Réponse de la commissaire
Liens connexes
- Rapport final de la CCETP
11 décembre 2020 - Rapport intérimaire de la CCETP
23 juin 2017
LE 20 NOVEMBRE 2020
Madame Michelaine Lahaie
Présidente
Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC
C.P. 1722, succursale B
Ottawa (Ontario)
K1P OB3
Madame,
J'accuse réception du rapport de la Commission concernant l'enquête d'intérêt public relativement à des allégations selon lesquelles la Gendarmerie royale du Canada (GRC) aurait surveillé de manière abusive des personnes et des groupes cherchant à participer aux audiences de l'Office national de l'énergie (ONE) et divulgué des renseignements à leur sujet, dossier no PC‑2014‑0380.
J'ai examiné l'affaire en cause, y compris les conclusions et les recommandations présentées dans le rapport intérimaire de la Commission.
Je suis d'accord avec la conclusion no 1, selon laquelle il était raisonnable de la part de la GRC d'assurer une présence visible lors des audiences de l'ONE.
Je suis d'accord avec la conclusion no 2, selon laquelle il était raisonnable de la part de la GRC de surveiller la manifestation de Prince Rupert.
Je suis d'accord avec la conclusion no 3, selon laquelle il était raisonnable de la part de la GRC de surveiller des événements dans le but de détecter des activités criminelles.
Je suis d'accord avec la conclusion no 4, selon laquelle la GRC a agi raisonnablement en surveillant les manifestations.
Je suis d'accord avec la conclusion no 5, selon laquelle il était raisonnable de filmer les manifestations.
Je suis d'accord avec la conclusion no 6, selon laquelle, comme en témoigne la politique sur l'utilisation d'une caméra de surveillance en circuit fermé sur laquelle se fonde la GRC, celle-ci n'a pas de politique claire sur l'enregistrement vidéo d'événements susceptibles de troubler l'ordre public comme des manifestations et des protestations.
J'appuie la recommandation no 1, à savoir que la GRC devrait envisager de se doter d'une politique régissant l'enregistrement vidéo de protestations et de manifestations qui énonce des critères et des conditions pour l'enregistrement vidéo de tels événements, et qui précise les périodes pendant lesquelles ces enregistrements seront conservés.
Des politiques opérationnelles sont en cours d'élaboration en ce qui a trait au maintien de l'ordre lors de rassemblements publics. Ces politiques porteront notamment sur l'enregistrement vidéo de protestations et de manifestations, et renverront aux politiques existantes sur la gestion de l'information et les périodes pendant lesquelles les enregistrements peuvent être conservés. D'autres politiques feront l'objet d'un examen afin de déterminer si on doit les modifier pour y intégrer une partie sur l'enregistrement vidéo d'événements comme ceux susmentionnés. Je demanderai que des dispositions concernant le maintien de l'ordre lors de rassemblements soient ajoutées dans la nouvelle politique; et que des dispositions concernant l'enregistrement vidéo de protestations et de manifestations soient ajoutées à la politique 55.2, « Manifestations et protestations autochtones », et au chapitre 37.7, « Conflits de travail », du Manuel des opérations. Ces ajouts énonceront des critères généraux concernant cette pratique et renverront aux politiques de la GRC sur la gestion de l'information et les périodes pendant lesquelles les enregistrements peuvent être conservés.
J'appuie la recommandation no 2, à savoir que, plus particulièrement, la totalité des enregistrements et des images captés lors de protestations et de manifestations pacifiques devrait être détruite dès qu'il est possible de le faire.
Au moment des audiences de l'ONE, il existait peu de politiques sur l'enregistrement vidéo de protestations ou de manifestations. Le chapitre 16.4 du Manuel des opérations, « Matériel vidéo en circuit fermé », était en vigueur à ce moment-là et prévoyait que, si aucun événement important ne s'était produit, les enregistrements devaient être considérés comme étant des documents éphémères, conservés pendant une période donnée, déterminée par les chefs des détachements. La politique a depuis été modifiée et les périodes de conservation sont maintenant indiquées dans la politique de la GRC portant sur la gestion de l'information des supports enregistrés, comme les enregistrements vidéo. La GRC gère l'information obtenue dans le cadre de l'exercice de ses fonctions conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels et aux politiques sur la gestion de l'information de la GRC. Les périodes de conservation des supports enregistrés sont indiquées au chapitre 2.3, « Ressources documentaires de nature opérationnelle », du Manuel de gestion de l'information. Nous profiterons de l'occasion pour examiner et confirmer les politiques actuelles et ainsi veiller à ce que les supports enregistrés soient détruits dès qu'il est possible de le faire.
