluation minutieuse des risques et tenir compte de la probabilité et de l'importance des pertes de vies, des blessures et des dommages à la propriété.
  6. L'évaluation du risque est un processus continu et la gestion des risques doit évoluer à mesure que les situations changent.

[150] Il incombe au membre de procéder à une évaluation du risque et de déterminer d'abord à laquelle des cinq catégories de comportement (coopératif, non coopératif, résistant, combatif et susceptible de causer des lésions corporelles graves ou la mortNote de bas de page 32) correspond la résistance du sujet. Il faut également tenir compte des éléments de situation propres à chaque incident, notamment les conditions météorologiques, la taille du sujet par rapport à celle du membre, la présence d'armes, le nombre de sujets et de policiers, la perception des capacités du sujet (cela peut comprendre la connaissance antérieure du sujet) ainsi que d'autres considérations propres à l'incident.

[151] Le MIGI prévoit diverses options d'intervention selon l'appréciation qu'a le membre du comportement du sujet ainsi que l'évaluation des éléments de la situation. Les options d'intervention sont les suivantes : présence du membre, communication, contrôle physique (modéré et intense), armes intermédiaires, armes à impact, force mortelle et repositionnement tactique. Les membres doivent évaluer constamment le risque et le potentiel de dommage et opter pour l'intervention appropriée. La communication verbale et le repositionnement tactique sont effectués peu importe le niveau de risque afin d'aider le membre à maîtriser la situation, à désamorcer toute confrontation et à assurer la plus grande sécurité pour toutes les personnes concernées.

[152] Un membre doit pouvoir expliquer les méthodes d'intervention qu'il choisit pour gérer un incident, en tenant compte de toutes les circonstances, y compris les perceptions, les éléments de la situation et le comportement du sujet. Dans son examen des options d'intervention, la Commission doit aussi tenir compte du fait que pour assurer la sécurité du public, on ne peut demander à des policiers d'intervenir dans des situations dangereuses tout en leur refusant le pouvoir de prendre des mesures pour protéger leur sécurité lorsque cela est raisonnable, surtout dans une situation de danger liée à la présence d'armes et à une menace fluide et imprévisible.

[153] La GRC forme également ses membres afin qu'ils soient en mesure de déterminer si, selon eux, le sujet avait l'aptitude, l'intention et le moyen d'exécuter la menace ou l'acte.

  • A. La personne suspecte a-t-elle, ou dans une mesure raisonnable, semble-t-elle avoir l'aptitude physique (capacité) et la mobilité nécessaire pour vous blesser ou vous tuer ou blesser ou tuer d'autres personnes?
  • I. Les paroles ou les actes de la personne suspecte vous portent-ils à croire qu'elle a l'intention de vous blesser ou de vous tuer ou de blesser ou de tuer d'autres personnes?
  • M. La personne suspecte a-t-elle un moyen, une méthode ou un instrument (arme) lui permettant de mettre à exécution la menace connue ou perçue?

[154] Selon le Manuel des opérations tactiques, seul le commandant des interventions peut déployer un GTI et autoriser le recours à la forceNote de bas de page 33. Les plans d'opération préparés par le caporal Brown et approuvés par l'inspecteur Egan prévoyaient l'exécution du mandat d'arrestation délivré par la cour et le recours aux options d'intervention appropriées. La justification du recours à une force mortelle doit s'appuyer sur les circonstances existantes au moment où elle a été utilisée et la position de chaque membre. Ce qui suit est un aperçu des circonstances qui ont donné lieu au recours à la force comme l'ont raconté les membres présents (car il n'y avait pas d'autres témoins), de leur justification du recours à une force mortelle et de l'évaluation de la Commission concernant la conduite de chaque membre.

[155] L'article 25 du Code criminel autorise un agent de police agissant dans l'application ou l'exécution de la loi à employer la force nécessaire pour cette fin. Il prévoit également qu'une personne n'est pas justifiée d'employer la force avec l'intention de causer, ou de nature à causer la mort ou des lésions corporelles graves, à moins qu'elle n'estime, pour des motifs raisonnables, que cette force est nécessaire afin de se protéger elle-même ou de protéger toute autre personne sous sa protection, contre la mort ou contre des lésions corporelles graves.

[156] Les lignes directrices de la GRC sur le recours à la force réitèrent qu'on n'a recours à la force mortelle que « pour protéger les agents de la paix et le public contre la mort, ou la menace de mort, ou des lésions corporelles graves, lorsqu'aucun moyen moins violent n'est appropriéNote de bas de page 34 ».

[157] Les membres du GTIDN, soit les caporaux Arnold et Brown et les gendarmes Warwick, Merriman, Degen et Atkinson, étaient les seuls témoins de l'affrontement ayant mené au décès de M. George. Par conséquent, la Commission s'est appuyée grandement sur leurs déclarations, qu'elle considère comme uniformes et dignes de foi. Leurs déclarations sont complétées et soutenues par les communications radio enregistrées et les rapports d'experts analysant les éléments de preuve matérielle recueillis sur les lieux.

[158] Vu toutes les circonstances, et pour les motifs établis ci-dessous, la Commission est convaincue que les membres du GTIDN craignaient raisonnablement d'être tués ou blessés grièvement ou de voir les autres membres du groupe subir le même sort au moment où ils ont fait feu sur M. George; par conséquent, le recours à une force mortelle était raisonnablement justifié.

Caporal Arnold

[159] Le caporal Arnold est le premier à avoir fait feu sur M. George. Le gendarme Shaw a déclaré que, dans les minutes précédant la fusillade mortelle, M. George avait pris le volant de son véhicule avec la carabine et qu'il se dirigeait vers la barricade de la police à toute vitesse. Le caporal Arnold a aperçu le véhicule dans l'allée et a communiqué par radio avec les autres membres du groupe pour les informer du fait que M. George se dirigeait vers eux à vive allure. Selon le caporal Arnold, tandis que le véhicule approchait, il entendait le moteur vrombir et voyait que le véhicule créait des nuages de poussière. Il a remarqué que M. George semblait conduire plus rapidement que les autres fois et croyait que M. George avait l'intention d'emboutir la barricade.

[160] Le caporal Arnold a expliqué qu'il a utilisé les colonnes d'alimentation le long de l'allée pour estimer la position de M. George. Antérieurement, M. George ne s'était pas approché à plus de trois ou quatre colonnes d'alimentation de la barrière. Cette fois-ci, M. George s'approchait de la colonne d'alimentation la plus près de la barrière, soit à environ 100 mètres. Le caporal Arnold a visé M. George grâce à la lunette de son fusil M16. Grâce à la photo qui avait été remise au groupe, il a reconnu M. George, qui conduisait. Le véhicule a poursuivi sa route sans ralentir et le caporal Arnold croyait que M. George allait heurter la barrière, causant probablement des lésions corporelles graves au caporal Arnold ou son décès. Par conséquent, le caporal Arnold a tiré un coup vers M. George pour se protéger. Il a remarqué un trou de balle dans le pare-brise du véhicule et vu M. George réagir au tir. M. George s'est baissé de quelques pouces dans son siège, puis la fourgonnette a commencé à ralentir et a fini par s'immobiliser.

Vue de l'allée qu'avait le caporal Arnold de sa  position à côté de la colonne d'alimentation. (On voit également le véhicule de  M. George dans sa position finale, à l'arrêt.
Photo 4 : Vue de l'allée qu'avait le caporal Arnold de sa position à côté de la colonne d'alimentation. (On voit également le véhicule de M. George dans sa position finale, à l'arrêt.)

[161] Le caporal Arnold a vu M. George sortir du véhicule du côté conducteur avec la carabine. Le caporal Arnold a ajouté avoir crié [traduction] « Fusil, fusil! » aux membres du groupe et a tiré plusieurs autres coups vers M. George par la porte. Il croyait que M. George sortait du véhicule avec sa carabine dans l'intention de faire feu sur la police. Le véhicule a continué à rouler vers la barrière, et il a perdu de vue M. George. Il a entendu des coups tirés par les autres membres du groupe qui ont touché le véhicule. Il a ensuite aperçu M. George traverser la route derrière son véhicule et s'effondrer sur le bord de l'allée, la carabine reposant au milieu de l'allée à côté de lui. Les membres du groupe ont approché M. George et commencé à administrer les premiers soins, en vain.

[162] Les conclusions énoncées dans le rapport d'analyse des traces de sang correspondent à la description des événements fournie par le caporal Arnold. Les conclusions principales étaient les suivantes :

[traduction]

  1. Les traces de sang à l'intérieur du véhicule montrent que Valerie [sic] GEORGE a saigné au-dessus du volant et qu'il est sorti du véhicule.
  2. Les éclaboussures sur la roue arrière du côté conducteur correspondent aux taches de sang projetées au-dessus du passage de la roue et au mouvement du pneu après que ces taches y ont été déposées.
  3. Les traces de sang qui se trouvaient sur l'allée de gravier montrent que Valerie [sic] GEORGE est sorti du véhicule et s'est dirigé vers l'est, le long de la route, et qu'il s'est effondré.

[163] La version des faits fournie par le caporal Arnold correspond également à celle des autres membres du GTIDN, établie de façon détaillée plus loin dans le présent rapport, ainsi qu'aux communications radio entre les membres du groupe et le poste de commandement.

[164] Le caporal Arnold a affirmé que, à la lumière des signalements des déplacements de M. George, fournis par le gendarme Shaw, il croyait que M. George essayait de trouver le courage d'affronter la police près de sa barrière. Le caporal Arnold a insisté sur les points suivants :

  • M. George marchait à l'extérieur de sa résidence et pointait la carabine dans les buissons, laissant entendre qu'il s'exerçait à faire feu sur la police et s'y préparait mentalement.
  • M. George est entré dans sa résidence et a fait les cent pas, gesticulant et criant.
  • M. George a changé de vêtements et a ensuite rempli le réservoir de son autre camionnette en utilisant les bidons d'essence dont il disposait sur la propriété, laissant entendre qu'il voulait changer d'apparence et de véhicule au cas où il serait en mesure de déjouer la police à la barrière et de fuir la propriété.
  • Les appels à la résidence de M. George sont restés sans réponse (sauf la fois où il a raccroché), alors qu'on savait qu'il était à l'intérieur, laissant entendre qu'il savait que c'était la police qui appelait et qu'il n'avait aucunement l'intention de négocier ou de se rendre.

[165] Quand M. George conduisait vers la barricade de la police, il était toujours en possession de sa carabine, ce qui, pour le caporal Arnold, signifiait qu'il avait l'intention de s'en prendre à la police. Le caporal Arnold maintient qu'il a utilisé une force mortelle en réaction au comportement de M. George et que ce n'était pas un plan qu'il avait prévu. Il n'avait pas le temps d'informer le chef des interventions tout en réagissant à la menace à laquelle il faisait face.

[166] Dans le cadre de l'enquête criminelle, un examen du recours à la force a été mené par un membre du Service de police de Calgary. Comme il a été mentionné dans le rapport connexe, une arme à feu est la seule option de recours à la force qui a une grande probabilité de mettre fin immédiatement à une menace mortelle. Cependant, même si l'intention est non pas de causer des lésions corporelles graves ou le décès, mais plutôt de faire cesser le comportement menaçant, elle a souvent des conséquences mortelles. Selon le caporal Arnold, il a fait feu sur M. George quand il croyait que les agissements de ce dernier étaient susceptibles de le blesser grièvement ou de le tuer. Il a agi de la sorte pour se protéger contre ce danger imminent et pour protéger les autres membres à proximité de la barricade.

[167] Le membre ne peut décharger une arme à feu sur une personne que pour en protéger une autre contre la mort ou des blessures graves, aux termes du Code criminel et du MIGINote de bas de page 35. La Commission reconnaît, d'après la version des événements du caporal Arnold, qui est étayée par le dossier d'enquête, qu'il était convaincu que M. George avait l'aptitude, l'intention et le moyen de le blesser grièvement ou de le tuer. Cela dit, faire feu sur un suspect dans un véhicule en mouvement comporte des risques tout à fait particuliers. Le caporal Arnold a affirmé qu'il n'était pas absolument certain que de tirer sur M. George immobiliserait le véhicule et l'empêcherait de heurter la barrière ou lui-même et qu'il a envisagé la possibilité que le véhicule roule vers lui ou vers les autres membres du GTIDN. Au moment où l'incident est survenu, la politique de la GRC établissait ce qui suit :

  1. Le membre ne peut décharger une arme à feu sur une personne dans un véhicule automobile que si cette personne est susceptible de causer la mort d'une autre personne ou des lésions corporelles graves et qu'aucune autre option en matière d'intervention n'est appropriéeNote de bas de page 36.
  2. Le membre ne doit pas décharger une arme à feu sur un véhicule automobile afin de l'immobiliser, à moins d'avoir obtenu l'autorisation du chef des interventions dans le cadre d'un incident critiqueNote de bas de page 37.

[168] La Commission mentionne que cette politique a été révisée pour indiquer que le membre ne peut décharger une arme à feu sur une personne dans un véhicule automobile utilisé délibérément comme arme que lorsqu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une telle mesure est nécessaire afin de protéger une personne contre la mort ou des blessures graves et que la personne menacée de manière imminente n'a pas de moyen raisonnable de s'en sortir indemneNote de bas de page 38.

