La police enquêtant sur la police : Une analyse critique de la documentation

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Chercheurs :
M. Christopher Murphy
M. Paul F. McKenna


Table des matières

Introduction

Partie I – Analyse critique de la documentation

Préambule

  1. EPP : Tendances générales et particulières
  2. Questions et controverses fondamentales liées à la police enquêtant sur la police
  3. Modèles, types et variantes d'EPP
  4. Lacunes en matière de connaissances et de recherche
  5. Conclusion

Partie II – Bibliographie


Introduction

Le débat public et politique actuel entourant le bien-fondé et l'efficacité de la police qui enquête sur les plaintes ou les allégations d'inconduite contre la police a atteint un point critique au Canada et dans bon nombre d'autres pays occidentaux. Au Canada, diverses situations ou divers incidents publics récents, au cours desquels on a remis en question le jugement ou l'intervention de la police, soulèvent des préoccupations fondamentales quant à la responsabilisation et à la gouvernance de la police. Au cours des dernières années, des événements comme l'enquête sur l'affaire Maher Arar (Commission d'enquête sur les actions des responsables canadiens relativement à Maher Arar, 2006), le scandale des régimes de retraite de la GRC (Brown, 2007), la controverse continue que représente le recours à l'arme à impulsions (Commission des plaintes du public contre la GRC, 2008) et, plus récemment, les recommandations substantielles découlant de l'enquête Taman (Taman Inquiry into the Investigation and Prosecution of Derek Harvey-Zenk (Manitoba), 2008) ont soulevé une préoccupation importante chez le public et suscité un intense débat politique. Au c œur du débat se trouvent les questions de fond afférentes au rôle et à l'impartialité de la pratique conventionnelle de la police enquêtant sur les plaintes et les incidents concernant la conduite ou les actions de ses propres membres. D'autres questions traitent de l'efficacité relative des diverses stratégies d'enquête et de surveillance de la police et s'attachent aux solutions de rechange possibles pouvant mieux répondre aux exigences de la responsabilisation envers le public et de la justice en matière de procédure.

Voilà quelques-unes des questions sur lesquelles se penche le rapport dans le cadre d'une revue de la documentation relative aux politiques et des travaux de recherche disponibles à l'échelle nationale et internationale. L'examen porte sur la théorie et la pratique des enquêtes de la police sur la police (EPP) dans les situations de surveillance. L'étude commandée doit présenter les documents sous la forme d'une bibliographie annotée et effectuer une analyse documentaire ainsi qu'une analyse critique des tendances en matière d'enquête, des enjeux cruciaux, des modèles de rechange, des lacunes en matière de recherche et des suggestions. Espérons que l'analyse et les renseignements fournis dans le présent rapport serviront de base éclairée à d'autres débats et à des progrès vers des méthodes et des modèles plus efficaces et plus acceptables aux yeux du public pour les enquêtes et les examens concernant les plaintes contre la police, un apport essentiel au maintien de la confiance du public envers la police.

Partie I : Analyse critique de la documentation

Préambule

La section suivante du rapport est une analyse critique des documents de politiques et des travaux de recherche pertinents axés sur les enquêtes de la police sur la police (EPP) dans le contexte des plaintes du public contre la police dans le cadre des processus d'examen et de surveillance internes ou externes. Tandis que les travaux de recherche abondent sur les questions touchant la responsabilisation, la gouvernance et les enquêtes de la police, la recherche et l'analyse empiriques directes concernant la pratique réelle de la police enquêtant sur la police sont remarquablement limitées. De même, la documentation est aride pour ce qui est des études comparatives ou des études d'évaluation des différents modèles et stratégies d'EPP. Dans la mesure où ces questions sont abordées, nous offrons une bibliographie annotée, qui traite à fond de vingt-six (26) documents de recherche et relatifs aux politiques qui sont directement pertinents aux EPP. De plus, nous avons cité un certain nombre de publications plus générales, mais liées aux travaux de recherche et aux politiques, qui fournissent un historique et un contexte pour cette analyse plus ciblée sur les EPP.

L'examen ci-après évalue d'un œil critique l'ensemble des travaux de recherche nationaux et internationaux sur les EPP de la façon suivante :

  • examen des tendances pertinentes du contexte social et juridique qui établissent les paramètres des progrès récents concernant les EPP et description des tendances précises dans l'évolution des divers modèles d'enquête et de gouvernance de la police;
  • recensement de divers modèles et types d'enquête de la police sur la police et des rapports de gouvernance à l'échelle nationale et internationale et définition d'une typologie de cinq (5) types distincts de modèles d'EPP;
  • description d'un certain nombre de questions problématiques cruciales cernées dans la documentation;
  • détermination des principales lacunes en matière de connaissances et de recherche dans la documentation et formulation d'un certain nombre de suggestions en vue de recherches futures.

1. EPP : Tendances générales et particulières

Il est plus facile de comprendre et de prévoir l'évolution du rôle de la police dans les enquêtes sur les plaintes contre la police et la gouvernance de la police en situant les progrès et les tendances des EPP dans un contexte social et politique élargi. L'exposé des faits ci-après sur le rôle changeant de la police dans le processus d'examen des plaintes et d'enquête sur les plaintes donne à penser que les principaux moteurs du changement et des progrès dans l'examen civil et policier s'inscrivent dans des virages sociaux et politiques généraux plus vastes dans le domaine de la gouvernance politique, des connaissances du public et des attitudes à l'égard des institutions autorisées comme la police. Quelques-unes des tendances sociales et politiques qui détermineront l'orientation et le rôle futur de la police dans le contexte de l'examen civil sont présentées ci-après.

Tendances générales en matière de responsabilisation et de gouvernance

1.1 La nouvelle responsabilisation de la police

Dans un article utile sur la nature changeante de la responsabilisation de la police et la demande croissante du public et du milieu politique pour des régimes plus efficaces de responsabilisation de la police, Mme Chan (1999) laisse sous-entendre qu'il y a eu des changements en faveur d'approches émanant du secteur privé pour une nouvelle gestion publique en ce qui a trait à la responsabilisation de la police. S'appuyant sur une critique néolibérale du gouvernement traditionnel et de la gestion des services publics comme la police, on propose de nouvelles philosophies et des nouvelles formes d'autoréglementation interne. Mme Chan soutient que la gouvernance politique générale de la police, du moins en Australie, délaisse les modèles traditionnels de responsabilisation réactive, qui sont fonction de l'application de règles juridiques externes, de la filière hiérarchique, de la réglementation centrale et des mesures disciplinaires axées sur les sanctions. Cet ancien modèle de responsabilisation ou d'examen public n'est pas parvenu à assurer la responsabilisation adéquate de la police, principalement en raison du caractère résilient et résistant de la culture professionnelle des services de police et de son incapacité de la changer ou de la maîtriser. La nouvelle responsabilisation de la police fait partie d'une tendance plus générale vers un nouveau gestionnariat du secteur public qui privilégie l'autoréglementation et la gouvernance gérées de près, renforcées par la surveillance externe. Les organisations policières sont soumises à une gestion et à un examen plus serrés à l'interne, au moyen d'un dédale de systèmes de gestion, de technologies et de procédures, et, à l'externe, au moyen de systèmes plus élaborés de plainte du public et de vérificateurs. La nouvelle responsabilisation s'éloigne de « la sanction et de la dissuasion » au profit de la « conformité» et des modes de réglementation visant à « éviter les préjudices » et à « réduire le risque », grâce à une réglementation, à une vérification, à une surveillance et à une inspection plus strictes. On estime que l'ancienne responsabilisation a échoué et que la nouvelle responsabilisation ne s'est pas non plus révélée très fructueuse. Toutefois, Mme Chan fait valoir que cette approche peut graduellement réussir puisque les modes d'autonomie et d'autoréglementation internes sont plus acceptables que les mesures de responsabilisation plus traditionnelles, légalistes et externes face à la culture policière. Bref, Mme Chan et d'autres personnes sont d'avis que l'avenir de la responsabilisation de la police réside dans des modes plus élaborés et efficaces de « gestion et d'autonomie internes » et non pas dans des formes plus complexes et puissantes de gouvernance et de contrôle externes.

1.2 La rationalisation de l'autonomie et de l'autoréglementation

Dans la présente ère du postmodernisme, le statut et les pouvoirs des professions et leur prétention à l'autoréglementation et à l'autonomie opérationnelle sont la cible d'attaques. Des universitaires comme Freidson (1984) et Reiner (1992) allèguent que, compte tenu du scepticisme postmoderne général face à toutes les institutions autorisées, les prétentions traditionnelles du milieu professionnel comme la médecine, le droit et l'enseignement, à une autonomie opérationnelle sont remises en question par les exigences croissantes du public et de la sphère politique à l'égard d'une responsabilisation plus manifeste. L'autoréglementation traditionnelle, en grande partie officieuse, des activités professionnelles n'est plus considérée acceptable aux yeux d'un public de plus en plus sceptique et des les gouvernements néolibéraux. On demande de plus en plus aux professions de justifier leurs privilèges et pouvoirs traditionnels en fournissant des comptes rendus plus officiels, détaillés et structurés de l'exercice de leurs pouvoirs discrétionnaires. L'élargissement de la responsabilisation interne par l'autoréglementation officielle plus détaillée semblerait être le prix à payer pour toutes les professions afin d'accéder à l'autonomie dans la nouvelle ère du postmodernisme.

Les revendications de la police concernant l'autonomie et l'autoréglementation sont en partie fonction de ses pouvoirs juridiques spéciaux et de la menace d'un contrôle politique indu, mais cette prétention est également fondée sur une revendication persistante, à défaut d'être toujours crédible, à l'égard du professionnalisme. La crédibilité professionnelle repose sur les démonstrations convaincantes de réglementation et de contrôle efficaces, justes et appropriés des activités de ses membres. Les policiers partagent certaines qualités d'une profession, mais ils omettent de satisfaire à quelques-unes des normes essentielles comme un système éthique et disciplinaire « interne », efficace et crédible, ainsi qu'une base de connaissances étayées par des méthodes scientifiques et des recherches qui éclairent leur pratique. La nature problématique des EPP et la mise au point d'un examen civil externe donnent à penser que la police n'a pas pu démontrer qu'elle était disposée ou apte à régir le comportement de ses membres, du moins, de façon à susciter la confiance du public et du milieu politique. Que la police agisse ou non de façon professionnelle, elle sera de plus en plus tenue de documenter, de réglementer et de justifier son autonomie. Cette tendance politique influera sur les services des policiers s'ils souhaitent maintenir encore leur niveau actuel d'autoréglementation et de contrôle. Cette tendance générale vers l'élargissement et l'officialisation de la responsabilisation interne et la réglementation croissante de l'autonomie opérationnelle est omniprésente au sein du gouvernement occidental et aura une incidence sur l'élaboration de nouveaux modèles de responsabilisation et de gouvernance de la police.

