Examen des activités précises de gestion par la GRC du processus de traitement des plaintes du public à la Division « V » (Nunavut)
Période d'examen : du 1er avril 2018 au 31 mars 2022
Loi sur la Gendarmerie royale du Canada
Paragraphe 45.34(1)
Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC
Liens connexes
- Communiqué de presse
28 novembre 2024 - ᖃᓄᐃᓕᐅᕈᑎᕕᓂᖏᑦ ᕿᒥᕐᕈᐊᖅᑕᐅᕗᑦ ᐸᓖᓯᒃᑯᑦ ᐱᓕᕆᖃᑦᑕᕐᓂᕕᓂᖏᓐᓂᒃ ᑭᒃᑯᑐᐃᓐᓇᐃᑦ ᐅᓐᓂᕐᓘᑎᖏᓐᓄᑦ ᐱᓕᕆᔭᐅᕙᓪᓕᐊᓂᖓ ᑕᐃᑲᓂ "V" ᐸᓖᓯᖃᕐᕕᒃ/ᓄᓇᕗᑦ
- Réponse de la commissaire de la GRC [en anglais seulement]
- Recherches communautaires [PDF]
- ᐱᓕᕆᓂᖏᑦ ᐃᓄᒋᐊᑦᑐᓄᑦ ᐅᓐᓂᕐᓗᖅᕕᐅᓲᓄᑦ ᐸᓕᓯᒃᑯᓄᑦ ᓄᓇᕗᒻᒥ [PDF]
- Communiqué de presse
4 août 2022 - ᑐᓴᒐᒃᓴᖅ
4 août 2022 - Tuhagakhamik Tunihijut
4 août 2022 - Mandat de l'examen systémique
- ᒪᓕᒐᐃᑦ
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Table des matières
- Résumé
- Objet du présent rapport
- À propos de la CCETP
- Motifs de l'enquête sur la gestion par la GRC du processus de traitement des plaintes du public au Nunavut
- Vue d'ensemble du processus de traitement des plaintes du public
- Ce que la CCETP a examiné
- Recommandations
Conclusions, recommandations et analyses de la CCETP
- Politiques, procédures et lignes directrices
- Conclusion 1 : La politique nationale n'est ni pertinente ni claire
- Conclusion 2 : La Division « V » ne dispose pas d'une politique à l'échelle divisionnaire
- Conclusion 3 : La GRC a apporté d'importantes améliorations au Guide
- Formation sur le processus de traitement des plaintes du public
- Conclusion 4 : Le cours de formation est conforme à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, mais il peut être amélioré
- Conclusion 5 : La formation nationale sur les plaintes du public n'était pas obligatoire et a été appliquée de manière variable
- Conclusion 6 : La Division « V » n'offre actuellement pas de formation préalable au déploiement
- Conformité
- Conclusion 7 : Les pratiques de tenue de documents de la GRC rendent difficile l'examen de la conformité
- Conclusion 8 : Plus des deux tiers des dossiers de plainte du public de la Division « V » comportaient des sections inadéquates
- Conclusion 9 : Les lettres, les documents et les raisons des retards étaient souvent inadéquats
- Conclusion 10 : Malgré les améliorations apportées, certaines enquêtes ont dépassé les délais normaux
- Conclusion 11 : La GRC et la Division « V » ne disposent pas d'un processus officiel pour voir à ce que les enquêtes et dossiers de plainte du public soient conformes à la politique nationale ou au Guide
- Sensibilisation du public et perception à l'égard du système de traitement des plaintes du public
- Conclusion 12 : Le système de traitement des plaintes du public n'est pas suffisamment connu et accessibles
- Conclusion 13 : La collectivité ne fait pas confiance au système de traitement des plaintes du public
- Conclusion 14 : Les Inuits ne sont pas suffisamment représentés au sein de la GRC
- Conclusion
Résumé
Il est essentiel d'assurer la mise en place d'un système de traitement des plaintes du public solide et adapté au Nunavut (Division « V ») pour faire preuve de transparence et de responsabilité, et pour répondre aux besoins de la population du Nunavut, en particulier les Inuits. Ce système peut également renforcer la confiance du public en la police lorsque les collectivités peuvent constater que leurs plaintes sont prises au sérieux et examinées de manière approfondie et efficace, dans le respect de leur culture. C'est particulièrement important pour les détachements de la GRC au Nunavut, où les efforts de réconciliation doivent être adaptés aux collectivités qu'ils servent s'ils veulent aller de l'avant de manière efficace.
Un petit nombre de plaintes du public ont été déposées au Nunavut au cours de la période d'examen (75 plaintes du public sur 4 ans), mais les enquêtes connexes ont pris trop de temps, et plus des deux tiers ont été jugées inadéquates en raison de l'absence d'éléments requis. Cette situation est d'autant plus préoccupante que des rapports antérieurs de la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC (CCETP) ont mis en évidence des problèmes semblables dans les enquêtes et dossiers de plainte du publicNote de bas de page 1.
Le fait de rendre obligatoire la formation sur le processus de traitement des plaintes du public, de mettre à jour et de mieux faire connaître la politique nationale, et de mettre en œuvre un système solide de respect des politiques aidera la GRC à atteindre ces objectifs. Il est important que la Division « V » élabore sa propre politique en matière de plaintes du public et l'adapte aux réalités du maintien de l'ordre au Nunavut. On incite la GRC à travailler avec les groupes communautaires et inuits ainsi qu'avec la CCETP à la conception d'un autre processus de résolution des plaintes adapté à la culture. La GRC doit aussi accorder la priorité au recrutement et au maintien en poste d'enquêteurs et d'administrateurs inuits chargés des plaintes du public afin de voir à ce que les détachements soient en mesure de répondre au mieux aux besoins des collectivités, surtout la collectivité inuite.