[169] La question du positionnement du caporal Arnold près de la barrière a été traitée antérieurement dans le présent rapport. La Commission est convaincue que, dans les moments précédant la fusillade, le caporal Arnold croyait raisonnablement que M. George avait l'intention d'emboutir la barricade et qu'il était donc lui-même à risque de subir des lésions corporelles graves ou de mourir. La Commission est également convaincue qu'aucune autre intervention n'était appropriée, car il n'existait pas d'autres moyens viables d'immobiliser le véhicule ou d'atténuer autrement le risque imminent de préjudice. Il avait déjà été jugé trop dangereux pour les membres de placer un hérisson plus loin dans l'allée dans l'espace ouvert (M. George aurait même pu l'éviter en quittant l'allée), et la politique de la GRC prévoit que la décharge d'une arme à feu sur un véhicule automobile est une façon inefficace de l'immobiliserNote de bas de page 39. Le caporal Arnold n'a pas fait feu sur le véhicule dans le but de l'immobiliser, et une telle action n'avait pas été autorisée par le chef des interventions. Par conséquent, la Commission estime que le geste du caporal Arnold, qui a tiré sur M. George alors que celui-ci était dans un véhicule automobile en mouvement, était raisonnable dans les circonstances et conforme à la politique de la GRC en vigueur à l'époque.

[170] Au bout du compte, M. George se dirigeait rapidement vers la barricade de la police, et les membres croyaient raisonnablement que son intention était de la heurter de plein fouet. Les membres du GTIDN, y compris le caporal Arnold, avaient nécessairement pris position dans les environs et hors de la vue de M. George afin de ne pas devenir des cibles délibérées et de ne pas se trouver désavantagés sur le plan tactique. Les actes de M. George faisaient en sorte que des lésions corporelles graves ou la mort étaient des résultats potentiels si son véhicule entrait en collision avec la barricade, et c'est pour cette raison que le caporal Arnold a tiré le premier coup de feu. Par la suite, et tandis qu'il avait déjà été blessé par ce qui a peut-être été le tir mortel, M. George est sorti de son véhicule avec sa carabine sans montrer qu'il avait l'intention de se rendre à la police. La Commission est convaincue que, durant tout l'affrontement, M. George constituait une menace réelle et imminente de lésions corporelles graves ou de mort pour les membres du GTIDN.

Conclusion : Le caporal Arnold craignait raisonnablement d'être blessé grièvement ou tué lorsqu'il a fait feu sur M. George.

Conclusion : Il était raisonnable pour le caporal Arnold de faire feu sur M. George dans son véhicule, car aucune autre méthode d'intervention n'était appropriée.

Caporal Brown

[171] Le caporal Brown a déclaré que, lorsqu'il a entendu M. George démarrer le VTT, il s'est dit que la voie de sortie vers l'arrière était couverte de végétation dense et qu'il était peu probable que M. George puisse s'en servir pour s'enfuir rapidement. Le caporal Arnold a envisagé d'envoyer des membres dans la zone où on présumait qu'il pourrait réapparaître, mais le gendarme Shaw a peu après signalé que le moteur du VTT avait calé. M. George est retourné dans la fourgonnette avec sa carabine et s'est dirigé à nouveau vers la barrière.

[172] Le caporal Brown a dit qu'il a entendu peu après le véhicule et croyait qu'il approchait plus rapidement que les autres fois, ayant remarqué que le moteur vrombissait davantage. Aucune musique ne jouait. Il a entendu le caporal Arnold dire [traduction] « il s'en vient », et, peu après, un coup de feu a été tiré. Il a entendu le véhicule déraper puis s'immobiliser et en a aperçu le devant. Il a vu que la porte du côté conducteur était ouverte et a remarqué du mouvement sur le siège du conducteur. Il a entendu le gendarme Merriman crier « Police! Arrêtez! » et plusieurs autres coups de feu. Le caporal Brown a déclaré qu'il a par la suite aperçu M. George avec une carabine, et le caporal Brown a donc fait feu en direction du siège du conducteur, par le pare-brise du côté passager du véhicule.

Photo 5 : Vue de l'allée qu'avait le caporal  Brown et véhicule de M. George dans sa position finale
Photo 5 : Vue de l'allée qu'avait le caporal Brown et véhicule de M. George dans sa position finale, à l'arrêt. Les autres membres du GTIDN en position le long des buissons avaient une vue semblable à des distances variables.

[173] Le caporal Brown a affirmé qu'il croyait que M. George était en possession d'une carabine parce qu'il avait l'intention de tirer sur un membre du GTI et que la seule façon de protéger les membres du groupe contre la mort ou des lésions corporelles graves était de recourir à une force mortelle. Ses tirs avaient pour but d'atteindre M. George, qui, selon lui, utilisait le véhicule pour se couvrir tandis qu'il roulait vers l'avant. Il a entendu quelqu'un crier dans une langue étrangère et n'a pu déterminer s'il s'agissait de M. George ou du gendarme Degen. Selon le caporal Brown, il a réévalué la situation et transmis une mise à jour par radio.

[174] Le caporal Brown a perdu de vue M. George et a regardé dans l'allée, où il a aperçu M. George effondré sur le sol. Le caporal Arnold a confirmé par radio que M. George se trouvait dans l'allée, à environ 50 mètres de lui, par terre. Le groupe s'est approché de M. George, et le caporal Brown a aperçu une pile de cartouches de calibre .22 non utilisées sur le sol près du corps. La carabine se trouvait à trois ou quatre pieds de lui. Les membres du GTIDN ont fourni une aide médicale immédiate, puis ont appelé l'ambulance, qui attendait à proximité.

[175] Le caporal Brown a déclaré qu'il avait utilisé son arme à feu, car il croyait que M. George avait l'aptitude, le moyen et l'intention de tuer ou de blesser grièvement les membres présents et pour les en protéger. Dans le cadre de son témoignage à l'enquête du coroner, le caporal Brown a expliqué que, lorsqu'on entend un membre faire feu, cela ne signifie pas que les autres membres du groupe peuvent faire de même. Chaque membre doit décider par lui-même s'il est justifié d'utiliser sa carabine, selon les principes du MIGI et la situation qui se présente.

[176] Au moment où le caporal Brown a tiré sur M. George, il craignait raisonnablement que les membres du GTIDN présents ne subissent des lésions corporelles graves ou ne soient tués. M. George était en possession de sa carabine et ne montrait pas qu'il avait l'intention d'arrêter ou de se rendre à la police. Le recours à une force mortelle par le caporal Brown était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Conclusion : Le recours à une force mortelle par le caporal Brown était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Gendarme Warwick

[177] Le gendarme Warwick se trouvait le long des buissons, dans la position la plus loin de la route et la plus près de la résidence des George. Il a affirmé que, à la lumière des renseignements transmis par le gendarme Shaw, il était évident pour lui que M. George traînait sa carabine partout avec lui et agissait de façon dangereuse, imprévisible et bizarre. Le gendarme Shaw a signalé que M. George remplissait le réservoir de son véhicule, ce qui a porté le gendarme Warwick à croire qu'il avait l'intention de passer à l'action. Il a fondé cette croyance sur le fait que M. George savait que la police était présente, qu'il ne s'était pas rendu et qu'il transportait continuellement une arme à feu. Selon lui, le fait que M. George a mis de l'essence dans son véhicule ne montrait pas qu'il avait l'intention de se rendre ou de parler à la police.

[178] Peu après le dernier signalement selon lequel M. George conduisait en direction des membres avec son arme à feu, le gendarme Warwick a entendu le véhicule approcher. Selon le bruit du moteur, il accélérait rapidement. Le gendarme Warwick a vu le véhicule se diriger vers la barricade à grande vitesse, et le conducteur ne montrait pas qu'il ralentirait ou éviterait la barricade. Le gendarme Warwick croyait qu'une importante collision était sur le point de survenir entre le véhicule de M. George et les véhicules de police.

[179] Le gendarme Warwick a entendu un coup de feu, et la fourgonette a immédiatement commencé à ralentir, a dérapé, puis s'est immobilisée dans l'allée devant lui, légèrement à sa gauche. Il pouvait voir le côté passager et une partie du devant du véhicule. La porte du conducteur s'est ouverte, mais il ne pouvait pas voir à l'intérieur du véhicule en raison du reflet sur le pare-brise. Il a soudainement entendu un coup de feu, qu'il croyait provenir du véhicule de M. George. Il a ensuite entendu plusieurs autres coups de feu provenant de sa droite.

[180] Le gendarme Warwick a constaté que M. George s'était déplacé vers l'arrière du véhicule et croyait qu'il se servait du véhicule pour se couvrir et se cacher afin de se mettre en position de tirer. M. George était légèrement penché et se déplaçait vers le côté passager à l'arrière de la fourgonnette, tenant sa carabine à deux mains. Tandis qu'il se déplaçait, il regardait par la vitre arrière de la fourgonnette et semblait regarder vers la barrière et en direction des autres membres. Le gendarme Warwick a déclaré qu'il croyait que M. George agissait de la sorte parce qu'il se préparait à faire feu en leur direction. Il a dit qu'il croyait que M. George avait l'aptitude, l'intention et le moyen de tuer ou de blesser grièvement les membres. Selon lui, M. George aurait pu épauler l'arme et tirer en moins d'une seconde. C'est ce qu'il semblait vouloir faire.

[181] Au dire du gendarme Warwick, il a crié « Arrêtez! Police! » d'une voix forte et claire, mais M. George n'a pas réagi. Le gendarme Warwick a donc visé M. George et fait feu en sa direction à plusieurs reprises. Pendant ce temps-là, la fourgonnette a commencé à rouler vers l'avant dans l'allée, laissant M. George à découvert. M. George s'est tourné et a tenté de reculer dans son allée. Le gendarme Warwick croyait que M. George tentait de trouver une couverture afin de se mettre en position de tir, compte tenu de ses actes précédents et du fait qu'il ne s'était pas rendu. Comme le gendarme Warwick se trouvait dans un buisson dense, il a perdu de vue M. George et a donc avancé. Il a alors aperçu M. George effondré au sol du côté gauche de l'allée. La carabine se trouvait près du centre de l'allée. Il a continué à tenir en joue M. George pour s'assurer qu'il ne récupère pas sa carabine. Après que les autres membres du GTIDN ont rejoint sa position, ils ont avancé vers M. George. Ils l'ont retourné, ont commencé immédiatement à prodiguer les premiers soins et ont appelé l'ambulance.

[182] Je souligne que le gendarme Warwick est un des deux membres se rappelant avoir entendu ce qui semblait être un coup de feu en provenance de la zone où M. George et son véhicule se trouvaient et dont le calibre était différent de celui des armes à feu utilisées par les membres du GTIDN. Une douille vide se trouvait dans la carabine de M. George.

[183] Le gendarme Warwick a déclaré avoir fait feu sur M. George, car il croyait que ce dernier se préparait à tirer sur les membres, ce qui était susceptible de causer leur mort ou des lésions corporelles graves. Il a soutenu qu'il n'y avait aucune autre option raisonnable et a utilisé son arme à feu uniquement pour protéger les membres. Il a arrêté de tirer quand il était clair que M. George ne constituait plus une menace pour eux.

[184] À la lumière de ce qui précède, la Commission estime que le gendarme Warwick croyait raisonnablement que M. George se préparait à tirer et que l'utilisation de son arme à feu était nécessaire pour mettre fin à la menace de lésions corporelles graves ou de mort. Selon la Commission, le recours à une force mortelle par le gendarme Warwick était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Conclusion : Le recours à une force mortelle par le gendarme Warwick était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Gendarme Degen

[185] Le gendarme Degen était placé à gauche du gendarme Merriman, lui-même à gauche du gendarme Arnold, qui était le plus près de la barrière. Le gendarme Degen se trouvait dans les buissons face à l'allée, mais il n'était pas en mesure de voir loin dans l'allée en raison de l'épais buisson à sa gauche. Il était derrière le fossé et l'accotement, ce qui, selon lui, le couvrait dans une certaine mesure tout en lui permettant de voir le chemin directement en face de lui. Il pouvait voir les véhicules de police bloquant la barrière (à sa droite) et il pouvait voir environ 30 mètres de l'allée, vers la résidence.

[186] Selon le gendarme Degen, le fait que M. George a rempli le réservoir de sa fourgonnette indiquait qu'il n'avait pas l'intention de se rendre. Le gendarme Degen a déclaré que, lorsque M. George a tenté d'utiliser un VTT, cela donnait à penser qu'il cherchait des moyens de franchir le contrôle du périmètre, puisque le VTT était en mesure de circuler sur le terrain fortement accidenté. Le comportement de M. George empirait, et le gendarme Degen craignait que, si M. George ne se rendait pas et réussissait à franchir le contrôle du périmètre, il n'inflige des blessures graves à un agent, à des membres de sa famille ou à quelqu'un ayant aidé sa femme à s'enfuir ou ne cause la mort d'une de ces personnes. Il s'inquiétait aussi du fait que les membres du GTIDN représentaient une organisation à laquelle M. George ne faisait pas confiance.