1.3 L'intensification de la critique publique à l'égard de la police

Tandis que les attitudes du public à l'égard de la police dans la plupart des pays occidentaux demeurent généralement bienveillantes, on observe un changement récent dans le discours public et politique au sujet de la gouvernance de la police concernant la conduite de ses propres membres, particulièrement le comportement déviant. Bien qu'ils reflètent une méfiance plus générale envers les institutions autorisées, le mauvais usage ou l'abus des pouvoirs policiers et la corruption policière ont dernièrement constitué l'essentiel du discours et des débats publics dans tous ces pays. Cette métamorphose du discours public est habituellement provoquée par des incidents ou des cas très médiatisés et soulève des questions quant au bien-fondé et à l'efficacité de la police qui réglemente ses propres actions et sa propre conduite. Bien que le phénomène puisse être attribuable à la visibilité accrue et à la médiatisation importante des cas d'abus liés à la police plutôt que d'être le reflet d'une intensification réelle, il a attiré l'attention sur la prétention de plus en plus anachronique de la police à l'autonomie et au contrôle à l'égard de ses processus d'examen des plaintes et d'enquête.

L'émergence récente d'une culture publique et politique des droits individuels et des libertés civiles dans la plupart des pays occidentaux se traduit par une critique plus franche et publique du comportement de la police, particulièrement en ce qui a trait aux minorités. Les collectivités et les groupes sont désormais organisés pour représenter les populations spéciales qui peuvent mobiliser l'opinion et le discours de la collectivité qui critique la pratique policière et qui appuie une réglementation plus juridique et plus externe. Dans un Canada de plus en plus diversifié, il est raisonnable de supposer que cette tendance axée sur les préoccupations des groupes d'intérêt concernant les droits juridiques ou civils et les allégations des minorités ou liées à la race suscitera davantage le soutien du public en faveur d'une réglementation et d'une gouvernance civiles plus énergiques de la police. Les gouvernements devront donc reconnaître ces exigences nouvelles et plus déterminées du public en ce qui a trait à la responsabilisation de la police.

1.4 L'attention accrue des médias et du public à l'égard des services de police

Jusqu'à tout récemment, le travail de la police était une occupation en grande partie secrète, échappant à l' œil du public et à l'examen critique des médias. La plupart des comptes rendus des activités de la police dépendaient des policiers eux-mêmes, et, somme toute, la couverture était favorable et limitée. Les médias étaient satisfaits de publier et d'appuyer les comptes rendus de la police concernant ses propres activités, et on n'était guère intéressé ni apte à offrir d'autres rapports. La distance et le respect à l'égard de la police se sont modifiés, et l'importance que les médias accordent aux drames et aux crises entraîne le signalement de la police dans les nouvelles. Davantage de reportages médiatiques indépendants et informés donnent lieu à des critiques et à un questionnement beaucoup plus virulents dans les médias concernant la police dans les médias et peut-être à une appréciation plus réaliste de la profession de policier, profession importante mais parfois imparfaite. Cette démystification des services de police et de leur travail par les médias s'assimile à la démystification d'autres professions, comme dans le domaine de la politique, du droit, de la médecine, de l'enseignement, etc. Toutefois, la tendance relative à la couverture et aux reportages critiques des médias est susceptible de persister et de compliquer davantage la tâche de la police, qui doit préparer ou gérer les comptes rendus de ses activités. Par conséquent, le mouvement vers un environnement médiatique plus virulent et critique continuera de façonner la dimension politique et la dynamique de l'examen civil et du rôle de la police à cet égard.

Une tendance connexe, mais importante, est la surveillance accrue des activités de la police au moyen des technologies publiques comme les caméras et les téléphones munis de caméras. Leur formidable popularité ajoute un « nouveau média » essentiel à l'examen des activités de la police. Les actions de la police qui étaient autrefois privées sont désormais du domaine public pour quiconque possède une télévision ou est branché à Internet. Par exemple, l'indignation publique actuelle concernant l'utilisation des armes à impulsions par la police de la GRC et la modification des politiques afférentes étaient clairement encouragées par l'enregistrement vidéo effectué avec le téléphone d'un passant qui se trouvait là par hasard. L'omniprésence croissance de la technologie de surveillance publique fait en sorte que la police elle-même est de plus en plus surveillée par le public et qu'il est de plus en plus difficile pour la police de se protéger des critiques, de l'examen ou de l'opinion du public (Ericson et Haggerty, 1997). Cette nouvelle surveillance croissante des médias exacerbe les incidents notoires et les éléments de déviance policière et soutient encore plus le renforcement de l'examen civil et de la réglementation.

Tendances particulières des enquêtes de la police sur la police

La section suivante présente un compte rendu descriptif de l'émergence et de l'évolution des différentes tendances en matière d'enquête et de gouvernance de la police. Les tendances sont exposées en grande partie de façon historique, et il convient de les considérer en fonction de l'ensemble élargi des circonstances sociales et politiques dans lesquelles elles ont vu le jour de même qu'en réaction l'une à l'autre. Les trois tendances en matière d'EPP décrites ci-dessous, même si elles résultent d'époques différentes et de circonstances distinctes, existent toujours aujourd'hui sous une forme ou sur une autre dans divers contextes nationaux et internationaux.

1.5 Tendance – La critique croissante des systèmes internes traditionnels d'enquête et de surveillance de la police

Jusque dans les années 1960 et 1970, les services de police avaient toujours traité les plaintes du public et les préoccupations relatives à l'inconduite d'un policier ou aux mesures disciplinaires au moyen de systèmes disciplinaires entièrement internes (Goldsmith et Farson, 1987; Kappeler et coll., 1994; Smith, 2004; Yeager, 1978). Les services de police étaient dotés d'unités des normes professionnelles ou des affaires internes qui cernaient les cas d'inconduite, de brutalité ou de corruption et enquêtaient sur ces cas en plus de formuler des recommandations sur les sanctions ou les mesures disciplinaires qui en résultaient. Essentiellement, ces systèmes, processus ou procédures ne faisaient pas l'objet d'une surveillance, et la participation publique était exclue. De plus, il n'y avait que peu de comptes rendus à cet égard à l'extérieur du service, voire pas du tout. La crédibilité accordée au traitement des plaintes du public variait, et il n'y avait pratiquement aucune garantie quant au suivi, à l'enquête ou au règlement conformément aux normes de responsabilisation ou de transparence en vigueur. Cette approche du système interne de police a persisté pendant la période qu'il est convenu d'appeler l'« ère professionnelle », selon la proposition d'O. W. Wilson (Bopp, 1977) et avec la certitude qu'il était possible de gérer les organisations policières au moyen des principes de gestion scientifique formulés pour les entreprises publiques et privées (Taylor, 1947). Un argument appuyait le système de police axé sur l'examen interne, soit que l'indépendance de la police était un complément nécessaire à son professionnalisme afin de protéger les organisations policières contre l'influence et l'ingérence politiques indues. L'acceptation de l'indépendance de la police comme condition nécessaire au professionnalisme était répandue en Amérique du Nord (Stenning, 1981, 1995). Pratiquement chaque service de police confiait aux unités des affaires internes l'entière responsabilité de cerner les cas d'inconduite policière (quelle que soit la définition que l'on donne à ce terme), d'enquêter sur ces cas et d'y donner suite. La discipline proprement dite était généralement une fonction du chef de police, et on ne pouvait guère interjeter appel contre les décisions relatives aux mesures disciplinaires.

Cette première approche à l'égard des enquêtes et de la surveillance concernant les plaintes du public peut être décrit comme un système fermé entièrement régi par la police qui enquête sur ses membres et leur impose des mesures disciplinaires (Barton, 1970; West 1988). Qui plus est, de façon générale, ce processus était d'abord amorcé par la police, même si un membre de la population avait déposé la plainte initiale, puisque les processus d'approche avec le plaignant étaient laissés, pour une bonne part, à la discrétion de l'agent (habituellement un sergent administratif) qui recevait la plainte (Brown, 1988; Colaprete, 2007; Fogel, 1987). Il est cependant propice et important de souligner les niveaux considérables de compétence exigés du policier pour agir comme « détective efficace » au moment de mener une enquête (Smith et Conor, 2000).

La critique de cette approche fermée a commencé à poindre chez le public, dans la sphère politique et le milieu de la recherche. Les membres du public, particulièrement ceux issus des groupes minoritaires au Canada et aux États-Unis, étaient mécontents de l'incapacité des gestionnaires policiers de traiter adéquatement, systématiquement et efficacement les plaintes légitimes (Berman, 1981; Culver, 1975; Finnane, 1990; Goldsmith, 1991; Kerstetter et Rasinski, 1994). Les pressions exercées à l'endroit des politiciens municipaux, provinciaux et fédéraux les motivaient souvent à solliciter des réformes quant à la façon dont les organisations policières traitaient les incidents notoires qui semblaient être des cas de brutalité, de corruption ou d'inconduite policière. Les travaux de recherche dictés par la discipline changeante de la criminologie ont produit un certain nombre d'études de recherche révélatrices sur le travail de la police dans la rue (Skolnick, 1994) et les organisations policières (Wilson, 1973) qui ont attisé la critique croissante du pouvoir discrétionnaire de la police et ont mis au jour une culture policière bornée, mais puissante (Liederback et coll., 2007). La recherche révélait également que les détectives dissimulaient souvent au public la conduite policière douteuse ou illégale (Corsianos, 2003)1. D'autres recherches (Newburn, 1999) ont relevé le manque de leadership des administrateurs de police, qui n'ont pas fourni les fonds et les ressources d'enquête nécessaires pour appuyer un processus adéquat d'enquête sur les plaintes. L'attention de plus en plus critique à l'égard des EPP a donné lieu à de nouvelles pressions : les administrateurs de police doivent justifier et expliquer l'éthique et l'efficacité de leur mode de fonctionnement concernant les plaintes du public, particulièrement à la lumière du problème persistant de l'inconduite policière. Plusieurs audiences notoires devant un grand jury, des commissions royales et des commissions d'enquête au Canada, aux États-Unis et ailleurs se sont employées à saper et à fouiller les limites de ce système fermé (Hudson, 1971). Au Canada, la Commission McDonald et, aux États-Unis, la Commission Knapp, sont des exemples de premier choix d'une crise majeure menant à une réforme fondamentale des enquêtes et de la surveillance chez les organisations policières (Commission d'enquête sur certaines activités de la Gendarmerie royale du Canada, 1979; Commission to Investigate Allegations of Police Corruption [commission d'enquête sur les allégations de corruption policière], maire de la ville de New York, 1973).

Combiné aux sources de critiques exposées ci-dessus, l'importance croissante des médias en tant que source constante de problèmes pour le système interne de police devrait être reconnue. Aux États-Unis, le mouvement dynamique pour la défense des droits civiques et, au Canada, la sensibilité croissante aux libertés civiles accentuent l'attaque soutenue du milieu journalistique contre l'inconduite policière. Souvent, tous ces protagonistes ont trouvé des raisons de s'unifier face à un événement déclencheur particulier qui mine gravement la sagesse conventionnelle de l'indépendance de la police et rend très problématique la pratique expresse de la police enquêtant sur la police. Par conséquent, dans bon nombre d'administrations, de tels événements ont donné lieu à une demande concertée de réforme des services de police. Une telle réforme s'est souvent exprimée par diverses approches de l'examen civil des activités de la police. Au début des années 1980, il a été établi que 83,9 % des services de police des États-Unis disposaient exclusivement de mécanismes internes d'examen des plaintes (West, 1988).

