ARCHIVÉ - Utilisation de l'arme à impulsions (AI) à la GRC
Informations archivées
Les informations archivées sont fournies aux fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elles ne sont pas assujetties aux normes Web du gouvernement du Canada et n'ont pas été modifiées ou mises à jour depuis leur archivage. Pour obtenir ces informations dans un autre format, veuillez communiquez avec nous.
Rapport intérimaire
Comprenant les recommandations à mettre en oeuvre immédiatement
11 décembre 2007
Liens connexes
Table des matières
- Résumé
- Introduction
- Arme à impulsions
- Plaintes présentées à la Commission concernant l'AI
- Ce qu'est le délire agité
- Résumé de l'analyse documentaire initiale
- Politique sur l'AI et protocoles
- Le MIGI et le recours à la force
- Formation de la GRC sur l'utilisation de l'AI
- Recommandations intérimaires de la Commission
- Glossaire
- Annexe A : Extrait de la réponse du commissaire de la GRC aux rapports intérimaires de la Commission
- Annexe B : Documents examinés
- Annexe C : Politique sur l'arme à impulsions - en vigueur à la GRC
Résumé
L'atout le plus puissant dont dispose un policier est l'appui du public. Toute circonstance pouvant saper cet appui compromet la capacité d'un policier de bien exercer ses fonctions pour la population. C'est ainsi que l'utilisation de l'arme à impulsions (AI)[1] et des autres techniques de recours à la force par les forces de l'ordre représente un enjeu de politique gouvernementale. La nature même du maintien de l'ordre et la dynamique de la relation entre la police et ceux qui sont surveillés remettent en question les interventions et les techniques dont le personnel des forces de l'ordre peuvent se prévaloir et qui seraient autrement illégales pour la plupart des citoyens.
Les services de police ont besoin d'outils et de techniques qui les habilitent justement et raisonnablement à accomplir leur travail qui consiste à faire respecter les lois et à protéger la société tout en se protégeant eux-mêmes. Par ailleurs, les citoyens ont le droit de ne pas être victimes de pratiques et comportements déraisonnables de la part de la police qui constituent un abus et fragilisent les libertés civiles. En raison de cette relation dynamique, les politiques de services de police sont primordiales pour la perception du public à l'égard de la police du fait qu'elles établissent les normes à l'égard desquelles la GRC, dans son ensemble, et ses membres, individuellement, peuvent être tenus responsables. À ce titre, l'élaboration de politiques est au coeur de la gouvernance de la police.
Actuellement, l'AI est l'une des quelques armes de recours à la force mises à la disposition des forces de l'ordre. À ce titre, l'AI sert dans des situations particulières exigeant des moyens d'intervention moins meurtriers pour réduire le risque de blessures ou le décès du policier et du sujet lorsqu'il convient de recourir à la force pour assurer la sécurité publique et celle des policiers. Autrement dit, il s'agit d'une option dans les cas où l'on aurait autrement envisagé le recours à la force létale. Toutefois, le recours à l'AI s'est répandu au point où on l'utilise pour maîtriser les sujets réfractaires qui ne représentent pas une menace de mort ou de lésions corporelles graves et contre lesquels le recours à la force létale ne serait pas une option. Il s'agit de déterminer dans quelles situations l'utilisation de l'AI est inappropriée.
La Commission des plaintes du public contre la GRC (Commission) ne recommande pas un moratoire absolu sur l'utilisation de l'AI à la GRC puisque l'arme est utile dans certaines situations. Il convient plutôt de classifier de façon appropriée l'AI dans l'utilisation des modèles de recours à la force pour des comportements très précis dans des situations très particulières. Cela suppose de restreindre l'utilisation de l'AI en modes paralysant et sonde et de la classer dans la catégorie « arme à impact », dont l'utilisation n'est justifiée que dans les situations où le sujet a un comportement « combatif » ou représente une menace de « mort ou de lésions corporelles graves ».
À la GRC, la politique en vigueur classifie l'AI comme un « dispositif intermédiaire », la plaçant dans la même catégorie que l'aérosol capsique. Cette classification permet d'utiliser l'arme contre un sujet dont le comportement est jugé « résistant » et non pas seulement « combatif » ou qui représente une menace de « mort ou de lésions corporelles graves » pour l'agent, le sujet lui-même ou le public. La Commission est d'avis que la classification de l'AI comme « dispositif intermédiaire » autorise l'usage de l'arme plus tôt qu'il n'est raisonnable de le faire.
L'approche adoptée par la GRC illustre clairement un changement dans l'usage autorisé par rapport à l'intention initiale en 2001 qui était plus restrictive : l'arme devait être utilisée pour maîtriser les suspects qui résistaient à l'arrestation, avaient un comportement « combatif » ou qui étaient suicidaires. La Commission qualifie cet usage répandu et moins restrictif d'« usage exponentiel ». Ainsi, l'arme est utilisée en dehors des objectifs énoncés, comme l'ont démontré les cas examinés par la Commission au cours des six dernières années où les sujets ont affiché des comportements qui étaient manifestement non combatifs ou ceux où il n'y avait pas de résistance active.
À la GRC, la politique en vigueur relative à l'utilisation de l'AI a évolué sans que l'on tienne compte suffisamment, si tant est qu'on en tienne compte, des réalités entourant l'utilisation de l'arme par la GRC. Il semble que les modifications apportées à la politique aient tenu compte, de façon appropriée, des expériences des sources externes, mais le défaut d'établir une corrélation entre ces données et les expériences particulières de la GRC constitue une omission importante, laquelle devrait être rectifiée le plus tôt possible.
Il est particulièrement inquiétant de constater que l'on dénombre actuellement 2 840 AI à la GRC et, depuis l'adoption du dispositif, 9 132 membres ont suivi une formation sur son utilisation; toutefois, la GRC n'a produit aucune donnée empirique sur les avantages ou les inconvénients liés à l'utilisation de l'arme. L'AI a été utilisée en modes paralysant et sonde à plus de 3 000 reprises depuis son arrivée en décembre 2001, mais aucun rapport annuel n'a encore été produit, et les renseignements saisis dans le Rapport d'utilisation de l'arme à impulsions n'ont pas fait l'objet d'un examen approfondi et n'ont pas servi à l'élaboration de la politique actuelle concernant l'AI. Qui plus est, la base de données sur l'utilisation de l'AI à la Direction générale n'est entièrement fonctionnelle que depuis la fin de 2005. Or, c'est à la fin de 2001 que l'AI a été utilisée la première fois sur le terrain. Des données exactes et valables sur l'utilisation de l'AI sont cruciales pour qui veut comprendre quand et pourquoi les membres emploient certaines techniques de recours à la force et pour permettre aux officiers supérieurs de prendre des mesures correctives au besoin.
Le défaut de recueillir, de rassembler ou d'analyser comme il se doit ses propres données suppose que la GRC est incapable, par sa propre inertie, d'établir des liens avec les recherches externes sur l'utilisation de l'AI à la GRC. Six ans après l'ajout de l'AI à l'arsenal de la GRC, il n'existe aucune analyse exhaustive ni même superficielle rapidement utilisable permettant à la Commission d'effectuer cet examen. Cette négligence dénote que la GRC a été incapable de mettre en oeuvre des processus de responsabilisation systémique - comme la présentation de rapports destinés au public – et ne peut pas évaluer les effets que les modifications apportées à la politique ont eus sur l'utilisation de l'AI, la formation ou la protection des policiers et du public. En réalité, l'utilisation de l'AI a été libéralisée sans une analyse réfléchie complète ou un plan stratégique, ce qui constitue une lacune capitale dans la gestion et la surveillance de l'AI.
La supervision des membres qui utilisent l'AI est une autre façon de garantir la pertinence. Bien que la Commission n'ait pas pu examiner entièrement les données se rapportant au nombre de membres et instructeurs ayant suivi une formation sur l'utilisation de l'AI en fonction du grade, les chiffres indiquent généralement que les superviseurs sur le terrain n'ont pas tous suivi une telle formation. Pourtant, ces superviseurs sont les seuls responsables des membres sous leur contrôle qui peuvent être autorisés à utiliser l'arme et ils remplissent les formulaires requis à présenter à la Direction générale. La Commission est d'avis qu'il y a entrave aux mesures correctives pouvant s'imposer dans le cas des membres qui ont utilisé les AI d'une manière inappropriée si le superviseur n'a pas suivi une formation et n'est pas accrédité.
Il convient de prévoir un mécanisme visant à garantir la conformité continue avec le modèle de recours à la force de la GRC et la politique en vigueur sur l'utilisation de l'AI dans le cadre d'opérations. La GRC a reconnu que l'évaluation et la reddition de comptes appropriées concernant l'utilisation de l'AI exigent des analyses et des rapports adéquats. Ces renseignements sont essentiels pour dissiper les préoccupations liées à l'utilisation et élaborer des politiques et des pratiques pertinentes et applicables. Outre l'absence d'évaluation à l'échelle de la GRC concernant l'utilisation de l'AI, on ne s'est guère penché sur les questions visant à déterminer l'effet qu'avait l'utilisation de l'AI sur l'application d'autres techniques de recours à la force. Ce sont également des aspects clés qu'il convient de prendre en considération au moment de déterminer le bien-fondé général de l'AI. Pour garantir l'uniformité des pratiques et politiques et pour établir un mécanisme de responsabilité défini, outre améliorer la transparence, il est essentiel de mettre en place un coordonnateur national du recours à la force à la GRC.
Les programmes de formation doivent veiller à ce que les membres de la GRC apprennent à utiliser une AI comme il se doit et à ce que le processus décisionnel et l'évaluation des facteurs conjoncturels en fonction du modèle de recours à la force soient pertinents et justifiables au moment d'utiliser l'arme. Le modèle de recours à la force est enseigné à grande échelle durant la formation des cadets à la Division Dépôt lorsque ces derniers suivent une formation portant sur presque tous les autres types de moyens d'intervention, y compris l'utilisation des armes à feu. Toutefois, la formation sur l'AI n'est pas enseignée en même temps que les autres méthodes de recours à la force, mais il semble que la situation soit en train de changer. Actuellement, la formation sur l'AI peut être offerte des années après la formation des cadets à la Division Dépôt, et l'exigence du recyclage annuel a été réduite à tous les trois ans. La Commission croit que cette période est trop longue et que le recyclage tous les deux ans est plus approprié. Ainsi, ceux qui sont autorisés à utiliser les AI demeurent au courant de la politique, des changements apportés à la politique, des techniques d'évaluation de la situation et des expériences dans l'utilisation du modèle de recours à la force.
Ces derniers mois, les incidents tragiques associés à l'utilisation de l'AI ont accentué l'intérêt du public à l'égard de l'arme. La GRC compte sur les études portant sur la sécurité relative des AI en tant que technologie moins meurtrière. Toutefois, bon nombre de ces mêmes études soulignent le manque de recherche se rapportant aux « groupes à risque ». Il est impératif que l'on poursuive les recherches visant à établir les niveaux de sécurité pour les « groupes à risque » et à déterminer si, en vertu de la symptomatologie même de ces groupes (c.-à-d. consommation de drogue ou troubles mentaux), ils peuvent être exposés à un nombre disproportionné d'interventions policières où l'utilisation de l'AI peut être jugée appropriée.
Dans l'examen de l'utilisation de l'AI par le personnel des forces de l'ordre, il est évident que l'on doit tenir compte de l'état de délire agité. Soulignons cependant que le terme n'est pas universellement accepté dans le milieu médical. Le délire agité, même s'il constitue toujours une question litigieuse pour certains, a été désigné dans la documentation comme un problème médical incontestable dont le personnel des forces de l'ordre doit tenir compte. Toutefois, pour ce qui est de l'utilisation des AI, on croit actuellement que les sujets qui sont dans un état de délire agité ont immédiatement besoin d'une intervention médicale et que le traitement ne devrait pas être retardé dans l'espoir que l'état du sujet s'améliorera. D'après la Commission, les AI ne constituent pas une option privilégiée pour maîtriser le sujet en état de délire agité, sauf s'il manifeste un comportement combatif ou qu'il représente une menace de mort ou de lésions corporelles graves pour l'officier, le sujet lui-même ou le public. À ce titre, l'AI n'est pas un outil médical à utiliser contre les sujets qui semblent en état de délire agité. Il est clair que la participation de la GRC à la recherche portant sur l'AI est nécessaire pour appuyer l'élaboration de politiques et de pratiques en la matière.
Pour donner suite à ces préoccupations et aux autres points indiqués dans ce rapport intérimaire, voici ce que la Commission recommande de mettre en oeuvre immédiatement :
Recommandation 1 : La GRC doit restreindre immédiatement l'usage de l'arme à impulsions en la classifiant comme une « arme à impact » dans les modèles de recours à la force et autoriser son utilisation seulement dans les situations où le sujet a un comportement « combatif » ou s'il représente une menace de « mort ou de lésions corporelles graves » pour l'agent, le sujet lui-même ou le public. Cela comprend l'utilisation du dispositif en modes paralysant et sonde.
Recommandation 2 : La GRC doit utiliser seulement l'arme à impulsions dans les situations où le sujet semble en état de délire agité lorsque le comportement est « combatif » ou s'il représente une menace « de mort ou de lésions corporelles graves » pour l'agent, le sujet lui-même ou le public.
Recommandation 3 : La GRC doit communiquer immédiatement à tous les membres ce changement dans la classification des techniques de recours à la force.
Recommandation 4 : La GRC doit remanier immédiatement la formation sur les armes à impulsions que les membres suivent afin qu'ils tiennent compte de la classification du dispositif comme « arme à impact ».
Recommandation 5 : La GRC doit modifier immédiatement la politique sur l'arme à impulsions en instaurant l'exigence du recyclage tous les deux ans.
Recommandation 6 : La GRC doit nommer immédiatement un coordonnateur national du recours à la force responsable, à tout le moins, des aspects suivants :
- L'orientation et la coordination nationales de l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- L'élaboration de la formation, des procédures et des politiques nationales relatives à l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- La mise en oeuvre de la formation, des procédures et des politiques nationales relatives à l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- La surveillance de la conformité avec la formation, les procédures et les politiques nationales relatives à l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- La création, la tenue à jour et le chargement des bases de données liées à l'utilisation de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- Les analyses des tendances dans l'utilisation de l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force.
Recommandation 7 : La GRC doit instaurer et appliquer immédiatement des exigences plus rigoureuses en matière de rapport sur l'utilisation des armes à impulsions afin de garantir la préparation des dossiers appropriés et leur transmission à la base de données nationale après chaque utilisation du dispositif.
Recommandation 8 : La GRC doit produire un rapport trimestriel sur l'utilisation de l'arme à impulsions qui sera distribué au ministre de la Sécurité publique, au commissaire de la GRC, au président de la Commission des plaintes du public contre la GRC et à tous les commandants divisionnaires de chaque division et qui fournit au moins les détails suivants :
- Le nombre et la nature des incidents au cours desquels l'arme à impulsions est utilisée;
- Le type d'utilisation (c.-à-d. mode paralysant, mode sonde, menace de recourir à une arme, dégainer, etc.);
- Le nombre de cas où des soins médicaux ont été requis après utilisation de l'arme;
- La nature des préoccupations ou des troubles médicaux après utilisation de l'arme;
- Le nombre de membres et d'instructeurs ayant suivi une formation;
- Le nombre ayant réussi la formation et le nombre de membres et d'instructeurs ayant échoué la formation;
- Le nombre ayant réussi le recyclage et le nombre de membres et d'instructeurs ayant échoué le recyclage.
Le rapport trimestriel sera produit pendant une période de trois ans à compter de ce jour.
Recommandation 9 : La GRC doit produire un rapport annuel sur l'utilisation de l'arme à impulsions qui sera distribué au ministre de la Sécurité publique, au commissaire de la GRC, au président de la Commission des plaintes du public contre la GRC et à tous les commandants divisionnaires de chaque division et qui comprend tous les rapports trimestriels de l'année visée et au moins les détails suivants :
- Toutes les données requises et analysées dans le rapport trimestriel;
- La justification des modifications proposées ou réelles de la politique;
- La justification des modifications proposées ou réelles de la formation;
- Une analyse des tendances sur l'utilisation;
- Une analyse du lien entre l'utilisation et la protection du policier ou du public;
- Une analyse du lien entre l'utilisation et les modifications proposées de la politique et de la formation.
Le rapport annuel continuera d'être produit après l'expiration de la période prévue pour le rapport trimestriel.
Recommandation 10 : La GRC doit continuer de participer à la recherche reliée à l'arme à impulsions qui porte sur les aspects sociaux, juridiques et médicaux de l'utilisation du dispositif. Il s'agit ici de mettre l'accent au moins sur les aspects suivants :
- L'utilisation de l'AI, l'infliction d'une douleur et l'importance de cette douleur;
- La pertinence de l'application de l'AI par rapport à d'autres moyens d'interventions axés sur le recours à la force;
- L'utilisation de l'AI contre les populations vulnérables ou à risque;
- Les autres techniques de recours à la force ou interventions lorsqu'il s'agit de personnes présentant des symptômes de délire agité;
- L'utilisation de l'AI, le délire agité et la mort subite dans le contexte des services de police en milieu rural ou dans le Nord;
- Les liens entre l'utilisation de l'AI, le délire agité et la possibilité de mort.