[187] Selon le dernier rapport du gendarme Shaw, M. George se trouvait dans son véhicule, avec une carabine, et se dirigeait vers la sortie de son allée à toute vitesse. Le gendarme Degen pouvait entendre le moteur du véhicule vrombir à mesure qu'il approchait, ainsi que les pneus qui glissaient sur le gravier. Il a entendu le caporal Arnold dire que le véhicule se rapprochait rapidement de leur position et a entendu un coup de feu venant de sa droite, avant de voir le véhicule. Le véhicule a rapidement ralenti et s'est arrêté directement face à lui. Il semblait que le conducteur cherchait quelque chose avant de sortir de la fourgonnette. Le gendarme Degen a perdu de vue le conducteur et, lorsque le véhicule a commencé à rouler vers l'avant, il a entendu des membres crier « Police! Arrêtez! », puis il a entendu une détonation non loin du véhicule, qui, selon lui, provenait de la carabine de M. George.

[188] Le gendarme Degen a ensuite vu M. George s'éloigner du véhicule, en direction de la résidence, avec la carabine dans la main droite. Il a tiré plusieurs fois vers M. George puisque celui-ci continuait d'avancer, était toujours en possession de sa carabine et n'avait pas l'air de vouloir ralentir ou se rendre. Le gendarme Degen a perdu de vue M. George, mais il a entendu un membre dire qu'il était au sol, dans l'allée. Les membres ont formé une ligne et se sont approchés de M. George, qui ne bougeait pas. Ils ont prodigué les premiers soins, et le gendarme Degen a ouvert la barrière verrouillée pour laisser passer l'ambulance qui avait été appelée sur les lieux.

[189] Il importe de reconnaître que cet événement, où il y avait beaucoup d'action, s'est déroulé en moins d'une minute et a nécessité la prise de décisions. Le gendarme Degen a entendu le coup de feu tiré par le caporal Arnold et ce qu'il croit être un coup de feu tiré par M. George, ce qui est étayé par des éléments de preuve. La Commission souligne que, selon l'angle d'entrée des quatre balles qui ont atteint M. George, et surtout celles qui l'ont frappé à la poitrine et qui ont causé sa mort, M. George était soit directement face au tireur, soit de côté, et il ne lui faisait pas dos. À tous les moments pertinents, la preuve est constante : M. George se déplaçait, n'a montré aucun signe de vouloir se rendre à la police et transportait une carabine. Le gendarme Degen a raisonnablement cru que M. George avait l'aptitude, l'intention et le moyen de blesser grièvement et de tuer les membres du GTIDN lorsqu'il a fait feu en direction de M. George.

Conclusion : Le recours à une force mortelle par le gendarme Degen était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Gendarme Merriman

[190] Le gendarme Merriman a déclaré qu'il avait entendu le gendarme Shaw dire que M. George était entré dans son véhicule avec une carabine et qu'il se dirigeait vers la barrière. Il a entendu le moteur vrombir avant de voir le véhicule, qui était à une distance d'environ 150 à 200 mètres de lui. Le véhicule roulait à vive allure, laissant une traînée de poussière derrière lui. Il n'a pas ralenti, et le gendarme Merriman croyait que le véhicule allait soit foncer dans la barrière, soit arrêter à la barrière en vue d'une embuscade. Le gendarme Merriman se trouvait à quatre ou cinq mètres de la barrière et il se préoccupait du fait que la force de la collision pourrait causer la mort ou des blessures graves aux membres positionnés près de la barrière.

[191] Lorsque la fourgonnette était à environ 70 mètres de la barrière, le gendarme Merriman a entendu un coup de feu et la fourgonnette a dérapé et s'est arrêtée à environ 50 mètres de lui. Il a crié « Police! Arrêtez! », et le conducteur, qu'il croyait être M. George, s'est tourné dans le siège du conducteur et est sorti du véhicule. Il a de nouveau crié « Arrêtez! Police! » Cet ordre a été répété, mais M. George n'a pas répondu. Lorsque M. George est sorti du véhicule, il a levé la main droite comme s'il manipulait un long objet qu'il devait dégager du tableau de bord et du volant. Puis, le gendarme Merriman a vu la carabine dans la main de M. George. M. George a ouvert la porte et s'est tourné rapidement pour faire face au gendarme Merriman. Celui-ci croyait que M. George utilisait la porte pour se protéger afin qu'il puisse tirer, n'ayant aucune raison de sortir de son véhicule armé d'une carabine.

[192] M. George semblait tenir la carabine dans une position de tir et il la pointait dans la direction du gendarme Merriman, qui craignait d'être pris pour cible et croyait avoir épuisé les options pour tenter de contrôler verbalement M. George. Il a tiré sur M. George. Il semble que M. George se soit baissé rapidement; la vitre du côté conducteur a volé en éclats. Le gendarme Merriman a continué à tirer en direction de M. George, qui se baissait et se relevait afin de repérer des agents à cibler. Le véhicule a commencé à avancer et M. George a semblé se diriger vers l'arrière du véhicule, où le gendarme Merriman l'a perdu de vue.

[193] Le gendarme Merriman a tiré sur le pneu avant du côté passager et sur la grille avant pour arrêter la fourgonnette. Une fois cela fait, il a vu M. George s'effondrer du côté gauche de l'allée, la carabine étant à environ un mètre de lui. Après que les membres se sont approchés, le gendarme Merriman a ramassé la carabine et a ouvert le mécanisme de chargement (où se trouvent les munitions) pour rendre l'arme sécuritaire. Lorsqu'il a fait cela, une douille vide a été éjectée de la chambre, et il l'a ramassée. (À l'enquête du coroner, le gendarme Merriman a déclaré qu'il n'avait pas entendu de décharge de fusil et qu'il avait été surpris, lorsqu'il l'a ouvert, de constater qu'il y avait une douille vide.)

Conclusion : Le recours à une force mortelle par le gendarme Merriman était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Gendarme Atkinson

[194] Le gendarme Atkinson pouvait entendre M. George approcher dans son véhicule et il lui semblait qu'il arrivait à vive allure. Il a entendu le caporal Arnold dire qu'il pouvait voir le véhicule. Peu après, le gendarme Atkinson a entendu un seul coup de feu tiré par un membre du GTIDN qui se tenait sur sa droite, suivi peu après par d'autres coups de feu tirés par les membres du GTIDN. Au début, il ne pouvait pas voir le véhicule ni le suspect, puisque sa vue était obstruée par les broussailles. Il a par la suite vu la fourgonnette, qui continuait d'avancer, avec la porte du conducteur ouverte.

[195] Le gendarme Atkinson ne pouvait pas voir M. George et a commencé à scruter la zone, criant qu'il ne le voyait pas. Par la suite, un autre membre a déclaré que M. George était par terre, du côté gauche de l'allée. Le caporal Brown a alors demandé aux membres de former une ligne; le gendarme Atkinson s'est donc déplacé et a vu M. George étendu près du côté gauche de l'allée, la carabine reposant dans le milieu de l'allée. Lorsqu'ils se sont tous approchés de M. George, le gendarme Atkinson a seulement vu un léger mouvement dans un des pieds de M. George. Il a vu une pile de munitions de petit calibre ensanglantées dans l'allée entre M. George et la carabine. Les membres ont commencé à donner les premiers soins à M. George.

Photo 6 : Vue de l'allée qu'avait le gendarme Atkinson et  véhicule de M. George dans sa position finale
Photo 6 : Vue de l'allée qu'avait le gendarme Atkinson et véhicule de M. George dans sa position finale, à l'arrêt.

[196] La photographie ci-dessus montre la vue obstruée qu'avait le gendarme Atkinson de la portion de l'allée où M. George a été abattu par les membres du GTIDN. Le gendarme Atkinson n'a à aucun moment pendant l'incident fait feu avec son arme. Il a déclaré avoir vu M. George seulement après la fin de la fusillade et lorsqu'il a su que M. George était au sol.

Conclusion : Il était raisonnable pour le gendarme Atkinson de ne pas recourir à la force, car, de sa position, il a vu M. George seulement lorsque celui-ci était au sol et ne représentait plus une menace pour les membres.

[197] La Commission souligne que de nombreux membres ont déclaré que, lorsque M. George est sorti de son véhicule avec l'arme à feu en main, ils lui ont dit d'arrêter, mentionnant qu'ils étaient des agents de police. Il semble que ces ordres n'aient pas été donnés en allemand, comme ils l'avaient été précédemment. Je comprends que ces événements se sont déroulés très rapidement et que les membres travaillaient dans des conditions extrêmement stressantes; cependant, les membres savaient que M. George ne parlait pas l'anglais. Bien que la Commission soit convaincue que M. George aurait dû savoir qu'il avait affaire à la police compte tenu des véhicules de police identifiés formant la barricade et du fait qu'il savait que la police le poursuivait relativement aux coups de feu qu'il avait tirés, il est malheureux que ces ordres aient été communiqués dans une langue que M. George ne comprenait pas. En raison de la nature dynamique de ces événements et des efforts précédents déployés par les membres du GTIDN pour donner les ordres en allemand, la Commission ne formule aucune conclusion ni recommandation quant à ces actes.

Force non mortelle et autres options sur le plan tactique

[198] Comme il en a été question dans la section précédente, la Commission reconnaît que, au moment où les membres ont eu recours à la force mortelle contre M. George, il n'y avait pas d'autres moyens raisonnables de composer avec la menace qu'il représentait en fonçant à toute allure dans la barricade et en étant en possession d'une arme à feu. Cela dit, le mandat de la Commission est de nature corrective, et la Commission doit envisager si des mesures supplémentaires auraient pu ou auraient dû être prises par les membres pour empêcher l'affrontement final et fatal entre les membres du GTIDN et M. George.

[199] Un certain nombre de tactiques et d'options de recours à la force non mortelle ont été envisagées dans les heures précédant l'affrontement final. Une de ces options était que le gendarme Shaw, qui se tenait caché près de la résidence, rende inutilisable le véhicule de M. George pendant qu'il était garé sur la propriété. Cependant, l'inspecteur Egan croyait que le fait de tirer sur le véhicule pourrait envenimer la situation et il n'était pas convaincu que cela serait bénéfique. À ce moment-là, la priorité consistait à communiquer avec M. George par téléphone. Le caporal Brown a déclaré que M. George n'avait toujours pas fait feu en leur direction et il craignait que cela ne l'amène à le faire et que M. George ne se sente ainsi pris au piège. Cela révélerait également la position du gendarme Shaw. De l'avis de la Commission, la tactique a été examinée de manière raisonnable et jugée peu judicieuse.

[200] Le recours au gendarme Warwick et à son chien a également été envisagé. Comme il a été mentionné plus tôt dans le présent rapport, le gendarme Warwick n'a pas été en mesure de se rendre près de la résidence avant que M. George ne commence la première d'une série de tentatives d'approche au bout de l'allée, son arme à feu en main. Par conséquent, le gendarme Warwick a été redirigé au bout de l'allée, où se trouvaient les autres membres du GTIDN. Dans le cadre de l'enquête du coroner, le gendarme Warwick a déclaré que le chien des Services cynophiles n'aurait pas été un moyen viable d'appréhender M. George à la résidence, alors qu'il n'avait pas son arme à feu, en raison de la présence d'autres chiens qui auraient pu nuire au processus et qui auraient averti M. George de la présence des agents, ce qui aurait compromis l'arrestation.

[201] De plus, il y avait un grand espace ouvert autour de la résidence et il aurait fallu du temps au chien pour couvrir cette distance. Pendant ce temps, M. George aurait pu retourner à l'intérieur de la résidence. En outre, si les Services cynophiles avaient été employés, les autres membres du groupe auraient eu à agir également, ce qui aurait changé leur façon de voir et de traiter la situation. Le gendarme Warwick croyait que la probabilité de réussite était faible et que la situation aurait exigé un suivi immédiat du reste du groupe.

[202] Le caporal Brown a déclaré qu'il avait pensé rapprocher le gendarme Warwick de la résidence afin qu'il puisse lancer une attaque avec son chien contre M. George au moment où il remplissait le réservoir du véhicule, mais cette stratégie comportait trop de risques. Ces risques comprenaient le comportement changeant de M. George, le fait que ses chiens pouvaient donner l'alarme et la direction du vent (qui, s'il était allé de la position des membres au bout de l'allée jusqu'à la résidence, aurait alerté les chiens de M. George de leur présence), ce qui aurait rendu trop risqué le fait de rapprocher les membres du groupe de la résidence.

[203] Une fois que les membres du GTIDN ont été en position d'observer le comportement de M. George (qui changeait constamment, celui-ci se déplaçant continuellement sur la propriété et tentant de s'en aller), il est devenu évident que davantage de ressources pourraient être requises. Moins d'une heure avant la fusillade mortelle, le chef d'équipe du GTIDN a demandé qu'on envisage le déploiement d'un autre GTI, en plus du recours à un hélicoptère. L'inspecteur Egan a parlé à l'inspecteur Fast de ces options et a présenté une demande officielle. L'inspecteur Fast a confirmé qu'il prendrait les dispositions requises. Dans le cadre d'un appel de suivi, l'inspecteur Egan a dit à l'inspecteur Fast que le deuxième groupe était souhaité parce que la confrontation allait probablement durer longtemps, avant que M. George ne se rende, et que l'hélicoptère était nécessaire pour surveiller M. George, surtout s'il entrait dans la forêt à pied.

[204] Les ressources représentent un problème constant pour les GTI à temps partiel qui travaillent dans des régions éloignées. Il s'agit d'un problème encore plus complexe lorsqu'une opération se déroule sur une vaste propriété où il est difficile d'assurer le contrôle du périmètre. Au bout du compte, il n'y a pas eu assez de temps pour obtenir les ressources supplémentaires voulues, c'est-à-dire l'hélicoptère ou un autre GTI, sur les lieux de l'incident. Ces ressources n'auraient pas pu être envisagées ni demandées plus tôt dans le processus de planification. Rien dans le dossier d'enquête n'indique que cela a été le cas.