1.6 Tendance – La création de systèmes d'examen civil d'enquête et de surveillance de la police

La deuxième tendance englobe l'examen civil, qui a vu le jour dans les années 1970 au Canada, aux États-Unis et dans d'autres administrations. Il est souvent considéré comme la manifestation d'une préoccupation croissante face aux libertés civiles et de la responsabilisation accrue envers le public pour l'ensemble des organisations publiques, particulièrement la police (Goldsmith, 1988, 1991; Landau, 1996). Les doléances quant à l'efficacité de l'ère professionnelle de l'administration policière étaient particulièrement axées sur le défaut des policiers et de leurs dirigeants de prendre au sérieux la légitimité et l'omniprésence des plaintes du public (Adams, 2003). Nonobstant l'existence des unités des affaires internes et des sections des normes professionnelles, les observateurs publics, politiques et universitaires étaient préoccupés par le fait que les organisations policières n'étaient pas pleinement engagées envers les principes de responsabilisation et de responsabilité afférents à la gamme complète d'inconduite policière. Pourtant, divers organes de surveillance destinés à limiter l'indépendance de la police sous la forme de l'examen civil ont été mis en place. Par exemple, dans plusieurs administrations, l'organe civil établi examinait une enquête menée à l'interne par les policiers de ce service (Barton, 1970; Culver, 1975; Prenzler, 2000; Walker et Bumphus, 1992). La plupart des modèles d'examen civil possédaient les pouvoirs suivants :

  • les citoyens enquêtent sur les plaintes du public et soumettent des recommandations au chef de police;
  • la police enquête sur les plaintes du public et présente des conclusions; les citoyens examinent les conclusions et soumettent des recommandations au chef;
  • les plaignants interjettent appel des conclusions devant un organe civil, qui examine l'appel et soumet des recommandations au chef;
  • les vérificateurs examinent le processus par lequel la police est arrivée aux conclusions et rend compte de l'impartialité et de l'exhaustivité à la police et au public (Finn, 2001).

L'approche de la police enquêtant sur la police serait donc maintenue avec l'élément additionnel d'un examen de l'enquête par des civils représentant les autorités municipales, provinciales ou fédérales, de l'État et les intérêts communautaires. Manifestement, l'approche s'appuyait abondamment sur la pertinence et l'exhaustivité de l'enquête initiale, et le conseil d'examen civil avait très peu de pouvoirs indépendants, voire aucun, pour confirmer ou valider la qualité, la portée ou la suffisance de l'enquête (Bobb, 2000; Prenzler et Ronkin, 2001)2.

De nombreux dirigeants policiers estimaient que cette tendance vers l'examen civil constituait une provocation, et le mécanisme est devenu une cause principale de controverse pour les associations policières, qui ont mis en marche leurs considérables ressources du milieu financier, juridique et des relations publiques dans le but de miner et de discréditer la légitimité de l'examen civil (Littlejohn, 1981). La police a invoqué les arguments suivants contre l'examen civil : il viole les droits fondamentaux d'un agent en tant que citoyen, car il y a violation de la procédure établie et des dispositions relatives à l'égalité de protection garantie qui suscite des préoccupations liées aux « déclarations de culpabilité multiples » (Barton, 1970). Ils ont également fait remarquer que ces conseils d'examen civil retiraient aux chefs de police la responsabilité de gestion, et la présence de civils dans le processus d'examen des plaintes sapait le moral des policiers. Selon la police, les tentatives de substituer la participation des civils à celle de la police au processus d'enquête ou de mesures disciplinaires entraîneraient de graves difficultés (Lewis, Linden et Keene, 1986; Walker, 1998).

Par exemple, au Canada, le Citizens Independent Review of Police Activities (CIRPA) [examen indépendant civil des activités de la police] découlait d'une préoccupation grave et constante selon laquelle la police de la communauté urbaine de Toronto (à l'époque) n'était pas contrôlée par ses officiers supérieurs et que les cas de brutalité et d'inconduite étaient impunis et minimisés (McMahon et Ericson, 1984). On estime que plusieurs événements importants ont catalysé la demande de plus en plus tenace à l'égard d'une approche uniforme, cohérente et incontestable concernant l'examen civil indépendant des actions des policiers (Lewis, Linden et Keene, 1986). Pionnière de telles initiatives de coopération, Toronto est devenue le point tournant d'une attention accrue sur l'examen civil qui a évolué jusqu'à prendre la forme des deux dernières tendances ci-après en ce qui concerne la police (Landau, 1996; Lewis, Linden et Keene, 1986; McMahon et Ericson, 1984; Watt, 1991). Comme on pouvait s'y attendre, le syndicat des policiers a réagi de façon véhémente et critique face au CIRPA et à d'autres mécanismes de surveillance de la police selon le modèle de l'examen civil.

Étant donné la réaction de la police, il ne faut peut-être pas s'étonner du fait que, en dépit des attentes élevées du public, la promesse d'un examen civil solide et efficace des plaintes contre la police s'est révélée insaisissable (Finn, 2001). Les organes de surveillance de la police comme la Commission civile des services policiers de l'Ontario, le Bureau du Commissaire aux plaintes contre la police de la Colombie-Britannique, la Police Complaints Authority (Philadelphie) [autorité responsable des plaintes contre la police], entre autres, semblaient restreints dans leurs activités par un processus qui les autorisait à examiner simplement les enquêtes policières et à en évaluer après coup la pertinence, l'impartialité et l'exactitude. Cet examen limité n'était pas satisfaisant pour les praticiens ou les critiques du domaine de la police, et on a exigé à maintes reprises un examen plus énergique et efficace, indépendant de la participation de la police, au moment tant de l'enquête que de la décision.

1.7 Tendance – Vers des méthodes civiles « indépendantes » d'enquête et de surveillance

La tendance actuelle vers des modèles d'enquête civile est issue, en grande partie, de la frustration croissante du public et du milieu politique. Elle s'ajoutait à une sensibilisation accrue aux limites de l'examen civil concernant les EPP et à sa capacité restreinte évidente de produire des résultats démontrant une responsabilisation, une transparence et une indépendance incontestables envers le public. L'absence de participation civile au processus d'enquête et le contrôle du processus qui soutient les plaintes du public et la réouverture ultérieure de l'enquête sur ces plaintes était perçue comme minant la crédibilité et l'utilité de l'examen civil et, en fait, des modèles de surveillance de la police et de participation du public. Depuis la fin des années 1990, on observe la tendance en faveur d'une participation civile plus indépendante et dynamique aux enquêtes et à la surveillance directe. Cette tendance intègre des approches différentes qui prônent une compréhension transformée de l'ensemble de l'organisation policière. Toutefois, ces deux modèles d'enquête transcendent l'examen civil des enquêtes policières en faveur de la participation directe des civils aux enquêtes et aux décisions relatives à ces cas. Le modèle de surveillance civile plus radical plaide en faveur d'un contrôle « civil » (c.-à-d. non policier) complètement indépendant de la réception des plaintes du public, de l'enquête sur ces plaintes et de la réponse dans les cas d'inconduite policière3.

La dernière approche commence à prendre clairement forme à la fin des années 1990 jusque dans le siècle actuel et intègre deux modèles fondamentalement similaires, qui préconisent une compréhension très nuancée de l'organisation policière. La différenciation conceptuelle de ces modèles, qui repose sur une compréhension des réalités pratiques des services de police dans le contexte d'une administration publique moderne, éclipse les similitudes qu'ils partagent. Une méthode milite en faveur d'une approche entièrement indépendante de la réception des plaintes du public, de l'enquête sur ces plaintes et de la réponse dans les cas d'inconduite policière tandis que l'autre vante un concept de surveillance hybride ou « en équipe » qui inclut des enquêteurs de la police avec des homologues civils affectés conjointement aux entrevues, aux interrogatoires et aux enquêtes concernant les plaintes du public (Harrison et Cunneen, 2000; Thomassen, 2002). Les deux méthodes sont actuellement en place dans plusieurs administrations. Par exemple, le Police Ombudsman of Northern Ireland (PONI) [ombudsman pour la police de l'Irlande du Nord] et l'Unité des enquêtes spéciales (UES) de l'Ontario se présentent comme des exemples d'organes de surveillance complètement indépendants. À Seattle (Washington) l'Office of Professional Accountability [bureau de la responsabilisation professionnelle] offre une approche d'équipe inhabituelle : un procureur civil est à la tête d'une unité comprenant un capitaine, un lieutenant et six sergents. Le directeur relève cependant du chef de police du service (Bobb, 2000). En Grande-Bretagne, l'Independent Police Complaints Commission (IPCC) [commission indépendante des plaintes contre la police] est un exemple d'approche d'équipe comprenant des gestionnaires civils indépendants faisant enquête, des officiers supérieurs détachés agissant comme enquêteurs, des équipes constituées d'une combinaison appropriée de membres policiers et non policiers (initialement sans pouvoirs policiers) chargés d'offrir des conditions optimales au chapitre du rendement et de la confiance du public (Home Office, 2000). L'IPCC pourrait enquêter directement sur les plaintes ou surveiller ces enquêtes (IPCC, 2008). L'approche axée sur le décret de consentement adoptée aux États-Unis fournit un exemple intéressant où le gouvernement fédéral, par l'entremise du Département de la Justice, intervient directement et de façon concluante dans l'administration et le fonctionnement d'un service de police en réponse aux préoccupations liées à la pertinence des enquêtes sur les plaintes du public4.

En résumé, notre analyse de la documentation relative aux politiques et des travaux de recherche existants laisse entrevoir une tendance perceptible à s'éloigner des modèles traditionnels d'EPP au Canada et dans d'autres administrations. La tendance cherche à aller au-delà du contrôle de la police concernant les processus d'enquête et les processus décisionnels au profit d'une participation civile plus directe et étendue dans le cadre des enquêtes sur les plaintes contre la police et les décisions finales. La tendance persistera puisque les conditions sociales et politiques qui dictent une responsabilisation et une transparence accrues dans tous les organismes autorisés, non pas seulement la police, ne sont pas susceptibles de s'atténuer, tout comme les circonstances donnant lieu à des plaintes ne changeront vraisemblablement pas (Travers, 2007). Il est donc raisonnable de conclure que la tendance vers la participation civile accrue demeurera tout aussi forte. Il semblerait que la question consiste non plus à déterminer si l'examen civil est souhaitable ou possible, mais plutôt à établir si la participation civile aux enquêtes et aux processus disciplinaires peut se révéler plus efficace pour satisfaire à la responsabilisation envers le public tout en permettant également d'obtenir la coopération de la police nécessaire aux bonnes enquêtes internes (Hutchinson, 2005). Le débat entourant le bien-fondé relatif des différents modèles civils hybrides ou indépendants d'enquête policière et de gouvernance de la police promet de dominer dans un avenir immédiat.

2. Questions et controverses fondamentales liées à la police enquêtant sur la police

L'aperçu ci-après se veut une tentative de recenser dans la documentation quelques-unes des questions problématiques et des controverses fondamentales se rapportant à la police enquêtant sur la police qui se trouvent au c œur des débats actuels dans les travaux de recherche et la documentation relative aux politiques. Après lecture de cette documentation, voici les questions fondamentales clés des réformes ou des progrès futurs dans ce domaine de politique publique.