Cela comprend notamment les projets de recherche en collaboration réalisés par le Centre canadien de recherches policières (CCRP).
La Commission a l'intention d'examiner davantage l'utilisation de l'arme à impulsions à la GRC. Compte tenu des difficultés liées à l'obtention de données exactes et valables, du besoin d'évaluer à tous égards les données existantes de la GRC sur l'utilisation de l'AI par les membres de la GRC, du volume de recherche et de documents existants sur le sujet et de la nécessité d'effectuer des comparaisons entre les administrations, la Commission a l'intention de produire un rapport final d'ici l'été 2008 qui porte sur ces aspects et de nombreuses autres questions recensées à ce jour. Le rapport final comprendra des recommandations détaillées.
Paul E. Kennedy
Président, Commission des plaintes du public contre la GRC
Restrictions proposées concernant le Modèle d'interventionpour la gestion d'incidents
Proposed Restrictions on Incident Management/Intervention Model
Cliquez sur l'image pour l'agrandir.
Introduction
Contexte
Le 14 octobre 2007, quatre membres de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) au détachement de Richmond (Colombie-Britannique) ont répondu à une plainte selon laquelle un homme se comportait de manière excentrique à l'aéroport international de Vancouver. Alors que les membres tentaient de maîtriser et d'arrêter l'individu, que l'on a identifié plus tard comme étant M. Robert Dziekanski, ils ont employé une arme à impulsions (AI)[2]. Peu après avoir été arrêté, M. Dziekanski s'est évanoui et est par la suite décédé. Une vidéo ayant capté l'incident a ultérieurement été diffusée sur les réseaux de nouvelles nationales et internationales et a causé tout un émoi dans la population face au traitement qu'avait subi M. Dziekanski et à son décès.
À la suite de l'attention de la presse et du décès de M. Dziekanski, la sécurité et la nécessité des AI ont été remises en question tout comme le comportement des membres en cause dans l'incident survenu à l'aéroport de même que la GRC en général. En réponse, le solliciteur général de la Colombie-Britannique, le coroner de la Colombie-Britannique, le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes, le ministre de la Sécurité publique et la GRC ont tous entrepris des examens indépendants sur l'utilisation des AI.
Le 19 novembre 2007, deux membres de la GRC de Chilliwack ont répondu à un appel concernant M. Robert Knipstrom, qui, d'après certaines informations, avait un comportement agité et menaçant. Pour régler l'incident, la police a utilisé une AI. M. Knipstrom a été transporté à l'hôpital pour y recevoir des traitements; admis à l'hôpital dans un état grave, il est décédé quelques jours plus tard.
Le 20 novembre 2007, le ministre de la Sécurité publique, l'honorable Stockwell Day, a demandé à la Commission « [...] d'examiner tous les protocoles de la GRC concernant l'utilisation des AI et de déterminer si la GRC respectait ces protocoles » et de présenter un rapport intérimaire d'ici le 12 décembre 2007.
À cette fin, la Commission a amorcé un examen de l'ensemble des politiques et protocoles de la GRC relativement à l'utilisation des AI afin de bien saisir la question à l'étude. Plus particulièrement, le rapport intérimaire indiquera et passera brièvement en revue les importantes études canadiennes, le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents (MIGI) de la GRC[3] et le recours à la force, l'historique de l'élaboration de la politique sur l'AI, la formation de la GRC sur l'utilisation de l'AI, les plaintes relatives à l'AI présentées à la Commission de même que les conclusions et recommandations antérieures de la Commission. Le rapport intérimaire fournit les recommandations initiales se rapportant à l'utilisation de l'AI à la GRC.
La Commission préparera également un rapport final qui approfondira les questions examinées dans le rapport intérimaire en plus d'inclure les consultations auprès des organes d'examen provinciaux, des gouvernements provinciaux, des membres de la GRC et des autres intervenants intéressés.
Recours à la force et responsabilité
D'après le Code criminel[4] du Canada, un agent de la paix est fondé à employer la force raisonnablement nécessaire lorsqu'il est obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l'application ou l'exécution de la loi. Ce principe est généralement reconnu comme étant nécessaire pour servir et protéger la société. Toutefois, cette autorisation juridique du recours à la force pour la police n'est pas absolue : la force employée doit être raisonnable et concorder avec la situation dans laquelle se trouvent les agents.
La force dont peut se prévaloir le personnel policier varie : il peut s'agir de guider une personne en lui tenant le coude, de recourir à une technique de clé pouvant aller jusqu'à la force meurtrière, si les circonstances le justifient. À l'intérieur de cette gamme, la police dispose de différentes armes, notamment le vaporisateur de poivre, le bâton ASP, les AI et l'arme réglementaire. Le public compte sur la police pour qu'elle utilise ces armes de manière responsable et raisonnable et que ces armes ne causent pas de préjudices indus. Tous les services de police suivent des lignes directrices concernant l'usage de la force qui aident les agents sur le terrain à bien évaluer la situation et y réagir. Le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents (MIGI) de la GRC qui sert à former et à guider les membres concernant le recours à la force favorise l'évaluation du risque et illustre différents niveaux de comportement résistant et des interventions raisonnables. À l'instar de modèles similaires, le MIGI repose sur le principe selon lequel la meilleure stratégie consiste à utiliser l'intervention minimale nécessaire pour gérer les risques.
Tout comme l'agent de police qui emploie la force pour maîtriser une situation doit justifier et documenter ses actes par la prise de notes et l'expression judiciaire, le service de police est tenu, en tant qu'institution sociale, d'expliquer à la population les raisons pour lesquelles les armes et stratégies utilisées par ses agents sont nécessaires dans l'exercice de leurs fonctions légitimes. La façon la plus transparente de le faire est de recueillir et d'analyser comme il se doit les données empiriques fournies par les agents sur le terrain, de veiller à ce que les documents requis soient remplis, d'être au courant des nouveaux renseignements sur la sécurité et l'efficacité des dispositifs et des armes à la disposition des forces de l'ordre et de s'y adapter. Faute de tels renseignements et d'un contrôle administratif, l'utilisation des armes accessibles aux agents, et plus particulièrement dans le contexte du présent rapport, les AI, doit faire l'objet d'une surveillance et d'un contrôle étroits. Selon la Commission, jusqu'à ce que la GRC présente des données empiriques établissant clairement que l'utilisation générale de l'AI est dans l'intérêt de la sécurité de l'agent et du public, l'arme devrait être limitée de par sa désignation comme arme à impact dans le MIGI.
Soulignons que la GRC a entièrement appuyé la Commission pour ce qui est de la demande du Ministre et de la préparation du rapport intérimaire.
Arme à impulsions
Ce qu'est une arme à impulsions (AI)
Les AI englobent une grande diversité d'armes électriques qui transmettent une décharge à haute tension et à faible ampérage à un sujet pour neutraliser son système nerveux sensoriel et moteur. Bref, l'arme provoque un choc électrique. Les effets sont instantanés et varient, allant d'une sensation douloureuse localisée à la neutralisation musculaire qui fait souvent perdre tout contrôle moteur au sujet, qui s'écroule.
Aux États-Unis, les forces de l'ordre ont initialement adopté les AI dans les années 90 comme option dans les cas où l'on aurait autrement envisagé le recours à la force létale; toutefois, le recours à cette arme s'est répandu au point où on l'utilise pour maîtriser les sujets réfractaires qui ne représentent pas une menace de mort ou de lésions corporelles graves et contre lesquels le recours à la force létale ne serait pas une option. Avant d'autoriser l'AI, la GRC a entrepris d'en étudier le bien-fondé. Voici ce qu'a conclu l'étude intitulée The Conducted Energy Weapon Evaluation Project :
[Traduction] Bien que [l'arme à impulsions] ne soit pas efficace à 100 p. 100, elle procure à l'agent un outil inégalé par rapport aux options courantes d'intervention de l'agent. La capacité de maîtriser, à distance, un sujet combatif, d'une manière généralement moins préjudiciable que les techniques de contrôle conventionnelles, ne peut qu'être avantageuse pour le policier et la collectivité qu'il sert [gras ajouté][5].
La raison d'être de cette utilisation accrue tient à la croyance selon laquelle les AI réduisent le risque de blessure ou de mort à la fois pour le sujet et l'agent lorsqu'il y a lieu de recourir à la force. Divers examens et études découlant de données cliniques et de données sur le terrain étayent cette croyance.
Ce qu'est le Taser®
Un certain nombre d'entreprises fabriquent des AI. Taser® est la marque de fabrique du manufacturier des deux modèles d'AI approuvés pour la GRC – le Taser M26 et le plus récent Taser X26. Sur le plan opérationnel, le Taser X26 a l'avantage d'être plus léger et plus petit que le Taser M26, mais il fonctionne de la même manière lorsqu'il est utilisé dans un contexte opérationnel. Ils ressemblent à une arme réglementaire. Le Taser® emmagasine des données de tir pouvant être extraites ultérieurement et peut être muni d'une caméra pour enregistrer les événements; ces questions seront étudiées plus en profondeur dans le rapport final.
Les deux modèles peuvent s'utiliser de deux manières : en mode paralysant ou en mode sonde. En mode paralysant, le Taser® activé est appuyé contre le sujet et lui transmet une décharge électrique. Pour garantir un effet maximal et réduire au minimum le risque de blessure, les agents suivent une formation sur l'application du Taser® à des endroits désignés du corps. Une décharge est transmise pendant cinq secondes lorsqu'on engage l'arme. Il est possible de raccourcir la durée de la décharge en éloignant le Taser® du sujet ou en mettant le cran de sûreté. L'électrochoc peut pénétrer jusqu'à 2,5 centimètres à travers les vêtements. Employé de cette façon, le Taser® est considéré comme un outil de contrainte par la douleur et n'entraînera généralement pas une neutralisation musculaire.
En mode sonde, le Taser® projette deux électrodes d'une cartouche située sur le devant de l'arme. À la pointe des électrodes, un court dard est muni d'un petit crochet, qui maintient les électrodes fixées au sujet. Les sondes sont lancées avec suffisamment de force pour pénétrer des couches de vêtements et sont reliées au Taser® par deux câbles qui transmettent des impulsions électriques au sujet : en appuyant sur la détente, on libère l'azote comprimé dans la cartouche qui projette les sondes. Chaque sonde doit frapper le sujet sinon le Taser® n'a aucun effet. Habituellement, les sondes frappent le sujet à des endroits plus éloignés que ne le ferait le pistolet en mode paralysant. Par conséquent, le dysfonctionnement musculaire et sensoriel touche une plus grande région, ce qui se traduit par une neutralisation musculaire outre la douleur.
Peu importe le mode employé, il convient de souligner que les sujets éprouveront de la douleur. Toutefois, il semble qu'on ait accordé peu d'attention au niveau de douleur infligé par l'application de l'AI. L'utilisation des AI a fait l'objet d'un examen dans R. c. Hannibal, 2003 BCPC 0504. Dans cette affaire, où un membre de la GRC a été accusé de voies de fait à la suite d'un incident survenu en août 2001, voici ce qu'a déclaré la juge Challenger : « Aucune étude n'a été faite en ce qui concerne l'expérience que de recevoir une décharge de pistolet Taser en comparaison des techniques de contrôle à mains nues »[6]. Toutefois, un rapport d'Amnistie Internationale[7] contenait les anecdotes suivantes :
D'après Taser International, les Taser comptent parmi les quelques armes non meurtrières capables d'immobiliser une personne sans la blesser. La société indique que toute douleur ressentie est passagère et ne comporte aucun effet ultérieur. Pourtant, les policiers qui ont reçu une décharge d'une fraction de seconde seulement dans le cadre de leur formation disent avoir ressenti une douleur vive :
Bjornstad, qui a reçu une décharge d'une seconde et demie dans le cadre de sa formation, a affirmé que tous ses muscles se sont contractés et que le choc était semblable à celui causé par une prise électrique, mais plus violent encore. Ceux qui ont vécu l'expérience ne l'oublieront jamais... Je ne recommande cela à personne. C'est très désagréable... c'est le moins qu'on puisse dire. (The Olympian, 14 octobre 2002)
C'est comme recevoir cent coups de suite, mais dès que ça arrête, tout va bien. (The Olympian, 2 mars 2002)
C'était terrible. Quelle douleur. Je penserai deux fois avant d'utiliser cette arme contre quiconque. (Propos de deux policiers cités dans le Mobile Register, 8 avril 2002)
Je n'ai jamais ressenti une douleur aussi pénétrante. Les gens vous obéissent car ils ne veulent recevoir une deuxième décharge. (Commentaires d'un consultant en armes à feu cités dans The Associated Press, 12 août 2003)
Il s'agit des cinq secondes les plus longues de votre vie... c'est très douloureux, cela ne fait aucun doute. Personne ne voudrait recevoir un deuxième coup. (Shérif de comté, cité dans The Kalamazoo Gazette, Michigan, 7 mars 2004)
Évaluant les aspects négatifs de l'utilisation de l'AI, la juge Challenger a écrit :
La GRC ainsi que d'autres services de police devraient tenir compte du fait que le Taser peut causer des brûlures superficielles et des dommages aux tissus, entraînant ainsi des croûtes et des cicatrices. Le Taser provoque une douleur intense et peut aussitôt complètement immobiliser une personne. Si un policier peut contrôler les techniques traditionnelles de contrainte par la douleur qu'il utilise, il en est autrement pour le Taser, qui cause une douleur constante [gras ajouté].
L'aspect « douleur » lié à l'utilisation de l'AI demeure un sujet largement anecdotique et n'a pas été suffisamment étudié pour que l'on puisse déterminer la pertinence de son utilisation dans le cadre des interventions des forces policières.
Décision de la GRC d'adopter le Taser®
Dans les années 90, les autorités de police en Amérique du Nord ont de plus en plus adopté les AI comme technique de recours à la force moins meurtrière. Le 17 mai 2000, la GRC a amorcé une évaluation de l'efficacité et de l'utilisation des AI, plus particulièrement le Taser M26. Cette évaluation, The Conducted Energy Weapon Evaluation Project, comportait trois volets : une évaluation technique de la recherche indépendante, la mise à l'essai faisant appel à des volontaires et un essai de six mois sur le terrain.
Au terme du projet, il a été recommandé que le Taser M26 soit utilisé comme arme sur le terrain en tant que technologie moins meurtrière.
Le 20 décembre 2001, la GRC a autorisé pour la première fois l'utilisation des AI, plus particulièrement le Taser M26. Le 21 octobre 2005, la GRC a approuvé l'utilisation du Taser X26 après avoir réalisé deux essais distincts sur le terrain. Seuls les membres de la GRC possédant le certificat d'utilisation de l'AI peuvent porter ou utiliser l'arme.
Actuellement, la GRC possède 1 709 Taser M26 et 1 131 Taser X26 utilisés au Canada.
Figure 1 : Nombre d'AI sur le terrain (par année)
Division | 2002 | 2003 | 2004 | 2005 | 2006 | 2007 |
---|---|---|---|---|---|---|
A | 23 | 13 | 17 | 10 | 11 | 11 |
B | 36 | 87 | 61 | 58 | 59 | 62 |
C | 0 | 7 | 14 | 14 | 15 | 15 |
D | 25 | 43 | 84 | 113 | 126 | 134 |
E | 48 | 515 | 508 | 541 | 574 | 630 |
F | 9 | 49 | 129 | 165 | 189 | 210 |
G | 3 | 35 | 34 | 36 | 37 | 39 |
H | 2 | 15 | 35 | 59 | 64 | 69 |
J | 2 | 73 | 56 | 60 | 83 | 97 |
K | 76 | 279 | 265 | 273 | 277 | 286 |
L | 0 | 9 | 12 | 14 | 14 | 15 |
M | 31 | 38 | 39 | 46 | 49 | 36 |
N | 275 | 222 | 145 | 184 | 185 | 24 |
O | 15 | 19 | 42 | 29 | 29 | 29 |
T | 2 | 0 | 0 | 3 | 3 | 10 |
V | 2 | 23 | 44 | 41 | 42 | 42 |
Total | 549 | 1 427 | 1 485 | 1 646 | 1 757 | 1 709 |
Division | 2003 | 2004 | 2005 | 2006 | 2007 | |
---|---|---|---|---|---|---|
A | 0 | 0 | 0 | 0 | 3 | |
B | 0 | 0 | 0 | 8 | 34 | |
C | 0 | 0 | 2 | 13 | 17 | |
D | 0 | 0 | 0 | 59 | 73 | |
E | 0 | 3 | 7 | 135 | 392 | |
F | 0 | 0 | 0 | 0 | 67 | |
G | 0 | 0 | 0 | 0 | 3 | |
H | 0 | 0 | 0 | 0 | 25 | |
J | 0 | 0 | 0 | 2 | 38 | |
K | 0 | 3 | 8 | 172 | 318 | |
L | 0 | 0 | 0 | 10 | 15 | |
M | 0 | 3 | 4 | 5 | 49 | |
N | 5 | 9 | 10 | 16 | 24 | |
O | 0 | 0 | 0 | 0 | 6 | |
T | 0 | 0 | 0 | 0 | 35 | |
V | 0 | 0 | 0 | 29 | 32 | |
Total | 5 | 18 | 31 | 449 | 1 131 |
Plaintes présentées à la Commission concernant l'AI
Plaintes présentées à la Commission
Toute personne, y compris un non-résident, préoccupée par la conduite d'un membre de la GRC peut déposer une plainte. La personne n'a pas à être liée directement à l'incident; elle peut déposer une plainte pour quelqu'un, ou si elle a été témoin de l'incident qui a suscité la plainte.