[205] Le problème des ressources et du contrôle du périmètre a fait l'objet d'une recommandation dans le cadre de l'EAI et de commentaires par la GRC dans sa réponse à la Commission. La Commission souligne que le caporal Arnold a exprimé des préoccupations selon lesquelles il y avait un risque pour le public étant donné que la route n'avait pas été bloquée. Il a déclaré que, si les agents et la barricade avaient été plus près de la route, ils auraient perdu l'avantage tactique de voir M. George venir et auraient compromis leur sécurité et celle du public. Il a ajouté que le fait de déplacer les véhicules de police vers la route pour s'en servir comme couverture (comme il a été suggéré dans les questions posées par les enquêteurs) aurait aussi mis le public en danger, car la route n'était pas bloquée par la police.

[206] Même si quelques efforts pour assurer le contrôle du périmètre ont été faits (le gendarme Poyzer se trouvait dans un véhicule sur la route, près de la fin de l'allée), il était clair que le périmètre de la propriété n'était pas pleinement contrôlé. Comme il est souligné dans l'EAI :

[traduction]
Malheureusement, ces ressources [GTI supplémentaire] ne pouvaient pas arriver à temps. C'est la réalité du travail dans les régions du pays éloignées, où les ressources spécialisées sont souvent minimes. Il est généralement très difficile d'obtenir les ressources adéquates au début d'un incident. Je crois qu'il aurait été bénéfique de compter sur des membres supplémentaires du GTI au début de l'appel pour assurer un meilleur contrôle du périmètre. L'aménagement de la propriété représentait particulièrement un risque pour la sécurité des agents et du public, ce qui limitait les options d'intervention dont disposaient les membres.

[207] Dans le cadre de l'EAI, on a recommandé que la Division « E » envisage la mise en œuvre d'équipes responsables d'assurer le contrôle du périmètre pour accroître la capacité d'intervention du GTI dans le district Nord. Ces équipes n'assumeraient pas les rôles et les responsabilités du GTI; elles permettraient plutôt au GTI de se concentrer sur ses responsabilités principales, tout en maintenant un haut niveau de sécurité dans le périmètre. Cela permettrait une intervention plus souple. La réponse de la GRC à la Commission indique que la haute direction au quartier général de la Division « E » et au district Nord envisage de mettre en œuvre une ou plusieurs de ces équipes. Le surintendant Rod Booth, signataire de la réponse de la GRC et alors surintendant du district Nord, a mentionné qu'il anticipait la mise en œuvre d'une telle équipe.

[208] Comme il en a été question plus tôt dans le présent rapport, on a également pensé à repositionner le hérisson plus loin dans la propriété, après la barrière de métal. Cependant, l'inspecteur Egan et le caporal Brown ont déclaré que cela exposerait les membres du groupe à des tirs et que l'aire ouverte de l'allée faisait en sorte que cela n'était pas judicieux sur le plan tactique. De l'avis de la Commission, cette décision était raisonnable compte tenu du grand nombre de fois où M. George s'est approché du bout de l'allée.

[209] Compte tenu de la difficulté à établir la communication avec M. George, le GTIDN a considéré diverses autres options, notamment l'utilisation d'un mégaphone et/ou d'un téléphone portable. Il est clair d'après les transmissions radio que l'utilisation d'un mégaphone a été envisagée par le caporal Brown, du moins pour tenter de communiquer avec M. George à distance dans les environs de sa résidence. Toutefois, il y a eu des problèmes logistiques en ce qui concerne le fait d'apporter l'équipement sur les lieux, qui étaient difficiles d'accès et ce qui supposait une longue marche dans les buissons, ainsi qu'en ce qui concerne la distance que l'équipement couvrirait. Il n'est pas clair d'après le dossier d'enquête si cela a été pris en considération lorsque les membres ont rencontré M. George à ce moment-là.

[210] L'inspecteur Egan a déclaré avoir confirmé qu'un téléphone portable et un mégaphone étaient disponibles, au besoin. Toutefois, une évaluation des risques faite par le groupe a révélé que le téléphone portable exposerait les membres à des tirs potentiels et les rendrait vulnérables pendant trop longtemps. Par conséquent, l'idée a été écartée.

[211] Les difficultés au chapitre des communications ont été aggravées par le fait qu'il n'était pas sécuritaire pour les membres de s'approcher ouvertement de M. George alors qu'il était toujours en possession d'une arme à feu, qu'il portait continuellement sur lui, et qu'il avait déjà démontré qu'il savait s'en servir. Selon une recommandation faite à la suite de l'enquête du coroner, la GRC aurait dû envisager de déployer auprès du GTIDN un véhicule blindé, auquel il n'avait pas accès au moment de l'incident. Le district Nord a depuis reçu un véhicule blindé tactique, qui offre au GTI la capacité de s'approcher de façon sécuritaire des sujets armés.

Conclusion : Des options de recours à la force non mortelle et d'autres options tactiques ont été raisonnablement envisagées, y compris le fait de rendre inutilisable le véhicule de M. George à sa résidence, d'obtenir des ressources du GTI supplémentaires, d'utiliser le chien des Services cynophiles pour appréhender M. George près de la résidence et de recourir à d'autres moyens de communication.

Conclusion : Des ressources du GTI supplémentaires auraient dû être déterminées et demandées plus tôt au cours des étapes de la planification.

Conclusion : Des ressources supplémentaires auraient pu permettre d'assurer un meilleur contrôle du périmètre.

Recommandation : Que la GRC établisse dans le district Nord une ou plusieurs équipes responsables du contrôle du périmètre, si une telle équipe n'est pas déjà en place.

Soins médicaux après la fusillade

[212] La GRC est chargée de prendre soin des personnes sous sa garde, et ses politiques orientent ses membres en ce qui concerne l'obtention de soins médicaux pour ces personnes. Selon la politique de la GRC, les membres doivent obtenir de l'assistance médicale immédiate et fournir les premiers soins nécessaires lorsque la personne semble être inconsciente ou présente tout autre signe indiquant une blessure ou une maladie pour laquelle il faudrait obtenir des soins médicauxNote de bas de page 40. Cela peut être difficile face à un sujet qui, quelques secondes plus tôt, selon les membres, posait une menace qui a justifié le recours à une force mortelle; or, cette obligation s'applique également à de telles situations.

[213] L'inspecteur Egan a demandé qu'une ambulance du service de la C.-B. soit en attente au début du déploiement du GTI. L'ambulance est arrivée au poste de commandement peu après 10 h. Immédiatement après la fusillade, vers 13 h, les ambulanciers ont été appelés sur les lieux, où ils ont vu les membres du GTIDN pratiquer la RCR. Les ambulanciers ont effectué une évaluation et appelé un médecin, qui leur a dit d'arrêter la réanimation.

[214] La Commission est convaincue que des dispositions ont été prises pour la fourniture de soins médicaux d'urgence pendant l'opération du GTIDN. Les membres ont fourni des premiers soins d'urgence à M. George avant l'arrivée des ambulanciers, qui attendaient au poste de commandement. Les membres du GTIDN ont continué de pratiquer la RCR pendant que les ambulanciers évaluaient M. George et ont cessé lorsqu'on leur a dit de le faire. Tous les efforts raisonnables ont été déployés par les membres pour fournir des soins médicaux immédiats et nécessaires à M. George après la fusillade.

Conclusion : Des dispositions ont été prises pour la fourniture de soins médicaux d'urgence pendant l'opération du GTIDN.

Conclusion : Tous les efforts raisonnables ont été déployés par les membres du GTIDN pour fournir des soins médicaux immédiats et nécessaires à M. George après la fusillade.

Rôle de la GRC après la fusillade

[215] Immédiatement après la fusillade, le chef des interventions, l'inspecteur Egan, a géré les lieux, à l'aide des membres du GTI et de Fort St. John jusqu'à ce que les membres du Groupe des crimes graves du district Nord soient en mesure de s'y rendre. Ceux-ci ont par la suite été remplacés par les membres du Groupe des crimes graves de la Division « E », qui se sont déplacés de Kelowna et de Vancouver et qui ont été affectés à l'enquête sur le décès sous garde de M. George.

[216] L'incident est survenu en 2009 en Colombie-Britannique, avant la création du bureau des enquêtes indépendantes (IIO), organe civil établi en 2012 par le gouvernement provincial afin de faire enquête sur des incidents où les actes d'agents de police ont mené à un décès ou à des blessures graves. L'incident en question a aussi eu lieu avant la mise en œuvre de la politique actuelle de la GRC relative aux enquêtes ou aux examens externes, qui énonce que, dans les cas où il n'y aucun organe provincial ou fédéral établi pour mener de telles enquêtes, la GRC demandera à un organisme d'application de la loi externe de mener une enquête que la GRC réaliserait habituellement dans les cas où survient une blessure grave ou le décès d'une personne mettant en cause un membre de la GRCNote de bas de page 41.

[217] Au moment de l'incident, la politique de la Division « E » de la GRC exigeait que tous les décès de personnes sous la garde de la GRC fassent l'objet d'une enquête par le Groupe des crimes graves. Cependant, en raison de la nouvelle politique qui entrera bientôt en vigueur, on a déployé des efforts pour obtenir une équipe d'enquête de l'extérieur de la GRC, mais ces efforts ont été vains. Comme il a été mentionné ci-dessus, ce sont des membres du Groupe des crimes graves de la Division « E » qui ont enquêté sur le décès de M. George.

[218] Conformément à la politique de la GRC, l'équipe d'enquête a suivi le modèle de la gestion des cas graves (GCG). Le modèle de la GCG est « une méthode de gestion des cas graves qui assure la reddition des comptes, l'établissement de buts et d'objectifs clairs, la planification, l'affectation des ressources et le contrôle du rythme, du déroulement et de l'orientation de l'enquêteNote de bas de page 42 ». La GCG est assurée par l'équipe de gestion des cas graves (EGCG), formée du « triangle de commandement », qui comprend le chef d'équipe, l'enquêteur principal et le coordonnateur des dossiers. Le chef d'équipe assume la responsabilité et le contrôle global de l'EGCG, de ses ressources (humaines et matérielles) et de son mandat. L'enquêteur principal surveille le déroulement de tout le processus d'enquête. Le coordonnateur des dossiers est responsable du contrôle, de la surveillance, de l'organisation et de la communication des documents du dossierNote de bas de page 43.

[219] Les rôles du triangle de commandement ont été assignés aux membres du Groupe des crimes graves de la Division « E ». Le sergent d'état-major Maurice Tremblay était le chef d'équipe, le sergent David Chauhan, l'enquêteur principal, et le caporal Terry Faulkner, le coordonnateur des dossiers. Ils étaient tous des membres formés et compétents ayant de l'expérience dans les enquêtes sur les crimes graves. L'inspecteur Thomas McCluskie du Service de police de Vancouver devait assurer la surveillance indépendante de l'enquête sur l'incident. En outre, un membre du Service de police de Calgary a mené un examen du recours à la force.

[220] Tous les membres de l'équipe d'enquête ont rempli un questionnaire d'impartialité créé par la GRC pour assurer le plus haut degré possible d'objectivité de la part des membres en cause dans l'affaire. La procédure prévoit la divulgation complète de toute relation passée ou présente que les enquêteurs peuvent entretenir ou avoir entretenue avec des membres en cause dans l'incident examiné. Tous les questionnaires sont passés en revue par le chef d'équipe afin de déterminer si un enquêteur devrait être exclu de l'équipe au motif qu'il pourrait y avoir une perception de conflit d'intérêts à son égard.

[221] Le 1er octobre 2009, le président de la Commission de l'époque a demandé que l'observateur indépendant de la CommissionNote de bas de page 44 soit mobilisé pour qu'il a) fasse une évaluation initiale quant à l'impartialité du Groupe des crimes graves affecté à l'enquête sur l'incident, et b) surveille les progrès afin de s'assurer que les problèmes liés à l'impartialité dans le cadre de l'enquête soient cernés et réglés. L'observateur de la Commission a mené une évaluation quant à l'impartialité de l'équipe d'enquête et a conclu qu'il n'y avait aucun problème touchant les questions d'impartialité.

[222] En plus des mesures prises pour lancer l'enquête initiale, la GRC a demandé à un agent de mener un examen indépendant de l'enquête, auquel on fait référence tout au long du présent rapport.

Conclusion : Le recours à la force mortelle par le GTIDN contre M. George a fait l'objet d'une enquête par des membres de la GRC, puisque l'incident est survenu avant l'établissement de la politique sur les enquêtes externes de la GRC et la création du bureau des enquêtes indépendantes de la Colombie-Britannique.

Conclusion : Des efforts raisonnables ont été déployés par la GRC pour veiller à ce que l'enquête criminelle sur le recours à la force mortelle par le GTIDN soit menée d'une manière impartiale, ce qui comprenait la surveillance par un inspecteur du Service de police de Vancouver.

Comptes rendus à l'intention des membres

[223] La politique du GTI prévoit que le chef d'équipe, de concert avec le chef des interventions, présente un compte rendu de mission au groupe et aux autres services de soutien participants, s'assurant que les discussions touchent à tous les aspects de l'opération, c'est-à-dire exposé de mission, déploiement, communications, tactiques et résultats. Si un membre du GTI est impliqué dans un incident de tir (où le membre tire sur une autre personne ou un objet ou est la cible de tirs), le chef d'équipe doit en informer immédiatement le psychologue en chef de la Direction générale de la GRC et veiller à ce que du counseling post-traumatique soit offert, en consultation avec les Services de santé divisionnairesNote de bas de page 45.