Enfin, la GRC et la CCETP ont du travail à faire pour accroître la sensibilisation au système de traitement des plaintes du public et son accessibilité de façon pertinente pour le Nunavut et les Inuits. Elles doivent le faire en collaboration avec les organisations inuites et apporter conjointement des améliorations en tenant compte des valeurs traditionnelles inuites, des recommandations formulées par les commissions et les enquêtes successives, et des principes directeurs de la Politique sur l'Inuit Nunangat.
Objet du présent rapport
Le 21 juillet 2022, la CCETP a ouvert une enquête systémique sur la gestion par la GRC du processus de traitement des plaintes du public au Nunavut (Division « V »).
L'enquête a porté sur les quatre volets suivantsNote de bas de page 2 :
- Politiques, procédures et lignes directrices – question de savoir si les documents qui régissent le processus de traitement des plaintes du public de la GRC au Nunavut sont bien fondés, pertinents, adéquats et clairs;
- Formation – question de savoir si la GRC offre une formation bien fondée, pertinente, adéquate et claire sur le processus de traitement des plaintes du public;
- Conformité – question de savoir si la GRC se conforme à ses politiques, procédures et lignes directrices, si elle a les ressources pour évaluer cette conformité, et si elle s'acquitte de cette tâche;
- Perception du public – question de savoir si la population du Nunavut connaît le processus de traitement des plaintes du public de la GRC et si elle a confiance en ce processus.
Le présent rapport expose le processus d'enquête, les conclusions et les recommandations de la CCETP.
À propos de la CCETP
La CCETP est un organisme indépendant chargé de veiller à ce que les plaintes déposées contre la GRC soient examinées de manière équitable et impartiale. Comme l'énoncent les parties VI et VII de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, le mandat de la CCETP consiste à :
- recevoir les plaintes du public concernant la conduite des membres de la GRC;
- procéder à un examen lorsque les plaignants sont insatisfaits du règlement de leur plainte par la GRC;
- déposer des plaintes et à déclencher des enquêtes sur la conduite de la GRC lorsqu'il est dans l'intérêt du public de le faire;
- examiner des activités précises de la GRC (« enquêtes systémiques »);
- énoncer des conclusions et à formuler des recommandations;
- sensibiliser le public au processus de traitement des plaintes.
Méthode de réalisation d'enquêtes systémiques par la CCETP
Pour s'assurer que les activités de la GRC sont exécutées conformément aux lois, aux règlements ou aux instructions ministérielles, la CCETP :
- cerne les lacunes et les problèmes systémiques en examinant les programmes, les activités et les opérations de la GRC;
- établit si les politiques, les procédures et les lignes directrices relatives aux opérations de la GRC sont bien fondées, pertinentes, adéquates et claires;
- formule des recommandations pour améliorer les choses ou résoudre ces problèmes;
- publie le rapport et la réponse de la GRC afin de renforcer la responsabilité et la transparence de cette dernière;
- assure le suivi de la mise en œuvre des recommandations précédentes.
Motifs de l'enquête sur la gestion par la GRC du processus de traitement des plaintes du public au Nunavut
Il était grand temps de revoir le système de traitement des plaintes du public de la GRC
Le dernier examen par la CCETP de la gestion des plaintes du public par la GRC a pris la forme d'observations pour la GRC et le gouvernement du Yukon. Intitulé Examen des services de police au Yukon, le rapport a été publié en août 2010 et a porté sur les dossiers de plainte du public au Yukon pour la période de 2005 à 2010Note de bas de page 3. Cet examen faisait suite à trois examens annuels précédents (de 2007 à 2009) du système de traitement des plaintes du public pour toutes les divisions de la GRC au Canada. Ces examens étaient les suivants : Projet d'Examen du bilan 2009 – Sommaire, Examen du bilan des plaintes du public de la GRC – 2008 et Examen du bilan des plaintes du public de la GRC – 2007.
Préoccupations relatives à l'efficacité du processus de traitement des plaintes du public au Nunavut
En janvier 2019, la CCETP a pris des engagements envers les représentants du gouvernement du Nunavut et les organisations non gouvernementales (ONG) du Nunavut, qui ont fait part de leurs préoccupations au sujet du maintien de l'ordre au sein de la Division « V ». Ces préoccupations ont été reprises dans le Plan d'action national inuit sur la disparition et les assassinats de femmes et de filles inuites et de personnes 2SLGBTQQIA+, qui aborde la question de la supervision des services de police.
Problèmes liés à la résolution des plaintes contre la GRC
Après avoir analysé les plaintes déposées au Nunavut pendant la période du 1er avril 2015 au 31 mars 2021, la CCETP a constaté que :
- certaines enquêtes avaient duré de trois à cinq ans;
- la GRC n'avait pas ouvert certaines enquêtes avant près de deux ans, ce qui a incité des plaignants à retirer leur plainte;
- près des deux tiers des plaintes avaient été retirées ou réglées à l'amiable – ce pourcentage est nettement supérieur à la moyenne nationale.
Selon le Guide national sur le traitement des plaintes du public (version actuelle et version de 2017), la GRC doit traiter les plaintes dans un délai de 90 jours à compter de leur réception et doit consigner toute prolongation nécessaire.
Il est essentiel de disposer d'un processus solide et rigoureux de traitement des plaintes du public pour la responsabilité de la police
Le Handbook on police accountability, oversight and integrity (guide sur la responsabilité, la supervision et l'intégrité de la police) (en anglais seulement) de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime souligne l'importance de gérer efficacement le système de traitement des plaintes du publicNote de bas de page 4. Lorsque le système fonctionne, il :
- attribue une responsabilité à la police;
- contribue à la confiance du public en la police;
- améliore la qualité du maintien de l'ordre en établissant les questions problématiques à améliorer ou en désignant les agents qui ont besoin d'une orientation ou d'une formation.