2.1 Est-il possible pour la police de mener des enquêtes justes et efficaces sur ses propres membres?

La question porte sur le problème fondamental suivant : la police peut-elle mener des enquêtes équitables et efficaces sur les plaintes contre ses propres membres? Elle représente l'aspect principal, fondamental, de tous les débats sur la gouvernance et les modèles d'examen de la police. Selon divers arguments politiques, universitaires et juridiques (Goldsmith, 1988; Harrison et Cunneen, 2000; Landau, 1996; Littlejohn, 1981; Ombudsman de l'Ontario, 2008; Seneviratne, 2004), il semblerait que, normalement, la police ne peut pas enquêter de façon adéquate et impartiale sur l'inconduite dans ses rangs. Fondée sur les travaux de recherche et les divers conseils et commissions d'enquête, la critique tient à différents arguments. En général, il a été démontré que les policiers et leur organisation représentent une profession bornée et protectrice avec une culture organisationnelle distinctive et puissante. La culture vise en partie à protéger les agents et l'organisation de l'examen et de la critique externes, car elle défend et rationalise l'inconduite policière. Dans leurs fonctions, les policiers sont influencés et limités par cette culture et ses exigences liées à la loyauté et à la solidarité face à l'examen et la critique externes (Bennett et Corrigan, 1980; Loveday, 1987). Le défaut des EPP de produire des conclusions transparentes satisfaisantes s'est traduit par la perte de la confiance du public à l'égard des EPP et des processus d'examen des plaintes pris en charge par la police.

Une assertion contraire, c'est que la police peut et doit, dans bon nombre de cas, offrir des enquêtes justes et impartiales (Her Majesty's Inspectorate of Constabulary of Scotland, 2000) et que le retrait de la police du processus d'enquête atténuera l'efficacité de ces enquêtes. Malgré le peu de données d'évaluation ou de comparaison permettant de valider ou de réfuter cette hypothèse, il est vrai que bon nombre d'enquêtes policières sur les plaintes débouchent sur des conclusions qui satisfont les plaignants (Bayley, 1991; Smith, 2004). Selon la police et des universitaires, les enquêteurs de police sont forcément en mesure d'obtenir la coopération et la légitimité policières nécessaires dans le cadre du processus d'enquête, et seule la police possède les compétences, les connaissances et l'expérience requises pour mener des enquêtes efficaces (Maguire et Corbett, 1991; Prenzler, 2004). Toutefois, la possibilité que les EPP puissent être perçues comme étant impartiales ou légitimes peut reposer, au bout du compte, non pas sur des faits, des preuves ou des recherches, mais sur des perceptions d'impartialité et de responsabilisation chez le public (Landau, 1996; Miller et Merrick, 2002; Seneviratne, 2004). Aussi longtemps que les policiers seront perçus comme les uniques enquêteurs et décideurs concernant les plaintes, le processus des EPP sera dénué de crédibilité et de légitimité aux yeux du public.

2.2 Est-il possible pour les enquêteurs civils d'effectuer des enquêtes justes et efficaces?

Le recours aux civils plutôt qu'aux policiers dans les enquêtes sur l'inconduite est fondé, entre autres, sur l'argument selon lequel les compétences d'enquête de la police ne sont pas forcément uniques aux services de police et qu'il est possible de les acquérir grâce à la formation, à l'enseignement et au perfectionnement. De plus, les enquêteurs civils peuvent également apporter d'importantes compétences non reliées aux activités policières comme l'analyse statistique, la conception de systèmes et la gestion de projets dans le cadre du processus d'enquête. Fait plus important encore, cependant, on allègue que, comme les enquêteurs civils ne sont pas des policiers, ils ne sont pas liés par les valeurs ou les intérêts de la culture policière et sont donc plus susceptibles de mener des enquêtes ouvertes et impartiales. La dimension civile procure également au public sceptique la garantie additionnelle que les enquêtes sur les plaintes seront justes et impartiales et non pas indûment solidaires des intérêts de la police ou soumis à leur influence (KPMG, 2000; Strudwick, 2003). Tandis que les modèles d'enquête ou de surveillance civiles en vigueur ont affiché des résultats mitigés, ils montrent que les enquêtes civiles sont possibles et que les enquêtes civiles sur les plaintes sont davantage susceptibles de dissiper les préoccupations liées à l'indépendance du processus d'enquête (Harrison et Cunneen, 2000; Prenzler et Ronken, 2001).

Les arguments contre un processus d'enquête exclusivement civil proviennent de divers services de police et universitaires qui allèguent que les enquêtes « uniquement civiles » ne sont pas souhaitables pour un certain nombre de raisons (Bayley, 1983; Hutchinson, 2005). La police allègue que les civils ne possèdent ni la compréhension, ni les compétences requises pour les enquêtes, pas plus qu'ils ne peuvent facilement les acquérir, afin de pouvoir mener des enquêtes complètes et justes (Littlejohn, 1981). Les enquêteurs civils seront moins susceptibles d'obtenir la coopération et l'accès voulus pour les enquêtes complètes, car ils sont même privés de la légitimité limitée accordée aux enquêteurs de police (Fyfe, 1985). D'aucuns soutiennent également que le contrôle civil du processus d'enquête et de gouvernance finira par éroder la responsabilité et la capacité de l'administration policière de régir et de discipliner l'inconduite policière, si l'on permet à la police de confier cette responsabilité aux autorités civiles (Bayley, 1983; Naegle, 1967). En dernier lieu, le contrôle civil des enquêtes policières indique la réticence ou l'incapacité de la police d'autoréglementer la conduite de ses propres membres et ébranle davantage la confiance du public envers ces organisations.

2.3 Peut-on réformer ou modifier la culture policière afin d'appuyer des enquêtes justes et impartiales sur les plaintes?

Les spécialistes et les chercheurs du domaine de la police semblent largement d'avis qu'il existe des cultures policières puissantes et résistantes, qui peuvent notamment entraver ou empêcher des enquêtes justes et impartiales de la police sur les plaintes graves du public. Comme les conditions organisationnelles et professionnelles qui ont créé la culture policière et qui guident son caractère protecteur et borné n'ont pas changé, la plupart des arguments théoriques supposent que la culture policière est relativement permanente et imperméable à une réforme sérieuse ou à une évolution progressive. Par exemple, l'étude de Mme Chan (1999) sur la réforme et le changement dans les services de police australiens indiquait que, en dépit d'un lourd investissement de la part de l'administration dans la réforme des services de police communautaires, une culture policière relativement inflexible et puissante au sein de la profession a fini par fragiliser ces changements (Skogan, 2006).

Par ailleurs, même si les données existantes appuient la notion selon laquelle la police a toujours manifesté une résistance face à la gouvernance et à la réforme civiles externes, cela ne suppose pas forcément que la culture policière tolère ou encourage, en fait, l'inconduite, la corruption ou le recours excessif à la force chez ses membres. Certains affirmeraient que cette réaction défensive reflète simplement la compréhension et la solidarité à l'égard des tensions et des risques inhérents au travail policier ainsi qu'une réticence à subir ce qui est perçu comme une critique externe antipathique et non informée. Aux yeux de nombreux policiers, cette perception, alliée à des processus d'examen civil imposés à l'externe, finit par compliquer le travail de la police et le rend peut-être plus dangereux (Liederback et coll., 2007). Même les syndicats de policiers ont commencé à reconnaître qu'un processus plus ouvert et responsable d'enquête et d'examen concernant les plaintes est inévitable, sinon souhaitable. Les chercheurs chevronnés du domaine de la police (Bayley, 1983; Reiner, 1992) laissent sous-entendre qu'un processus fructueux d'examen externe doit comprendre les préoccupations légitimes de la police et y donner suite en plus de trouver des moyens de faire participer la police au processus d'examen, d'enquête et de réforme. Ils allèguent que, à moins que l'examen civil puisse créer une relation de travail avec les policiers qui leur permet de participer de façon valable à la démarche d'autoréglementation, les modèles civils de gouvernance de la police seront un échec.

2.4 Dans le cadre d'un processus d'examen civil, le recours aux policiers actifs ou à la retraite menace-t-il les enquêtes sur les plaintes?

Bien qu'il s'agisse d'une question opérationnelle, la documentation analyse amplement le recours aux agents de police à divers titres dans le cadre d'un processus d'examen civil. Il faut se demander si la participation de la police aux processus d'enquête et de gouvernance met forcément en péril l'indépendance et l'intégrité des examens civils sur les enquêtes ou la perception d'impartialité chez le public. La question est importante parce que la plupart des modèles de participation de la police aux enquêtes et aux examens civils font appel à des policiers actifs (y compris détachés) ou à la retraite pour les raisons déjà abordées (Goldsmith, 1995; Harrison et Cunneen, 2000; KPMG, 2000; et Lewis et Prenzler, 2000).

Policiers actifs — La plupart des processus d'examen civil indépendant reposent sur le détachement de policiers en fonction pour mener à terme la phase de l'enquête. Les policiers en fonction apportent un large éventail de compétences, une vaste expérience et d'importants pouvoirs légaux qui sont essentiels à la réussite de l'enquête. Toutefois, des critiques de ce modèle affirment que le recours aux policiers actifs ou en service supposera qu'ils sont limités en raison des valeurs et des points de vue professionnels communs qui, invariablement, éclaireront leurs conclusions et feront en sorte que leur enquête à l'égard de collègues sera peu susceptible d'être juste et impartiale (Goldsmith, 1995; Landau, 1996; Maguire et Corbett, 1991; Perez, 2000; Strudwick, 2003). La preuve indubitable est limitée quant à l'efficacité relative ou comparative de la police enquêtant sur la police par rapport aux civils enquêtant sur la police, mais la documentation convient généralement du fait que, dans la mesure du possible, on devrait limiter ou éviter le recours aux policiers détachés, actifs (Prenzler et Ronkin, 2003).

Policiers à la retraite — Dans certains modèles d'examen des plaintes, les policiers « à la retraite » sont affectés à la tenue de l'enquête nécessaire sur les plaintes du public. Les policiers à la retraite, particulièrement les officiers supérieurs, possèdent une précieuse expérience policière, mais ils ne subissent pas les mêmes pressions que les agents de police en service (Herzog, 2002). De plus, bon nombre semblent avoir acquis une vision plus professionnelle et indépendante de la fonction policière, ce qui leur permet d'évoluer selon une perspective élargie des services de police et de la gouvernance policière. Cette affirmation semble particulièrement s'avérer en ce qui a trait aux enquêteurs supérieurs occupant un poste de commandement (p. ex. rang de surintendant et plus). Par exemple, l'étude de Herzog (2002) sur les agents de police supérieurs a conclu qu'ils s'identifiaient beaucoup moins aux valeurs du personnel subalterne et qu'ils étaient plus ouverts à l'égard des processus de responsabilisation.

Les arguments militant contre le recours aux policiers, même à la retraite, dans un processus d'examen civil donnent à penser que, inévitablement, ces agents maintiendront leur engagement envers les intérêts et les valeurs de leur profession et culture policières antérieures et qu'ils seront incapables de travailler de façon entièrement impartiale ou objective. Par exemple, le concept de « théorie de la capture » (Prenzler, 2000) explique la façon dont un ex-policier peut influer sur les processus d'examen civil auxquels il participe et se les approprier, ce qui donne lieu à des conclusions qui sont davantage favorables à la police et au point de vue policier en général. Voilà qui tranche par rapport aux résultats obtenus dans le cadre d'une enquête menée uniquement par des civils. Il semblerait qu'il faut évaluer le recours aux policiers à la retraite, et le risque que présente leur expérience policière, eu égard aux avantages de cette même expérience policière.