[224] Dans sa réponse à la plainte déposée par le président, la GRC a déclaré que le fait d'offrir rapidement du counseling après un incident critique constituait une priorité. Dans l'EAI, on a recommandé que la GRC entreprenne un examen de la politique pour qu'il y soit question de la prise en compte de la santé et du bien-être des membres immédiatement après un incident critique. La réponse de la GRC énonçait que la politique actuelle est suffisante et prévoit un compte rendu dans les 72 heures suivant un incident traumatisant sur le plan psychologique, ce qui comprend les fusillades.

[225] Cependant, de l'avis de la Commission, la réponse de la GRC n'aborde pas de façon adéquate deux préoccupations importantes : 

  1. La question soulevée dans le cadre de l'EAI selon laquelle trois des membres qui sont intervenus pendant l'incident avaient été impliqués dans une fusillade mortelle dans les cinq jours précédant cet appel et rien n'indiquait qu'une évaluation avait été menée avant qu'ils ne soient déployés à nouveau dans le cadre de l'incident. (La Commission souligne que, selon l'EAI, rien n'indique que cela a influé négativement sur les décisions qu'ils ont prises relativement à l'incident, ce à quoi la Commission souscrit.)
  2. Une indication, dans le cadre de l'EAI, selon laquelle [traduction] « les membres qui sont intervenus dans le cadre de l'incident critique s'entendent tous pour dire qu'il y a un besoin pressant d'améliorer la façon dont les membres sont traités à la suite d'une fusillade. Il faut établir un équilibre entre l'enquête et la santé et le bien-être de nos membres. »

[226] En ce qui concerne les comptes rendus, il est en outre mentionné ce qui suit dans l'EAI :

[traduction]
Le principe selon lequel il faut donner aux unités tactiques l'occasion de tenir un compte rendu immédiatement après un incident est une pratique de longue date. Cela vise à cerner les lacunes et les pratiques exemplaires le plus rapidement possible après l'événement, dans un environnement où il n'y a pas de menaces. La pratique du Groupe des crimes graves consiste à ne pas autoriser les témoins à partager leur version des faits, ce qui pourrait contaminer la version des autres. La politique de la GRC adoptée depuis l'incident en question devrait aborder la nécessité de fournir rapidement (dans les 10 jours) un compte rendu de l'incident, en laissant l'occasion aux membres de raconter leur version des faits.

[227] Dans l'EAI, on a recommandé qu'un compte rendu officiel de l'incident critique soit offert à tous les membres ayant participé à l'affaire, puisqu'il y a une [traduction] « perception selon laquelle “on peut parler, mais cela peut être utilisé contre nous” ». Bien que la GRC ait mentionné qu'un compte rendu sur l'incident critique a eu lieu une semaine après l'incident, en plus d'un compte rendu d'ordre psychologique un mois plus tard et d'un compte rendu opérationnel officiel à l'intention du groupe un an après l'incident, la Commission se préoccupe du fait que les questions soulevées dans le cadre de l'EAI n'ont pas été suffisamment abordées.

[228] L'EAI a identifié un membre en cause dans l'incident qui a exprimé sa frustration pendant l'enquête du coroner à l'égard de ce qu'il a perçu comme un manque de soutien de la part de la GRC à la suite de l'incident. Dans une déclaration aux enquêteurs, un autre membre a indiqué que le compte rendu initial était une perte de temps, puisque les membres ne pouvaient pas parler des détails de l'incident et que le compte rendu opérationnel tenu sept mois après l'incident était peu utile en raison du temps écoulé. La Commission reconnaît que des années ont passé depuis l'incident; toutefois, elle recommande que la GRC examine le processus relatif à la tenue de ces comptes rendus pour s'assurer qu'ils ont lieu rapidement et qu'ils sont menés de façon à répondre aux besoins des membres.

Conclusion : Les comptes rendus du GTIDN n'étaient pas exhaustifs et n'ont pas eu lieu en temps opportun.

Recommandation : Que la GRC examine le processus relatif à la tenue des comptes rendus du GTI à la suite d'un incident critique qui pourrait faire l'objet d'une enquête pour s'assurer qu'ils sont exhaustifs et menés en temps opportun.

Caractère adéquat des politiques, procédures et lignes directrices

[230] La GRC a déclaré dans sa réponse à la Commission que les politiques, procédures et lignes directrices de la GRC, établies à l'échelle nationale, à l'échelle de la Division « E » et à l'échelle du détachement, et s'appliquant à l'incident en cause étaient adéquates et sont continuellement passées en revue et évaluées. L'examen de la Commission a révélé qu'un grand nombre des politiques de la GRC avaient en fait été mises à jour depuis l'incident. La Commission n'a pas cerné de problèmes concernant les politiques, procédures et lignes directrices relatives aux événements ayant mené au décès par balle de M. George qui n'ont pas été abordés dans le cadre de révisions subséquentes.

Conclusion

[231] D'une façon tragique, dans le cadre des efforts de la police pour assurer la sécurité de la famille de M. George, celui-ci a perdu la vie le 30 septembre 2009. Des efforts incroyables ont été déployés par un grand nombre de membres de la GRC afin de régler l'affaire pacifiquement, compte tenu d'enjeux importants, y compris des questions évidentes liées à la santé mentale, à la culture, à la communication et aux ressources. Selon l'examen des circonstances mené par la Commission, les membres se sont généralement conduits de manière professionnelle et responsable, en conformité avec la loi et la formation qu'ils avaient suivie. Cependant, certains des enjeux n'ont pas été surmontés.

[232] Même si l'on croyait que la communication et la négociation étaient les outils qui auraient permis de régler la situation pacifiquement, M. George n'était pas disposé à participer au processus. Malgré l'approche calme, délibérée et modérée adoptée par les membres de la GRC, les actes de M. George ont malheureusement mené à l'affrontement qui a entraîné le recours à la force mortelle. La Commission espère que les recommandations énoncées dans le présent rapport aideront la GRC à apporter des améliorations à la façon dont elle traite de tels incidents.

[233] Conformément à l'alinéa 45.71(3)a) de la Loi sur la GRC, je dépose mon rapport intérimaire, après avoir mené un examen de la plainte.

Ian McPhail, c.r.
Président

Annexe A – Plainte déposée par le président : Décès par balle de M. Valeri George survenu le 30 septembre 2009 à Buick Creek, dans le secteur de Fort St. John (Colombie-Britannique)

6 octobre 2009

No de dossier : PC-2009-2863

En tant que président de la Commission des plaintes du public contre la GRC, je dépose une plainte au sujet de la conduite des membres non identifiés de la GRC qui étaient présents lors du décès par balle de M. Valeri George, survenu le 30 septembre 2009 à Buick Creek, dans le secteur de Fort St. John, en Colombie-Britannique.

Selon les renseignements dont on dispose, la GRC de Fort St. John a reçu un appel le 26 septembre 2009 à propos de M. George, qui aurait tiré sur les pneus d'un véhicule à bord duquel se trouvaient son épouse et ses enfants et aurait regagné son domicile après ne pas avoir réussi à leur parler. Le Groupe tactique d'intervention (GTI) du district Nord de la GRC a été mobilisé dans le secteur, puis déployé sur place le 30 septembre 2009. Cette journée-là, M. George a quitté son domicile à bord de son véhicule en roulant à toute vitesse. Les membres du GTI ont fait feu sur le véhicule, et M. George a été mortellement touché.

Je dépose ma plainte en étant tout à fait conscient que la GRC a nommé son Groupe des crimes graves pour qu'il enquête sur l'incident et que la GRC demandera un examen par un agent indépendant. Je n'ai aucunement l'intention de porter préjudice aux enquêtes de la GRC. Toutefois, je surveillerai de près le déroulement des enquêtes en cours afin que je puisse donner suite à la plainte en temps opportun une fois les enquêtes achevées.

Je suis convaincu qu'il existe des motifs raisonnables d'enquêter sur les circonstances entourant le décès par balle de M. George. Ainsi, en vertu du paragraphe 45.37(1) de la Loi sur la GRC, je dépose aujourd'hui une plainte au sujet de la conduite des membres de la GRC et de toute personne nommée ou employée en vertu de cette loi en cause dans le présent incident et au sujet de situations d'ordre général de même nature, plus précisément celles où le Groupe tactique d'intervention de la GRC est déployé, pour déterminer notamment :

  1. si les membres de la GRC ou toute autre personne nommée ou employée en vertu de la Loi sur la GRC en cause dans les événements survenus du 26 au 30 septembre 2009, soit du premier contact jusqu'au décès de M. George, ont agi conformément à la formation, aux politiques, aux procédures, aux lignes directrices et aux exigences législatives pertinentes en ce qui concerne le recours à la force;
  2. si les politiques, procédures et lignes directrices de la GRC, établies à l'échelle nationale, à l'échelle de la Division « E » et à l'échelle du détachement, et s'appliquant à l'incident en cause et aux situations où le Groupe tactique d'intervention de la GRC est déployé, sont adéquates.

Annexe B – Réponse de la GRC à la plainte déposée par le président

2 NOV 2016

Monsieur Ian McPhail, c.r.
Président
Commission civile d'examen et de traitement des
plaintes relatives à la GRC
C.P. 1722, succ. B
Ottawa (Ontario) K1P 0B3

Monsieur,

J'accuse réception du rapport intérimaire de la Commission sur la plainte déposée par le président concernant le décès par balle de M. Valeri George à Buick Creek, en Colombie-Britannique, dossier no PC-2009-2863.

J'ai examiné l'affaire en cause, y compris les conclusions et les recommandations présentées dans le rapport intérimaire de la Commission.

Je suis d'accord avec la conclusion no 1, selon laquelle les membres de la GRC avaient le devoir de faire enquête sur les actes de M. George qui avaient été signalés.

Je suis d'accord avec la conclusion no 2, selon laquelle les membres de la GRC ont pris des mesures raisonnables pour enquêter sur l'incident.

Je suis d'accord avec la conclusion no 3, selon laquelle les membres de la GRC ont pris des mesures appropriées pour assurer la sécurité des membres de la famille de M. George jusqu'à l'arrestation de ce dernier.

Je suis d'accord avec la conclusion no 4, selon laquelle les membres de la GRC avaient des motifs raisonnables de croire que M. George avait commis de multiples infractions aux termes du Code criminel.

Je suis d'accord avec la conclusion no 5, selon laquelle les membres de la GRC avaient des motifs d'arrêter M. George sans mandat en raison de l'incident avec sa famille.

Je suis d'accord avec la conclusion no 6, selon laquelle la décision des membres de la GRC de procéder à l'arrestation de M. George sans mandat découlait d'un exercice raisonnable du pouvoir discrétionnaire.

Je suis d'accord avec la conclusion no 7, selon laquelle il était raisonnable et nécessaire pour les membres de demander un mandat visant l'arrestation de M. George dans sa maison au cas où les négociations échoueraient.

Je suis d'accord avec la conclusion no 8, selon laquelle la demande de mandat contenait une description raisonnablement complète et exacte des éléments de preuve.

Je suis d'accord avec la conclusion no 9, selon laquelle les membres de la GRC ont fait des tentatives raisonnables pour communiquer avec M. George afin de négocier une reddition pacifique.

Je suis d'accord avec la conclusion no 10, selon laquelle les membres de la GRC ont pris des mesures raisonnables pour veiller à ce qu'ils puissent communiquer avec M. George dans une langue qu'il comprenait.

Je suis d'accord avec la conclusion no 11, selon laquelle la décision des membres de la GRC de demander l'aide de M. Jakob Remple père pour communiquer avec M. George après qu'il a refusé de parler avec les membres était raisonnable.

Je suis d'accord avec la conclusion no 12, selon laquelle l'inspecteur Patrick Egan a raisonnablement décidé que le fait de demander à Mme Irina George de communiquer avec son mari était inapproprié dans les circonstances.

Je suis d'accord avec la conclusion no 13, selon laquelle la décision prise le 29 septembre 2009, consistant à mettre sur pied et à déployer le GTIDN pour contribuer à l'arrestation de M. George, était raisonnable et conforme à la politique de la GRC.

Je suis d'accord avec la conclusion no 14, selon laquelle les membres du GTIDN ayant participé à l'intervention dans le cadre de l'incident étaient à jour par rapport à leur formation.

Je suis d'accord avec la conclusion no 15, selon laquelle la caporale Claudette Garcia n'avait pas suivi de cours de recyclage destiné aux négociateurs, comme l'exigent les directives de la GRC. Toutefois, je souhaite faire observer que bien que la caporale Garcia ait tenté de joindre M. George, elle n'est jamais entrée en communication avec lui. Je relève également que, comme l'avait observé la Commission dans son rapport intérimaire, la caporale Garcia « avait une expérience considérable en tant que négociatrice en situation de crise et qu'elle avait pris part à de nombreux séminaires et ateliers connexes, surtout concernant des questions liées à la santé mentale ». J'estime que cela atténue tout risque qui aurait pu être lié au fait que la caporale Garcia n'avait pas encore suivi le cours de recyclage destiné aux négociateurs. Je tiens aussi à préciser que depuis l'incident, la caporale Garcia a suivi le cours de recyclage.