Depuis le 20 décembre 2001, la Commission a reçu 138 plaintes concernant l'utilisation de l'AI, qu'il s'agisse de son utilisation proprement dite ou de l'avertissement d'y recourir. Soulignons que les statistiques de la Commission concernant les plaintes ne tiennent pas compte des plaintes présentées directement à la GRC[8]. Pour cette même période, 86 plaintes en provenance de la Colombie-Britannique[9] (Division E) alléguaient l'utilisation inappropriée de l'AI. Cela compte pour 62 p. 100 des plaintes reliées à l'AI.
En 2007[10], la Commission a reçu 23 plaintes concernant l'utilisation de l'AI ou l'avertissement d'y recourir. De ce nombre, 14 provenaient de la Colombie-Britannique, ce qui représente 61 p. 100 des plaintes reliées à l'AI pour cette année.
En ce qui a trait particulièrement au décès de M. Dziekanski, la Commission a reçu sept (7)[11] autres plaintes officielles et 97 expressions de préoccupations.
Figure 2 : Plaintes du public reçues par la Commission concernant l'utilisation de l'AI ou l'avertissement d'y recourir
Figure 2A : Plaintes depuis le 20 décembre 2001 | Utilisation | Utilisation (tiers*) | Avertissement | Avertissement (tiers*) |
Total |
---|---|---|---|---|---|
Toutes les plaintes | 74 | 34 | 27 | 3 | 138 |
Plaintes n'incluant pas les incidents récents à l'aéroport international de Vancouver[12]** | 74 | 27 | 27 | 3 | 131 |
Plaintes concernant les incidents à l'aéroport international de Vancouver*** | 0 | 7 | 0 | 0 | 7 |
Toutes les plaintes présentées en Colombie-Britannique | 37 | 26 | 20 | 3 | 86 |
Plaintes présentées en Colombie-Britannique ne comprenant pas les incidents récents à l'aéroport international de Vancouver** | 37 | 19 | 20 | 3 | 79 |
Plaintes concernant les incidents survenus à l'aéroport international de Vancouver présentées en Colombie-Britannique*** | 0 | 7 | 0 | 0 | 7 |
Figure 2B : Plaintes en 2007 | Utilisation | Utilisation (tiers*) | Avertissement | Avertissement (tiers*) |
Total |
---|---|---|---|---|---|
Toutes les plaintes | 12 | 11 | 6 | 1 | 30 |
Plaintes n'incluant pas les incidents récents à l'aéroport international de Vancouver** | 12 | 4 | 6 | 1 | 23 |
Plaintes concernant les incidents à l'aéroport international de Vancouver*** | 0 | 7 | 0 | 0 | 7 |
Toutes les plaintes présentées en Colombie-Britannique | 7 | 9 | 4 | 1 | 21 |
Plaintes présentées en Colombie-Britannique ne comprenant pas les incidents récents à l'aéroport international de Vancouver** | 7 | 2 | 4 | 1 | 14 |
Plaintes concernant les incidents survenus à l'aéroport international de Vancouver présentées en Colombie-Britannique*** | 0 | 7 | 0 | 0 | 7 |
* « Tiers » indique que la personne déposant la plainte n'est pas liée directement à l'incident; elle a déposé la plainte pour quelqu'un ou elle a été témoin de l'incident qui a suscité la plainte.
** Comprend deux (2) plaintes afférentes à l'incident survenu à Chilliwack, dont une plainte du Président.
*** Comprend la plainte du Président afférente à l'incident survenu à l'aéroport international de Vancouver.
Rapports intérimaires et rapports d'examen faisant état de la satisfaction de la Commission
Si une personne ayant présenté une plainte relative à la conduite d'un membre de la GRC n'est pas satisfaite de la manière dont la GRC a traité sa plainte, elle a le droit d'en appeler en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Depuis le 20 décembre 2001, la Commission a reçu 21 demandes d'examen concernant les AI. De ce nombre, 15 appels étaient reliés à l'utilisation proprement dite de l'AI contre six (6) reliés à la menace de recourir à l'arme.
Lorsque la Commission entreprend un examen, elle évalue les éléments de preuve au dossier au regard du Manuel des opérations de la GRC, du Code criminel du Canada, du modèle de résolution de problèmes CAPRA[13] et du MIGI. Le Code criminel autorise les policiers à faire usage d'une force raisonnable aux fins de l'application de la loi. De plus, dans le modèle de résolution de problèmes CAPRA et le MIGI, il est entendu que les policiers doivent mesurer le risque et constamment évaluer s'il convient d'intervenir et à quel niveau. Actuellement, la politique de la GRC prévoit le recours à des dispositifs intermédiaires, qui comprennent les AI, lorsque le sujet a un comportement résistant[14].
Dans les rapports d'examen antérieurs, la Commission a conclu que le recours aux dispositifs intermédiaires comme l'AI est une décision que le membre de la GRC doit prendre en toute logique dans la situation. Pour décider du niveau d'intervention, un policier devrait prendre en compte le principe de la proportionnalité : la force utilisée doit correspondre à peu de chose près à la résistance que rencontre un policier, de même que le contexte dans lequel s'inscrit l'incident.
Si la Commission détermine, selon la prépondérance des probabilités, que le membre de la GRC a bien agi, un rapport faisant état de sa satisfaction est rédigé et soumis à toutes les parties en cause. Toutefois, en règle générale, si, après un examen des éléments de preuve, la Commission conclut que le membre de la GRC n'a pas agi de manière appropriée, des conclusions défavorables sont tirées à son encontre, et un rapport intérimaire est soumis à l'examen du commissaire de la GRC. Voici les conclusions défavorables formulées par la Commission dans les rapports intérimaires antérieurs concernant l'utilisation de l'AI :
- les éléments de preuve sont insuffisants pour confirmer ou nier le recours à l'AI;
- l'utilisation inappropriée de l'AI ou l'utilisation de l'AI constituaient un recours excessif à la force;
- le défaut de se conformer aux exigences de la politique en matière de rapport;
- le défaut de se conformer aux exigences de la politique en matière de traitement médical;
- l'utilisation initiale de l'AI était raisonnable et conforme à la politique, mais les utilisations ultérieures constituaient un recours excessif à la force.
Après examen des conclusions et recommandations antérieures de la Commission, il ressort également que la Commission était satisfaite du recours à l'AI dans un certain nombre de cas lorsque le membre de la GRC pouvait démontrer qu'il avait respecté la politique de la GRC en utilisant l'AI « pour maîtriser les suspects qui résistent à l'arrestation ou qui sont combatifs ou suicidaires ». Plus particulièrement, lorsque le membre pouvait justifier d'avoir utilisé l'intervention minimale nécessaire pour gérer les risques et que l'intervention avait causé le moins de préjudices ou de dommages.
Inversement, la Commission a tiré des conclusions défavorables lorsque les éléments de preuve démontraient que le membre avait omis d'évaluer et de réévaluer le risque et de modifier le niveau d'intervention en conséquence, même lorsque le niveau de menace avait diminué. Généralement, la Commission formulait ce genre de conclusions défavorables à la suite de l'utilisation répétée de l'AI même lorsque le sujet n'affiche plus un comportement combatif ou résistant.
Une tendance récurrente dans les conclusions défavorables de la Commission visait les membres qui omettaient de bien évaluer et déterminer le comportement observé et qui, du coup, optaient pour un niveau d'intervention supérieur au niveau justifié selon le MIGI.
La conclusion la plus fréquente de catégorie erronée de comportement survenait lorsque les membres de la GRC étaient confrontés à un comportement résistant. La Commission est d'avis qu'une distinction s'impose entre « résistance passive » et « résistance active » puisque la résistance active se situe à la limite du comportement combatif. Même si la politique en vigueur de la GRC prévoit le recours à des dispositifs intermédiaires lorsqu'un sujet manifeste un comportement résistant, mais pas combatif, la Commission recommandait un remaniement de la politique visant à clarifier que la résistance en soi ne justifie pas le recours à des armes comme l'aérosol capsique ou une AI.
Historiquement, la Commission a présenté les recommandations suivantes au commissaire de la GRC relativement à l'AI :
- que les membres reçoivent une formation et des directives sur la façon d'interagir avec les personnes en crise psychologique;
- que la GRC fournisse une formation concernant les interventions d'urgence en santé mentale à tous les membres qui traitent directement avec des clients;
- que la GRC mette en oeuvre une directive opérationnelle nationale sur la façon d'appréhender une personne qui est en état de crise;
- que des directives opérationnelles soient données aux policiers quant à la politique de la GRC sur l'utilisation d'une arme à impulsions;
- que des directives opérationnelles soient données aux policiers quant à la politique de la GRC sur la mise en pratique et l'utilisation appropriée du MIGI;
- que le policier présente ses excuses au plaignant;
- que la GRC revoie sa politique concernant l'utilisation de l'AI et qu'elle :
- réévalue où l'AI doit figurer dans le paradigme de l'usage de la force;
- redéfinisse le comportement résistant;
- continue de revoir les politiques de formation;
- s'assure que les formateurs n'étant pas experts en recours à la force n'enseignent que le volet technique de l'AI et que la formation sur son utilisation ne soit donnée que par des experts en recours à la force;
- suive les nouvelles obligations de rendre compte en vue de cumuler des statistiques sur les moyens d'intervention utilisés.
Réponses du commissaire de la GRC aux rapports intérimaires de la Commission
Après la présentation d'un rapport intérimaire à la GRC, le commissaire de la GRC est tenu de répondre en indiquant les mesures que la GRC a prises ou qu'elle entend prendre pour donner suite au rapport de la Commission. Si le Commissaire rejette les recommandations de la Commission, il doit en donner les raisons[15].
Depuis le 20 décembre 2001, la Commission a tiré 22 conclusions relatives à l'utilisation de l'AI ou à la menace d'y recourir. Selon quinze (15) de ces conclusions, aucun préjudice n'a résulté de la conduite de la GRC, et la Commission a formulé sept (7) conclusions défavorables. Par conséquent, la Commission est satisfaite de la conduite de la GRC dans 68 p. 100 des allégations et a conclu à une inconduite dans 32 p. 100 des cas.
Le commissaire de la GRC était d'accord avec quatre (4) des sept (7) conclusions défavorables de la Commission. Il y a actuellement deux rapports intérimaires en attente d'une réponse du commissaire de la GRC.
Conclusions de la Commission | ||
---|---|---|
Satisfaisantes | Défavorables | Total |
15 | 7 | 22 |
Réponse du Commissaire aux conclusions défavorables de la Commission | ||
D'accord | En désaccord | Total |
4 | 1 | 5 |
Note : La Commission n'a pas encore reçu les avis du Commissaire concernant deux (2) des conclusions défavorables.
Résumé
Même si un coup d'oeil jeté aux statistiques sur les plaintes présentées à la Commission peut donner à penser, pour certains, que l'utilisation inappropriée de l'AI par la GRC est relativement rare, il importe de placer ces chiffres dans le contexte général des plaintes du public. La Commission croit que les 3 000 occurrences de recours à l'AI par les membres de la GRC, en raison du manque de rigueur du système de rapports au sein de la Gendarmerie, laisseraient entendre que l'utilisation de cette arme a été déclarée en partie seulement. Du reste, comme la Commission ne reçoit que la moitié environ des plaintes contre les membres de la GRC, il lui est difficile de mesurer pleinement l'étendue et l'ampleur du problème. De plus, la Commission est consciente du fait que le grand public peut ne pas bien comprendre les droits dont il peut se prévaloir pour déposer une plainte ou interjeter appel. Comme la Commission le mentionne dans le rapport annuel 2006-2007, les activités de relations externes constituent une priorité.
Ce qu'est le délire agité
Dans l'examen de l'utilisation de l'AI par le personnel des forces de l'ordre, il est évident que l'on doit tenir compte de l'état de délire agité. Soulignons cependant que le terme n'est pas universellement accepté dans le milieu médical. L'approfondissement du lien entre le recours à l'AI et le délire agité transcende la portée du présent rapport, et il sera examiné plus en détail dans le rapport complet. Toutefois, une brève revue du délire agité est présentée ci-après.
Le délire agité est une expression utilisée pour décrire un état pouvant être associé à une mort subite à la suite de l'usage de la contrainte policière. Il serait relié de plus près aux troubles mentaux ou à la consommation de drogue, en particulier la cocaïne. L'état est marqué par deux éléments : une fatigue physique extrême alliée à un état mental délirant. Les personnes que l'on croit atteintes de délire agité peuvent montrer certains signes comme un comportement bizarre, une grande force et de l'agressivité (voir la figure 3).
Figure 3 : Symptômes du délire agité[16]
Les signes visibles du délire agité comprennent les suivants, mais sans s'y limiter :
- Force incroyable
- Insensibilité à la douleur
- Capacité d'offrir une résistance efficace à plusieurs policiers
- Échauffement (hyperthermie)
- Transpiration
- Comportement bizarre et violent
- Agressivité
- Hyperactivité
- Paranoïa extrême
- Cris incohérents
Aux fins du présent rapport, l'importance du délire agité est le lien possible avec les morts subites à la suite de la contrainte. Ces décès peuvent refléter les décès inexpliqués longtemps avant l'utilisation de l'AI. Dans les cas de mort subite inexpliquée mettant en cause la police, il semble souvent y avoir un lien entre le délire agité, la fatigue extrême - si la personne a résisté à l'arrestation et qu'on a pu recourir à l'AI - et la technique de contrainte ultérieure. L'interaction peut être complexe, et la recherche en cours pourrait fournir des réponses. Le sujet est brièvement abordé dans l'analyse documentaire qui suit et il sera traité plus en détail dans le rapport final.
Délire agité et maintien de l'ordre
Les décès à la suite d'une contrainte ne représentent pas un phénomène unique au maintien de l'ordre; d'après la documentation médicale, d'autres sphères professionnelles en ont fait état, surtout la psychiatrie et la médecine d'urgence. Partant, la documentation a laissé entendre, à maintes reprises, que le personnel des forces de l'ordre ou des services d'urgence considère le délire agité comme une urgence médicale.
Toutefois, cela pose problème pour les agents de police, car le personnel des soins médicaux d'urgence ne transportera généralement pas par ambulance une personne présentant manifestement des symptômes de délire agité. En réalité, ce sont les symptômes même du délire agité qui précipitent la présence des forces de l'ordre et qui empêchent la personne atteinte de recevoir des soins médicaux immédiats simplement parce que son comportement est trop violent et combatif pour qu'elle puisse recevoir des soins avant d'être maîtrisée. Les professionnels de l'application de la loi se retrouvent donc dans une situation difficile : ils doivent assurer la garde et la surveillance d'une personne dont l'état constitue une urgence médicale, mais qui ne peut pas recevoir de soins avant d'être maîtrisée, ce qui peut entraîner sa mort.
Le délire agité, même s'il constitue toujours une question litigieuse pour certains, a été désigné dans la documentation comme un problème médical incontestable dont le personnel des forces de l'ordre doit tenir compte. Toutefois, pour ce qui est de l'utilisation des AI, on croit actuellement que les sujets qui sont dans un état de délire agité ont immédiatement besoin d'une intervention médicale et que le traitement ne devrait pas être retardé dans l'espoir que l'état du sujet s'améliorera. En outre, les praticiens ne peuvent soigner le sujet avant qu'il n'ait été maîtrisé. En dernier lieu, comme la fatigue associée à la résistance du sujet serait néfaste pour sa santé, on juge préférable de recourir aux moyens les plus rapides pour l'immobiliser.
Résumé de l'analyse documentaire initiale
Un examen de la recherche existante, à l'échelle tant nationale qu'internationale, révèle que des centaines de rapports scientifiques et médicaux portent sur l'utilisation des AI, le délire agité et la mort subite ou inattendue. La Commission a examiné plus d'une douzaine d'études et de rapports de recherche universitaire, scientifique et médicale en préparation du présent rapport. Trois de ces rapports ont été retenus pour l'examen documentaire du rapport intérimaire, car ils représentent le mieux l'utilisation des AI dans le contexte canadien. Ces rapports ont eu une incidence importante sur l'élaboration de politiques et la compréhension du recours à l'AI au sein des forces de l'ordre au Canada et ont grandement contribué à éclairer le débat élargi sur l'utilisation de l'AI.
En outre, comme l'utilisation par la GRC des AI fabriquées par TASER International est approuvée, la Commission a examiné l'information sur le produit et les données de recherche affichées sur le site Web de l'entreprise. Cette dernière allègue que l'utilisation d'un Taser® réduit considérablement le risque de blessure grave pour le sujet et le policier.