Vue d'ensemble du processus de traitement des plaintes du public
La responsabilité du système de traitement des plaintes du public relatives à la GRC est partagée entre la CCETP et la GRC. La GRC est mobilisée à la fois à l'échelle nationale et à l'échelle des divisions.
Mobilisation à l'échelle nationale de la GRC
La Direction nationale des plaintes du public (DNPP) de la GRC :
- est responsable de la politique et de la formation nationales relativement au processus de traitement des plaintes du public;
- présente une orientation aux groupes de la responsabilité professionnelle des divisions et aux dirigeants des Relations employeur‑employés (DREE);
- effectue un suivi des enquêtes sur les plaintes du public menées par toutes les divisionsNote de bas de page 5.
Mobilisation à l'échelle des divisions de la GRC
Toutes les divisions de la GRC suivent la même approche générale. Chaque division dispose toutefois d'une certaine latitude dans la façon dont elle gère le processus de traitement des plaintes du public dans sa province ou son territoire.
Nunavut
La Division « V » attribue les responsabilités en matière d'enquête sur les plaintes du public de la manière suivante :
Responsabilité | Rôle |
---|---|
Superviser le processus de traitement des plaintes du public au sein de la division |
Officier divisionnaire responsable de l'administration et du personnel |
Coopérer avec la DNPP |
DREE |
Rédiger et signer le rapport final qui explique les résultats de l'enquête |
Sous‑officier‑conseiller de district ou chef de détachement |
Ce que la CCETP a examiné
Documents et dossiers
- Ensemble des dossiers de plainte du public au sein de la Division « V » pendant la période d'examen (du 1er avril 2018 au 31 mars 2022)
- Politique nationale et guides applicables
- Cours et matériel de formation
- Procédures opérationnelles réglementaires (POR) divisionnaires
- Autres documents pertinents
Entrevues
- Membres de la GRC participant au processus de traitement des plaintes du public au Nunavut
- Membres de la DNPP à Ottawa
- Personnes au Nunavut qui connaissent bien le processus de traitement des plaintes du public de la GRC, notamment un représentant du gouvernement territorial.
Également, la CCETP a conclu un contrat avec NVision Insight Group Inc. (NVision), une société à participation majoritaire autochtone, pour qu'elle mène des recherches communautaires. NVision a rédigé un rapport sur les résultats qui comprend notamment des recommandations au sujet de la manière d'améliorer le système de traitement des plaintes du public au Nunavut (Traitement des plaintes du public par la GRC au Nunavut).
Chaque section des conclusions et des recommandations indique les documents précis examinés.
Pour connaître la liste intégrale des éléments examinés, consultez l'annexe A.
Recommandations
À la suite de l'enquête systémique, la CCETP formule les recommandations ci‑dessous.
Politiques, procédures et lignes directrices
- La GRC doit mettre à jour la politique nationale en matière de plaintes du public.
- La Division « V » de la GRC doit élaborer une politique divisionnaire en matière de plaintes du public qui sera adaptée aux besoins du Nunavut.
Formation
- La GRC doit rendre obligatoire la formation sur les plaintes du public pour tous les enquêteurs et administrateurs du système de traitement des plaintes du public.
- La Division « V » doit assurer la formation préalable au déploiement des membres qui y sont mutés.
Conformité
- La GRC et la Division « V » doivent mettre en place un système de traitement des plaintes du public qui leur permettra de déceler les tendances, d'évaluer la conformité avec les politiques et l'efficacité de la formation, et d'établir si des mesures correctives sont nécessaires.
Perception à l'égard du système de traitement des plaintes du public
- La GRC et la Division « V » doivent collaborer avec la CCETP pour faire connaître le système de traitement des plaintes du public et en améliorer l'accessibilité.
- La GRC doit collaborer avec des groupes dirigés par des Inuits ainsi que des partenaires communautaires et la CCETP pour étudier l'élaboration d'un autre mécanisme de résolution des plaintes adapté à la culture.
- La GRC doit collaborer avec la CCETP pour étudier les possibilités de créer un portail en ligne qui permettra aux personnes de vérifier l'état de leur plainte.
- La GRC doit élaborer un plan durable pour accroître le recrutement et le maintien en poste d'enquêteurs et d'administrateurs chargés des plaintes du public qui parlent l'inuktitut.
Conclusions, recommandations et analyses de la CCETP
Politiques, procédures et lignes directrices
La CCETP a examiné le bien-fondé, la pertinence, l'adéquation et la clarté des politiques, procédures et lignes directrices applicables à la gestion des plaintes du public, de la manière dont elles sont mises en œuvre et des éventuels processus de surveillance et d'examen existants. Des politiques, procédures et lignes directrices efficaces aident les personnes participant au processus de traitement des plaintes du public à prendre des décisions cohérentes, à fixer des attentes claires et à atténuer l'ambiguïté du processus d'enquête sur les plaintes du public.
La CCETP a relevé trois principaux problèmes et formule deux recommandations.
Ce que la CCETP a examiné
La CCETP a examiné le cadre national de la politique en matière de plaintes du public, qui comprend les éléments suivants :
- La politique nationale de la GRCNote de bas de page 6, qui décrit les exigences statutaires de la partie VII de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada concernant les plaintes du public. En général, elle précise ce qui doit être fait et qui est responsable (par exemple qui se charge d'une plainte, qui mène l'enquête et qui établit un rapport);
- Le Guide, qui définit les mesures, les méthodes et les étapes à suivre pour mener une enquête sur une plainte du public conformément aux politiques, aux lois et aux règlements (en date du 23 février 2017)Note de bas de page 7.
La CCETP a également interrogé des membres de la GRC et examiné les POR de la Division « V », les entrevues et le rapport de NVision, et les documents connexes.