J'appuie la recommandation no 1, à savoir que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que tous les membres assumant des rôles dans le cadre d'incidents critiques satisfassent aux exigences continues en matière de formation. J'estime toutefois que de telles mesures existent déjà.

En ce qui concerne les négociateurs en situation de crise plus particulièrement, le chapitre 3.2 du Manuel des opérations tactiques, intitulé « Sélection, formation et équipement », prévoit que le coordonnateur divisionnaire des négociateurs doit veiller à ce que toutes les exigences en matière de formation soient respectées, notamment que le cours de recyclage destiné aux négociateurs en situation de crise soit suivi tous les cinq ans. Ce cours de recyclage est fourni exclusivement par le Collège canadien de police sur une base limitée, et plusieurs corps policiers cherchent à y envoyer des participants. Ces facteurs, combinés aux pressions opérationnelles, peuvent faire en sorte qu'il soit difficile d'envoyer un négociateur en situation de crise assister au cours de recyclage à temps.

En ce qui concerne le Programme des incidents critiques en général, une politique est en place pour faire en sorte qu'il soit satisfait à toutes les exigences en matière de formation. À titre d'exemple, selon la politique, il incombe aux responsables des GTI de veiller à ce que les niveaux de compétence soient maintenus et à ce que des registres de formation soient tenus (chapitres 2.1 et 2.2 du Manuel des opérations tactiques).

Je suis d'accord avec la conclusion no 16, selon laquelle même si cela n'était pas exigé à l'époque, l'inspecteur Egan ne respectait pas la norme de cours actuelle pour les chefs des interventions.

J'appuie la recommandation no 2, à savoir que la GRC s'assure que tous les membres du GTIDN, les chefs des interventions et tout autre employé de soutien suivent, en temps opportun, une formation sur les nouvelles normes. Je ferai en sorte que cette recommandation soit communiquée à la Division. J'aimerais toutefois souligner que le surintendant Rod Booth, dans son rapport final à la Commission, a indiqué que tous les chefs des interventions du district Nord suivent maintenant une formation sur les nouvelles normes.

Je suis d'accord avec la conclusion no 17, selon laquelle la préposée au registre des communications relevant du chef des interventions n'avait pas suivi le cours lié à ce poste, mais cela n'était pas obligatoire à l'époque, et que la politique actuelle exige dorénavant qu'une telle formation soit suivie.

Je suis d'accord avec la conclusion no 18, selon laquelle le compte rendu du GTIDN préparé et fourni par les membres du détachement de la GRC de Fort St. John était raisonnablement complet et exact.

Je suis d'accord avec la conclusion no 19, selon laquelle la décision de l'inspecteur Egan de reporter le déploiement du GTIDN à la propriété des George jusqu'au matin du 30 septembre 2009 était raisonnable dans les circonstances.

Je suis d'accord avec la conclusion no 20, selon laquelle les plans opérationnels ont été préparés et signés par le chef d'équipe et le chef des interventions avant le déploiement du GTIDN à la propriété des George, conformément à la politique de la GRC.

Je suis d'accord avec la conclusion no 21, selon laquelle les plans opérationnels étaient raisonnablement complets et adéquats au moment de leur élaboration, selon les circonstances connues des membres.

Je suis d'accord avec la conclusion no 22, selon laquelle le gendarme Matthew Shaw a pris position près de la résidence des George et a transmis par radio ses observations de façon continue et détaillée.

Je suis d'accord avec la conclusion no 23, selon laquelle l'ENSC n'était pas complète, ce qui était toutefois raisonnable dans les circonstances.

Je suis d'accord avec la conclusion no 24, selon laquelle les membres de l'ENSC ont déployé des efforts pour trouver des personnes qui pouvaient communiquer avec M. George en leur nom en raison d'un obstacle linguistique.

Je ne suis pas d'accord avec la conclusion no 25, selon laquelle à la lumière du dossier, il n'est pas clair si les membres de l'ENSC ont évalué pleinement les limites et les capacités du tiers qu'ils comptaient utiliser pour communiquer avec M. George ou si d'autres options existaient.

En ce qui concerne l'évaluation des limites et des capacités de M. Jacob Dick, le tiers que les membres de l'ENSC entendaient utiliser comme traducteur, j'estime que les renseignements au dossier montrent qu'une évaluation adéquate a été menée par les membres de l'ENSC. Dans une déclaration post facto, M. Dick a dit qu'il était préoccupé par la différence d'âge entre M. George et lui et par les antécédents culturels de la communauté russo-allemande, à l'origine d'une peur de la police [déclaration de Jacob Dick, page 4]. Rien dans le dossier n'indique qu'à ce moment-là, M. Dick ait communiqué l'information relative à la différence d'âge à l'ENSC. En ce qui concerne la peur de la police, il ressort assez clairement du dossier que la majorité des membres concernés, sinon tous les membres, étaient au courant de cette peur culturelle de la police. En ce qui concerne les membres de l'ENSC en particulier, leurs notes indiquent qu'ils avaient été mis au courant de cette question culturelle. J'estime qu'il est manifeste que la décision de recourir aux services de M. Dick n'a pas été prise à la légère. En fait, les membres de l'ENSC se sont assis avec M. Dick et ont longuement discuté de l'affaire, du processus et de leur rôle pour en arriver à la conclusion que M. Dick était un atout [notes du caporal Mike Stevenson; déclaration de la caporale Garcia, pages 2-3; déclaration du caporal Stevenson, pages 2, 11-12]. Par conséquent, je conclus que le dossier renferme suffisamment d'éléments qui corroborent qu'une certaine forme de discussion et d'évaluation a eu lieu concernant le recours aux services de M. Dick et qu'aucune préoccupation n'a été soulevée quant à ses capacités ou limites.

Dans une déclaration post facto, M. Waldemar Schaefer fait mention d'un lien vague et éloigné entre M. Dick et une autre personne qui aurait apparemment eu un désaccord avec M. George, ce qui, par conséquent, aurait fait en sorte que le choix de M. Dick comme interprète ne fût pas approprié. M. Schaefer a déclaré qu'il avait communiqué ces préoccupations dans sa déclaration à la gendarme Jessica Veysey, alors que M. George s'était barricadé.

La déclaration fournie par M. Schaefer à la gendarme Veysey ne renferme pas de tels renseignements. Ainsi, j'accorde peu de poids, voire aucun, à l'affirmation de M. Schaefer.

En ce qui a trait à la disponibilité d'autres options, les déclarations au dossier montrent qu'un membre du détachement de Fort St. John a informé la caporale Garcia qu'un traducteur potentiel, M. Vitaly Fendel, avait été trouvé, mais M. Fendel a fini par se désister [déclaration du caporal Milo MacDonald; déclaration de la caporale Garcia, page 2]. La chose est également confirmée dans les notes manuscrites prises par les membres de l'ENSC [registre du négociateur, pages 2 et 3]. De plus, les notes des membres de l'ENSC comportent des entrées telles que [traduction] « MEL prêt à aider la police, lui parlerons », lorsqu'il est question de M. Mel Woolfolk, un voisin de M. George, ainsi que [traduction] « Dirk : membre d'origine russe à Castlegar, C.-B. », faisant référence au gendarme Dirk Finkensiep, un membre dont on a utilisé les services pour communiquer avec M. George avant que l'ENSC et le GTI n'entrent en jeu [notes des membres de l'ENSC, page 6]. Les déclarations des membres de l'ENSC indiquent aussi qu'ils avaient reçu des renseignements selon lesquels M. George ne s'entendrait pas bien avec une femme, et que cet aspect a été pris en compte [déclaration de la caporale Garcia, page 2; déclaration du caporal Stevenson, pages 5 et 6]. Par conséquent, j'estime que tous les renseignements susmentionnés montrent que les membres de l'ENSC ont de fait consigné la disponibilité d'autres traducteurs.

J'appuie la recommandation no 3, à savoir que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que les membres de l'ENSC prennent des notes détaillées sur l'évaluation et la participation de tout tiers dans le cadre du processus de négociation. J'estime toutefois que de telles mesures sont déjà en place. Bien que la politique n'exige pas précisément la prise de « notes détaillées » sur l'évaluation et la participation de tout tiers, une politique existe qui dispose que l'utilisation d'un tiers doit être approuvée par le chef des interventions [Manuel des opérations tactiques, chapitre 3.3, Opérations de négociation en cas de situation de crise, section 1.5]. À mon avis, il est raisonnable de croire que ce processus d'approbation, et ce qui a mené à une telle approbation, seraient détaillés par les membres et la préposée au registre des communications en cause. Dans l'affaire qui nous occupe, j'estime que les membres de l'ENSC ont pris des notes concernant le recours à un tiers et qu'il est raisonnable de conclure qu'ils ont mené une évaluation et tenu compte de la candidature d'autres personnes.

Je ne suis pas d'accord avec la conclusion no 26, selon laquelle à la lumière du dossier, il n'est pas clair si les membres de l'ENSC ont envisagé de recourir au gendarme Finkensiep pour communiquer avec M. George dans le cadre du déploiement du GTIDN.

Premièrement, comme il a déjà été mentionné dans le cadre de la conclusion no 25, les notes des membres de l'ENSC contiennent une entrée sur le gendarme Finkensiep [notes des membres de l'ENSC, page 6]. Il appert donc qu'ils ont envisagé de demander l'aide du gendarme Finkensiep. Deuxièmement, le gendarme Finkensiep a parlé à M. George au téléphone avant que l'ENSC et le GTI n'entrent en jeu. La conversation téléphonique a été enregistrée, traduite et transcrite, et elle montre que le gendarme Finkensiep s'est présenté comme travaillant pour la GRC et que M. George a dit à deux reprises qu'il ne voulait pas parler à la police. M. George a fini par couper la communication avec le gendarme Finkensiep. Il semble donc que M. George ne voulait pas parler au gendarme Finkensiep en particulier ou avec la police en général. Troisièmement, le dossier renferme des renseignements sur la peur culturelle de la police dans la communauté russo-allemande, à laquelle appartenait M. George. Il ressort de déclarations que les membres de l'ENSC avaient été mis au courant de cette peur, et les notes des membres de l'ENSC contiennent des entrées précises à ce sujet.

Par conséquent, j'estime que les renseignements au dossier montrent que les membres de l'ENSC ont envisagé d'avoir recours à l'aide du gendarme Finkensiep. De toute façon, à la lumière des renseignements sur la peur culturelle de la police, il était tout à fait raisonnable que les membres de l'ENSC ne recourent pas aux services du gendarme Finkensiep, mais qu'ils se tournent plutôt vers une connaissance de M. George.

J'appuie la recommandation no 4, à savoir que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que tous les membres participant à des déploiements du GTI envisagent de recourir à des membres aux services généraux lorsqu'une compétence ou une expertise particulière (comme la capacité de parler une langue étrangère) est requise. J'estime toutefois que de telles mesures sont déjà en place.

Si l'on se reporte précisément à l'ENSC dans la présente affaire, j'estime que comme selon mes conclusions relatives à la conclusion no 26, les membres de l'ENSC ont effectivement envisagé de recourir à un membre aux services généraux (le gendarme Finkensiep) relativement à une compétence particulière, mais qu'un facteur situationnel a fait en sorte que cette option ne soit pas recommandée. De façon plus générale, bien que rien dans les politiques de la GRC ne traite précisément de l'utilisation du personnel ne faisant pas partie du GTI lors du déploiement du GTI, on s'attend raisonnablement à ce que toute ressource utile ne faisant pas partie du GTI soit prise en considération, dans la mesure où la sécurité est maintenue. Citons pour illustrer le guide qui a été élaboré et communiqué au personnel pour donner suite à la recommandation 7.12 découlant du rapport MacNeil, à savoir « que le groupe tactique d'intervention (GTI) élabore un guide de référence rapide à l'intention des membres non formés par le GTI qui peuvent être appelés en renfort (et affectés au réglage du tir par avion et autres postes d'observation) ». Ce guide vise à aider les membres du personnel ne faisant pas partie du GTI à comprendre les protocoles radio et le vocabulaire spécialisé du GTI pour les situations où ces membres du personnel seraient appelés à aider les équipes du GTI au cours d'un incident. Il est donc clairement reconnu que les membres du personnel ne faisant pas partie du GTI peuvent être appelés en renfort dans le cadre des déploiements du GTI.

Je suis d'accord avec la conclusion no 27, selon laquelle il était raisonnable pour les membres de confronter M. George quand il s'est approché d'eux à pied au bout de l'allée en possession d'une carabine, surtout compte tenu du fait que les membres étaient visibles.

Je suis d'accord avec la conclusion no 28, selon laquelle les membres ont donné leurs ordres à M. George dans une langue qu'ils savaient qu'il comprenait.

Je suis d'accord avec la conclusion no 29, selon laquelle la décision de déplacer la barricade de la police près de la barrière et de la fortifier était raisonnable.

Je suis d'accord avec la conclusion no 30, selon laquelle la décision de ne pas déplacer le hérisson plus près de la propriété était raisonnable compte tenu du risque pour les membres.

Je ne suis pas d'accord avec la conclusion no 31, selon laquelle les feux d'urgence auraient dû être utilisés à la barricade de la police en tant que moyen supplémentaire de signaler à M. George d'arrêter.