Je suis d'accord avec la conclusion no 7, selon laquelle il était raisonnable de la part de la GRC de surveiller les sources ouvertes afin de recueillir des renseignements sur les manifestations et les protestations à venir.
Je suis d'accord avec la conclusion no 8, selon laquelle la politique actuelle de la GRC sur l'utilisation des sources ouvertes ne donne pas d'orientations claires quant à la collecte, l'utilisation et la conservation de renseignements personnels obtenus sur les réseaux sociaux dans les situations où aucun lien avec des activités criminelles n'a été établi.
Comme vous le savez, dans ma réponse aux manifestations contre le gaz de schiste dans le comté de Kent (Nouveau-Brunswick), j'étais généralement d'accord avec une conclusion semblable. La GRC a adopté sa première politique à cet égard, c'est-à-dire le chapitre 26.5, « Utilisation d'Internet aux fins d'enquête et de renseignements criminels », du Manuel des opérations, en mars 2015. Le 15 juillet 2019, le chapitre 26.5 a été modifié et se nomme maintenant « Utilisation d'Internet pour l'acquisition de renseignements de sources ouvertes et la conduite d'enquêtes criminelles ». Cette mise à jour de la politique a modifié les rôles et les responsabilités du Groupe de la recherche tactique sur Internet en soutien aux opérations ainsi que des chefs de service, et harmonisé la politique avec les plus récents progrès technologiques dans le domaine de la collecte de renseignements de sources ouvertes. La mise à jour n'a pas modifié les principales dispositions figurant dans la version originale.
La réponse aux événements survenus dans le comté de Kent était fondée sur les renseignements connus à ce moment et fournis par les divers centres de décision consultés dans le cadre du rapport. Depuis ma réponse concernant le comté de Kent datant du 17 juin 2020, j'ai examiné une ébauche du rapport de l'audit sur les renseignements de sources ouvertes. J'ai également passé en revue votre rapport final sur le comté de Kent, publié le 12 novembre 2020.
Lorsque le chapitre 26.5, « Utilisation d'Internet aux fins d'enquête et de renseignements criminels », du Manuel des opérations est entré en vigueur en 2015, et après qu'il a fait l'objet d'un examen en 2019, on estimait que la politique était adéquate. Même si la politique était en place, l'audit sur les renseignements de sources ouvertes de 2020 a permis de révéler qu'elle était peu connue et que les taux de conformité étaient très faibles parmi les personnes interviewées. L'audit a permis de cerner des possibilités d'élaborer un cadre de gouvernance plus robuste, ainsi que d'examiner et de renforcer la politique 26.5 actuelle du Manuel des opérations de même que toute autre politique portant sur la collecte, le stockage et la conservation de renseignements de sources ouvertes. Le rapport d'audit et le plan d'action de la direction au sujet des renseignements de sources ouvertes seront disponibles au moment de leur publication.
Compte tenu de ce qui précède, j'appuie la recommandation no 3, à savoir que la GRC devrait fournir des lignes directrices claires qui décrivent les renseignements personnels pouvant être recueillis sur les sites de médias sociaux, les utilisations qui peuvent en être faites, et les mesures devant être prises pour s'assurer de leur fiabilité. Je demanderai que ces mesures soient prises dans le cadre du plan d'action de la direction pour l'audit sur les renseignements de sources ouvertes.
J'appuie, en partie, la recommandation no 4, à savoir que la politique de la GRC devrait exiger la destruction des dossiers obtenus à partir de sources de médias sociaux contenant des renseignements personnels (comme des captures d'écran de sites de médias sociaux) une fois qu'il est établi qu'il n'y a pas de lien entre les renseignements et des activités criminelles.
Il existe déjà une politique sur la gestion de l'information qui établit des périodes de conservation à partir du moment où des renseignements sont ajoutés à un dossier opérationnel. Ces renseignements sont ensuite protégés par la Loi sur la protection des renseignements personnels et la Loi sur l'accès à l'information, ainsi que par la politique sur la gestion de l'information et les processus de la Sous-direction de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels de la GRC.
Comme mentionné plus tôt, depuis ma réponse à une recommandation semblable au sujet des manifestations dans le comté de Kent, j'ai appris de nouvelles informations. Les politiques sur les renseignements de sources ouvertes et la gestion de l'information de la GRC seront examinées et renforcées en ce qui a trait à la conservation de dossiers obtenus à partir de sources de médias sociaux, par l'entremise du rapport d'audit et du plan d'action de la direction au sujet des renseignements de sources ouvertes. Je demanderai que cette recommandation soit mise en œuvre dans le cadre de ces travaux.