3. Modèles, types et variantes d'EPP

Introduction

On tente ici de catégoriser et de distinguer les divers modèles et types d'enquête sur l'inconduite policière ainsi que leur contexte de gouvernance et de surveillance. Les cinq (5) modèles d EPP ci-après ressortent d'un examen de la documentation en fonction de l'autonomie relative de la police ou des civils dans le cadre des EPP et de la nature de la participation de policiers ou de civils à la structure de gouvernance ou de surveillance.

  • Modèle d'enquête — Il décrit la nature et le degré de la participation de la police aux enquêtes sur les plaintes d'inconduite policière en reconnaissant que l'importance et la nature de la participation varient de même que le rôle et l'ampleur de la participation des membres civils ou non policiers au processus d'enquête.
  • Modèle de surveillance — Il décrit la nature et la structure du processus ou de l'organisation du règlement, de l'administration et du traitement de l'enquête sur les allégations d'inconduite policière et l'ampleur de la participation civile à l'enquête et à la surveillance5.

La typologie des cinq (5) modèles d'EPP ci-après découlant de notre analyse de la documentation est fondée sur la nature particulière des enquêtes sur les plaintes ou les allégations contre la police et la mesure dans laquelle il s'agit d'enquêtes menées par la police ou des civils. De plus, ces modèles d'enquête se distinguent par le type caractéristique de structure de surveillance dans lesquels ils évoluent ainsi que la nature et l'importance de la participation civile par rapport à la participation policière au processus de surveillance. Ces modèles ont été élaborés à des époques différentes, mais ils sont tous fonctionnels, sous différentes formes, au Canada et sur la scène internationale. À partir de notre analyse de la documentation, nous avons défini une typologie de cinq (5) modèles distinctifs d'examen et d'EPP qui décrit la gamme complète des pratiques nationales et internationales en vigueur.

  • Enquête de la police sur la police (interne) – Modèle d'enquête selon lequel la police est elle-même pleinement responsable de la réception, des enquêtes, du règlement et de l'administration des plaintes du public, sans surveillance ou examen civil externe.
  • Enquête de la police sur la police (externe) – Modèle d'enquête selon lequel les policiers d'un autre service sont invités à enquêter sur un autre service de police. Ce modèle d'enquête ne fait pas non plus l'objet d'une surveillance ou d'un examen civil externe.
  • Enquête de la police sur la police + examen ou contrôle civil — Modèle d'enquête selon lequel la police demeure responsable de la réception, des enquêtes, du règlement et de l'administration des plaintes du public. La participation et la surveillance civiles au processus d EPP est variable et peut englober, notamment, a) l'examen civil/après enquête et b) l'observation et le contrôle civils des EPP.
  • Enquête policière et civile (hybride) + examen civil — Modèle selon lequel la police assure une certaine forme de collaboration, de coopération ou de coordination dans le cadre des enquêtes sur les plaintes du public. Il peut également y avoir des aspects auxquels les civils participent concernant la réception, le règlement et l'administration des plaintes du public.
  • Civils enquêtant sur la police + examen civil — Modèle selon lequel la police est exclue ou retirée du processus d'enquête sur les plaintes du public. La police peut participer, d'une certaine manière, au processus de règlement associé à ces modèles, mais la caractéristique d'un système « indépendant », c'est que le personnel civil est largement responsable de diriger et de conclure le processus d'enquête. Le modèle peut également inclure une certaine forme d'examen civil des mesures de relance prises par le service de police concernant les sanctions, la formation, l'éducation et d'autres processus organisationnels visant à donner suite aux questions découlant de ces enquêtes.

3.1 Enquête de la police sur la police (interne)

Le modèle englobe toutes les approches d'EPP par lesquelles les enquêtes sur les plaintes publiques sont gérées à l'interne par les policiers et le service de police. La gouvernance policière à l'égard des enquêtes et du règlement des plaintes réside exclusivement dans la chaîne de commandement de la police, et il n'y a pas d'examen civil ou de participation civile. Généralement, le modèle se caractérise également par la responsabilisation finale qui est dévolue au chef ou au directeur de police et il ne comprend habituellement aucune forme d' examen civil externe. Il s'agit du modèle traditionnel de la police enquêtant sur la police. À titre d'exemple, on pourrait citer une enquête des affaires internes sur une plainte, le règlement final incombant au chef de police. Nous le répétons, le modèle est essentiellement un processus d'enquête de la police relevant de la gouvernance et du contrôle de la police.

Avantages signalés

  • La police dispose des compétences d'enquête nécessaires et peut accéder aux ressources adéquates (p. ex. soutien judiciaire).
  • La police comprend le fonctionnement de l'organisation et la dynamique culturelle.
  • La participation de la police garantit la légitimité aux yeux des policiers et les incite à coopérer (à policier, policier et demi).
  • La police dispose des pouvoirs juridiques nécessaires pour mener l'enquête, tout particulièrement en ce qui concerne les cas relatifs au Code criminel.
  • Le règlement et les mesures disciplinaires déterminés par la police sont importants pour le maintien de l'autorité et de la responsabilité de la gestion au sein de l'organisation policière (Goldstein, 1978; Bayley, 1991).

Inconvénients signalés

  • La police ne prend pas au sérieux la plupart des plaintes du public et affecte des ressources et des experts en nombre limité au processus (KPMG, 2000).
  • Les agents de police ont à c œur les normes et perspectives culturelles non officielles de la police et y adhèrent, ce qui protège les agents et mine le processus d'enquête (Prenzler, 2000).
  • Les agents de police peuvent être incités par d'autres agents et par la culture policière (loi du silence) à mener des enquêtes inefficaces.
  • Il existe très peu d'éléments indiquant que les agents de police obtiennent une plus grande coopération de la part de l'autre service de police dans le cas d'enquêtes sur des plaintes.
  • Les processus disciplinaires et de règlement de la police ne reflètent généralement pas les normes et les attentes publiques à l'égard des résultats d'enquête adéquats.
  • Le modèle réduit le nombre de plaintes fondées.
  • Compte tenu de la participation exclusive et compromise de la police à toutes les étapes du processus d'examen des plaintes et d'enquête sur les plaintes, bon nombre considèrent que le modèle ne respecte pas les normes de base de responsabilisation publique.

3.2 Enquête de la police sur la police (externe)

Le modèle se distingue par son recours aux enquêteurs de police externes provenant d'un autre service de police chargés d'enquêter sur une plainte pour le compte du service visé par la plainte. Face à une plainte suffisamment importante, bon nombre de services policiers canadiens inviteront un autre service de police à assumer la responsabilité de l'enquête sur cette plainte ou cette allégation. Le mécanisme accentue la perception d'indépendance de l'enquête aux yeux du public et réduit au minimum les effets négatifs de la loyauté et de la solidarité interne pour ce qui est de la conduite d'une enquête équitable. La participation des services de police externes au processus d'examen d'une plainte peut avoir lieu à différentes étapes de l'enquête. Dans certains cas, il existe des ententes ou des protocoles officiels conclus entre les corps de police concernant la tenue de telles enquêtes. Dans tous les cas, l'autre corps policier rend compte de ses conclusions au service de police et ne participe pas au règlement final de la plainte. Le rapport final sur la récente enquête Taman décrit un exemple intéressant à cet égard.

Avantages signalés

  • La police dispose des compétences d'enquête et des connaissances nécessaires sur la police pour mener une enquête efficace et peut accéder aux ressources adéquates (p. ex. soutien judiciaire).
  • Le corps de police externe possède la compréhension nécessaire de l'organisation et de la dynamique culturelle pour ce genre d'enquête.
  • Comme les policiers proviennent d'un autre organisme, ils jouissent d'une légitimité au sein du service de police, ce qui favorise la coopération et la collaboration.
  • Le corps policier externe dispose des pouvoirs juridiques nécessaires pour mener l'enquête, tout particulièrement en ce qui concerne les cas relatifs au Code criminel.
  • À titre d'enquêteurs de police externes représentant un autre service de police, ils présentent une certaine indépendance et une présumée objectivité, ce qui renforce la légitimité du processus d'enquête aux yeux du public.
  • Les enquêtes effectuées par un corps policier externe libèrent les administrateurs policiers des pressions liées à la tenue de leurs propres enquêtes internes en plus de limiter la responsabilité interne à l'égard des conclusions négatives.
  • La stratégie au service de police de mener une enquête policière quasi indépendante sans être assujetti à un processus d'enquête et d'examen civils.

Inconvénients signalés

  • Le recours à un corps policier externe pour les enquêtes peut uniquement offrir l'illusion d'une enquête indépendante.
  • Les théoriciens et les critiques mettent sérieusement en doute la possibilité d'indépendance dans les cas d'enquêtes par un corps policier externe en raison des liens professionnels et des engagements liés aux fonctions policières actives (Prenzler, 2000).
  • Les agents de police ont habituellement à c œur les normes et perspectives culturelles non officielles de la police (loi du silence) et y adhèrent, ce qui protège les agents et mine le processus d'enquête (Prenzler, 2000).
  • Il existe très peu d'éléments indiquant que les agents de police obtiennent une plus grande coopération de la part de l'autre service de police dans le cas d'enquêtes sur des plaintes pour justifier leur participation.
  • Sans surveillance publique, les EPP externes peuvent bien souvent arriver aux mêmes conclusions qu'une enquête interne et réduire le nombre de plaintes fondées.
  • Le dossier insatisfaisant des enquêtes policières a miné la confiance du public dans la légitimité de cet autre modèle externe des EPP pour satisfaire aux normes adéquates de responsabilisation.

3.3 Enquête de la police sur la police + examen ou contrôle civil

Le modèle reflète bon nombre des mêmes caractéristiques que les deux modèles précédents d'EPP du fait qu'il s'agit d'un processus d'enquête géré par la police. Toutefois, un organisme ou un agent d'examen civil externe examine les résultats de l'enquête. Cet examen du processus d'enquête s'effectue soit dans le cadre d'une évaluation civile après enquête ou de l'observation ou du contrôle civil du processus d'enquête criminelle. Le modèle d'EPP assortie de l'examen civil après enquête se limite aux évaluations après coup du processus d'enquête et n'a aucune incidence directe sur ce processus. La variante du modèle d'EPP assortie de l'observation ou du contrôle civil laisse entrevoir un rôle plus actif et prépondérant à l'égard de la surveillance civile et de l'influence directe sur le processus d'enquête. Elle est généralement considérée comme une forme plus efficace que le modèle de surveillance de l'enquête. Les travaux du Bureau du Commissaire aux plaintes contre la police de la Colombie-Britannique présentent un bon exemple de l'EPP assortie de l'examen civil. Quant à la Commission des plaintes du public contre la GRC, ses travaux illustrent l'approche d'EPP assortie de l'observation ou du contrôle civil. Les avantages et les inconvénients signalés ci-dessous sont génériques et s'appliquent également aux approches de l'examen et de l'observation ou du contrôle civils.

Avantages signalés

  • Le modèle permet une influence civile ou non policière, ce qui renforce la responsabilisation et la transparence à l'égard du public, par rapport à un processus de plainte du public interne et axé sur la police.
  • Grâce à l'observation civile, il est possible de contrôler le caractère adéquat et l'efficacité des enquêtes sur les plaintes contre la police et de formuler des recommandations à la police ou aux autorités civiles quant aux conclusions et aux sanctions appropriées.
  • L'examen civil ou l'observation civile des EPP peut permettre une évaluation et un examen indépendants des pratiques administratives et opérationnelles générales de la police qui favorisent les plaintes.
  • L'examen civil ou l'observation civile d'une enquête de la police sur la police offre un certain degré de transparence et de renseignements au public par rapport à un processus interne et fermé.