Le Centre canadien de recherches policières (CCRP)[17] a mentionné ce qui suit dans son étude de 2005 :
[...] les agents doivent être conscients des effets négatifs de cycles consécutifs et multiples d'un DAI sur un sujet, du déchargement du DAI en visant la personne à la tête, au cou ou aux parties génitales, de l'utilisation d'un DAI lorsque la personne pourrait faire une chute d'une certaine hauteur, et du déchargement du DAI lorsque le sujet se tient debout dans un endroit où il y a présence évidente de substances inflammables ou explosives, comme une flaque de gazoline ou une fuite de gaz naturel, ou près d'un tel endroit[18].
En effet, l'entreprise TASER International a elle-même publié[19] deux bulletins de formation et une mise en garde applicable au produit qui traitent en particulier des décharges multiples, des blessures secondaires possibles et de l'utilisation contre des « personnes sensibles ». TASER International est cependant d'avis que la plupart des décès survenus à la suite du recours à l'AI sont imputables au délire agité ou à la toxicomanie et fait remarquer que l'entreprise a eu gain de cause dans toutes les poursuites intentées contre elle.
Il importe de souligner le manque indéniable de recherche, à l'échelle nationale et internationale, qui examine sous tous les angles le lien entre l'utilisation de l'AI, le délire agité et la probabilité de décès. La recherche médicale commence à peine à étudier cet aspect. Le peu de choses que l'on sait à ce sujet donne à penser qu'il convient de prévoir des options plus conservatrices quant à l'utilisation des AI contre les populations vulnérables (personnes en crise psychologique, personnes sous l'effet de la drogue et personnes présentant des symptômes du délire agité). D'après la recherche, ces populations seraient exposées à un risque accru de mort, non pas forcément à la suite du recours à la force ou à une technique de contrainte, mais en raison de l'état mental ou pathologique de la personne au moment de l'intervention policière.
La recherche disponible révèle généralement que, peu importe le type de contrainte ou la technique de recours à la force, la mort peut survenir chez les personnes dont l'état de santé est vulnérable. Pour des considérations morales, la recherche et l'expérimentation se font souvent sur des animaux (race porcine); dans le cas des sujets humains, les personnes sont des adultes volontaires qui, au dire de tous, sont en santé et ne sont pas en crise psychologique, ne sont pas aux prises avec une surdose de drogue ou en état de délire agité. Amnistie internationale Canada a fait ressortir la principale préoccupation touchant la recherche sur l'utilisation de l'AI à ce jour : [Traduction] « Malgré un certain nombre d'études réalisées ou en cours sur l'utilisation du Taser aux États-Unis et au Canada, aucune n'a encore été publiée qui satisfait pleinement aux critères d'une enquête rigoureuse, exhaustive, sur l'utilisation ou l'effet du pistolet Taser[20]. »
Les études examinées semblent justifier l'affirmation que les AI sont généralement sécuritaires lorsqu'elles sont utilisées contre des personnes en santé. Toutefois, l'étude du CCRP réalisée en 2005 indique qu'il y a un manque criant de paramètres de sécurité reconnus mondialement se rapportant à l'utilisation des AI.
On l'a mentionné précédemment : peu de recherches permettent d'examiner les effets négatifs que les AI peuvent avoir sur les populations vulnérables. Cette lacune est généralement attribuable au fait que, pour des raisons d'ordre éthique et logique, les chercheurs ne peuvent pas effectuer d'expériences contrôlées sur les personnes affligées des problèmes évoqués antérieurement. Une autre faille dans la documentation médicale et universitaire tient à ce que la plupart de ces études portaient sur le maintien de l'ordre en milieu urbain, où les policiers peuvent demander du renfort et avoir accès à du personnel médical à proximité. Toutefois, aucune recherche précise ne s'est penchée sur l'utilisation de l'AI, le délire agité et la mort subite ou inattendue dans le contexte des services de police en milieu rural ou dans le Nord. De plus, la Commission n'a pu retracer une seule étude qui traitait expressément du recours à l'AI et l'infliction d'une douleur[21]. Étant donné que l'AI en mode paralysant est réputée être une technique acceptable de contrainte par la douleur, le manque de données scientifiques ou empiriques sur la nature et l'intensité de cette douleur est inquiétant.
La Commission insiste sur le besoin d'une recherche plus poussée et la collecte d'autres données empiriques sur l'utilisation des AI qui mettent l'accent sur les aspects suivants :
- l'utilisation de l'AI, l'infliction d'une douleur et l'importance de cette douleur;
- la pertinence de l'application de l'AI par rapport à d'autres moyens d'interventions axés sur le recours à la force;
- l'utilisation de l'AI contre les populations vulnérables ou à risque;
- les autres techniques de recours à la force ou interventions lorsqu'il s'agit de personnes présentant des symptômes de délire agité;
- l'utilisation de l'AI, le délire agité et la mort subite dans le contexte des services de police en milieu rural ou dans le Nord;
- les liens entre l'utilisation de l'AI, le délire agité et la possibilité de mort.
Politique sur l'AI[22] et protocoles
Aperçu
La section qui suit passe brièvement en revue la manière dont la GRC régit l'utilisation de l'AI par ses membres. Cette revue montre que les changements apportés à la politique depuis que la GRC a autorisé le recours à l'AI en 2001 ont assoupli les limites en vigueur à l'origine. Ce relâchement s'est effectué sans que l'on évalue le bien-fondé ou l'efficacité de l'utilisation à la Gendarmerie, et ce n'est que récemment que la GRC a défini une procédure lui permettant de mesurer l'utilisation de l'AI afin [Traduction] « de cerner les tendances du recours au DAI [...], de noter les préoccupations liées à son utilisation et de jauger son efficacité comme moyen de dissuasion ou de prévention[23]. » Voilà une omission cruciale dans la gestion de l'utilisation de l'AI à la GRC.
Processus d'élaboration de politiques à la GRC
Les opérations policières sont généralement régies par des politiques. Dans le cas de la GRC, il peut s'agir d'une politique nationale ou régionale ou encore d'une politique de la division ou du détachement. Ainsi, on dispose d'une certaine marge de manoeuvre pour aborder les questions opérationnelles dans divers milieux de travail de la police (p. ex. service de police municipal ou dans les collectivités nordiques éloignées). Les politiques opérationnelles doivent constamment être revues et révisées pour refléter les changements qui surviennent dans les façons de faire, le droit, la technologie et une foule d'autres facteurs. Le groupe de travail national chargé de la gestion des incidents est l'une des principales instances responsable à cet égard à la GRC; il comprend des représentants de la formation et des opérations à la GRC. On s'efforce actuellement de garantir la pertinence et la solidité du groupe (c.-à-d. garantir la représentation à l'échelle de la Division). Il est important de souligner que la GRC n'est pas dotée d'un coordonnateur national du recours à la force ni d'un organisme précis responsable des questions touchant le recours à la force, mais qu'elle traite plutôt de ces questions par l'entremise du groupe de travail.
Les politiques sont primordiales pour la perception du public à l'égard de la police du fait qu'elles établissent les normes à l'égard desquelles la GRC, dans son ensemble, et ses membres, individuellement, peuvent être tenus responsables. À ce titre, l'élaboration de politiques est au coeur de la gouvernance de la police. Le processus suppose que l'on constate un problème et qu'une politique ou une modification de la politique s'impose. Au début du processus, un examen des autres services de police, à l'échelle tant nationale qu'internationale, peut être entrepris. Au cours du processus, la politique fera l'objet d'examens et de consultations à de nombreux niveaux afin que l'on puisse s'assurer qu'elle répond aux différents besoins à la GRC et qu'elle est juridiquement fondée. En 2007, la GRC a commencé à consulter la Commission au moment de revoir certaines politiques, avec la révision de la politique sur l'AI en premier lieu[24].
Historique de l'élaboration de politiques sur l'AI à la GRC
À l'examen des changements apportés à la politique nationale de la GRC concernant les AI, certaines tendances se dégagent, et il convient de les mentionner. La première version de la politique sur l'AI a été émise le 20 décembre 2001; plusieurs révisions ont abouti au document de politique actuel émis le 8 août 2007. La politique originale avait trait à l'utilisation, aux mesures médicales préventives, aux rapports et à l'entretien.
Date de la modification | Politique sur l'AI et modifications de la politique |
---|---|
2001-12-20 (Original) |
|
2002-05-15 |
|
2002-09-25 |
|
2004-06-23 |
|
2005-06-01 |
|
2005-09-08 |
|
2007-08-08 (En vigueur) |
|
La politique originale contenait des dispositions indiquant à quel moment on pouvait recourir à l'AI (c.-à-d. l'AI ne peut être utilisée que pour « maîtriser les suspects qui résistent à l'arrestation ou qui sont combatifs ou suicidaires »; il fallait envisager d'autres interventions avant de recourir à l'AI pour arrêter un suspect) et interdisant son utilisation dans d'autres cas (c.-à-d. que l'AI ne pouvait pas être utilisée pour le contrôle des foules). Toutefois, au fil du temps, on a pu constater une « évolution » de la politique qui élargissait l'usage acceptable en laissant au membre le soin d'en évaluer l'utilisation appropriée selon le MIGI et en dehors de la portée de la politique sur l'AI. L'acceptation croissante de l'AI était également manifeste lorsque la politique a été modifiée en 2004 : la norme de recyclage pour l'utilisation de l'AI a été repoussée, passant de un (1) à trois (3) ans. C'est là un changement important étant donné que la politique sur l'AI a changé à maintes reprises depuis 2001, et que la période la plus longue sans modification est inférieure à deux ans.
La version la plus récente de la politique reprend quelque peu la nature directive, mais en faisant davantage référence à la santé et à la sécurité, particulièrement en ce qui a trait au délire agité, qu'aux interventions appropriées à la situation. Par exemple, les limites afférentes aux cycles consécutifs et multiples, intégrées pour la première fois en 2005, sont actuellement en vigueur. Auparavant, aucune limite n'était prévue quant au nombre d'utilisations ou à leur durée.
L'inclusion des considérations afférentes au délire agité est très remarquable : il semble ainsi que l'AI soit l'intervention privilégiée lorsqu'on croit que la personne manifeste des signes de délire agité. En fait, la politique en vigueur se lit comme suit : « Lorsqu'on envisage des moyens d'intervention dans les cas de délire, l'utilisation de l'AI en mode à sondes peut être la façon la plus efficace de maîtriser la personne [gras ajouté]. » Le danger, c'est que les agents qui interprètent le comportement de la personne comme des signes de délire agité peuvent s'estimer autorisés à recourir à l'AI quand le comportement proprement dit ne l'aurait pas autrement permis. La politique doit insister sur ce point : croire qu'une personne est en état de délire agité ne justifie pas le recours à l'AI. La personne doit afficher un comportement (c.-à-d. combatif) qui justifierait autrement l'utilisation de l'AI.
L'examen de la conduite des membres constitue une grande partie du mandat de la Commission, et dans l'évaluation de la pertinence de la conduite d'un membre relativement à l'utilisation de l'AI, le MIGI se trouve au coeur même de cet examen. La question est davantage analysée plus loin.
Évaluation de la pertinence par la Commission
Au cours des premières années de l'utilisation de l'AI, avant la modification de la politique et l'intégration du MIGI en tant que principe, la politique sur l'AI et le MIGI étaient parfois conflictuels. Les changements apportés à la politique ont permis d'éliminer ces conflits.
Le genre de conclusions formulées par la Commission relativement au comportement inapproprié des membres de la GRC témoigne de l'évolution de la politique. Pour rationaliser le recours à l'AI, les membres comptaient beaucoup sur l'énonciation des principes du MIGI, qui rejoint leur formation. Souvent, il semblait que les considérations de principe étaient secondaires ou non applicables lorsque les membres évaluaient le caractère raisonnable de leurs actes. Résultat : même si les membres ont pu croire avoir bien agi dans le contexte du MIGI, leurs actes constituaient peut-être une contravention claire à la politique. On a également relevé des cas où le contraire s'était produit.
Le défaut de se conformer à la politique se divisait en trois catégories, dont la première regroupait les cas où on a eu recours à l'AI autrement que « pour maîtriser les suspects qui résistent à l'arrestation ou qui sont combatifs ou suicidaires ». La deuxième catégorie avait trait au défaut d'envisager d'autres moyens d'intervention. Quant à la troisième, il s'agissait du défaut de lancer un avertissement avant de recourir à l'arme.
Les changements apportés à la politique, indiqués dans le tableau ci-dessus, permettront de soustraire les deux premières considérations de principe à un examen plus poussé, d'où un relâchement des limites d'utilisation. Cela semble appuyer une acceptation plus libérale de l'utilisation de l'AI à la GRC. Toutefois, soulignons également que certaines modifications de la politique (c.-à-d. les limites afférentes aux cycles consécutifs et multiples de l'AI) donnent suite à la nouvelle recherche médicale qui a soulevé des préoccupations relatives à l'usage de l'AI et aux personnes potentiellement sensibles (celles en état de délire agité).
Malheureusement, le défaut de la GRC de recueillir, de rassembler ou d'analyser comme il se doit ses propres données suppose que la Gendarmerie est incapable, par sa propre inertie, d'établir des liens avec les recherches externes sur l'utilisation de l'AI à la GRC. Six ans après l'ajout de l'AI à l'arsenal de la GRC, il n'existe aucune analyse exhaustive ni même superficielle rapidement utilisable permettant à la Commission d'effectuer cet examen. Cette négligence dénote que la GRC a été incapable de mettre en oeuvre des processus de responsabilisation systémique – comme la présentation de rapports destinés au public – et ne peut pas évaluer les effets que les modifications apportées à la politique ont eus sur l'utilisation de l'AI, la formation ou la protection des policiers et du public. En réalité, l'utilisation de l'AI a été libéralisée sans une analyse réfléchie complète, un recours que nous qualifions d'« usage exponentiel[26] ». La façon de faire se distingue de celle d'autres services de police nord-américains qui ont justifié leur utilisation des AI en se fondant non pas seulement sur la recherche et les études réalisées par les autres, mais également sur les données empiriques se rapportant à l'utilisation proprement dite à leur propre service.
Protocoles d'élaboration de rapports
Dans le milieu du maintien de l'ordre, il semble y avoir une compréhension universelle du besoin de rendre compte, de manière appropriée, du recours à l'AI : [Traduction] « La tenue de dossiers adéquate des incidents liés à l'AI favorise les évaluations de l'efficacité et de la fiabilité de cette technologie moins meurtrière en plus de fournir un compte rendu exact des événements qui ont exigé son utilisation[27]. »
La politique de la GRC a également évolué en ce qui a trait aux rapports sur l'utilisation de l'AI. Dans la politique originale de 2001, les membres devaient consigner une brève description de chaque utilisation dans leur carnet de notes. En 2002[28], la GRC a instauré la formule 3996, Rapport d'utilisation d'une arme à impulsions, qui est devenu le nouveau mécanisme obligatoire pour rendre compte de chaque utilisation d'AI. Contrairement aux inscriptions dans le carnet qui demeuraient généralement la propriété des membres ayant créé les notes et qui ne sont conservées que pour une période limitée, la formule 3996 devait être conservée au dossier et transmise à un service d'archives à Ottawa (SSPCA).
En juin 2004, à l'époque où les limites liées à l'utilisation des AI prévues par la politique ont commencé à se relâcher, les protocoles d'établissement de rapports ont été modifiés; la formule 3996 ne doit être envoyée aux SSPCA que dans le cas :
- d'une blessure ou de troubles médicaux apparents ou prétendus;
- d'une poursuite civile prévue;
- d 'un usage abusif évident de drogues ou d'alcool, ou de complications ou de difficultés;
- de l'ajout de l'incident à la base de données, dicté par les circonstances.
L'exigence de remplir la formule 3996 ayant été supprimée, il n'existait donc plus de structure uniforme de rapport. Les blessures apparentes ou alléguées devaient être consignées dans le dossier opérationnel, et l'exigence de suivre les directives divisionnaires sur les rapports était obligatoire. La procédure a sans aucun doute favorisé la diminution importante des rapports sur l'utilisation de l'AI en 2004 comparativement à 2003, comme l'illustre la figure 8 ci-dessous.
En 2005, on a rétabli le rapport obligatoire (formule 3996) au même titre que l'obligation de remplir la formule à l'intérieur de 15 jours. Les lacunes systémiques ont cependant persisté au chapitre de la collecte de données se rapportant à chaque utilisation de l'AI. Le bulletin OM-470 (28 octobre 2005) confirmait qu'il était possible de remplir la formule 3996 en ligne; la réception du formulaire par télécopieur n'était plus valide depuis juin 2005. Les membres qui avaient transmis les formulaires par télécopieur devaient les retransmettre en ligne, puisque, comme l'étayaient les chiffres, l'utilisation était déclarée en partie dans les mois précédents.
Ces changements montrent un manque de planification stratégique au sujet de la mise en place d'un système efficace d'établissement de rapports, et la réponse aux demandes de renseignements de la Commission concernant le recours à l'AI déclenchées par le présent examen remet en question l'efficacité du régime actuel de rapports. En juin 2005, voici ce qu'a déclaré la GRC :
L'objet principal de la création de la formule était de recueillir des renseignements statistiques qui pourraient nourrir le débat en ce qui concerne la sécurité et l'efficacité de l'AI comme option de force moins meurtrière. Un objet secondaire était de pouvoir récupérer rapidement des données relativement aux incidents d'AI, et en réponse à la demande à savoir si une formule 3996 a été soumise concernant un sujet donné.