Conclusion 1 : La politique nationale n'est ni pertinente ni claire
Recommandation 1 : La GRC doit mettre à jour la politique nationale en matière de plaintes du public
La CCETP a estimé que la politique nationale était bien fondée et adéquate pour transmettre les éléments essentiels du système de traitement des plaintes du public, et qu'elle était conforme aux exigences législatives énoncées dans la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Elle n'a toutefois pas été jugée pertinente, car elle ne prévoyait pas l'obligation d'en surveiller ou d'en examiner l'efficacité ni de méthode pertinente de suivi et d'évaluation de la conformité. En outre, la politique nationale manque de clarté dans certaines sections et fait double emploi avec le Guide.
La politique nationale n'est pas claire et est trop longue
L'objectif d'une politique est d'énoncer les principes, les valeurs et l'intention des résultats attendus afin de favoriser la prise de décision cohérente. La CCETP a cerné les problèmes ci‑dessous concernant la politique nationale.
- Certaines sections sont difficiles à comprendre. Par exemple, la section 4.2 est longue, ne présente pas une orientation claire et cite plusieurs fois la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, ce qui oblige les membres à alterner entre la Loi et la politique nationaleNote de bas de page 8.
- De nombreux liens hypertextes ne fonctionnent pas. Certains liens ne fonctionnaient pas du tout, tandis que d'autres ne correspondaient pas à la cible du lien.
- La politique nationale et le Guide ne fonctionnent pas toujours bien ensemble. Une partie du contenu est en double, ce qui rend les deux documents inutilement longs. Certaines instructions de la politique nationale sont trop détaillées et pourraient être mieux adaptées au Guide. La politique nationale ne renferme pas de lien direct vers le Guide, bien qu'elle y fasse référence dans plusieurs sections.
Il n'est pas nécessaire de surveiller ou d'examiner la conformité avec la politique
La politique nationale n'exige pas de supervision visant à surveiller ou à vérifier si elle est efficace et exécutée de manière appropriée. Elle ne précise pas non plus la nécessité de procéder à un examen de la conformité. Un système efficace de responsabilisation de politique doit comprendre les principaux éléments suivantsNote de bas de page 9 :
- Collecte efficace de renseignements sur les résultats et processus de la politique;
- Capacité de comprendre, de traiter et d'utiliser les renseignements en se fondant sur les processus analytiques internes;
- Échange de renseignements internes qui relie l'élaboration de politiques aux informations provenant de la surveillance;
- Procédures d'évaluation contribuant à l'élaboration de nouvelles politiques, procédures et instructions.
La politique nationale ne met pas en relief l'optique de l'ACS Plus
L'Analyse comparative entre les sexes Plus (ACS Plus) est un processus analytique servant à évaluer l'expérience que divers groupes peuvent avoir avec les politiques, les programmes et les initiatives. Selon Femmes et Égalité des genres Canada :
L'ACS Plus est un processus qui permet de comprendre qui est touché par la question abordée par l'initiative; de déterminer comment l'initiative pourrait être adaptée pour répondre aux divers besoins des personnes les plus touchées; et d'anticiper et d'atténuer tout obstacle à l'accès à l'initiative ou à sa mise en œuvreNote de bas de page 10.
La politique nationale n'exige ni n'encourage les divisions de la GRC à s'en inspirer ou à l'adapter pour mettre en relief leurs circonstances uniques dans une politique divisionnaire. L'application d'une optique de l'ACS Plus peut aider les divisions à voir à ce que le processus de traitement des plaintes du public soit efficace au sein de la province ou du territoire. La politique nationale n'est pas adaptée à l'intégration et à l'application d'initiatives propres à une division, mais l'obligation de créer et d'adapter une politique divisionnaire pourrait aider la Division « V » à traiter des initiatives telles que les suivantes :
- La Politique fédérale sur l'Inuit Nunangat – Cette politique s'applique à tous les ministères et organismes fédéraux, et vise à « […] favoriser l'équité sur les plans socioéconomique et culturel entre les Inuit et les autres Canadiens ». Elle encourage le recours à une approche axée sur l'Inuit Nunangat en vue de la mise en place de services qui s'appliquent aux Inuits : « Les Inuits sont les personnes qui connaissent le mieux les enjeux qui touchent leurs communautés, régions et société; par conséquent, ils doivent jouer un rôle essentiel et exercer des responsabilités croissantes dans la prise de décisions concernant les enjeux qui concernent les Inuits ou l'Inuit Nunangat »;
- Les valeurs inuites traditionnelles – Elles sont fondées sur les connaissances inuites traditionnelles, et il faut les intégrer dans les processus qui influent sur la collectivité inuite pour veiller à ce qu'elles soient pertinentes.
Conclusion 2 : La Division « V » ne dispose pas d'une politique à l'échelle divisionnaire Note de bas de page 11
Recommandation 2 : La Division « V » doit élaborer une politique divisionnaire en matière de plaintes du public adaptée aux besoins du Nunavut
La Division « V » a besoin d'une politique divisionnaire qui tient compte de la façon dont le Nunavut se distingue des autres divisions, notamment sa vaste zone géographique, son importante population inuite et le fait que les détachements ne comptent souvent que deux membres de la GRC.
Les entrevues menées par NVision ont mis en évidence la nécessité pour que la Division « V » adapte mieux le processus de traitement des plaintes du public en fonction des circonstances uniques des Inuits. « Le modèle actuel dans le Nord reflète celui du Sud, et on s'attend à ce que les collectivités travaillent dans le cadre de ce systèmeNote de bas de page 12. » Consultez la section « Sensibilisation du public et opinions sur le système de traitement des plaintes du public » pour obtenir de plus amples renseignements.