Inconvénients signalés

  • L'examen civil ou l'observation civile d'un processus d'enquête axé sur la police ne peut pas dissiper pleinement les préoccupations du public quant à l'indépendance et à la pertinence des EPP.
  • Les agents ou organismes chargés de l'examen civil ou de l'observation civile ne disposent généralement pas des pouvoirs et des ressources voulus pour garantir adéquatement que les EPP satisfont aux normes de responsabilisation publique.
  • Les agents ou organismes chargés de l'examen civil ou de l'observation civile ne peuvent pas mener leurs propres enquêtes et dépendent donc entièrement des EPP.
  • L'examen civil ou l'observation civile des EPP repose sur une compréhension insuffisante et limitée de l'administration et des opérations policières, ce qui réduit au minimum leur efficacité.
  • Des policiers et des associations policières considèrent que l'examen civil ou l'observation civile des EPP sont illégitimes et inappropriés, insuffisants, peu critiques et non pertinents.
  • L'examen civil ou l'observation civile sont considérés comme coûteux, inefficaces et chronophages; il s'agit d'une très mauvaise optimisation des ressources.
  • Malgré la participation de civils à l'examen des EPP, certains soutiennent que cela n'a pas entraîné d'augmentation des plaintes fondées ni d'augmentation de la satisfaction du public.

3.4 Enquête policière et civile (hybride) + examen civil

Le modèle se distingue par la participation d'enquêteurs civils au processus d'enquête sur les plaintes contre la police dans le cadre d'une collaboration avec des enquêteurs de police. Il pourrait s'agir d'une collaboration entre des enquêteurs civils et policiers ou de civils qui mènent seuls les enquêtes sur les plaintes. La participation directe de civils au processus d'enquête et la gestion civile ou policière de l'enquête sur les plaintes relèvent généralement de l'autorité générale de l'organe de surveillance ou d'examen civil. Un exemple de la première variante est le service de police de Chicago. Un exemple de la deuxième approche est l'Équipe d'intervention en cas d'incident grave de l'Alberta (ASIRT), qui emploie des enquêteurs civils et des enquêteurs de police détachés.

Avantages signalés

  • Grâce au maintien de la participation de policiers chevronnés au processus d'enquête, que ce soit sous la responsabilité d'agents civils ou en collaboration avec ces derniers, le processus d'examen des plaintes produira des résultats plus équilibrés et, au bout du compte, plus efficaces.
  • Les agents de police détachés conservent les pouvoirs policiers essentiels pour mener les enquêtes criminelles, que leurs homologues civils ne possèdent normalement pas.
  • Les agents de police détachés ou à la retraite comprennent l'organisation et la culture policières et peuvent donc créer un environnement d'enquête plus coopératif.
  • Les agents détachés ou à la retraite posséderaient des compétences et des aptitudes spécialisées en matière d'enquête que les enquêteurs civils ne sont pas susceptibles de posséder.
  • La synergie entre l'expérience et les compétences diverses des enquêteurs civils et de la police renforce les processus d'enquête sur les plaintes.

Inconvénients signalés

  • Le modèle hybride ne satisfait quand même pas au critère public de pleine responsabilisation et d'indépendance.
  • La participation de la police risque de compromettre l'indépendance de la surveillance civile et peut, à la limite, nuire à son efficacité dans l'atteinte de ses objectifs de responsabilisation.
  • L'intégration de la culture et des valeurs policières au titre de la participation continue d'agents de police à la retraite ou détachés peut inhiber l'évolution d'une nouvelle culture organisationnelle civile.
  • Il peut être aussi difficile de détacher ou d'attirer des enquêteurs policiers supérieurs dans un modèle intégré sur lequel ils n'ont pas d'autorité ni de contrôle.

3.5 Civils enquêtant sur la police + examen civil

Le modèle se distingue par son recours exclusif aux civils chargés de toutes les étapes du processus d'examen des plaintes, y compris les enquêtes et les recommandations qui en résultent. Ce modèle d'EPP pourrait comprendre des policiers à la retraite, qui ne possèdent plus leurs pouvoirs policiers ou des civils n'ayant pas d'expérience policière. Ce modèle est considéré comme étant la « solution de rechange » la plus caractéristique aux EPP, car il ne confère pas à la police une influence ou des pouvoirs officiels dans le cadre du processus d'examen des plaintes. On trouvera un exemple de ce modèle au sein du Police Ombudsman for Northern Ireland (PONI) [ombudsman pour la police de l'Irlande du Nord].

Avantages signalés

  • Aux yeux de la plupart des membres du public, il s'agirait du modèle le plus indépendant parmi les cinq modèles d'enquête.
  • En raison de l'absence d'expérience et d'influence ou de culture policière, une culture organisationnelle plus redevable et transparente soutiendra le processus d'enquête.
  • Les plaignants peuvent avoir une plus grande confiance à l'égard des enquêteurs non policiers et coopérer plus librement avec eux.
  • Dans certaines circonstances, l'indépendance du processus d'enquête civile renforce la validation du public à l'égard de la position de la police.

Inconvénients signalés

  • Le modèle n'offre pas l'expérience, l'expertise, la connaissance et la compréhension policières requises pour la tenue d'enquêtes justes et efficaces.
  • Une enquête ou un processus de règlement dirigé uniquement par des civils sera considéré par la plupart des policiers comme étant inadéquat et ne tenant pas compte des préoccupations policières et des réalités opérationnelles.
  • L'absence de légitimité aux yeux de la police sera davantage susceptible de miner la coopération et la participation de la police et, au bout du compte, de faire déraper l'enquête.
  • Devant des enquêtes infructueuses et qui ont échoué, les membres du public perdront confiance à l'égard du modèle d'examen civil entièrement indépendant.
  • Des consultants maintiennent qu'il s'agit du modèle le plus coûteux, puisqu'il faut affecter des ressources supplémentaires pour assurer des enquêtes professionnelles (c.-à-d. services judiciaires, etc.)
  • Les frais de formation sont plus élevés pour ce qui est du perfectionnement et du renforcement des compétences et de la formation continue.
  • Les modèles civils doivent disposer de pouvoirs juridiques et d'enquête spéciaux pour assurer un traitement efficace des enquêtes portant sur des cas graves.
  • Ce modèle minerait l'autorité et la responsabilité de la gestion policière en ce qui concerne l'ensemble des processus administratifs et opérationnels.

 3.6 Typologie des modèles de surveillance et d'enquête sur les plaintes du public

Le graphique qui suit récapitule visuellement les cinq (5) modèles expliqués. Cette typologie des enquêtes sur les plaintes du public est approfondie dans la section suivante du rapport, qui comprend un aperçu plus détaillé des modèles de surveillance et d'enquête sur les plaintes du public qui illustre chacun des modèles. Cette typologie tente de mieux expliquer les éléments distincts qui soutiennent chacun des divers modèles d'EEP décrits. L'aperçu comprend des renseignements afférents aux organes de surveillance particuliers, leur cadre législatif, leur administration, leur lien hiérarchique et leur année de création. Ces cinq (5) modèles visent à préciser le contexte et le concept de la police enquêtant sur la police.

Typologie des modèles d'enquête et de surveillance des plaintes du public

Typologie des modèles d'enquête et de surveillance des  plaintes du public

NdT – Traduction du cercle

  1. Enquête de la police sur la police (interne)
  2. Enquête de la police sur la police (externe)
  3. Enquête de la police sur la police + examen ou contrôle civil
  4. Enquête policière et civile (hybride) + examen civil
  5. Civils enquêtant sur la police + examen civil
Typologie des modèles d'enquête et de surveillance des plaintes du public
Organe de surveillance (emplacement) Pouvoir juridique Compétence* Responsable devant Année de création
1. Enquête de la police sur la police (interne)
Office of Professional Responsibility (États-Unis) [bureau de la responsabilité professionnelle] Titre 28, section 533, US Code [code des règlements fédéraux] Agents du Federal Bureau of Investigation Département de la Justice Non signalé
Interne (Pays-Bas) Police Act Tous les services de police néerlandais Ministère de l'Intérieur
et ministère de la Justice
Non signalé
2. Enquête de la police sur la police (externe)
Gendarmerie royale du Canada Loi sur la GRC Les services de police ayant conclu une entente ou un protocole officiel ou non officiel relatif aux enquêtes externes. Exemple : la GRC a dû enquêter sur le service de police de Toronto en 2003. Commissaire de la GRC 1920
Service de police d'Ottawa Loi sur les services policiers, L.R.O. 1990, ch. 15 Service de police ayant conclu des ententes officielles ou non officielles relatives aux enquêtes externes6 Chef de police 1855
3. Enquête de la police sur la police + examen ou contrôle civil
Commission des plaintes du public contre la GRC (Canada) Loi sur la GRC, article 37 Tous les agents de la GRC Ministre de la Sécurité publique 1987
Bureau du Commissaire aux plaintes contre la police (Colombie-Britannique) Partie 9, Police Act, RSBC, 1996, ch. 367 Tous les services de police de la Colombie-Britannique* Assemblée législative de la Colombie-Britannique 1998
Organisme chargé des enquêtes sur l'application de la loi (OPOAL) (Manitoba) Loi sur les enquêtes relatives à l'application de la loi, CPLM, ch. L75 Tous les policiers du Manitoba* Rapport annuel au ministre de la Justice; sur le plan administratif, le SMA, Justice criminelle 1985
Commission civile des services policiers de l'Ontario7 (CCSPO) Loi sur les services policiers,L.R.O. 1990, ch. 15 Tous les services policiers de l'Ontario* Ministre de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels 1990
4. Enquête policière ou civile (hybride) + examen civil
Équipe d'intervention en cas d'incident grave (ASIRT)8
(Alberta)
Police Act Tous les services de police municipaux de l'Alberta* Solliciteur général de l'Alberta et ministre de la Sécurité publique 2007
Public Complaints Commission (PCC) [commission des plaintes du public])9
(Saskatchewan)
Police Act, 1990 Tous les services de police municipaux de la province* Sous-ministre de la Justice de la Saskatchewan 1990
Crime & Misconduct Commission [commission sur la criminalité et l'inconduite]10
(Australie)
Criminal Justice Act, 1989; Crime and Misconduct Act, 2001 Toutes les « unités de l'administration publique » du Queensland, y compris les services de police Parliamentary Crime and Misconduct Committee (comité parlementaire sur la criminalité et l'inconduite) 2002
Independent Police Complaints Commission (IPCC) [commission indépendante des plaintes contre la police]11
(Grande-Bretagne)
Police Reform Act, 2002 (ch. 30); Police and Justice Act, 2006, art. 41 Tous les policiers en Angleterre et au Pays de Galles Home Secretary [secrétaire de l'intérieur] 200412
Civilian Complaint Review Board (CCRB) [comité d'examen des plaintes]13 (Ville de New York) Ordonnance de la Ville Tous les policiers du service de police de New York (NYPD)14 Maire 1993
5. Civils enquêtant sur la police + examen civil
Unité des enquêtes spéciales (UES)15
Direction générale indépendante de l'examen de la police [en cours de formation]16 (Ontario)
Partie VII, art. 113, Loi sur les services policiers;
projet de loi 103
Tous les policiers de l'Ontario* Procureur général de l'Ontario 1990
2008 [directeur nommé]
Police Ombudsman of Northern Ireland [ombudsman pour la police de l'Irlande du Nord]17
(Irlande du Nord)
Police (Northern Ireland) Act, 1998; 2003 Tous les services de police d'Irlande du Nord Secrétaire d'État 2001
Independent Police Review Authority [autorité indépendante responsable de l'examen de la police]18 (Chicago) Ordonnance de la Ville Tous les policiers du service de police de Chicago Conseil municipal de Chicago 2007

* Indique les administrations canadiennes où la compétence de l'autorité responsable des plaintes du public ne s'étend pas aux agents de la GRC.