La première proposition en 2001 était que les données relativement aux incidents avec AI de la formule 3996 auraient été stockées dans une base de données électroniques autonome à réserve de consultation et emmagasinées dans un serveur national. La base de données était élaborée partiellement; cependant, elle n'a jamais été mise en oeuvre ni chargée. Des formules papier ont été soumises et sont classées, mais les données n'ont jamais été chargées dans une base de données.
...
Pour démontrer la sécurité et l'efficacité des AI, il est primordial de recueillir les données provenant de tous les incidents concernant le déploiement d'une AI. Les données statistiques sont nécessaires afin de pouvoir valider la responsabilité à l'égard du public [gras ajouté][29].
La GRC dispose désormais d'une base de données électronique qu'elle a créée pour la saisie des formules 3996 remplies pour ce qui est de l'utilisation à l'échelle nationale. On s'efforce actuellement de transférer le contenu des copies papier précédentes du formulaire 3996 dans la base de données électronique[30]. Soulignons que la GRC n'a jamais produit de rapport annuel assurant le suivi de l'utilisation de l'AI. Étant donné l'importance du processus mentionné ci-dessus, il est essentiel que les travaux commencent immédiatement et rapidement. Ces données peuvent se révéler avantageuses pour bon nombre de sous-directions à la GRC, mais il serait peut-être profitable qu'un coordonnateur national du recours à la force supervise le projet.
Entre-temps, la GRC a déployé des efforts remarquables pour compiler les données demandées par la Commission pour l'avancement du présent rapport.
Résumé
À la GRC, la politique en vigueur relative à l'utilisation de l'AI a évolué sans que l'on tienne compte suffisamment, si tant est qu'on en tienne compte, des réalités entourant son utilisation par la GRC. Il semble que les modifications apportées à la politique aient tenu compte, de façon appropriée, des expériences des sources externes, mais le défaut d'établir une corrélation entre ces données et les expériences de la GRC constituent une omission importante, laquelle devrait être rectifiée le plus tôt possible.
Le MIGI et le recours à la force
Ce qu'est le MIGI
Le MIGI est un guide détaillé qui aide les membres de la GRC à décider des techniques d'intervention à employer lorsqu'ils doivent traiter avec des civils dans toutes sortes de circonstances. Ce guide constitue un outil de formation dont les policiers se servent pour décider de la façon d'intervenir dans une situation et du moment auquel ils peuvent recourir à la force. Le MIGI comprend sept principes fondamentaux d'intervention :
Figure 4 : Principes du MIGI[31]
Les sept principes fondamentaux du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents (MIGI)
- Le principal objectif de toute intervention est la sécurité publique.
- La sécurité de l'agent de police est essentielle à la sécurité publique.
- Le modèle d'intervention doit toujours être appliqué dans le contexte d'une évaluation minutieuse des risques.
- L'évaluation des risques doit tenir compte de la probabilité et de l'importance des pertes de vies, des blessures et des dommages à la propriété.
- L'évaluation du risque est un processus continu et la gestion des risques doit évoluer à mesure que les situations changent.
- La meilleure stratégie consiste à utiliser l'intervention minimale nécessaire pour gérer les risques.
- L'intervention idéale cause le moins de préjudices ou de dommages.
Le guide écrit a également été converti en modèle graphique pour faciliter une reconnaissance visuelle simple des éléments principaux de la gestion des interventions. Il comprend une série de cercles concentriques formant des anneaux. Les anneaux de chacun de ces éléments sont subdivisés, et les subdivisions dans le cercle des moyens d'intervention dont dispose le membre se chevauchent pour indiquer qu'il peut y avoir plus d'une intervention appropriée face à l'évaluation d'un risque donné.
Figure 5 : MIGI
Restrictions proposées concernant le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents Proposed Restrictions on Incident Management/Intervention Model
Cliquez sur l'image pour l'agrandir.
L'aspect primordial du MIGI dont se servent les membres de la GRC pour analyser les situations est le modèle de résolution de problèmes CAPRA, qui favorise l'acquisition et l'analyse de renseignements et la détermination de l'intervention appropriée. Les membres doivent tenir compte de tous les facteurs pertinents à la situation afin d'en arriver au moyen d'intervention le plus approprié. À titre d'exemple, voici quelques-uns de ces facteurs :
- le nombre d'agents et le nombre de sujets;
- l'âge et le sexe de l'agent par rapport à ceux du sujet;
- la taille et le poids de l'agent et ceux du sujet;
- l'expérience de l'agent (y compris la formation en autodéfense antérieure);
- les armes de l'agent par rapport à celles du sujet;
- la proximité du sujet;
- les connaissances particulières du sujet (c.-à-d. habileté en arts martiaux);
- la condition physique actuelle de l'agent et la santé physique apparente du sujet;
- les blessures ou l'état de fatigue de l'agent de police;
- les gestes menaçants;
- l'environnement;
- l'état de sobriété du sujet.
L'aspect clé est l'évaluation du comportement du sujet. Chaque fois que le policier interagit avec une personne du public, il lui incombe d'évaluer le risque en déterminant d'abord dans quelle catégorie de comportement (coopératif, non coopératif, résistant, combatif et comportement susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves) s'inscrit la personne ou la situation.
Figure 6 : Catégories de comportement'[32]'
Catégories de comportement (catégories de résistance)
- Coopératif
- Il n'y a pas de résistance.
- La personne répond positivement aux demandes et aux ordres verbaux.
- La personne obéit de plein gré.
- La résistance physique est faible ou nulle.
- En général, la présence d'un uniforme, d'une voiture d'une agence d'application de la loi, ou l'identification correcte de l'agent suffisent à accélérer la capitulation ou l'arrestation.
- Non coopératif
- La personne n'obéit pas à la demande de l'agent.
- Elle affiche une résistance verbale et une réaction physique faible ou nulle.
- Elle peut refuser de quitter la scène, ne pas suivre les directives, être sarcastique envers les agents, inciter les autres à ignorer les demandes légitimes des agents.
- Résistant
- La personne manifeste de la résistance au contrôle de l'agent de police.
- La personne se dégage, repousse avec l'intention de ne pas être maîtrisée,s'enfuit, ainsi que refuse nettement et verbalement avec colère d'obéir aux ordres légitimes.
- Combatif
- La personne tente d'exercer ou menace d'exercer la force contre autrui, par exemple en frappant des poings ou des pieds, en serrant les poings dans l'intention de frapper ou de résister, en menaçant d'agression.
- Agression active.
- Le sujet attaque l'agent pour l'empêcher de prendre le contrôle.
- L'attaque du sujet se présente sous forme d'une agression physique de l'agent, au cours de laquelle il frappe ou utilise des techniques qui peuvent blesser l'agent ou d'autres personnes.
- Comportement susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves
- La personne agit de manière à amener l'agent de police à craindre des lésions corporelles graves ou la mort d'un membre du public ou d'un agent.
- Pour que ce niveau du comportement existe, la présence d'une arme n'est pas un élément essentiel aussi longtemps que la crainte de la mort ou de lésions corporelles graves existe.
- Ce niveau serait présent dans le cas de la plupart des attaques avec arme et comprendra une menace des armes suivantes :
- couteau
- bâton de baseball
- arme à feu
Dans le même ordre d'idées, l'agent dispose d'options qui offrent une gamme d'interventions, et, comme il est mentionné ci-dessus, plusieurs moyens d'intervention peuvent se révéler appropriés dans les circonstances d'une interaction précise. Les options comprennent la présence de l'agent, l'intervention verbale, le contrôle mains nues[33], les dispositifs intermédiaires - qui comprennent les AI et l'aérosol capsique - les armes à impact[34] et l'usage de la force mortelle.
Figure 7 : Niveaux d'intervention[35]
Niveaux d'intervention (options en matière d'intervention)
- Présence de l'agent
- La présence d'un agent peut avoir un impact sur comment une situation se déroule.
- Ex. : Membres en uniforme, patrouille à pied, voitures identifiées, nombre de véhicules d'agence d'application de la loi sur les lieux, type d'uniforme porté (type d'équipement porté et son utilisation)
- Intervention verbale
- Techniques d'intervention d'urgence
- Communication verbale (volume, ton, support de la voix : système de sonorisation)
- Vocabulaire (contexte, ordres, structure)
- Communication non verbale (posture, gestes, expression du visage)
- Contrôle mains nues
- Techniques de contrainte douces
- Techniques de contrainte
- Clés d'articulation
- Contrainte par la douleuré
- Artifices de distraction, déséquilibre
- Menottage
- Contrôle mains fermées
- Blocage
- Coups
- Technique d'étranglement par la région carotidienne[36]
- Dispositifs intermédiaires
- Aérosol capsique
- Gaz CS
- Arme à impulsions
- Système de projection d'eau
- Armes à impact
- Utilisation du bâton de défense
- Utilisation d'autres bâtons et armes à impact approuvés par la GRC, etc.
- Utilisation du bâton extensible
- Armes à impact à portée étendue
- Force mortelle
- Armes à feu
- Techniques d'autodéfense
- Utilisation du bâton de défense sur une zone d'impact mortelle
- Véhicule automobile
- Repositionnement tactique
- Les agents peuvent se repositionner tactiquement n'importe quand.
La mise en oeuvre appropriée du modèle exige de l'agent qu'il surveille continuellement le risque que présente le comportement du sujet et qu'il adapte son intervention afin qu'elle demeure pertinente en tout temps. Le MIGI ne requiert pas une approche pouvant servir de point de départ à l'intervention de l'agent; tout comme les incidents peuvent dégénérer, exigeant immédiatement un niveau d'intervention supérieur, la menace peut également diminuer, exigeant une intervention nettement moins énergique. Même dans les situations intenses et dynamiques, on s'attend à ce que les agents réévaluent continuellement les circonstances.
Lien avec la politique
Même si la politique reprenait les principes fondamentaux du MIGI, ce dernier n'était pas lui-même un document de politique au départ. Il était considéré comme une ressource pour aider les membres à évaluer les facteurs du comportement et les facteurs de risque leur permettant ensuite de déterminer l'intervention la plus appropriée. Le MIGI créait un cadre fluide dans lequel les membres doivent continuellement évaluer le risque et modifier leur intervention au besoin. Il se démarquait de la politique opérationnelle qui visait généralement à guider avec plus de précision les actes des membres. L'approche va de pair avec la philosophie du recours à la force où il est jugé préférable de permettre aux membres d'exercer leur jugement dans un cadre d'intervention général plutôt que d'entraver leur latitude avec une politique directive ou restrictive. La justification proposée en faveur de cette approche, c'est qu'elle empêche les membres de se prêter des intentions durant des interactions dynamiques, souvent instables, qui peuvent exiger des interventions immédiates.
En 2005, le MIGI a été officiellement converti en une politique indépendante. Les changements apportés à la politique exclusive sur l'AI ont renforcé la fiabilité du MIGI pour ce qui est du recours à l'arme, à l'exception des modifications de la politique sur l'AI portant spécifiquement sur les préoccupations touchant la santé et la sécurité (c.-à-d. le délire agité).
Lien avec la formation
Le MIGI est un élément essentiel de la formation des cadets de la GRC et durant la carrière d'un membre pour ce qui est de l'ensemble de la formation sur le recours à la force comme la formation sur l'AI ou les armes spéciales. Durant leur formation à la Division Dépôt, les cadets sont initiés au MIGI en classe et dans l'apprentissage fondé sur des scénarios; on s'attend à ce qu'ils puissent justifier leurs interventions. Dès le tout début de leur formation à la GRC, il semble que l'on s'efforce d'inculquer aux agents les principes fondamentaux du MIGI afin qu'ils deviennent une seconde nature lorsqu'ils exercent leurs fonctions quotidiennes.
Place de l'AI dans le MIGI
Actuellement, l'AI s'inscrit dans la catégorie des dispositifs intermédiaires dans le MIGI. Son utilisation correspond à la gamme moyenne de la catégorie du comportement de résistance chez le sujet. Cette catégorie se définit comme suit :
Résistant : La personne manifeste de la résistance au contrôle de l'agent de police en adoptant des comportements tels que s'écarter, pousser ou s'enfuir en courant. Ceci peut inclure une situation où un policier met en marche l'équipement d'urgence et le suspect refuse de s'arrêter et essaie de s'enfuir pour ne pas être appréhendé en conduisant évasivement.
L'AI est prévue pour faire face aux comportements de résistance jusqu'aux situations à risque élevé, où il y a menace de lésions corporelles graves ou de mort.
Parmi les options offertes à l'agent, le recours à l'AI se situe après la présence de l'agent et l'intervention verbale, qui sont des options auxquelles les membres ont toujours accès. On la retrouve également après le contrôle mains nues (méthodes douces) et le contrôle mains fermées (méthodes dures), mais elle recoupe également ces interventions. L'AI est également considérée comme une intervention de niveau inférieur aux armes à impact, mais elle empiète aussi sur cette catégorie.
Difficultés liées à la place qu'occupe l'AI dans le MIGI
Le recours à l'AI dans les situations à risqué élevé, comme lorsqu'il y a menace de lésions corporelles graves ou de mort, ne semble pas préoccuper aussi vivement le public comparativement aux interventions présentant un risque moins élevé. Le fait que les dispositifs intermédiaires coïncident avec la catégorie moyenne du comportement de résistance donnerait à penser que l'AI ne doit pas servir si le comportement se retrouve au début de cette catégorie. Malheureusement, aucune directive particulière n'est fournie quant à la manière d'évaluer cet aspect, ce qui pourrait éventuellement mener à un « usage exponentiel ». Ainsi, l'AI est utilisée successivement à des niveaux de risque inférieurs, ce qui est particulièrement pertinent pour le comportement résistant pouvant être considéré comme « passif » ou pour le comportement non coopératif.
Même si la politique antérieure exigeait la prise en considération d'autres moyens d'intervention, la Commission a examiné des cas où le recours à l'AI semblait être la première intervention ou, si elle était utilisée une fois, l'AI était par la suite utilisée sans une réévaluation appropriée du changement de comportement, par exemple quand le sujet avait été maîtrisé et qu'il était seulement non coopératif. Dans de tels cas, on n'avait pas recours au contrôle mains nues (techniques douces). En réalité, dans certains cas, le contrôle mains nues (techniques douces) n'était même pas envisagé avant le recours à l'AI. Ces cas montraient généralement une divergence entre la politique de l'époque, dont il est question dans la section suivante, et la mise en oeuvre du MIGI. Le recours à la force était justifié en fonction du MIGI, et les exigences particulières de la politique sur l'AI n'étaient pas abordées.
Une cause possible du seuil réduit de l'utilisation de l'AI est la trop grande importance véhiculée dans les deux derniers principes fondamentaux du MIGI au moment d'envisager le recours à l'AI :
6) La meilleure stratégie consiste à utiliser l'intervention minimale nécessaire pour gérer les risques.
7) L'intervention idéale cause le moins de préjudices ou de dommages.
Bref, en faisant la promotion de l'AI comme intervention la moins susceptible de causer des blessures à l'agent ou au sujet, il n'est pas surprenant que l'on privilégie cette option. Les services de police citent couramment ces principes lorsqu'ils préconisent l'utilisation des AI. Malheureusement, il semble qu'en surestimant ces deux principes, la GRC a suscité chez ses membres une préférence pour l'utilisation de l'AI, d'où une diminution de la prise en compte des autres principes du MIGI. Plus particulièrement, les membres n'effectuent pas une évaluation appropriée du risque avant d'opter pour l'AI.
Selon les experts en recours à la force, l'AI est plus sécuritaire que le contrôle mains nues (techniques douces), même si le recours autorisé à l'AI commence après le contrôle mains nues (c.-à-d. les clés d'articulation). Étant donné cette théorie, il ne faut pas s'étonner du fait que l'AI s'est greffée à des interventions de plus en plus à faible risque. Le problème tient non pas seulement aux utilisateurs de l'AI, mais également aux membres supérieurs de la GRC qui examinent l'utilisation de l'AI et ne constatent aucun acte irrégulier là où le commissaire de la GRC estime que les gestes du policier sont « on ne peut plus excessifs ».
Le fait de comprendre quand l'utilisation de l'AI est appropriée s'avère le deuxième problème. La décision rendue dans l'affaire R.c.Hannibal offre un examen complet de ce problème. Dans le cadre de cette affaire, concernant un policier de la GRC impliqué dans un incident survenu en août 2001, la juge Challenger a entendu des témoignages d'experts contradictoires en la matière. On a déclaré notamment qu'en mode paralysant, l'AI équivaut au niveau d'intervention physique le plus faible, soit le contrôle à mains nues[37], ce à quoi la juge a répondu : « que les experts en recours à la force policière ne s'entendent pas tous sur le niveau d'intervention auquel correspond le Taser M26[38] ». Ayant examiné les faits, la juge Challenger a conclu que le recours à la force était inutile[39] et a affirmé : « Je ne peux que conclure que le [membre] a su profiter de la philosophie organisationnelle en ce qui concerne le Taser M26 comme une panacée dans le cadre de sa formation [40]. »
L'utilisation du pistolet Taser® est d'autant plus une solution aux interventions que l'idée que le Taser® en mode paralysant est un outil d'intervention minimale préféré, qui cause le moins de blessures. La suite logique est donc de dire que son utilisation équivaut aux techniques de contrôle les moins intrusives et qu'on peut s'en servir quand il faut recourir à la force.