Il m'apparaît évident que M. George savait que des policiers se tenaient à la barricade et j'estime que les trois véhicules de police à la barrière de l'allée de M. George et garés dans l'allée indiquaient clairement à M. George qu'il devait s'arrêter. J'estime que le fait de laisser les feux d'urgence allumés sur les véhicules de police pendant ce temps aurait probablement épuisé rapidement les batteries des véhicules, rendant les véhicules inutilisables. En outre, j'estime que si l'on avait laissé le moteur des véhicules de police tourner pour pouvoir faire fonctionner les feux d'urgence, les réservoirs d'essence des véhicules se seraient épuisés. Le fait de devoir remplir les réservoirs des véhicules de police aurait posé un problème, puisqu'il aurait fallu conduire les véhicules hors de l'allée, ce qui aurait affaibli la barricade, ou qu'une personne aurait dû remplir le réservoir avec un bidon d'essence portatif, ce qui aurait rendu l'opération non sécuritaire pour cette personne alors que M. George se déplaçait sur sa propriété, muni d'une carabine. Enfin, j'estime que le contrôle du périmètre aurait pu être un long processus, étant donné que la priorité était accordée à la négociation et que M. George ne consentait pas à y participer. Par conséquent, le fait de laisser les feux d'urgence des véhicules de police allumés pendant tout ce temps n'aurait pas procuré d'avantage sur le plan tactique et aurait pu entraîner des situations dangereuses.

Je ne suis pas d'accord avec la conclusion no 32, selon laquelle on aurait dû envisager de bloquer les routes entourant la propriété des George au cas où M. George aurait réussi à franchir la barricade de la police au bout de l'allée.

Une seule route menait à la propriété des George, et le reste de la propriété était entouré d'épais buissons. Les renseignements au dossier indiquent qu'à un certain moment pendant l'opération du GTI, des membres aux services généraux avaient bel et bien bloqué l'accès à la propriété de M. George [déclaration du gendarme Nathan Poyzer; notes et déclaration de la gendarme Jackelynn Passarell; notes et déclaration du gendarme Camil Coutney; déclaration du caporal MacDonald].

Je n'appuie pas la recommandation no 5, à savoir que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que suffisamment de ressources soient accessibles pour bloquer les routes publiques lorsqu'il y a un risque pour le public dans le cadre d'un incident critique.

Dans ce cas particulier, comme je l'ai mentionné à l'égard de la conclusion no 32, j'estime que les renseignements au dossier montrent que les membres aux services généraux avaient bel et bien bloqué l'accès à la propriété de M. George. De façon plus générale, j'estime que les membres de la GRC font preuve de diligence en faisant de la protection du public une grande priorité pendant des incidents critiques. Bien qu'aucune politique n'en fasse état précisément, les obligations de common law qui incombent aux policiers incluent le maintien de la paix et la protection des personnes et des biens, et je crois que les membres de la GRC s'acquittent de ces obligations avec diligence.

Je suis d'accord avec la conclusion no 33, selon laquelle les caporaux Ryan Arnold et Richard Brown ont tenu adéquatement compte de tous les risques liés au maintien de la position du caporal Arnold près de la barrière, y compris le risque de blessure ou de décès qui pouvait justifier le recours à une force mortelle contre M. George, et ont conclu raisonnablement qu'il était nécessaire de conserver l'avantage tactique.

Je suis d'accord avec la conclusion no 34, selon laquelle le caporal Brown aurait dû informer l'inspecteur Egan de sa discussion avec le caporal Arnold au sujet des risques liés à sa position et de leur décision de maintenir la position.

Toutefois, comme il a été conclu dans l'examen par un agent indépendant, la décision prise par les caporaux Brown et Arnold était valable et justifiée, et le fait qu'elle n'ait pas été communiquée au chef des interventions signifie simplement que l'inspecteur Egan n'a pas été mis au courant de la décision, et ne suppose pas qu'une faute quelconque a été commise. Je fais observer que la position finale de tous les membres du GTI avait été communiquée à l'inspecteur Egan par message radio au répartiteur [transcription des communications radio, page 38].

J'appuie de façon générale la recommandation no 6, à savoir que la GRC passe en revue le présent rapport avec le caporal Brown pour s'assurer qu'il est conscient de la nécessité de communiquer les décisions tactiques et les risques courus par les membres du GTI au chef des interventions, lorsque le temps le permet.

Je demanderai qu'une copie du rapport intérimaire de la Commission et une copie de ma réponse soient fournies au caporal Brown pour qu'il puisse les examiner.

Je suis d'accord avec la conclusion no 35, selon laquelle le caporal Arnold craignait raisonnablement d'être blessé grièvement ou tué lorsqu'il a fait feu sur M. George.

Je suis d'accord avec la conclusion no 36, selon laquelle il était raisonnable pour le caporal Arnold de faire feu sur M. George dans son véhicule, car aucune autre méthode d'intervention n'était appropriée.

Je suis d'accord avec la conclusion no 37, selon laquelle le recours à une force mortelle par le caporal Brown était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Je suis d'accord avec la conclusion no 38, selon laquelle le recours à une force mortelle par le gendarme Colin Warwick était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Je suis d'accord avec la conclusion no 39, selon laquelle le recours à une force mortelle par le gendarme Martin Degen était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Je suis d'accord avec la conclusion no 40, selon laquelle le recours à une force mortelle par le gendarme Brian Merriman était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Je suis d'accord avec la conclusion no 41, selon laquelle il était raisonnable pour le gendarme Colin Atkinson de ne pas recourir à la force, car, de sa position, il a vu M. George seulement lorsque celui-ci était au sol et ne représentait plus une menace pour les membres.

Je suis d'accord avec la conclusion no 42, selon laquelle des options de recours à la force non mortelle et d'autres options tactiques ont été raisonnablement envisagées, y compris le fait de rendre inutilisable le véhicule de M. George à sa résidence, d'obtenir des ressources du GTI supplémentaires, d'utiliser le chien des Services cynophiles pour appréhender M. George près de la résidence et de recourir à d'autres moyens de communication.

Je suis d'accord avec la conclusion no 43, selon laquelle des ressources du GTI supplémentaires auraient dû être déterminées et demandées plus tôt au cours des étapes de la planification.

Étant donné le plan de départ de « contrôle du périmètre et de négociation », qui suppose en soi du temps, et étant donné le caractère éloigné du lieu, l'aide d'un autre GTI aurait dû être envisagée dès le début.

Je suis d'accord avec la conclusion no 44, selon laquelle des ressources supplémentaires auraient pu permettre d'assurer un meilleur contrôle du périmètre.

De manière générale, il m'apparaît évident que des ressources plus nombreuses renforcent la sécurité du périmètre. Dans ce cas en particulier, j'estime que le chef du GTI avait demandé l'aide d'un hélicoptère de la Gendarmerie pour sécuriser le périmètre ainsi que le déploiement d'un deuxième GTI. Aucune suite n'a toutefois été donnée à ces deux demandes puisque les événements ont connu une fin tragique avant. Qui plus est, j'estime que la sécurité du périmètre peut être assurée sans qu'il soit nécessaire de déployer plusieurs membres. La sécurité du périmètre peut être assurée par deux membres bien placés seulement. Dans cette affaire, les membres sur les lieux avaient remarqué que la propriété était entourée d'épais buissons, ce qui aurait compliqué la progression de M. George s'il avait choisi de s'échapper par là du périmètre de sécurité. Aussi, le caporal Arnold observait les gestes de M. George à son insu à partir d'un emplacement caché près de la maison et transmettait l'information au GTI. Si M. George avait tenté de se soustraire à la barricade, le caporal Arnold aurait été en position d'intervenir ou de suivre M. George.

J'appuie la recommandation no 7, à savoir que la GRC établisse dans le district Nord une ou plusieurs équipes responsables du contrôle du périmètre, si une telle équipe n'est pas déjà en place.

Depuis, des équipes responsables du contrôle du périmètre ont été mises sur pied à Terrace et à Dawson Creek, dans le district Nord.

Je suis d'accord avec la conclusion no 45, selon laquelle des dispositions ont été prises pour la fourniture de soins médicaux d'urgence pendant l'opération du GTIDN.

Je suis d'accord avec la conclusion no 46, selon laquelle tous les efforts raisonnables ont été déployés par les membres du GTIDN pour fournir des soins médicaux immédiats et nécessaires à M. George après la fusillade.

Je suis d'accord avec la conclusion no 47, selon laquelle le recours à la force mortelle par le GTIDN contre M. George a fait l'objet d'une enquête par des membres de la GRC, puisque l'incident est survenu avant l'établissement de la politique sur les enquêtes externes de la GRC et la création du bureau des enquêtes indépendantes de la Colombie-Britannique.

Je suis d'accord avec la conclusion no 48, selon laquelle des efforts raisonnables ont été déployés par la GRC pour veiller à ce que l'enquête criminelle sur le recours à la force mortelle par le GTIDN soit menée d'une manière impartiale, ce qui comprenait la surveillance par un inspecteur du Service de police de Vancouver.

Je suis d'accord avec la conclusion no 49, selon laquelle les comptes rendus du GTIDN n'étaient pas exhaustifs et n'ont pas eu lieu en temps opportun. Je crois toutefois que certains facteurs ayant contribué aux délais peuvent se justifier.

Selon la politique de la GRC, lorsqu'un tir met en cause un membre, un compte rendu psychologique doit obligatoirement être fait dans les 72 heures suivant l'incident [Manuel d'administration, annexe 11-19-5, par l'intermédiaire du Manuel des opérations tactiques 2.3.2.1.4 et du Manuel des services de santé III.1.P.1.c)]. Dans l'affaire qui nous occupe, j'estime qu'il n'y a pas eu de compte rendu psychologique dans les 72 heures réglementaires.

La politique de la GRC prévoit que le chef du GTI tient un compte rendu opérationnel exhaustif, mais elle ne précise pas de délai pour ce faire [Manuel des opérations tactiques 2.3.2]. Dans l'affaire qui nous occupe, il me semble que le compte rendu sur l'incident critique mettant en cause l'ENSC a eu lieu relativement peu de temps après l'incident (une semaine). Toutefois, le compte rendu opérationnel exhaustif n'a eu lieu qu'un an après l'incident. La politique ne prévoyant pas d'échéance à cet égard, il importe de garder présent à l'esprit le fait que chaque situation est différente et qu'un délai jugé raisonnable pour la tenue d'un tel compte rendu devra être évalué individuellement. Dans cette affaire, une vaste enquête criminelle était en cours : les membres de l'ENSC avaient le devoir de rendre compte de leurs gestes, mais en même temps, cette nécessité doit être mise en balance avec les droits garantis par la Charte et le fait que toute discussion approfondie au sujet de l'incident entre les membres de l'équipe aurait été perçue comme de la collusion. Il aura fallu presque cinq mois à tous les membres de l'ENSC pour qu'ils présentent leur compte rendu des événements à l'équipe responsable de l'enquête. Celle-ci a envoyé des questions de suivi aux membres de l'ENSC et il a fallu un an aux membres de l'ENSC pour présenter leurs réponses aux questions de suivi. Cette situation montre que certains délais relatifs à la tenue du compte rendu exhaustif trouvent leur origine dans les délais auxquels font face les membres de l'ENSC quand il s'agit de présenter leur propre compte rendu des événements. En outre, il y a un retard apparent dans la tenue du compte rendu complet du chef du GTIDN après la présentation de la version des faits initiale des membres.

Je n'appuie pas la recommandation no 8, à savoir que la GRC examine le processus relatif à la tenue des comptes rendus du GTI à la suite d'un incident critique qui pourrait faire l'objet d'une enquête pour s'assurer qu'ils sont exhaustifs et menés en temps opportun.

La politique actuelle m'apparaît complète en ce qui concerne les comptes rendus. En dépit du fait que seul le compte rendu d'ordre psychologique est assorti d'échéances strictes, on n'a pas cerné le besoin d'établir d'échéances pour le compte rendu d'ordre opérationnel, puisque chaque situation est différente. J'estime que le compte rendu psychologique est peut-être le plus important et urgent. Comme il est expliqué relativement à la conclusion no 49, la politique précise clairement que le compte rendu psychologique doit être fait dans les 72 heures suivant une fusillade impliquant un membre. En ce qui concerne le compte rendu opérationnel exhaustif, la politique est également claire et précise qu'un tel compte rendu doit avoir lieu. J'estime qu'il est raisonnable que la politique n'inclue pas d'échéance précise étant donné que, comme il a été expliqué dans le cadre de la conclusion no 49, plusieurs facteurs situationnels doivent être pesés avant que le compte rendu ne puisse avoir lieu.

J'attendrai avec impatience de recevoir votre rapport final sur l'affaire en cause.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées.

Bob Paulson
Commissaire

Annexe C – Résumé des conclusions et des recommandations

Conclusion : Les membres de la GRC avaient le devoir de faire enquête sur les actes de M. George qui avaient été signalés.

Conclusion : Les membres de la GRC ont pris des mesures raisonnables pour enquêter sur l'incident.

Conclusion : Les membres de la GRC ont pris des mesures appropriées pour assurer la sécurité des membres de la famille de M. George jusqu'à l'arrestation de ce dernier.

Conclusion : Les membres de la GRC avaient des motifs raisonnables de croire que M. George avait commis de multiples infractions aux termes du Code criminel.

Conclusion : Les membres de la GRC avaient des motifs d'arrêter M. George sans mandat en raison de l'incident avec sa famille.