La politique divisionnaire doit tenir compte à la fois des exigences nationales et des besoins régionaux particuliers
La Division « V » doit collaborer avec les organisations inuites à l'élaboration d'une politique divisionnaire sur les plaintes du public qui répondra aux besoins des collectivités inuites du Nunavut.
Une politique divisionnaire peut notamment englober une orientation sur les points ci‑dessous.
- Mise en place d'un processus de règlement à l'amiable adapté à la culture. Dans les entrevues menées par NVision, [traduction] « ont constaté que de nombreuses plaintes contre des agents provenaient de personnes qui souhaitaient être entendues et que les plaintes étaient résolues plus efficacement lorsqu'elles étaient traitées à l'extérieur du cadre du processus officiel (c'est‑à-dire lors de rencontres en personne avec le superviseur). Les rencontres en personne ont eu des résultats plus réparateurs tant pour les plaignants que pour l'agent en cause, car elles ont permis de mettre un visage sur le problème pour les deux parties ». Une politique divisionnaire pourrait représenter l'engagement de la GRC à résoudre les plaintes de manière équitable et appropriée en intégrant des principes directeurs adaptés à la culture et à la collectivité inuite.
- Garantie de l'accessibilité. Une politique divisionnaire pourrait exposer les grandes lignes du recours aux services d'interprètes et de traducteurs dans le cadre du processus de traitement des plaintes du public, le cas échéant.
Les POR ne correspondent pas à la politique nationale
La Division « V » utilise actuellement des POR pour orienter son processus. Les POR sont utiles pour décrire de façon détaillée les responsabilités précises au sein de la Division, mais elles ne présentent pas une image globale de la manière dont le processus de traitement des plaintes du public doit être mis en œuvre au sein de la Division « V ». Elles ne font pas référence à la politique nationale ou au Guide et ne font qu'énoncer les instructions prescriptives des personnes responsables des tâches à accomplir dans le cadre du traitement des plaintes du public, sans expliquer pourquoi ces tâches doivent être réalisées. En général, les POR doivent découler de la politique divisionnaire et être conformes à la politique nationale.
Conclusion 3 : La GRC a apporté d'importantes améliorations au Guide
Dans l'ensemble, le Guide utilisé au cours de la période d'examen (celui en date du 23 février 2017) était bien fondé et adéquat pour transmettre les éléments essentiels du processus d'enquête, mais il n'était pas pertinent ou clair, car il ne fonctionnait pas toujours bien avec la politique nationale.
Au cours de l'enquête de la CCETP, la GRC a publié une version actualisée du Guide (décembre 2022) qui a été considérablement améliorée par rapport à la version précédente utilisée (février 2017), notamment sur le plan de la clarté. En effet, le Guide :
- est plus clair et utilise un langage plus simple;
- est facile à lire et expose de façon détaillée les normes de service faisant partie d'une enquête sur une plainte du public;
- englobe une recommandation de la CCETP qui découle d'un rapport antérieur sur les plaintes du public et selon laquelle les enquêteurs chargés des plaintes du public doivent remplir un formulaire relatif aux conflits d'intérêts.
Formation sur le processus de traitement des plaintes du public
La CCETP a mené une enquête sur la qualité de la formation offerte et sur les personnes qui l'ont suivie. Elle a relevé trois principaux problèmes et formule deux recommandations.
Les changements ci‑dessous permettraient aux enquêteurs chargés des plaintes du public de mieux connaître le processus et feraient en sorte que ceux chargés des plaintes du public au Nunavut seraient sensibilisés à la culture et aux enjeux propres aux Inuits.
L'examen de la CCETP a porté sur le cours de formation national sur les plaintes du publicNote de bas de page 13
Pendant la période d'examen, un cours de formation national sur les plaintes du public a été donné à la GRC. Il a été conçu pour être donné en personne et durer une journée (huit heures). Cependant, dans la pratique, la DNPP adaptait la formation selon les besoins des divisions, ce qui signifie que la formation s'étendait rarement sur toute une journée (seuls certains modules de la formation étaient présentés en fonction des besoins et du temps alloué par la division).
La première moitié du cours donne un aperçu du processus de traitement des plaintes du public, y compris les étapes et les formulaires à remplir, les exigences obligatoires ainsi que les lois et politiques pertinentes pour les plaintes du public. La deuxième moitié est consacrée à la rédaction du rapport d'enquête sur les plaintes du public à l'issue d'une enquête sur une plainte. Les participants devaient obtenir une note de 80 % à l'évaluation en ligne pour réussir, mais ils avaient un nombre illimité de tentativesNote de bas de page 14.
Conclusion 4 : Le cours de formation est conforme à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, mais il peut être amélioré
L'examen a permis de constater que le cours de formation national sur les plaintes du public était :
- conforme à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (la formation abordait principalement la Loi);
- bien fondé, adéquat, pertinent et clair pour transmettre les éléments essentiels du système de traitement des plaintes du public.
La formation peut être améliorée
Ce cours peut présenter de l'information et un contexte supplémentaires concernant les résultats des plaintes du public, tels que les règlements à l'amiable et les retraits.
Le cours n'explique pas suffisamment la différence entre les retraits et les règlements à l'amiable
Il est important que les membres de la GRC comprennent cette distinction, car la Division « V » a souvent recours aux retraits et aux règlements à l'amiable pour régler les plaintes du public. Cependant, la CCETP a constaté que cette situation se produisait souvent sans que la raison en soit correctement expliquée, ce qui fait en sorte qu'il était difficile de savoir si la plainte avait été codée correctement en tant que retrait ou règlement à l'amiable.
Dans certains cas, les termes utilisés dans le dossier donnaient à penser que des engagements avaient été pris de manière à encourager les retraits. Les personnes interrogées ont affirmé qu'il y avait une lacune dans le traitement des retraits et des règlements à l'amiable, dans la mesure où ces dernières exigent que la personne et le membre de la GRC parviennent à une entente. Cette disposition ne s'applique toutefois pas à un chef de détachement qui conclut une entente avec une personne. Dans ces cas, l'issue a été classée comme un retrait.