Amnistie Internationale a préparé un document portant sur la question. Le rapport contenait beaucoup de renseignements anecdotiques pour étayer le principe selon lequel, dans la pratique, les AI ont trouvé une gamme plus générale d'utilisations acceptables que les fins pour lesquelles on en faisait la promotion au départ et a souligné ce qui suit :
[...] bien qu'ils ne soient pas employés pour éviter le recours à la force meurtrière, les pistolets Taser sont utilisés par de nombreux services de police américains comme option de force habituelle pour maîtriser des individus non coopératifs ou perturbés qui ne présentent aucun danger sérieux tant pour eux-mêmes que pour autrui. Dans certains services de police, le Taser est désormais l'outil le plus couramment utilisé. On s'en est déjà servi contre des écoliers indisciplinés, des personnes souffrant de troubles psychologiques ou intoxiquées qui n'étaient pas armées, des suspects prenant la fuite et des personnes se disputant avec un policier ou n'obéissant pas immédiatement à un ordre.
[...]Nombre de services de police estiment que le Taser répond à un besoin au niveau de la force. Cependant, ce qui préoccupe Amnistie Internationale c'est que l'utilisation des pistolets Taser fasse reculer dangereusement les limites des niveaux de force jugées « acceptables », plutôt que de limiter le recours à la force. Nous reconnaissons, certes, que les Taser peuvent s'avérer une solution de rechange à la force meurtrière dans des circonstances exceptionnelles, mais certains faits portent à croire que des mesures telles qu'un plus grand contrôle et une formation sur le recours à la force et l'utilisation d'armes à feu sont d'autant plus efficaces qu'elles diminuent le nombre de décès ou de blessures inutiles[41]. [...]
Le Bureau du commissaire aux plaintes contre la police de la Colombie-Britannique a publié une évaluation détaillée des pistolets Taser® et a donné suite aux observations d'Amnistie Internationale. Tout en étant d'accord avec les propos d'Amnistie Internationale en ce qui concerne la responsabilité, les contre-indications, la responsabilité administrative et l'obligation de rendre compte au public, le Commissaire soutient ce qui suit dans son rapport :
Nous croyons également qu'[Amnistie Internationale] a beaucoup minimisé les risques que courent les policiers qui essaient de maîtriser un individu « non armé », et la possibilité de blessures graves aux deux parties lors d'arrestations, même si aucune arme n'est utilisée. Amnistie Internationale ne tient pas compte d'une réalité courante : les policiers sont souvent appelés à contrôler des individus plus gros, plus forts et plus jeunes qu'eux, et ayant reçu une formation officielle ou non officielle en combat sans arme, dans des écoles d'arts martiaux ou un quartier pénitentiaire. Supposer qu'un individu non armé ne présente pas un risque sérieux est une erreur monumentale [souligné dans l'original][42].
Quoique dans ce rapport on envisage davantage de façons de bien utiliser l'AI que ne le propose Amnistie Internationale, on reconnaît tout de même que « l'établissement des limites précises des circonstances dans lesquelles l'utilisation d'un DAI est appropriée » est un enjeu critique[43]. La plupart des modèles de la police visent à établir un équilibre entre l'usage restrictif que suggère Amnistie Internationale, c'est-à-dire que l'AI ne serait utilisée que dans une situation où pourraient survenir des lésions corporelles graves ou la mort, et l'approche organisationnelle libérale selon laquelle un policier pourrait recourir à l'AI même quand il doit intervenir auprès d'une personne non coopérative[44]. Il n'y aurait aucune contestation sur l'importance d'utiliser l'AI dans les situations entraînant des lésions corporelles ou la mort. De même, les modèles de gestion du recours à la force de la police classent uniformément l'utilisation de l'AI dans les catégories de comportement « résistant » ou « combatif ».
Placer l'AI à mi-chemin, entre ces deux catégories, signifie qu'on doit tenir compte de tous les éléments de la situation. En misant davantage sur les sixième et septième principes du MIGI, on pourrait ne pas tenir suffisamment compte des troisième, quatrième et cinquième principes, soit l'évaluation du risque.
Solutions de rechange à la place actuelle de l'AI dans le MIGI
La Commission a déjà exprimé au commissaire de la GRC les préoccupations quant à l'endroit où doit figurer l'AI dans le MIGI. Un examen mentionné dans le rapport annuel 2006-2007[45] de la Commission mentionnait ce qui suit :
Il existe deux options en vue d'aider à clarifier les situations dans lesquelles un policier peut recourir à l'AI. On pourrait déplacer l'AI ailleurs dans le modèle graphique du MIGI, d'abord de la catégorie de dispositifs intermédiaires à un niveau qui débute après la catégorie de comportement résistant, soit au début de la catégorie de comportement combatif. L'utilisation de l'AI diminuerait ainsi dans des situations moins conflictuelles.
Autrement, on pourrait supprimer la catégorie de comportement non coopératif et diviser la catégorie de comportement résistant en deux, résistance active et résistance passive. C'est ce que propose le Cadre national de l'emploi de la force[46], auquel la GRC a collaboré. L'AI pourrait être utilisée à partir de la catégorie de résistance active. Ainsi, l'utilisation demeure « acceptable » au sens de la politique tout en donnant l'occasion aux policiers de réfléchir au niveau de résistance que présente un sujet. Les situations au cours desquelles les policiers emploient le terme résistant de façon exagérée et ont recours à l'AI comme moyen d'intervention courant pourraient alors diminuer[47].
Le commissaire de la GRC a répondu qu'un « groupe d'experts » venait tout juste d'examiner la place qu'occupait l'AI dans le MIGI et avait conclu qu'elle figurait à l'endroit approprié. Il a également indiqué que la redéfinition du comportement résistant serait abordée à une réunion en janvier 2007. Il semble que la question n'a pas été soulevée à ce moment-là et, en tout état de cause, qu'aucun changement n'avait été apporté aux définitions des différentes catégories de comportement dans le MIGI. Les recommandations ci-dessus ont été formulées dans le cadre de l'examen de l'utilisation de l'AI dans un cas en particulier. La portée de cet examen était beaucoup plus limitée que le présent examen qui, même aux premières étapes, a amené la Commission à réévaluer ces recommandations.
Particulièrement en ce qui touche le présent rapport intérimaire, la Commission est d'avis que la redéfinition des catégories de comportement dans le MIGI ne représente plus un choix efficace pour dissiper les préoccupations systémiques précisées plus tôt. Il conviendrait plutôt de s'attacher immédiatement à la première recommandation, soit que l'AI figure dans les moyens d'intervention permettant de faire face au comportement combatif et plus.
Résumé
L'AI faisant partie de la catégorie des dispositifs intermédiaires dans le MIGI, les statistiques sur les rapports de la GRC indiquent que l'AI a été utilisée à 4 025 reprises. Dans 42 p. 100 des cas déclarés, l'AI a été utilisée en mode paralysant contre 29 p. 100 des cas, où l'arme a été utilisée en mode sonde. Fait également intéressant, on dit que l'arme a été utilisée 9 p. 100 du temps à la fois en mode paralysant et en mode sonde. Précisons cependant que la simple présence de l'AI (l'arme est dégainée mais non utilisée) est survenue dans 20 p. 100 de l'ensemble des cas déclarés. Voilà qui dénote, à tout le moins au départ, que la simple présence de l'arme a pu avoir un effet dissuasif. Ces conclusions méritent un examen plus poussé dans le rapport final de la Commission.
Figure 8 : Utilisation de l'AI selon les rapports dans la base de données de la GRC[48]
Année | Rapports sur l'utilisation de l'AI | Utilisation de l'AI en mode paralysant | Utilisation de l'AI en mode sonde | Utilisation de l'AI en modes paralysant et sonde | AI dégainée mais non utilisée |
---|---|---|---|---|---|
2001 | 2 | 0 | 1 | 0 | 1 |
2002 | 84 | 38 | 15 | 7 | 24 |
2003 | 559 | 302 | 163 | 28 | 66 |
2004 | 240 | 135 | 68 | 20 | 17 |
2005 | 600 | 247 | 196 | 64 | 93 |
2006 | 1 123 | 464 | 325 | 104 | 230 |
2007* | 1 417 | 512 | 399 | 133 | 373 |
Total | 4 025 | 1 698 | 1 167 | 356 | 804 |
Formation de la GRC sur l'utilisation de l'AI
Le rapport intérimaire fournira une explication sommaire de la formation sur l'utilisation de l'AI à la GRC; le rapport final ira plus en profondeur après d'autres discussions avec la GRC.
Figure 9 : Membres de la GRC et AI sur le terrain
Année | Membres qualifiés sur le terrain | AI sur le terrain – Par numéro de modèle | ||||
---|---|---|---|---|---|---|
Instructeurs | Utilisateurs | Total | M26 | X26 | Total | |
2001 | 0 | 189 | 189 | 0 | 0 | 0 |
2002 | 67 | 709 | 776 | 549 | 0 | 549 |
2003 | 159 | 2 902 | 3 061 | 1 427 | 5 | 1 432 |
2004 | 69 | 1 898 | 1 967 | 1 485 | 18 | 1 503 |
2005 | 77 | 1 257 | 1 334 | 1 646 | 31 | 1 677 |
2006 | 115 | 897 | 1 012 | 1 757 | 449 | 2 206 |
2007* | 0 | 1 280 | 1 280 | 1 709 | 1 131 | 2 840 |
*Données jusqu'au 7 décembre 2007
Mis à jour le 10 décembre 2007
Actuellement, le cours sur l'utilisation de l'AI à la GRC est de 16 heures, et les candidats doivent être qualifiés dans les domaines suivants : premiers soins, utilisation du bâton de défense, utilisation de l'aérosol capsique, application de la technique d'étranglement par la région carotidienne et utilisation de l'arme de service. Le cours de formation fait appel à des exposés, des discussions, des démonstrations et à l'apprentissage fondé sur des scénarios. Le programme est divisé en 14 modules qui couvrent les aspects technologiques de l'utilisation de l'AI; les effets sur les systèmes nerveux central, moteur et sensoriel; les considérations d'ordre médical; les principes du MIGI, la politique de la GRC et l'utilisation; l'entretien de l'arme; les applications sur le terrain portant sur les toxicomanes, les personnes en crise psychologique et les possibilités de suicide; et un module indépendant sur le délire agité. Pour être qualifié à utiliser l'AI, le membre de la GRC doit obtenir une note de passage de 80 p. 100 à un examen écrit, démontrer qu'il peut adéquatement se servir de l'AI et justifier ses gestes, sur le plan juridique, en plus de démontrer qu'il peut retirer les sondes de façon appropriée après utilisation. La certification en utilisation de l'AI est valide pendant trois (3) ans.
La formation d'instructeur en utilisation de l'AI ressemble beaucoup au cours pour l'utilisateur, mais il met l'accent sur la formation visant à permettre à l'instructeur d'enseigner comme il se doit l'utilisation de l'arme. Pour être admissible à la formation d'instructeur, le candidat doit montrer qu'il a satisfait à tous les critères du cours général pour l'utilisateur, décrit ci-dessus, en plus d'être instructeur sur la sécurité du public et de la police. Le cours est d'une durée de trente-deux (32) heures et s'échelonne sur quatre jours. Le jour un se concentre sur le cours pour l'utilisateur de l'AI; le jour deux met l'accent sur le délire agité, les présentations médias, la façon d'utiliser l'AI; les jours trois et quatre portent sur la façon d'enseigner le cours pour l'utilisateur de l'AI.
Le cours de recyclage pour l'utilisation de l'AI est semblable au cours initial pour l'utilisateur. Il s'agit d'un cours d'une durée de quatre (4) heures qui comprend des exposés, des discussions et des démonstrations. Contrairement au cours initial pour l'utilisateur et au cours pour l'instructeur, le cours de recyclage est noté en fonction d'une réussite ou d'un échec. Les candidats doivent subir un examen écrit, pouvoir justifier le recours à l'AI et retirer les sondes de façon appropriée.
Durant la formation et sur le terrain, les pairs et les superviseurs des membres de la GRC évaluent la compétence des membres qualifiés pour l'utilisation de l'AI.
La GRC a informé la Commission du fait qu'à partir de janvier 2008, tous les cadets à la Division Dépôt seront certifiés concernant l'utilisation de l'AI. Reste à voir si chaque cadet se verra remettre une AI au moment de la remise du certificat.
Recommandations intérimaires de la Commission
Actuellement, l'AI est l'une des quelques armes de recours à la force mises à la disposition des forces de l'ordre. À ce titre, l'AI sert dans des situations particulières exigeant des moyens d'intervention moins meurtriers pour réduire le risque de blessures ou le décès du policier et du sujet lorsqu'il convient de recourir à la force. Autrement dit, il s'agit d'une option dans les cas où l'on aurait autrement envisagé le recours à la force létale. Toutefois, le recours à l'AI s'est répandu au point où on l'utilise pour maîtriser les sujets réfractaires qui ne représentent pas une menace de mort ou de lésions corporelles graves et contre lesquels le recours à la force létale ne serait pas une option. Il s'agit de déterminer dans quelles situations l'utilisation de l'AI est inappropriée.
La Commission des plaintes du public contre la GRC (Commission) ne recommande pas un moratoire absolu sur l'utilisation de l'AI à la GRC puisque l'arme est utile dans certaines situations. Il convient plutôt de classifier de façon appropriée l'AI dans l'utilisation des modèles de recours à la force pour des comportements très précis dans des situations très particulières. Cela suppose de restreindre l'utilisation de l'AI en modes paralysant et sonde et de la classer dans la catégorie « arme à impact », dont l'utilisation n'est justifiée que dans les situations où le sujet a un comportement « combatif » ou représente une menace de « mort ou de lésions corporelles graves ».
À la GRC, la politique en vigueur classifie l'AI comme un « dispositif intermédiaire », la plaçant dans la même catégorie que l'aérosol capsique. Cette classification permet d'utiliser l'arme contre un sujet dont le comportement est jugé « résistant » et non pas seulement « combatif » ou qui représente une menace de « mort ou de lésions corporelles graves » pour l'agent, le sujet lui-même ou le public. La Commission est d'avis que la classification de l'AI comme « dispositif intermédiaire » autorise l'usage de l'arme plus tôt qu'il n'est raisonnable de le faire.
L'approche adoptée par la GRC illustre clairement un changement dans l'usage autorisé par rapport à l'intention initiale en 2001 qui était plus restrictive : l'arme devait être utilisée pour maîtriser les suspects qui résistaient à l'arrestation, avaient un comportement « combatif » ou qui étaient suicidaires. La Commission qualifie cet usage répandu et moins restrictif d'« usage exponentiel ». Ainsi, l'arme est utilisée en dehors des objectifs énoncés, comme l'ont démontré les cas examinés par la Commission au cours des six dernières années où les sujets ont affiché des comportements qui étaient manifestement non combatifs ou ceux où il n'y avait pas de résistance active.
À la GRC, la politique en vigueur relative à l'utilisation de l'AI a évolué sans que l'on tienne compte suffisamment, si tant est qu'on en tienne compte, des réalités entourant l'utilisation de l'arme par la GRC. Il semble que les modifications apportées à la politique aient tenu compte, de façon appropriée, des expériences des sources externes, mais le défaut d'établir une corrélation entre ces données et les expériences particulières de la GRC constitue une omission importante, laquelle devrait être rectifiée le plus tôt possible.
Il est particulièrement inquiétant de constater que l'on dénombre actuellement 2 840 AI à la GRC et, depuis l'adoption du dispositif, 9 132 membres ont suivi une formation sur son utilisation; toutefois, la GRC n'a produit aucune donnée empirique sur les avantages ou les inconvénients liés à l'utilisation de l'arme. L'AI a été utilisée en modes paralysant et sonde à plus de 3 000 reprises depuis son arrivée en décembre 2001, mais aucun rapport annuel n'a encore été produit, et les renseignements saisis dans le Rapport d'utilisation de l'arme à impulsions n'ont pas fait l'objet d'un examen approfondi et n'ont pas servi à l'élaboration de la politique actuelle concernant l'AI. Qui plus est, la base de données sur l'utilisation de l'AI à la Direction générale n'est entièrement fonctionnelle que depuis la fin de 2005. Or, c'est à la fin de 2001 que l'AI a été utilisée la première fois sur le terrain. Des données exactes et valables sur l'utilisation de l'AI sont cruciales pour qui veut comprendre quand et pourquoi les membres emploient certaines techniques de recours à la force et pour permettre aux officiers supérieurs de prendre des mesures correctives au besoin.
Le défaut de recueillir, de rassembler ou d'analyser comme il se doit ses propres données suppose que la GRC est incapable, par sa propre inertie, d'établir des liens avec les recherches externes sur l'utilisation de l'AI à la GRC. Six ans après l'ajout de l'AI à l'arsenal de la GRC, il n'existe aucune analyse exhaustive ni même superficielle rapidement utilisable permettant à la Commission d'effectuer cet examen. Cette négligence dénote que la GRC a été incapable de mettre en oeuvre des processus de responsabilisation systémique – comme la présentation de rapports destinés au public – et ne peut pas évaluer les effets que les modifications apportées à la politique ont eus sur l'utilisation de l'AI, la formation ou la protection des policiers et du public. En réalité, l'utilisation de l'AI a été libéralisée sans une analyse réfléchie complète ou un plan stratégique, ce qui constitue une lacune capitale dans la gestion et la surveillance de l'AI.