4. Lacunes en matière de connaissances et de recherche

En dépit de l'importance croissante des EPP et de la surveillance civile et de la controverse à cet égard, notre revue de la documentation révèle qu'il y a très peu de recherche de quelque genre que ce soit sur les opérations et les activités réelles des divers modèles d'EPP, à plus forte raison une recherche qui satisfait aux normes conventionnelles des sciences sociales et des travaux de recherche. Pour être plus précis, un certain nombre de secteurs de recherche et de connaissances doivent faire l'objet de divers types d'études afin que l'on puisse comprendre et évaluer l'efficacité relative de plusieurs modèles à l'étude. La plupart des recherches effectuées sur les EPP sont de nature générale et descriptive; les données empiriques font défaut, et on fait une large place aux conseils normatifs (Walker, 2007). Il semble y avoir si peu de connaissances empiriques sur les EPP qu'il est impossible de répondre avec certitude aux questions les plus fondamentales à leur sujet, encore moins de déterminer avec confiance les meilleures pratiques. Par exemple, nous ne disposons d'aucune donnée fiable permettant d'établir des comparaisons quant à l'efficacité relative des enquêtes policières ou des résultats ou encore pour expliquer pourquoi il en est ainsi. Selon notre étude des travaux de recherche, pour les universitaires et la plupart des décideurs, l'EPP et ses variables existent en tant que « boîte noire » virtuelle dans laquelle la dynamique et les détails du processus d'enquête demeurent inconnus et flous; seuls les résultats sont visibles. Voici quelques-unes des lacunes les plus évidentes en matière de recherche sur les EPP qui, selon nous, devraient faire partie d'un programme de recherche sur les politiques. Afin d'offrir un aperçu des orientations futures concernant les EPP et les thèmes connexes, la présente section énumérera les lacunes précises en matière de recherche en plus de formuler des suggestions de recherche appropriée visant à combler ces lacunes. Bien que cette section ne soit nullement exhaustive, nous nous sommes efforcés de résumer les aspects les plus importants devant faire l'objet d'autres études.

4.1 Lacune en matière de recherche – Qualité des enquêtes

Il semble n'y avoir pratiquement pas d'études de cas concernant des expertises réelles sur les différents modèles d'EPP ou autres processus connexes qui permettraient d'effectuer une analyse détaillée en vue d'établir de bonnes pratiques et d'aider à cerner les mauvaises pratiques. Qui plus est, il manque de données empiriques détaillées et de renseignements sur l'EPP et ses variantes, que ce soit de nature qualitative ou quantitative. Il est donc difficile d'affirmer avec certitude si un modèle est plus efficace qu'un autre et d'expliquer pourquoi il l'est.

Suggestion de recherche – Études de cas sur les  EPP

La recherche pouvant documenter en détail la dynamique et les stratégies d'enquête employées à l'égard des divers facteurs influant sur les résultats d'enquête donnerait lieu à une évaluation du bien-fondé relatif des différents modèles et à des analyses comparatives systématiques. La recherche serait utile pour l'acquisition de données ou d'éléments de preuve empiriques concernant l'efficacité de modèles ou de structures d'EPP.

4.2 Lacune en matière de recherche – Compétences vagues en matière d'enquête

Même si certains allèguent que les enquêteurs civils ou les enquêtes civiles représentent un substitut beaucoup plus souhaitable pour les approches d'EPP, il n'y a actuellement pas d'élément de preuve ou de recherche pouvant étayer cette affirmation ou préciser les compétences requises en matière d'enquête. Le recours aux enquêtes civiles devrait être fondé sur la preuve établissant qu'il s'agit d'une hypothèse valide.

Suggestion de recherche – Définition des compétences relatives aux enquêtes

Déterminer un sujet de recherche pertinent qui déboucherait sur la formulation claire de l'expérience et des compétences requises pour mener des enquêtes policières internes efficaces et sur une évaluation de la meilleure façon de transférer ces connaissances fonctionnelles, qui serviraient aux enquêteurs civils. Procéder à l'examen des compétences requises éventuelles en matière d'enquête et d'analyse. Recherche sur l'évaluation des compétences fonctionnelles et sur le profil des compétences des enquêteurs et préparation d'un compte rendu à ce sujet.

4.3 Lacune en matière de recherche – Incidence incertaine de la culture policière

On a blâmé la culture policière pour bon nombre des problèmes survenus dans le cadre des EPP ou dans d'autres modèles, mais il existe très peu de recherches détaillées qui décrivent et analysent précisément le rôle de la culture policière dans les enquêtes sur les plaintes contre la police (Skolnick, 2006). Étant donné la présumée pratique persistante et importante au sein de la culture policière visant à rationaliser et à protéger certaines activités discutables de la police, il serait utile de disposer de données ethnographiques plus modernes concernant la nature et la fonction contemporaines de la culture au sein des corps de police modernes. Ces études devraient également porter sur les préoccupations tenaces de la police au sujet de l'impact et de l'effet de la surveillance et des enquêtes civiles sur son travail (Bayley, 1983).

Suggestion de recherche – Déterminer l'incidence de la culture policière

D'autres études sur le terrain et travaux ethnographiques axés sur une compréhension contemporaine de la dynamique culturelle et organisationnelle de la police moderne et de la résistance policière à l'examen externe pourraient se révéler utiles pour l'élaboration de modèles pouvant renforcer la coopération et la collaboration policières dans le cadre de divers systèmes d'examen externes.

4.4 Lacune en matière de recherche – Absence d'une orientation systématique

À l'exception des travaux de Janet Chan (1999) et de quelques études britanniques plus générales sur la police, il y a très peu de projets qui tentaient d'examiner les nouveaux modèles de gestion policière et les technologies employées pour la gestion et la documentation des activités et des comportements de la police. Les modèles et techniques de gestion du risque, ou la « nouvelle responsabilisation » (Chan, 1999), sont censés réduire les cas de déviance ou d'erreur policière. Les organismes d'examen civils doivent élaborer des mécanismes permanents de surveillance et de responsabilisation, parallèlement à la capacité d'évaluer l'incidence de la mutation structurelle et des procédures au travail. De nouvelles stratégies de gestion comme l'assurance de la qualité, l'amélioration continue, l'apprentissage organisationnel (Goldsmith et Lewis, 2000), le tableau de bord équilibré et l'harmonisation organisationnelle offrent, du moins en théorie, une meilleure gestion grâce à des formes plus indirectes d'orientation et de contrôle.

Suggestion de recherche – Recherche sur l'amélioration continue

Effectuer une recherche qui fournit une tribune pour l'approche de collaboration à l'égard de l'amélioration continue dans les systèmes existants de réception des plaintes du public, d'enquêtes sur les plaintes et de règlement des plaintes. La recherche pourrait inclure la collecte et l'analyse des données sur les plaintes et l'information de gestion eu égard aux enquêtes qui permettraient d'établir les buts et les objectifs de mesures du rendement. La recherche qui regroupera et facilitera la gestion des connaissances institutionnelles sera profitable aux organismes individuels d'examen des plaintes du public, mais elle contribuera également à une plus vaste compréhension des plaintes contre la police et des systèmes de surveillance en général. Voici les thèmes qui pourraient être compatibles avec un modèle de recherche sur l'amélioration continue :

  • degré de satisfaction du public et de la police à l'égard des processus et des approches de système de plainte du public;
  • indicateurs du volume de plaintes réglées à diverses étapes (p. ex. enquêtes, supervision des enquêtes, plans d'enquête);
  • délais de traitement à des étapes précises du processus d'examen des plaintes;
  • nombre d'enquêtes assorties de mesures disciplinaires;
  • nombre d'interventions dans le cadre de la surveillance ou du contrôle des enquêtes policières;
  • coût des enquêtes et des autres étapes du processus d'examen des plaintes.

4.5 Lacune en matière de recherche – Opposition des associations policières

Il existe très peu de recherches qui examinent adéquatement le rôle des associations policières et des conventions collectives dans la participation (bonne ou mauvaise) aux EPP ou à d'autres enquêtes (Walker, 2006). Les associations policières au Canada sont peu étudiées et elles jouent pourtant un rôle prépondérant dans l'élaboration des politiques, la formulation des procédures et la réforme législative ayant une incidence sur la sécurité publique.

Suggestion de recherche – Examen de l'engagement et du désengagement des associations policières

Effectuer une recherche sur le rôle des associations policières dans le contexte des EPP et d'autres enquêtes. La recherche pourrait comprendre une analyse des associations policières à l'échelle nationale, provinciale et municipale en ce qui a trait à la réforme des systèmes de plainte du public.

4.6 Lacune en matière de recherche – Légitimité publique incertaine

Nous ne disposons pas de connaissances précises sur la façon dont divers éléments ou aspects des EPP ou des autres modèles peuvent contribuer, favorablement ou défavorablement, à la légitimité publique du processus de surveillance ou d'examen civil (p. ex. l'ancienneté des policiers en cause, les communications et le statut du superviseur civil, entre autres). Une caractéristique de la réforme des systèmes de plainte contre la police est l'exigence primordiale de la légitimité publique à l'égard des processus, des pratiques et, plus particulièrement, des personnes participant à ces systèmes. La recherche portant de façon claire, cohérente et approfondie sur cette dimension enrichirait notre compréhension de l'expérience canadienne dans le domaine des plaintes du public.

Suggestion de recherche – Examen de la participation et du soutien du public

La conception et la réalisation d'une recherche qui tiendrait compte des aspects particuliers des EPP et des autres modèles en ce qu'ils touchent à l'acceptation publique seraient intéressantes pour les réformes futures et l'élaboration des politiques générales. La réussite et l'efficacité d'un système de plainte contre la police reposent en grande partie sur l'acceptation publique. La crédibilité d'un système de plainte contre la police doit bien entendu satisfaire à des critères importants établis par les dirigeants policiers, les associations policières et les dirigeants de première ligne. Toutefois, la participation publique à ces systèmes et leur soutien dépendent d'une meilleure compréhension des éléments précis qui contribueront à des pratiques et des principes accessibles, responsables, justes, indépendants et transparents.