Dans l'ensemble, la proportion de plaintes du public qui ont été retirées au cours de la période d'examen est beaucoup plus élevée au Nunavut que dans le reste du Canada (27 % contre 11 %). Lorsqu'une plainte est retirée, les allégations ne font pas l'objet d'une enquête ou d'un examen. Il est intéressant de noter que lorsqu'une plainte faisait l'objet d'une enquête au Nunavut, le nombre d'allégations appuyées était plus élevé que la moyenne nationale (12 % contre 7 %). Il est louable que des tentatives aient été faites pour régler les plaintes à l'amiable, y compris la conclusion d'ententes avec les chefs de détachement, mais il incombe à la GRC de voir à ce que les personnes comprennent les répercussions du retrait de leur plainte et de leur donner la possibilité de se rendre jusqu'à l'étape de l'enquête.
Le cours national en personne sur les plaintes du public donne des instructions sur les règlements à l'amiable et les retraits. Il serait utile de renforcer les principes et l'intention de ces options en y intégrant :
- des mises en situation supplémentaires qui permettraient de mieux comprendre le processus nécessaire à la mise en œuvre de ces options;
- des discussions et des instructions sur le moment de l'utilisation de chaque option;
- les répercussions du retrait d'une plainte;
- la nécessité de formuler clairement ce qui s'est passé dans le dossier.
Conclusion 5 : La formation nationale sur les plaintes du public n'était pas obligatoire et a été appliquée de manière variable
Recommandation 3 : La GRC doit rendre obligatoire la formation sur les plaintes du public pour tous les enquêteurs et administrateurs du système de traitement des plaintes du public
La formation des enquêteurs chargés des plaintes du public n'était pas uniforme au Canada et au sein des différentes divisions. Au cours de la période d'examen couverte par la présente enquête, le cours national sur les plaintes du public n'était pas obligatoire et n'était pas proposé à intervalles réguliers, et les divisions devaient en faire la demande. La GRC a déclaré que seules les Divisions « M » (Yukon), « D » (Manitoba) et « E » (Colombie‑Britannique) l'avaient suivi (la Division « D » a reçu la formation deux fois).
Les entrevues menées par la CCETP ont démontré que le cours national sur les plaintes du public était généralement proposé aux cadres supérieurs et aux administrateurs chargés des plaintes du public, mais pas aux enquêteurs. Au sein de la Division « V » :
- le cours n'a été donné à aucun enquêteur chargé des plaintes du public au cours de la période d'examen;
- la plupart des personnes interrogées ne savaient pas que ce cours de formation était offert;
- aucun enquêteur n'a reçu la moindre formation sur les plaintes du public;
- un seul membre du personnel administratif a bénéficié d'une formation après l'avoir demandée à la suite d'une recommandation de l'officier de l'Administration et du Personnel.
Les enquêteurs de la Division « V » ont plutôt reçu une formation ad hoc en :
- obtenant des conseils de la part de membres plus compétents;
- cherchant eux‑mêmes à suivre une formation en bénéficiant du soutien de la direction;
- examinant du matériel de recherche tel que le Guide.
L'absence de formation obligatoire pourrait expliquer pourquoi les enquêteurs de la Division « V » chargés des plaintes du public ont précisé aux entrevues qu'ils ne connaissaient pas bien la politique nationale et qu'ils s'appuyaient uniquement sur le Guide. Le fait d'exiger que les enquêteurs chargés des plaintes du public reçoivent une formation à la fois sur la politique nationale et sur le Guide contribuera à garantir que les enquêtes sur les plaintes du public sont conformes à la politique et aux lignes directrices.
La GRC a rendu une partie de la formation obligatoire depuis la période d'examen de la CCETP
La GRC a récemment apporté plusieurs améliorations.
- Nouvelle formation obligatoire pour les enquêteurs – La GRC a mis au point un nouveau cours de formation en ligne sur les plaintes du public et l'a lancé en janvier 2023. La dernière version du Guide (décembre 2022) a rendu cette formation obligatoire pour les enquêteurs chargés des plaintes du public. La formation en ligne est plus courte que la formation initiale en personne, mais elle est organisée de façon semblable.
- Plans de sensibilisation – La DNPP a intégré un plan visant à rendre la formation en ligne disponible et à l'annoncer dans le cadre de son plan d'activités pour l'exercice 2022‑2023.
- Plan visant à rendre le cours obligatoire – Le plan d'activités de 2023‑2024 comporte l'engagement à adopter une stratégie selon laquelle toutes les personnes participant au système de traitement des plaintes du public seraient tenues de suivre le cours, et pas seulement les enquêteurs.
Les administrateurs ne sont toujours pas tenus de suivre une formation sur les plaintes du public
La formation est maintenant obligatoire pour les enquêteurs, mais elle ne l'est toujours pas pour les administrateurs chargés des plaintes du public, selon l'officier responsable par intérim d'alors de la DNPP.
Il est préoccupant de constater que la personne qui mène l'enquête doit être formée, mais pas celle qui supervise son travail. Pour s'assurer que les administrateurs reçoivent la formation sur les plaintes du public, on pourrait voir à ce que celle‑ci soit intégrée dans les cours existants suivants :
- Programme de perfectionnement des cadres et des officiers : il aide les participants à acquérir les connaissances et compétences nécessaires pour faciliter leur transition vers les postes de direction. La DNPP présentait autrefois des renseignements sur le système de traitement des plaintes du public dans le cadre de ce programme;
- Programme de perfectionnement des gestionnaires : il soutient la transition des caporaux vers le grade de sergent;
- Programme de perfectionnement des superviseurs : il appuie la transition des gendarmes vers le grade de caporal.