Je suis d'accord avec la conclusion no 9, selon laquelle la Commission ne dispose pas de suffisamment de renseignements pour conclure qu'il était déraisonnable de conserver le profil et les renseignements personnels de Personne G.
Je suis d'accord avec la conclusion no 10, selon laquelle la GRC ne dispose pas d'une politique ou de lignes directrices claires concernant l'utilisation et la conservation des renseignements personnels lorsqu'il est déterminé qu'il n'y a aucun lien avec des activités criminelles.
J'appuie la recommandation no 5, à savoir que la GRC devrait se doter d'une politique lui interdisant de conserver les renseignements personnels qu'elle a recueillis une fois qu'il est établi qu'ils ne sont liés à aucune activité criminelle.
La GRC prend très au sérieux ses obligations législatives consistant à protéger tous les renseignements personnels, qu'ils soient liés ou non à une activité criminelle. Dans le contexte de la collecte de renseignements de sources ouvertes aux fins d'application de la loi ou de renseignements criminels, je demanderai que les politiques concernant la conservation de l'information soient modifiées et, au besoin, que de nouvelles politiques soient élaborées.
Je suis d'accord avec la conclusion no 11, selon laquelle il n'était pas déraisonnable d'effectuer des vérifications dans les sources ouvertes et la base de données interne dans les autres cas examinés par la Commission.
Je suis d'accord avec la conclusion no 12, selon laquelle il était raisonnable pour la GRC d'assister à l'atelier et de faire des observations.
Je suis d'accord avec la conclusion no 13, selon laquelle il n'était pas déraisonnable de prendre en note des numéros de plaque d'immatriculation aux fins de la collecte de renseignement.
Je suis d'accord avec la conclusion no 14, selon laquelle la GRC n'a pas de politique ni de ligne directrice concernant la collecte, l'utilisation et la conservation des numéros de plaque d'immatriculation et des renseignements personnels qui y sont rattachés pour les besoins de la collecte de renseignements.
J'appuie la recommandation no 6, à savoir que la GRC devrait se doter d'une politique prévoyant que, lorsqu'un numéro de plaque d'immatriculation et les renseignements personnels qui y sont rattachés ne sont pas liés à une activité criminelle, les renseignements ne devraient pas être conservés.
Au fil des ans, il y a eu différentes opinions et décisions juridiques à savoir si les numéros de plaque d'immatriculation constituent des renseignements personnels. Par conséquent, ce sujet mérite d'être examiné de plus près, et il pourrait l'être lors de l'examen de diverses politiques réalisé dans le cadre de l'audit et du plan d'action de la direction au sujet de renseignements de sources ouvertes. Je demanderai à ce que ce soit fait.
Je suis d'accord avec la conclusion no 15, selon laquelle il était raisonnable pour la GRC de partager avec Ressources naturelles Canada des renseignements au sujet de menaces potentielles aux infrastructures énergétiques essentielles.
Je suis d'accord avec la conclusion no 16, selon laquelle la GRC n'a pas partagé de renseignements obtenus de sources confidentielles avec l'ONE.
Je suis d'accord avec la conclusion no 17, selon laquelle il était raisonnable dans les circonstances pour la GRC de partager des renseignements et des évaluations de la menace avec l'ONE.
Je suis d'accord avec la conclusion no 18, selon laquelle il n'était pas raisonnable pour la GRC de partager les renseignements personnels concernant un organisateur de la manifestation avec l'ONE.
J'appuie la recommandation no 7, à savoir que le Détachement de Kelowna devrait revoir toutes ses politiques régissant la collecte, la conservation et la divulgation des renseignements personnels et prendre des mesures pour veiller à ce qu'il y ait divulgation de renseignements personnels seulement lorsqu'elle est conforme à la législation et aux politiques.
Le rapport a cerné un seul incident, qui s'est produit il y a plusieurs années. Par conséquent, il ne s'agit pas d'une habitude ou d'un problème généralisé du Détachement de Kelowna. Bon nombre d'employés, et peut-être même la majorité d'entre eux, ont probablement été transférés depuis cet incident. Toutefois, il est judicieux que le commandant du Détachement de Kelowna passe en revue les politiques, comme indiqué dans les recommandations. En plus des recommandations, je demanderai que les officiers responsables des enquêtes criminelles de la Division « E » passent également en revue les mêmes politiques.
J'ai hâte de recevoir votre rapport final sur l'affaire en cause.
Je vous prie d'accepter, Madame, l'expression de mes sentiments distingués.
Brenda Lucki
Commissaire
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