La supervision des membres qui utilisent l'AI est une autre façon de garantir la pertinence. Bien que la Commission n'ait pas pu examiner entièrement les données se rapportant au nombre de membres et instructeurs ayant suivi une formation sur l'utilisation de l'AI en fonction du grade, les chiffres indiquent généralement que les superviseurs sur le terrain n'ont pas tous suivi une telle formation. Pourtant, ces superviseurs sont les seuls responsables des membres sous leur contrôle qui peuvent être autorisés à utiliser l'arme et ils remplissent les formulaires requis à présenter à la Direction générale. La Commission est d'avis qu'il y a entrave aux mesures correctives pouvant s'imposer dans le cas des membres qui ont utilisé les AI d'une manière inappropriée si le superviseur n'a pas suivi une formation et n'est pas accrédité.
Il convient de prévoir un mécanisme visant à garantir la conformité continue avec le modèle de recours à la force de la GRC et la politique en vigueur sur l'utilisation de l'AI dans le cadre d'opérations. La GRC a reconnu que l'évaluation et la reddition de comptes appropriées concernant l'utilisation de l'AI exigent des analyses et des rapports adéquats. Ces renseignements sont essentiels pour dissiper les préoccupations liées à l'utilisation et élaborer des politiques et des pratiques pertinentes et applicables. Outre l'absence d'évaluation à l'échelle de la GRC concernant l'utilisation de l'AI, on ne s'est guère penché sur les questions visant à déterminer l'effet qu'avait l'utilisation de l'AI sur l'application d'autres techniques de recours à la force. Ce sont également des aspects clés qu'il convient de prendre en considération au moment de déterminer le bien-fondé général de l'AI. Pour garantir l'uniformité des pratiques et politiques et pour établir un mécanisme de responsabilité défini, outre améliorer la transparence, il est essentiel de mettre en place un coordonnateur national du recours à la force à la GRC.
Les programmes de formation doivent veiller à ce que les membres de la GRC apprennent à utiliser une AI comme il se doit et à ce que le processus décisionnel et l'évaluation des facteurs conjoncturels en fonction du modèle de recours à la force soient pertinents et justifiables au moment d'utiliser l'arme. Le modèle de recours à la force est enseigné à grande échelle durant la formation des cadets à la Division Dépôt lorsque ces derniers suivent une formation portant sur presque tous les autres types de moyens d'intervention, y compris l'utilisation des armes à feu. Toutefois, la formation sur l'AI n'est pas enseignée en même temps que les autres méthodes de recours à la force, mais il semble que la situation soit en train de changer. Actuellement, la formation sur l'AI peut être offerte des années après la formation des cadets à la Division Dépôt, et l'exigence du recyclage annuel a été réduite à tous les trois ans. La Commission croit que cette période est trop longue et que le recyclage tous les deux ans est plus approprié. Ainsi, ceux qui sont autorisés à utiliser les AI demeurent au courant de la politique, des changements apportés à la politique, des techniques d'évaluation de la situation et des expériences dans l'utilisation du modèle de recours à la force.
Ces derniers mois, les incidents tragiques associés à l'utilisation de l'AI ont accentué l'intérêt du public à l'égard de l'arme. La GRC compte sur les études portant sur la sécurité relative des AI en tant que technologie moins meurtrière. Toutefois, bon nombre de ces mêmes études soulignent le manque de recherche se rapportant aux « groupes à risque ». Il est impératif que l'on poursuive les recherches visant à établir les niveaux de sécurité pour les « groupes à risque » et à déterminer si, en vertu de la symptomatologie même de ces groupes (c.-à-d. consommation de drogue ou troubles mentaux), ils peuvent être exposés à un nombre disproportionné d'interventions policières où l'utilisation de l'AI peut être jugée appropriée.
Dans l'examen de l'utilisation de l'AI par le personnel des forces de l'ordre, il est évident que l'on doit tenir compte de l'état de délire agité. Soulignons cependant que le terme n'est pas universellement accepté dans le milieu médical. Le délire agité, même s'il constitue toujours une question litigieuse pour certains, a été désigné dans la documentation comme un problème médical incontestable dont le personnel des forces de l'ordre doit tenir compte. Toutefois, pour ce qui est de l'utilisation des AI, on croit actuellement que les sujets qui sont dans un état de délire agité ont immédiatement besoin d'une intervention médicale et que le traitement ne devrait pas être retardé dans l'espoir que l'état du sujet s'améliorera. D'après la Commission, les AI ne constituent pas une option privilégiée pour maîtriser le sujet en état de délire agité, sauf s'il manifeste un comportement combatif ou qu'il représente une menace de mort ou de lésions corporelles graves pour l'officier, le sujet lui-même ou le public. À ce titre, l'AI n'est pas un outil médical à utiliser contre les sujets qui semblent en état de délire agité. Il est clair que la participation de la GRC à la recherche portant sur l'AI est nécessaire pour appuyer l'élaboration de politiques et de pratiques en la matière.
Pour donner suite à ces préoccupations et aux autres points indiqués dans ce rapport provisoire, voici ce que la Commission recommande de mettre en oeuvre immédiatement :
Recommandation 1 : La GRC doit restreindre immédiatement l'usage de l'arme à impulsions en la classifiant comme une « arme à impact » dans les modèles de recours à la force et autoriser son utilisation seulement dans les situations où le sujet a un comportement « combatif » ou s'il représente une menace de « mort ou de lésions corporelles graves » pour l'agent, le sujet lui-même ou le public. Cela comprend l'utilisation du dispositif en modes paralysant et sonde.
Recommandation 2 : La GRC doit utiliser seulement l'arme à impulsions dans les situations où le sujet semble en état de délire agité lorsque le comportement est « combatif » ou s'il représente une menace « de mort ou de lésions corporelles graves » pour l'agent, le sujet lui-même ou le public.
Recommandation 3 : La GRC doit communiquer immédiatement à tous les membres ce changement dans la classification des techniques de recours à la force.
Recommandation 4 : La GRC doit remanier immédiatement la formation sur les armes à impulsions que les membres suivent afin qu'ils tiennent compte de la classification du dispositif comme « arme à impact ».
Recommandation 5 : La GRC doit modifier immédiatement la politique sur l'arme à impulsions en instaurant l'exigence du recyclage tous les deux ans.
Recommandation 6 : La GRC doit nommer immédiatement un coordonnateur national du recours à la force responsable, à tout le moins, des aspects suivants :
- L'orientation et la coordination nationales de l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- L'élaboration de la formation, des procédures et des politiques nationales relatives à l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- La mise en oeuvre de la formation, des procédures et des politiques nationales relatives à l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- La surveillance de la conformité avec la formation, les procédures et les politiques nationales relatives à l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- La création, la tenue à jour et le chargement des bases de données liées à l'utilisation de l'équipement et des techniques de recours à la force;
- Les analyses des tendances dans l'utilisation de l'ensemble de l'équipement et des techniques de recours à la force.
Recommandation 7 : La GRC doit instaurer et appliquer immédiatement des exigences plus rigoureuses en matière de rapport sur l'utilisation des armes à impulsions afin de garantir la préparation des dossiers appropriés et leur transmission à la base de données nationale après chaque utilisation du dispositif.
Recommandation 8 : La GRC doit produire un rapport trimestriel sur l'utilisation de l'arme à impulsions qui sera distribué au ministre de la Sécurité publique, au commissaire de la GRC, au président de la Commission des plaintes du public contre la GRC et à tous les commandants divisionnaires de chaque division et qui fournit au moins les détails suivants :
- Le nombre et la nature des incidents au cours desquels l'arme à impulsions est utilisée;
- Le type d'utilisation (c.-à-d. mode paralysant, mode sonde, menace de recourir à une arme, dégainer, etc.);
- Le nombre de cas où des soins médicaux ont été requis après utilisation de l'arme;
- Le nombre de membres et d'instructeurs ayant suivi une formation;
- Le nombre ayant réussi la formation et le nombre de membres et d'instructeurs ayant échoué la formation;
- Le nombre ayant réussi le recyclage et le nombre de membres et d'instructeurs ayant échoué le recyclage.
Le rapport trimestriel sera produit pendant une période de trois ans à compter de ce jour.
Recommandation 9 : La GRC doit produire un rapport annuel sur l'utilisation de l'arme à impulsions qui sera distribué au ministre de la Sécurité publique, au commissaire de la GRC, au président de la Commission des plaintes du public contre la GRC et à tous les commandants divisionnaires de chaque division et qui comprend tous les rapports trimestriels de l'année visée et au moins les détails suivants :
- Toutes les données requises et analysées dans le rapport trimestriel;
- La justification des modifications proposées ou réelles de la politique;
- La justification des modifications proposées ou réelles de la formation;
- Une analyse des tendances sur l'utilisation;
- Une analyse du lien entre l'utilisation et la protection du policier ou du public;
- Une analyse du lien entre l'utilisation et les modifications proposées de la politique et de la formation.
Le rapport annuel continuera d'être produit après l'expiration de la période prévue pour le rapport trimestriel.
Recommandation 10 : La GRC doit continuer de participer à la recherche reliée à l'arme à impulsions qui porte sur les aspects sociaux, juridiques et médicaux de l'utilisation du dispositif. Il s'agit ici de mettre l'accent au moins sur les aspects suivants :
- L'utilisation de l'AI, l'infliction d'une douleur et l'importance de cette douleur;
- La pertinence de l'application de l'AI par rapport à d'autres moyens d'interventions axés sur le recours à la force;
- L'utilisation de l'AI contre les populations vulnérables ou à risque;
- Les autres techniques de recours à la force ou interventions lorsqu'il s'agit de personnes présentant des symptômes de délire agité;
- L'utilisation de l'AI, le délire agité et la mort subite dans le contexte des services de police en milieu rural ou dans le Nord;
- Les liens entre l'utilisation de l'AI, le délire agité et la possibilité de mort.
Cela comprend notamment les projets de recherche en collaboration réalisés par le Centre canadien de recherches policières (CCRP).
Glossaire
Annexe A : Extrait de la réponse du commissaire de la GRC aux rapports intérimaires de la Commission
Comme le prévoit la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, le commissaire de la GRC a donné les raisons de son désaccord avec les conclusions défavorables et les recommandations de la Commission :
- Le commissaire de la GRC n'était pas d'accord avec la conclusion de la Commission selon laquelle le comportement du plaignant ne justifiait pas le recours à l'AI. Dans le rapport intérimaire, la Commission était d'avis que l'utilisation de l'AI était inappropriée, car [Traduction] « le simple fait de serrer les poings ne constitue pas un comportement combatif ». Le commissaire a répondu : [Traduction] « J'ai conclu que le plaignant résistait physiquement à l'arrestation et que son comportement devenait plutôt combatif. De plus, ses poings serrés et ses attaques verbales contre les membres en cause, de même que sa résistance physique au moment de le menotter, indiquaient l'escalade possible d'une situation déjà dangereuse ».
- En réponse à un autre rapport intérimaire, le commissaire de la GRC s'est dit d'accord avec la conclusion défavorable de la Commission, mais à l'exception suivante : « [...] par comparaison aux techniques de recours à la force traditionnelles telles que la technique de clé, la soumission par point de compression et les coups visant à assommer l'adversaire, l'usage du pistolet Taser M26 Advanced contre un sujet qui manifeste de la résistance réduirait le risque de blessure, tant pour le sujet que pour le policier. »
- Dans un avis du commissaire (2007), voici ce qu'a déclaré le commissaire de la GRC qui a rejeté les recommandations de la Commission demandant un examen de la politique sur l'AI : « Suivant des préoccupations récentes que j'ai exprimées sur l'utilisation abusive possible d'armes à impulsions, notre Service de politique opérationnelle a formé un groupe d'experts; celui-ci a revu la politique de la GRC et a décidé que l'usage de pistolets électriques est conforme à la règle du recours progressif à la force. »
- Quant à la recommandation de la Commission que la GRC examine sa politique de formation sur les AI, le commissaire a indiqué dans un avis, en 2007, ce qui suit : « Des modifications ont été apportées au cours d'instructeur d'armes à impulsions en octobre 2005 afin de s'assurer que nos formateurs connaissent bien non seulement la fonctionnalité du pistolet, mais également les principes des moyens d'intervention moins meurtriers, les effets physiologiques et psychologiques qu'il cause, et la façon dont on applique son utilisation à la règle du recours progressif à la force que préconise le MIGI. Par ailleurs, pour participer au cours, les candidats doivent être des instructeurs actifs en sécurité publique et policière et bien connaître les principes du MIGI. Je suis convaincu que nos formateurs en armes à impulsions sont pleinement qualifiés pour s'acquitter de cette fonction. »
Annexe B : Documents examinés
Darren Laur, Le délire excité et sa corrélation avec la mort subite et inattendue à la suite d'une contention (TR-02-2005) (Ottawa, Centre canadien de recherches policières, 2004).
Le document publié par le Centre canadien de recherches policières (CCRP) en 2005 tentait de clarifier la mort subite et inattendue à la suite d'une contrainte policière et d'établir, le cas échéant, le rôle du délire agité dans ces décès. La revue de la recherche médicale et scientifique réalisée à l'échelle nationale et internationale était essentielle à l'examen. L'étude mettait également l'accent sur la corrélation possible entre les décès attribués au délire agité et au recours à la force par la police, ce qui incluait l'examen du rôle des AI. En se fondant sur la documentation disponible, la recherche médicale et les expériences scientifiques, le CCRP a présenté une liste des symptômes associés au délire agité et les protocoles proposés pour composer avec les personnes qui semblent en état de délire agité.
Selon l'étude, trois groupes précis de personnes semblent être davantage susceptibles d'être victime « d'une mort subite et inattendue à la suite d'une contention attribuée au délire excité[49] » :
- Les personnes qui souffrent d'un trouble psychiatrique.
- Les personnes qui font une consommation abusive et chronique de substances stimulantes illicites.
- Une combinaison de trouble mental et de consommation abusive d'alcool et d'autres drogues.
Les auteurs ont souligné qu'il serait irréaliste de s'attendre à ce que les agents de la paix déterminent, sur les lieux, ce qui a provoqué l'apparition du délire agité, car ils n'ont pas suivi une formation adéquate pour faire ces distinctions.
Outre les trois groupes à risque élevé, l'étude a répertorié neufs facteurs contributifs possibles pouvant favoriser la mort subite et le délire agité[50] :
- Facteur contributif no 1 : Toxicité de la cocaïne et effet de la dopamine sur le muscle cardiaque
- Facteur contributif no 2 : Toxicité de la cocaïne pour le cerveau (hyperthermie)
- Facteur contributif no 3 : Rhabdomyolyse associée à la cocaïne (RAC)
- Facteur contributif no 4 : Acidose métabolique
- Facteur contributif no 5 : Libération de catécholamines neuronales
- Facteur contributif no 6 : Médicaments antipsychotiques et mort soudaine
- Facteur contributif no 7 : Susceptibilité génétique à l'arythmie
- Facteur contributif no 8 : Cardiomyopathie hypertrophique
- Facteur contributif no 9 : Contention avec le visage contre terre à la suite d'une arrestation
L'étude concluait en soulignant que le délire agité devrait être considéré comme une urgence médicale et traité en conséquence par le personnel des forces de l'ordre et des services d'urgence. Vu le manque d'information sur le délire agité et la façon dont il se manifeste, les auteurs ont fait remarquer que la politique et les procédures devaient être suffisamment souples pour s'adapter aux nouvelles études.
Drazen Manojlovic et coll. Étude sur les dispositifs à impulsions (TR-01-2006) (Ottawa, Centre canadien de recherches policières, 2005).
À la lumière du nombre de décès survenus à la suite de l'utilisation de l'AI par la police, l'Association canadienne des chefs de police (ACCP) a demandé au CCRP d'effectuer une étude sur les données scientifiques et médicales disponibles visant à déterminer si les AI présentaient un risque accru pour la sécurité. Le rapport se divisait en trois sections : la sécurité de l'AI en matière de santé; les principes relatifs à l'utilisation de l'AI dans le cadre du travail policier; et le délire agité. L'examen de la recherche médicale existante réalisée au Canada et aux États-Unis confirmait l'hypothèse selon laquelle il était impossible d'établir un lien de cause à effet entre la mort (subite ou autre) et l'utilisation des AI. Le risque de dommages cardiaques par l'AI ne pouvait pas non plus être établi. Le rapport indiquait également que l'état de délire agité ressortait comme explication la plus probable de la mort inattendue.
En dépit des études médicales établissant un faible lien entre les AI et la mort, les auteurs du rapport ont constaté ce qui suit : « La question des utilisations multiples du DAI et de leurs répercussions sur la respiration, les niveaux de pH et autres effets physiques connexes, offre une théorie plausible sur le lien possible entre des morts, l'utilisation du DAI et les personnes montrant des symptômes de [délire agité][51]. » Le rapport confirme que l'utilisation de l'AI contre les personnes en santé est généralement sécuritaire, mais qu'il y a risque de mort soudaine à la suite de l'utilisation de l'arme, particulièrement contre les personnes sous l'effet de drogues illicites ou en état de délire agité.