L'enquête de la CCETP n'a pas permis de trouver de preuve selon laquelle les programmes de perfectionnement des superviseurs et des gestionnaires comprenaient un élément de plainte publique. Il serait toutefois possible d'en intégrer un étant donné que les caporaux (en particulier dans le Nord) peuvent agir en tant que chefs de détachement ou délégués compétents du commissaire en signant les rapports d'enquête sur les plaintes du public.
Conclusion 6 : La Division « V » n'offre actuellement pas de formation préalable au déploiement
Recommandation 4 : La Division « V » doit assurer la formation préalable au déploiement des membres qui y sont mutés
Les membres de la Division « V » bénéficient actuellement d'une évaluation psychologique de base et d'une formation visant à les aider à faire face à la vie lorsqu'ils sont affectés à un détachement éloigné. Ils ne reçoivent pas de formation sur la sensibilisation culturelle, les connaissances locales et l'histoire de la GRC au Nunavut. Ce type de formation devrait être ajouté dès que possible.
Nécessité d'une formation sur les compétences culturelles
Le rapport de NVision conclut que le manque de formation sur les compétences culturelles désavantage à la fois la GRC et la collectivité, et qu'il peut exacerber les déséquilibres de force qui existent déjà entre les deux (consultez la section « Sensibilisation du public et opinions sur le système de traitement des plaintes du public »)Note de bas de page 15.
Un document préparé pour la GRC fait écho à la recommandation relative à un programme d'orientation pour les membres de la GRC nouvellement arrivés dans le NordNote de bas de page 16.
Les organisations inuites ont également souligné la nécessité de cette formation.
- L'Inuit Tapiriit Kanatami (ITK), organisation nationale représentant les Inuits, a élaboré un plan de travail avec la GRC afin de combler les lacunes, de s'attaquer aux priorités relatives au maintien de l'ordre et d'établir une relation davantage axée sur la collaboration. Entre autres initiatives, le plan de travail de l'ITK et de la GRC prévoit [traduction] « l'élaboration et la présentation d'une formation obligatoire, continue et approfondie sur les compétences pour les membres de la GRC qui travailleront avec des Inuits ou des collectivités inuites ».
- La Commission de vérité du Qikiqtani (QTC)Note de bas de page 17 (en anglais seulement) a formulé une recommandation semblable dans son rapport : [traduction] « Pour s'assurer que la culture inuite est mieux comprise par les employés du gouvernement dont le travail touche les Inuits, les gouvernements du Nunavut et du Canada, avec l'aide de l'Association inuite du Qikiqtani (AIQ), doivent élaborer et donner une formation culturelle à tous ces employésNote de bas de page 18. »
- La Société des femmes de Yellowknife a récemment publié un rapport (avril 2024) (en anglais seulement) dans lequel elle recommandait d'améliorer et d'appliquer la formation obligatoire sur les compétences culturelles pour les membres de la GRC, et de voir à ce qu'elle soit [traduction] « […] continue, donnée en personne et propre à la collectivité ».
Programme de formation préalable au déploiement de la GRC en date de 2020 (interrompu au moment de la rédaction)
La GRC a confié à un centre d'apprentissage inuit basé à Iqaluit le soin d'élaborer un programme de formation préalable au déploiement à l'intention des membres affectés au Nunavut.
Le programme englobe les sept modules suivants :
- Réconciliation (1 jour);
- Orientation divisionnaire (1 jour);
- Chronologie des événements historiques (1 jour);
- Inuktitut de base (1 jour);
- Résilience, autosoins et adaptation (1 jour);
- Intervention initiale en cas d'incident critique dans le contexte du Nunavut (1 jour);
- Premiers soins en santé mentale (3 jours).
Malheureusement, les restrictions liées à la pandémie de COVID‑19 ont mis un terme au déploiement de la formation après un seul cours, et la formation n'a pas reprisNote de bas de page 19. Les entrevues menées auprès des membres de la Division « V » ont démontré que cette dernière étudiait la possibilité d'offrir la formation aux membres de la GRC en mutation et à leurs conjoints dans un format en ligne. Cette formation est destinée à tous les membres mutés à la Division « V », mais elle sera particulièrement utile pour ceux qui interviennent dans le système de traitement des plaintes du public, car elle leur permettra de mieux comprendre la culture inuite ainsi que le contexte et l'histoire de la GRC au Nunavut.
Conformité
La CCETP a mené une enquête pour savoir si les politiques et procédures de la GRC en matière de traitement des plaintes du public étaient correctement respectées au Nunavut. Elle a évalué les 75 plaintes du public déposéesNote de bas de page 20 (pendant la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2022) en fonction de critères précis. L'annexe B donne de plus amples renseignements au sujet des plaintes (le nombre d'allégations au Nunavut et leur nature, et la comparaison avec le Canada dans son ensemble). La CCETP a relevé sept principaux problèmes et formule une recommandation.
Méthode d'évaluation de la conformité par la CCETP
Les entrevues menées auprès des enquêteurs de la GRC chargés des plaintes du public au sein de la Division « V » ont révélé que le Guide était la principale source utilisée pour réaliser des enquêtes sur les plaintes du public. Le CCETP a donc vérifié si chaque dossier de plainte du public qu'elle avait examiné répondait aux 67 critères requis dans les instructions du Guide. L'annexe B explique la façon dont les critères ont été sélectionnés.
La CCETP a également vérifié si les instructions figurant ci‑dessous étaient respectées.