4.7 Commentaire sur la recherche – EPP, production de connaissances policières générales et soutien de la recherche

Préconiser davantage de recherche est une réaction universitaire prévisible face à presque n'importe quel problème, mais il ressort clairement du présent examen que les recherches adéquates de nature universitaire ou politique font manifestement défaut en ce qui a trait aux EPP et aux solutions de rechange. La bibliographie annotée indique relativement peu d'articles ou de rapports de recherche fondés directement sur une analyse des EPP. Le phénomène est surprenant étant donné l'importance des EPP et il est souligné par le fait qu'il s'agit du premier document de recherche qui tente réellement de recueillir et d'analyser les renseignements disponibles en matière de travaux de recherche et de politiques sur cet enjeu crucial. Il ne faut pas s'étonner de l'absence de recherches sur les EPP au Canada dans le contexte élargi de la recherche limitée et fragmentée sur la police concernant pratiquement tous les enjeux des services de police, en particulier les services de police appliqués. Faute d'un centre de recherche sur les sciences sociales et sur la police au Canada et du soutien du gouvernement, du secteur privé ou de la police à l'égard de la recherche, la plupart des enjeux canadiens en matière de services de police et de politiques ne reposent pas sur des données de recherche, des évaluations, ni même une surveillance continue. La rareté des travaux empiriques, soit sur les EPP ou les solutions de rechange, n'est donc pas surprenante, puisqu'on ne sait pas qui financerait ces recherches ou les réaliserait.

La recherche sur les EPP pose un autre problème : comme bon nombre d'autres enjeux liés aux services de police, elle représente un enjeu public et politique controversé. Par conséquent, la recherche, qu'elle soit effectuée par des organismes policiers ou civils d'examen sera considérée comme partisane et peu fiable. Idéalement, il faudrait octroyer un financement adéquat aux organisations ou organismes indépendants de recherche comme la British Police Foundation [fondation de la police britannique], qui assume la responsabilité d'entreprendre une recherche indépendante sur les enjeux des services policiers comme les EPP et qui en a la capacité. En outre, les services de police comme la GRC, laquelle adopte des politiques et des stratégies qui formulent diverses hypothèses, doivent pouvoir prouver que leurs politiques et pratiques sont fondées sur des données de recherche raisonnables et permanentes. Le phénomène n'est pas courant au sein des services de police au Canada, mais nous sommes d'avis que son absence donne lieu à une mauvaise politique et à des pratiques inefficaces en matière de services de police. Qui plus est, la police, les organismes d'examen externes et les organismes gouvernementaux doivent disposer de ressources et de la capacité de transcender l'examen et les enquêtes dans les cas simples afin de mener le genre de recherche requise pour cerner de façon proactive les causes des problèmes et étudier les pratiques et modèles de rechange. Le présent projet de recherche sur les EPP est un exemple du type d'acquisition de connaissances pouvant susciter un débat constructif et mener à l'élaboration de politiques tangibles.

5. Conclusion

L'examen des travaux de recherche et de la documentation relative aux politiques sur la question des enquêtes de la police sur la police (EPP) dans un contexte de gouvernance laisse entrevoir un certain nombre de conclusions. Nonobstant l'absence d'études empiriques sur la dynamique des EPP et de ses autres modèles civils et sur les problèmes qui en découlent, il ne semble pas y avoir de consensus dans la documentation selon lequel les modèles traditionnels d'EPP ne sont plus justifiables, soit en tant que modèle efficace permettant de donner suite aux plaintes du public soit en tant que méthode satisfaisant aux exigences du public à l'égard de la responsabilisation. Toutefois, bien que chacun convienne des limites du modèle traditionnel d'EPP, le consensus est moins accentué sur ses variantes civiles.

On estime que l'examen civil des EPP représente une amélioration par rapport aux modèles d'enquête policière uniquement, mais les modèles d'examen civil avec des mandats d'examen limités sont également considérés comme étant inadéquats. Le recours continu aux enquêtes policières sur les suspects et l'absence de pouvoir pour statuer sur les cas a produit des résultats décevants et ébranlé la confiance du public. Les critiques revendiquent des modèles d'examen civil plus robustes dotés de mandats plus vastes, qui comprennent la capacité non seulement d'examiner les enquêtes, mais également de formuler des recommandations pouvant influer sur les résultats concernant les cas, les politiques opérationnelles et les diverses conditions organisationnelles qui entraînent des plaintes. On considère que la tendance vers un nouveau type de responsabilisation de la police (Chan, 1998) qui privilégie la conformité et la gestion des risques à l'interne est, en dernier ressort, plus efficace que l'examen civil externe des EPP.

L'évaluation de la recherche donne également à penser qu'il faut nuancer les revendications en faveur de « modèles d'enquête et d'examen civil », attrayants en théorie, par une appréciation réaliste de la nécessité d'obtenir la coopération et la participation de la police. Des spécialistes du domaine de la police (Bayley, 1983; Reiner, 1992), qui comprennent bien les réalités et la dynamique des services de police et de la culture policière, laissent entendre que les modèles d'examen d'EPP devraient renforcer, non pas fragiliser, la responsabilité et la capacité de la police de régir le comportement de ses propres membres. Par conséquent, on prône la promotion de modèles hybrides policiers-civils d'examen et d'enquête qui reconnaissent le rôle légitime, mais limité, de la police dans le processus d'enquête et d'examen en association avec des enquêtes civiles et une surveillance civile rigoureuse.

C'est ainsi que notre interprétation de la documentation nous amène à proposer que le rôle futur de la police dans le processus d'enquête et d'examen consiste à favoriser une autoréglementation et une responsabilisation internes plus efficaces tout en mettant également en place des modèles d'enquête et de surveillance civiles plus puissants, mais en collaboration. Pour être efficaces, ces modèles doivent pouvoir donner suite aux préoccupations légitimes de la police au sujet d'enquêtes fondées et justes sur ses activités tout en assurant la protection des garanties juridiques et de l'intérêt public et que, au bout du compte, les corps de police, comme toute institution publique, sont responsables devant la loi et l'opinion publique. Donc, même s'il est juste de dire qu'il y a eu changement de paradigme des modèles traditionnels d'enquête et de surveillance contrôlés par la police au profit du nouveau paradigme de surveillance et d'enquête civile-policière, ce dernier est toujours en voie d'élaboration dans différentes administrations, selon une approche par tâtonnements, car on tente d'atteindre le difficile équilibre entre les préoccupations de la police et celles du public.

Partie II : Bibliographie

La présente section inclut les articles cités au cours de l'analyse critique précédente ou ceux qui sont réputés présenter une importance supplémentaire dans la prise en compte élargie des enjeux et points de vue entourant le thème de la police enquêtant sur la police. Comme les annotations et l'examen sont axés sur la recherche et les commentaires afférents à la police enquêtant sur la police, la bibliographie ci-après, bien qu'utile, n'a pas de lien direct avec le présent projet. Dans plusieurs cas, les ouvrages cités sont issus de la documentation canadienne de plus en plus abondante sur ce thème et sur des sujets connexes. D'autres ouvrages cités renvoient à une réflexion internationale, comparative, qui aborde de façon générale la responsabilisation de la police, l'examen civil et la surveillance civile. Encore une fois, l'initiative visait à isoler les travaux de recherche ainsi que les autres articles et rapports susceptibles d'être importants et révélateurs pour le projet de la police enquêtant sur la police. De même, une attention particulière a été portée pour s'assurer que la présente section reflète la documentation des universitaires et des praticiens contemporains.

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1 Toutefois, très peu de travaux d'érudition portent en fait sur l'examen approfondi du déroulement des enquêtes internes. Cela peut être attribuable au manque d'accès aux dossiers internes complets d'enquête sur les plaintes, qui sont confidentiels, ou à la résistance des services de police qui souhaitent éviter d'exposer à l'examen externe leurs fonctions liées aux affaires internes (Liederback et coll., 2007).

2 La recherche donne à penser que les pratiques générales en matière d'enquête policière sont demeurées relativement immuables au cours des 30 dernières années en dépit de changements importants au sein de la police (Horvath, Messig et Lee, 2001).

3 Selon la British Crime Survey 2006-2007, les gens étaient insatisfaits de la façon dont la police avait réglé les plaintes (taille de l'échantillon : 10 000) : 64 % étaient « très insatisfaits », 15 % « un peu insatisfaits » et 20 % « satisfaits » ou « très satisfaits » (IPCC, 2008). Il importe de reconnaître le rôle de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), en particulier les articles 2 et 3 (relatifs au droit à la vie et au droit de ne pas être soumis à la torture ou à un traitement inhumain ou humiliant); l'Independent Police Complaints Commission (IPCC) [commission indépendante des plaintes contre la police] est l'organe responsable du respect de ces articles de la CEDH. Les plaintes déposées à l'IPCC ont considérablement augmenté : de 15 855 en 2003-2004, elles sont passées à 28 998 en 2006-2007. L'exemple extrême de l'approche axée sur le décret de consentement aux États-Unis est abordé ailleurs dans le présent rapport (Davis, Henderson et Mandlestam, 2005).

4 On trouvera un examen plus détaillé du consentement de décret américain et de son application à Pittsburgh (Pennsylvanie) dans la partie II.1 – Bibliographie annotée, sous Davis et coll., 2000.

5 Pour la description complète des divers modèles de surveillance en Australie, voir Lewis et Prenzler, 1999; pour la Grande-Bretagne, voir KPMG, 2000; pour les États-Unis, voir le Police Assessment Resource Center [centre de ressources d'évaluation de la police], 2005).

6 La GRC a demandé au Service de police d'Ottawa qu'il enquête sur les préoccupations liées aux régimes de retraite et d'assurances, ce qui a par la suite constitué le fondement de l'examen de l'enquêteur indépendant en 2005.

7 Sera renommée la Commission civile de l'Ontario sur la police dès l'adoption du projet de loi 103.

8 L'ASIRT a un directeur civil, un directeur adjoint civil, quatre enquêteurs civils et dix enquêteurs de police assermentés (provenant du service de police de Calgary, du service de police d'Edmonton et de la GRC).

9 La PCC a des enquêteurs de police et des enquêteurs civils.

10 La CMC a vu le jour le 1er janvier 2002 lorsque la Criminal Justice Commission (CJC) [commission de la justice criminelle] et la Queensland Crime Commission (QCC) [commission sur la criminalité du Queensland] ont été fusionnés pour former un seul organe de lutte contre la criminalité et l'inconduite dans le secteur public. Son mandat englobe l'ensemble de la fonction publique, y compris la Queensland Police [service de police du Queensland].

11 L'IPCC a un enquêteur principal, qui était l'ancien surintendant détective au sein d'un service de police britannique, et des enquêteurs civils.

12 Elle a commencé à offrir ses services le 1er avril 2004 lorsqu'elle a remplacé la Police Complaints Authority (PCA) [autorité responsable des plaintes contre la police].

13 On indique que la CCRB est dotée d'enquêteurs « non policiers ».

14 Le 10 septembre 2008, le NYPD et le CCRB ont annoncé un projet pilote dans le cadre duquel les procureurs du CCRB siégeraient aux côtés des procureurs du NYPD dans le cas des procès pour mesure disciplinaire concernant le CCRB. Le projet pilote vise à renforcer la coopération et le dialogue entre le CCRB et le NYPD concernant les cas fondés du CCRB.

15 L'UES dispose actuellement d'un effectif de 40 enquêteurs « civils »; le directeur général est un ex-surintendant du service de police régional de Halton.

16 Cet organe d'examen des plaintes du public a été créé par le projet de loi 103, qui a obtenu la sanction royale le 17 mai 2007, et seul le directeur indépendant de l'examen de la police est en poste.

17 L'ombudsman du PONI est un ancien commissaire adjoint de la GRC; le directeur principal des opérations est un ancien sous-chef de police; et le directeur des opérations est un surintendant principal détaché.

18 L'IPRA est dirigé par un administrateur en chef civil et est doté « entièrement » d'enquêteurs civils.

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