L'étude mettait également l'accent sur les considérations stratégiques et proposait un modèle des meilleures pratiques. L'examen des renseignements disponibles à l'époque étayait la croyance selon laquelle l'AI, lorsqu'elle était utilisée dans les circonstances appropriées, renforçait la sécurité de l'agent, réduisait le nombre de blessures tant pour le sujet que pour le policier et diminuait le nombre de rencontres mortelles entre la police et le public. Toutefois, avec les avantages vient une responsabilité accrue, et le CCRP a proposé la création de bases de données sur l'utilisation, des protocoles d'établissement de rapports et de modèles appropriés d'orientation et de politique.
L'étude a également porté sur le phénomène du délire agité et le lien possible avec la mort subite. Une explication exhaustive des réalités médicales de cet état illustrait les difficultés auxquelles sont confrontés les policiers qui interagissent avec des personnes présentant des symptômes correspondant au délire agité. La Dre Christine Hall a recommandé de ne pas permettre aux personnes en état de délire agité de « se calmer », car les aspects plus mortels du délire agité peuvent progresser rapidement. Elle souligne : « Non seulement les propriétaires sont-ils mécontents de constater que la police laisse un individu détruire leur propriété, mais selon certaines preuves d'ordre médical, la progression vers un état d'épuisement est, en elle-même, dangereuse[52]. » En raison du manque de connaissances scientifiques et médicales sur le délire agité en général, la Dre Hall présente une liste de comportements observables et de symptômes physiologiques dont peuvent se servir les policiers pour déterminer si la personne est en proie au délire agité. Le rapport soulignait que le personnel des forces de l'ordre devait considérer le délire agité comme une urgence médicale et recommandait l'intervention des services médicaux d'urgence le plus tôt possible.
Ce document du CCRP concluait en réclamant l'établissement de protocoles exhaustifs des meilleures pratiques, mais suffisamment adaptés aux réalités que doivent affronter les agents de la paix sur le terrain. Il prévoyait également une liste des questions futures à aborder comme les paramètres de sécurité et d'autres données scientifiques sur le délire agité et la mort subite ou inattendue à la suite d'une technique de contrainte.
Colombie-Britannique. Bureau du commissaire aux plaintes contre la police, Étude sur la technologie du Taser - Rapport final, Dossier no 2474, BCPP (Victoria, Bureau du commissaire aux plaintes contre la police, 2005).
En septembre 2004, le Bureau du commissaire aux plaintes contre la police (BCPP) de la Colombie-Britannique a publié un rapport provisoire sur la technologie Taser® relatif aux fonctions d'application de la loi en Colombie-Britannique. Le rapport provisoire avait pour thème les incidences médicales et juridiques du recours à l'AI sur le terrain. Le rapport final visait à fournir des normes de formation au sujet des AI, du délire agité et des protocoles de contrainte.
Le BCPP a examiné les blessures subies par les agents au cours de la formation, ce qui, par extension logique, permettrait de comprendre les blessures pouvant être infligées sur le terrain par l'utilisation de l'AI. Ces blessures, désignées blessures de nature secondaire, comprenaient des dislocations de l'épaule, des dents ébréchées, un vertige, une sensibilité musculaire, des lacérations, brûlures et, dans un cas, une fracture par compression à la colonne vertébrale[53]. Ce qui ressort de la documentation existante, « c'est le danger de blessures musculosquelettiques causées par la contraction musculaire puissante qui se produit lors de la décharge d'un DAI[54]. »
L'étude invitait un groupe d'experts, y compris des professionnels de la santé, à examiner la documentation médicale disponible et à cerner les lacunes dans la recherche. Pour ce qui est du délire agité, le groupe a conclu, plutôt que d'établir un diagnostic ferme, que le phénomène se décrivait mieux comme une « grappe de symptômes ». De plus, « [o]n a aussi mentionné que l'abus de cocaïne et de méthamphétamine chevauchent les troubles mentaux et produisent une paranoïa et une neutralisation des mécanismes de contrôle où les sujets ressentent la perte du contrôle de leurs pensées et actions. Ces drogues pouvant stimuler beaucoup trop les patients déjà dans un état de délire, on constate des taux accrus de mortalité dans les hôpitaux sans la présence de TASER ou autres armes à létalité atténuée[55]. »
L'étude réclamait aussi la mise en place d'un coordonnateur provincial du recours à la force en Colombie-Britannique qui serait responsable de coordonner les renseignements relatifs à l'utilisation de l'AI, d'examiner la technologie nouvelle et la recherche et de communiquer les meilleures pratiques aux autres coordonnateurs de la force dans la province.
TASER International
TASER International soutient que ses produits sont sécuritaires et n'entraînent pas la mort, mais deux bulletins importants ont été publiés en juin 2005 et mai 2006, respectivement. Le bulletin de formation de juin 2005 mentionne en partie ce qui suit[56] :
[Traduction] L'exposition répétée, prolongée ou continue à la décharge électrique du TASER peut causer de fortes contractions musculaires pouvant altérer la respiration, particulièrement si les sondes sont placées contre la poitrine ou le diaphragme. Dans la mesure du possible, les utilisateurs doivent éviter les décharges prolongées, de longue durée, ininterrompues ou les cycles multiples consécutifs afin de réduire au minimum la possibilité que le sujet déploie trop d'efforts ou l'affaiblissement éventuel de sa pleine capacité à respirer durant une période prolongée [...] [les personnes en état de délire agité] sont exposées à des risques importants pour la santé pouvant entraîner la mort à la suite d'efforts prolongés ou de la difficulté à respirer.
Le bulletin de formation de mai 2006 se lit en partie comme suit[57] :
[Traduction] Le pistolet TASER peut causer de fortes contractions musculaires pouvant entraîner l'effort physique ou des blessures musculaires de « type athlétique ». Dans certains cas, des personnes peuvent se retrouver dans une situation grave [...] Ces incidents peuvent également survenir lorsqu'une personne réagit de manière inhabituelle ou imprévue à l'utilisation ou à la décharge du pistolet TASER [...] TASER International a immédiatement été informé de plusieurs incidents où des sujets volontaires ont subi des blessures durant l'exposition d'un groupe au dispositif ou à la suite d'une telle exposition [...] TASER International recommande désormais que le procédé d'exposition en groupe ne soit pas utilisé pour les démonstrations du pistolet TASER [gras ajouté].
Du reste, voici ce que mentionne en partie la mise en garde applicable au produit, publiée le 1er mars 2007 à l'intention des forces de l'ordre[58] :
[Traduction] [...] Dans certaines situations, chez les personnes sensibles, il est possible que le stress et l'effort à la suite des cycles multiples consécutifs ou de l'application prolongée ou continue du pistolet TASER puissent favoriser l'épuisement global, le stress et les risques médicaux connexes [...] Sans rapport avec l'exposition au pistolet TASER, certains états comme le délire agité, l'épuisement grave, les facultés affaiblies par la drogue ou la consommation chronique de drogues, l'effort exagéré à la suite d'un corps à corps peuvent entraîner des blessures graves ou la mort. [...] Il est recommandé d'employer une technique de contrainte physique avec le pistolet TASER pour réduire au minimum la durée globale du stress, de l'effort et de la difficulté éventuelle à respirer, particulièrement contre les personnes qui présentent des symptômes de délire agité ou d'épuisement.
Annexe C : Politique sur l'arme à impulsions – en vigueur à la GRC
17.7. Arme à impulsions
- 17-7-1 Étuis approuvés
- 17-7-2 Méthode de recharge des piles du Taser M26
[1] L'arme à impulsions (AI) est également appelée couramment dispositif à impulsions, Taser® ou matraque paralysante. Ces termes peuvent être interchangeables.
[2] Supra note 14.
[3] Le MIGI est « utilisé par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) afin de déterminer le niveau de force approprié, le cas échéant, qui est nécessaire pour assurer la sécurité publique et celle des officiers relativement à un incident de police. » Gendarmerie royale du Canada, Évaluation des facteurs relatifs à la vie privée – Arme à impulsions [GRC, Évaluation des facteurs relatifs à la vie privée - AI].
[4] Code criminel,L.R.C. 1985, Ch. C-46.
[5] Gendarmerie royale du Canada et Centre canadien de recherches policières, The Conducted Energy Weapon Evaluation Project (Ottawa, GRC, CCRP, 2002), p. 30.
[6] R. c. Hannibal, 2003 BCPC 504, para 119.
[7] Amnesty International, United States of America: Excessive and Lethal Force? Amnesty International's Concerns about Deaths and Ill-Treatment involving Police Use of Tasers(en anglais seulement).
[8]La Commission a reçu approximativement la moitié des plaintes contre la GRC; la GRC a reçu directement l'autre moitié des plaintes.
[9] Le rapport mettait au premier plan la Division E en Colombie-Britannique pour différentes raisons : 1) Un tiers (1/3) de l'effectif de la GRC est en service à cette Division; 2) la Division compte le plus grand nombre d'AI utilisées; et 3) les événements récents ont mobilisé l'attention sur cette Division.
[10] Du 1er janvier au 10 décembre 2007 et ne comprend pas les plaintes concernant le décès de M. Dziekanski.
[11] La Commission a également reçu trois (3) plaintes supplémentaires relativement au traitement médiatique du décès de M. Dziekanski.
[12] YVR.
[13] CAPRA est l'abbre de Clients, Acquisitions et analyse de renseignements, Partenariats, Réponses, Autoévaluation.
[14] Dans les catégories de comportement, la GRC définit comme suit le comportement résistant : « Se dégager, repousser avec l'intention de ne pas être maîtrisé, s'enfuir, ainsi que refuser nettement et verbalement avec colère d'obéir aux ordres légitimes. » Gendarmerie royale du Canada. Services nationaux d'apprentissage. Section de l'exercice et de la formation tactique, cours « Instructeur - Sécurité publique et policière Recours à la force, gestion des incidents et principes tactiques » CD-ROM, MIGI (Ottawa, GRC, 2006).
[15] Voir l'annexe A pour un échantillon des raisons du commissaire de la GRC.
[16] Tiré intégralement du document intitulé Le délire excité et sa corrélation avec la mort subite et inattendue à la suite d'une contention (TR-02-2005), Darren Laur (Ottawa, Centre canadien de recherches policières, 2004) [Laur, Le délire excité].
[17] Le CCRP est issu d'un partenariat entre l'Association canadienne des chefs de police (ACCP), la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et le Conseil national de recherches du Canada (CNRC). Il est dirigé par un conseil consultatif indépendant composé de représentants de la police et d'autres organismes connexes de tout le Canada. Le CCRP a pour mission d'assurer un leadership et de constituer un centre de convergence pour l'application de la science et de la technologie en matière de services de police et de sécurité publique dans tout le Canada au moyen de la recherche, du développement, des normes, de l'évaluation et de la commercialisation.
[18] Drazen Manojlovic et coll. Étude sur les dispositifs à impulsions (TR-01-2006) (Ottawa, Centre canadien de recherches policières, 2005), p. iii.
[19] Voir l'annexe B pour des extraits des bulletins de formation de TASER International et la mise en garde concernant l'utilisation du produit.
[20] Amnistie Internationale, Canada: Inappropriate and Excessive Use of Tasers (Londres, Amnesty International, 2007), p. 2 (en anglais seulement).
[21] La Commission est au courant des études médicales sur la douleur et des effets physiologiques et psychologiques de la douleur sur le corps. Toutefois, ces études s'inscrivent dans le contexte général d'avancement des connaissances médicales et ne portent pas précisément sur les techniques de contrainte par la douleur utilisées par les forces de l'ordre.
[22] Gendarmerie royale du Canada, Manuel des opérations (Ottawa, GRC) [GRC, MO]. La politique de la GRC relative aux AI se trouve dans le MO ch. III.2.I.5 : Recours à la force : Arme à impulsions (2001-12-20 à 2005-05-31) et le MO ch. 17.7 : Arme à impulsions (2005-06-01 à ce jour).
[23] PERF, Center on Force & Accountability, PERF Conducted Energy Device Policy and Training Guidelines for Consideration (Washington, D.C., PERF, 2005), p. 4 (en anglais seulement).
[24] À la GRC, l'élaboration des politiques opérationnelles est un long processus décrit brièvement dans sa liste de contrôle (Voir Bruce Stuart et Chris Lawrence, Report on Conducted Energy Weapons and Excited Delirium Syndrome (non publié, GRC, 2007), p. 16.
[25] La question a été soulevée pour la première fois dans un bulletin MO de la GRC le 12 juillet 2005.
[26] Cette préoccupation a récemment été soulevée dans un énoncé de principes sur l'utilisation de l'AI. Les auteurs y font une mise en garde relativement à la surveillance étroite des normes d'utilisation requises pour veiller à ce que ces normes ne se relâchent au point de compromettre le bien-fondé de leur imposition. (Voir American Civil Liberties Union of Oregon, ACLU of Oregon Recommendations Regarding Police Use of Conducted Energy Devices, American Civil Liberties Union of Oregon, p. 5 (en anglais seulement).
[27] Association internationale des chefs de police, Electro-Muscular Disruption Technology: A Nine-Step Strategy for Effective Deployment (Alexandria, VA, IACP, [2005]) (en anglais seulement).
[28] En juin 2004, les membres ne devaient présenter la formule 3996 que dans certaines situations précises et pas dans tous les cas. En septembre 2005, on a rétabli la déclaration obligatoire (formule 3996).
[29] GRC, Évaluation des facteurs relatifs à la vie privée - Arme à impulsions, supra note 3.
[30] Il se peut toutefois qu'on ne puisse d'aucune manière récupérer les données perdues au cours des périodes où la GRC a négligé de maintenir la tenue complète de dossiers. Ces périodes comprennent la première utilisation de l'AI lorsque les membres ne devaient consigner les événements que dans leur carnet; la période débutant en juin 2004 lorsque la GRC a réduit les exigences en matière de rapport qu'elle avait instaurées en 2002; et une période en juin 2005 après que la GRC avait encore une fois rétabli la déclaration obligatoire pour ensuite passer des rapports papier aux rapports électroniques.
[31] Gendarmerie royale du Canada, Manuel des opérations (Ottawa, GRC), ch. 17.1.
[32] Supra note 14.
[33] Le contrôle à mains nues consiste à utiliser la force sans recourir à une arme; les techniques de main ouverte sont les moins intrusives et peuvent comprendre les techniques de contrainte telles que la mise de menottes et la technique de clé pour maîtriser un sujet. Les techniques de contrôle à mains fermées, telles que les coups de pied et coups de poing, visent à stopper un comportement indésirable et présentent un plus grand risque de blessure et pour le sujet et pour le policier.
[34] Cette option inclut les bâtons ASP.
[35] Supra note 14.
[36] Le Manuel des opérations, ch. 17.5 de la GRC, « Technique d'étranglement par la région carotidienne », mentionne ce qui suit : Cette technique ne peut être appliquée que par un membre qui a reçu la formation approuvée par la GRC en la matière et que lorsqu'une personne est en danger de mort ou risque d'être grièvement blessée [gras ajouté].
[37] Hannibal, supra note 6, para 128.
[38] Ibid., para 129.
[39] Ibid., para 145.
[40] Ibid., para 147.
[41] Supra note 7 p. 2 et 3.
[42] Colombie-Britannique. Bureau du commissaire aux plaintes contre la police, Étude sur la technologie du Taser - Rapport final, Dossier no 2474, BCPP (Victoria, BCPP, 2005), p. 27.
[43] Ibid.
[44] Hannibal, supra note 6, para 125.
[45] Commission des plaintes du public contre la GRC, Rapport annuel 2006-2007 (Ottawa : CPP, 2007), p. 26-27.
[46] Association canadienne des chefs de police, Cadre national de l'emploi de la force (non publié, ACCP, 2000).
[47] Commission des plaintes du public contre la GRC, Incident lié au recours à la force (pistolet Taser) – 16 mai 2006.
[48] Données jusqu'au 30 novembre 2007.
[49] Laur, Le délire excité, supra note 13, p. 11.
[50] Ibid., p. 12 à 15.
[51] Drazen Manojlovic et coll. Étude sur les dispositifs à impulsions (TR-01-2006) (Ottawa, Centre canadien de recherches policières, 2005), p. vi.
[52] Ibid., p. iv.
[53] On a constaté ultérieurement que cet agent souffrait d'ostéoporose.
[54] Supra note 42, p. 16.
[55] Ibid., 29-30.
[56] TASER International, Training Bulletin (juin 2005), cité dans Amnistie Internationale, Canada: Inappropriate and Excessive Use of Tasers (en anglais seulement), supra note 20, p. 4 et 5.(Taser International n'affiche plus ce bulletin sur son site Web. La Commission a communiqué avec TASER International pour obtenir une copie du bulletin de 2005; notre demande a été transmise au service juridique de l'entreprise.)
Recommendation Against Group Exposures [version PDF 88.74Ko] (en anglais seulement).
Product Warnings – Law Enforcement: Important Safety and Health Information [version PDF 104.8Ko] (en anglais seulement).
- Date de modification :