Conclusion : La décision des membres de la GRC de procéder à l'arrestation de M. George sans mandat découlait d'un exercice raisonnable du pouvoir discrétionnaire.

Conclusion : Il était raisonnable et nécessaire pour les membres de demander un mandat visant l'arrestation de M. George dans sa maison au cas où les négociations échoueraient.

Conclusion : La demande de mandat contenait une description raisonnablement complète et exacte des éléments de preuve.

Conclusion : Les membres de la GRC ont fait des tentatives raisonnables pour communiquer avec M. George afin de négocier une reddition pacifique.

Conclusion : Les membres de la GRC ont pris des mesures raisonnables pour veiller à ce qu'ils puissent communiquer avec M. George dans une langue qu'il comprenait.

Conclusion : La décision des membres de la GRC de demander l'aide de M. Remple père pour communiquer avec M. George après qu'il a refusé de parler avec les membres était raisonnable.

Conclusion : L'inspecteur Egan a raisonnablement décidé que le fait de demander à Mme George de communiquer avec son mari était inapproprié dans les circonstances.

Conclusion : La décision prise le 29 septembre 2009, consistant à mettre sur pied et à déployer le GTIDN pour contribuer à l'arrestation de M. George, était raisonnable et conforme à la politique de la GRC.

Conclusion : Les membres du GTIDN ayant participé à l'intervention dans le cadre de l'incident étaient à jour par rapport à leur formation.

Conclusion : La caporale Garcia n'avait pas suivi de cours de recyclage destiné aux négociateurs, comme l'exigent les directives de la GRC.

Recommandation : Que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que tous les membres assumant des rôles dans le cadre d'incidents critiques satisfassent aux exigences continues en matière de formation.

Conclusion : Même si cela n'était pas exigé à l'époque, l'inspecteur Egan ne respectait pas la norme de cours actuelle pour les chefs des interventions.

Recommandation : Que la GRC s'assure que tous les membres du GTIDN, les chefs des interventions et tout autre employé de soutien suivent, en temps opportun, une formation sur les nouvelles normes.

Conclusion : La préposée au registre des communications relevant du chef des interventions n'avait pas suivi le cours lié à ce poste, mais cela n'était pas obligatoire à l'époque. La politique actuelle exige dorénavant qu'une telle formation soit suivie.

Conclusion : Le compte rendu du GTIDN préparé et fourni par les membres du détachement de la GRC de Fort St. John était raisonnablement complet et exact.

Conclusion : La décision de l'inspecteur Egan de reporter le déploiement du GTIDN à la propriété des George jusqu'au matin du 30 septembre 2009 était raisonnable dans les circonstances.

Conclusion : Les plans opérationnels ont été préparés et signés par le chef d'équipe et le chef des interventions avant le déploiement du GTIDN à la propriété des George, conformément à la politique de la GRC.

Conclusion : Les plans opérationnels étaient raisonnablement complets et adéquats au moment de leur élaboration, selon les circonstances connues des membres.

Conclusion : Le gendarme Shaw a pris position près de la résidence des George et a transmis par radio ses observations de façon continue et détaillée.

Conclusion : L'ENSC n'était pas complète, ce qui était toutefois raisonnable dans les circonstances.

Conclusion : Les membres de l'ENSC ont déployé des efforts pour trouver des personnes qui pouvaient communiquer avec M. George en leur nom en raison d'un obstacle linguistique.

Conclusion : À la lumière du dossier, il n'est pas clair si les membres de l'ENSC ont évalué pleinement les limites et les capacités du tiers qu'ils comptaient utiliser pour communiquer avec M. George ou si d'autres options existaient.

Recommandation : Que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que les membres de l'ENSC prennent des notes détaillées sur l'évaluation et la participation de tout tiers dans le cadre du processus de négociation.

Conclusion : À la lumière du dossier, il n'est pas clair si les membres de l'ENSC ont envisagé de recourir au gendarme Finkensiep pour communiquer avec M. George dans le cadre du déploiement du GTIDN.

Recommandation : Que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que tous les membres participant à des déploiements du GTI envisagent de recourir à des membres aux services généraux lorsqu'une compétence ou une expertise particulière (comme la capacité de parler une langue étrangère) est requise.

Conclusion : Il était raisonnable pour les membres de confronter M. George quand il s'est approché d'eux à pied au bout de l'allée en possession d'une carabine, surtout compte tenu du fait que les membres étaient visibles.

Conclusion : Les membres ont donné leurs ordres à M. George dans une langue qu'ils savaient qu'il comprenait.

Conclusion : La décision de déplacer la barricade de la police près de la barrière et de la fortifier était raisonnable.

Conclusion : La décision de ne pas déplacer le hérisson plus près de la propriété était raisonnable compte tenu du risque pour les membres.

Conclusion : Les feux d'urgence auraient dû être utilisés à la barricade de la police en tant que moyen supplémentaire de signaler à M. George d'arrêter.

Conclusion : On aurait dû envisager de bloquer les routes entourant la propriété des George au cas où M. George aurait réussi à franchir la barricade de la police au bout de l'allée.

Recommandation : Que la GRC prenne des mesures pour veiller à ce que suffisamment de ressources soient accessibles pour bloquer les routes publiques lorsqu'il y a un risque pour le public dans le cadre d'un incident critique.

Conclusion : Les caporaux Arnold et Brown ont tenu adéquatement compte de tous les risques liés au maintien de la position du caporal Arnold près de la barrière, y compris le risque de blessure ou de décès qui pouvait justifier le recours à une force mortelle contre M. George, et ont conclu raisonnablement qu'il était nécessaire de conserver l'avantage tactique.

Conclusion : Le caporal Brown aurait dû informer l'inspecteur Egan de sa discussion avec le caporal Arnold au sujet des risques liés à sa position et de leur décision de maintenir la position.

Recommandation : Que la GRC passe en revue le présent rapport avec le caporal Brown pour s'assurer qu'il est conscient de la nécessité de communiquer les décisions tactiques et les risques courus par les membres du GTI au chef des interventions, lorsque le temps le permet.

Conclusion : Le caporal Arnold craignait raisonnablement d'être blessé grièvement ou tué lorsqu'il a fait feu sur M. George.

Conclusion : Il était raisonnable pour le caporal Arnold de faire feu sur M. George dans son véhicule, car aucune autre méthode d'intervention n'était appropriée.

Conclusion : Le recours à une force mortelle par le caporal Brown était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Conclusion : Le recours à une force mortelle par le gendarme Warwick était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Conclusion : Le recours à une force mortelle par le gendarme Degen était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Conclusion : Le recours à une force mortelle par le gendarme Merriman était raisonnable, proportionnel à la menace que représentait M. George et conforme à la loi et à la formation et aux politiques de la GRC.

Conclusion : Il était raisonnable pour le gendarme Atkinson de ne pas recourir à la force, car, de sa position, il a vu M. George seulement lorsque celui-ci était au sol et ne représentait plus une menace pour les membres.

Conclusion : Des options de recours à la force non mortelle et d'autres options tactiques ont été raisonnablement envisagées, y compris le fait de rendre inutilisable le véhicule de M. George à sa résidence, d'obtenir des ressources du GTI supplémentaires, d'utiliser le chien des Services cynophiles pour appréhender M. George près de la résidence et de recourir à d'autres moyens de communication.

Conclusion : Des ressources du GTI supplémentaires auraient dû être déterminées et demandées plus tôt au cours des étapes de la planification.

Conclusion : Des ressources supplémentaires auraient pu permettre d'assurer un meilleur contrôle du périmètre.

Recommandation : Que la GRC établisse dans le district Nord une ou plusieurs équipes responsables du contrôle du périmètre, si une telle équipe n'est pas déjà en place.

Conclusion : Des dispositions ont été prises pour la fourniture de soins médicaux d'urgence pendant l'opération du GTIDN.

Conclusion : Tous les efforts raisonnables ont été déployés par les membres du GTIDN pour fournir des soins médicaux immédiats et nécessaires à M. George après la fusillade.

Conclusion : Le recours à la force mortelle par le GTIDN contre M. George a fait l'objet d'une enquête par des membres de la GRC, puisque l'incident est survenu avant l'établissement de la politique sur les enquêtes externes de la GRC et la création du bureau des enquêtes indépendantes de la Colombie-Britannique.

Conclusion : Des efforts raisonnables ont été déployés par la GRC pour veiller à ce que l'enquête criminelle sur le recours à la force mortelle par le GTIDN soit menée d'une manière impartiale, ce qui comprenait la surveillance par un inspecteur du Service de police de Vancouver.

Conclusion : Les comptes rendus du GTIDN n'étaient pas exhaustifs et n'ont pas eu lieu en temps opportun.

Recommandation : Que la GRC examine le processus relatif à la tenue des comptes rendus du GTI à la suite d'un incident critique qui pourrait faire l'objet d'une enquête pour s'assurer qu'ils sont exhaustifs et menés en temps opportun.

Annexe D – Liste des principaux membres de la GRC en cause dans l'incident

Personne Rôle
Inspecteur Patrick Egan Chef des interventions
Caporal Richard Brown Chef d'équipe du GTIDN
Caporal Ryan Arnold Commandant en second du GTIDN
Gendarme Colin Warwick Membre du GTIDN et des Services cynophiles
Gendarme Matthew Shaw Membre du GTIDN
Gendarme Martin Degen Membre du GTIDN
Gendarme Brian Merriman Membre du GTIDN
Gendarme Colin Atkinson Membre du GTIDN
Gendarme Nathan Poyzer Membre du GTIDN
Sergent Mike Stevenson Négociateur, Équipe de négociation en situation de crise
Caporale Claudette Garcia Négociatrice, Équipe de négociation en situation de crise
Membre civil Shirley Hogan Préposée au registre des communications
Gendarme Krystal Moren A répondu au signalement initial concernant M. George.
Gendarme Josh Martyn A répondu au signalement initial concernant M. George.
Caporale Nina Johnson Superviseure des membres aux services généraux, GRC de Fort St. John
Sergent d'état-major Ward Johnson Sous-officier des Opérations, GRC de Fort St. John
Gendarme Henderson A aidé à l'enquête initiale sur l'incident.
Gendarme Davidson A interviewé les membres de la famille George à Dawson Creek.
Gendarme Kamel Coutney Services généraux, GRC de Fort St. John. A aidé à l'enquête; a recueilli des renseignements pour les comptes rendus du GTIDN.
Gendarme Clinton Corbeil Services généraux, GRC de Fort St. John. A aidé à l'enquête.
Caporal Steve Perret Sous-officier responsable, GRC de Fort St. John, Section des enquêtes générales. A aidé à l'enquête.
Gendarme Jessica Veysey GRC de Fort St. John, Section des enquêtes générales, Crimes graves. A présenté la demande pour le mandat d'arrestation.
Caporal Milo MacDonald Superviseur de la Section antidrogue de Fort St. John et commandant en civil par intérim. A fourni de l'aide avant et pendant le déploiement du GTIDN.
Gendarme Dirk Finkensiep GRC de Castlegar. Membre germanophone. A communiqué avec Mme George et M. George par téléphone.
Inspecteur Ray Fast Bureau des opérations, district Nord de la GRC. A pris la décision, en consultation avec l'inspecteur Egan, de mettre sur pied le GTI.

Annexe E – Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents de la GRC

Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents
Version textuelle

Annexe F – Catégories de comportement du sujet

Le comportement du sujet est l'élément central du processus d'évaluation. Le MIGI présente cinq catégories de comportement dans l'anneau adjacent aux éléments de la situation. Le mélange graduel de couleurs à l'intérieur de cet anneau traduit la difficulté à délimiter les catégories. Il est effectivement souvent difficile de faire la distinction entre les catégories de comportement, car la catégorisation du comportement du sujet dépend en partie de la perception de l'agent. Voici une description des cinq catégories :

Coopératif

Le sujet réagit de façon appropriée à la présence et aux directives de l'agent, ainsi qu'à la façon dont il maîtrise la situation.

Résistant passif

Le sujet, avec peu de manifestations physiques, voire aucune, refuse d'obéir aux ordres de l'agent. Ce comportement peut se manifester par un refus verbal ou par une inertie physique intentionnelle. Par exemple, il peut refuser de contracter le moindre muscle et se laisser porter de tout son poids.

Résistant actif

Le sujet résiste de façon physique ou manifeste physiquement son refus d'obéir aux ordres de l'agent sans toutefois commettre une agression. Par exemple, il peut s'écarter brusquement pour empêcher ou échapper à la maîtrise de l'agent; il peut aussi s'éloigner ouvertement de l'agent. La fuite est un autre exemple de résistance active.

Agression

Le sujet tente ou menace, par une action ou un geste, d'employer la force, ou emploie la force contre une autre personne, s'il a à ce moment la capacité, ou s'il porte l'agent à croire, pour des motifs raisonnables, qu'il a alors la capacité d'accomplir son dessein. Par exemple, il peut donner des coups de pied, des coups de poing, ou tout simplement afficher un langage corporel menaçant avec l'intention d'agresser.

Lésions corporelles graves ou mort

Le comportement du sujet porte l'agent à croire, pour des motifs raisonnables, que l'individu a l'intention ou est susceptible de causer des lésions corporelles graves ou la mort à une autre personne. Par exemple, le sujet peut commettre une agression avec un objet tel qu'un couteau, un bâton ou une arme à feu, ou agir de façon à causer des lésions corporelles graves à un agent ou encore à une autre personne.

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