- Protocole d'entente conclu entre la GRC et la CCETP
- Vérification de la gestion des politiques de la GRC – Phase 2
Conclusion 7 : Les pratiques de tenue de documents de la GRC rendent difficile l'examen de la conformité
Recommandation 5 : La GRC et la Division « V » doivent mettre en place un système de traitement des plaintes du public qui leur permettra d'établir les tendances, d'évaluer le respect des politiques et l'efficacité de la formation, et d'établir si des mesures correctives sont nécessaires
La CCETP a eu de la difficulté à évaluer la conformité avec les procédures pour les plaintes du public
Pour obtenir un portrait complet de la manière dont les dossiers de plainte ont été traités, la CCETP a dû accéder à des renseignements provenant de trois systèmes différents de tenue de dossiers, les examiner, les comparer et les faire correspondre. Ces systèmes sont les suivants :
- Système d'incidents et de rapports de police (SIRP) – il permet d'effectuer le suivi de la résolution des plaintes ou de l'enquête;
- SIGRH – il vise le suivi des volets pertinents de la plainte jusqu'au membre concerné;
- Dossiers papier – ils sont conservés au sein de la Division « V ».
Ce processus a demandé beaucoup de temps et était excessivement compliqué, ce qui a rendu difficile l'examen de la conformité (interne ou externe).
Conclusion 8 : Plus des deux tiers des dossiers de plainte du public de la Division « V » comportaient des sections inadéquates
Parmi les dossiers de plainte du public examinés, 69,3 % englobaient au moins une section inadéquate, tandis que 16 % étaient caractérisés par la présence de déficiences dans plusieurs sections (tableau 1)Note de bas de page 21. Le tableau 2 montre les volets où les déficiences ont été le plus souvent constatées.
Nombre de sections inadéquates | Fréquence | Pourcentage du total des dossiers (75) |
---|---|---|
0 (le dossier est complet) |
23 |
30,6 % |
1 section inadéquate |
40 |
53,3 % |
2 sections inadéquates |
9 |
12,0 % |
3 sections inadéquates |
3 |
4,0 % |
Section analysée | Fréquence | Pourcentage du total des dossiers (75) |
---|---|---|
Retraits |
16 |
21 % |
Réception et évaluation des plaintesNote de bas de page 22 |
14 |
19 % |
Enquêtes formelles |
14 |
19 % |
Règlement à l'amiable |
11 |
15 % |
Refus et cessation |
7 |
9 % |
Mesures correctives |
5 |
7 % |
Examen par la CCETP |
0 |
0 |
Incident grave |
0 |
0 |
Code de déontologie |
0 |
0 |
Conclusion 9 : Les lettres, les documents et les raisons des retards étaient souvent inadéquats
De nombreuses lettres de mise à jour adressées aux personnes ayant déposé une plainte ne respectaient pas la norme du Guide
Le Guide de 2017 précise que la GRC doit « […] fournir des renseignements concrets quant à l'évolution de l'enquête, notamment en ce qui concerne les progrès réalisés depuis la mise à jour antérieure et les mesures qui restent à prendreNote de bas de page 23 ». Bon nombre des lettres envoyées pour informer les personnes de l'état de leur plainte étaient vagues et n'englobaient que peu de renseignements.
Les motifs des mesures n'ont pas été clairement consignés, ce qui a rendu difficile l'évaluation de leur caractère raisonnable
Souvent, la documentation dans les dossiers ne comprend pas suffisamment d'informations ou ne présente pas une justification claire des mesures prises, en particulier pour les règlements à l'amiable. À maintes reprises, ce qui s'était passé entre la personne, l'enquêteur chargé des plaintes du public et le membre de la GRC concerné, et avait conduit à un règlement à l'amiable n'était pas clair. Cette situation se produisait malgré l'exigence du Guide de 2017 selon laquelle « [l]e formulaire de réception de plainte doit contenir des renseignements détaillés sur la manière dont chaque allégation a été traitée et sur toutes les mesures correctives qui ont été prises Note de bas de page 24 ».
Le Guide demande aux membres concernés d'accepter un retrait écrit et de le transmettre à la DNPP, qui remettra ensuite le document à la CCETP. Dans la pratique, les notes limitées sur les dossiers de plainte du public et les entrevues ont révélé que les membres, généralement des superviseurs, s'engageaient souvent à conseiller la personne et, parfois, à prendre des mesures pour la satisfaire. Cependant, si les conditions de la résolution ne sont pas respectées (par exemple si un membre concerné ne donne pas son consentement), une plainte ne pourra pas être considérée comme réglée à l'amiable au titre de l'article 45.56 de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Dans de telles situations, les plaintes sont souvent traitées comme un retrait étant donné l'absence d'autres mécanismes officiels dans la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada qui auraient permis de caractériser ce type de situation. Il s'agit d'une lacune dans la législation.
Absence de formulaires de conflit d'intérêts
La CCETP a relevé plusieurs cas où il aurait pu y avoir un conflit d'intérêts, mais elle n'a trouvé aucun formulaire de conflit d'intérêts rempli dans les 75 dossiers examinés.
- Bien que cela ne soit pas obligatoire en ce moment, les détachements composés de deux membres devraient sans aucun doute faire l'objet d'une évaluation des conflits d'intérêts si une plainte était déposée contre l'un des membres. Les administrateurs chargés des plaintes du public de la Division « V » ont déclaré que les conflits d'intérêts étaient évalués de manière informelle au moment de la vérification de l'aptitude d'un membre à enquêter.
- Or, ce processus informel n'est consigné nulle part dans le dossier de plainte.
Les formulaires de conflits d'intérêts sont désormais exigés par le Guide en date de 2022.
Les motifs des retards n'ont pas été consignés
Le Guide de 2017 exigeait une justification écrite mensuelle dans les cas où un dossier dépassait 90 jours. La justification d'un retard était rarement consignée au dossier malgré le dépassement de la norme de service de 90 jours pour certains dossiers.
Conclusion 10 : Malgré les améliorations apportées, certaines enquêtes ont dépassé les délais normaux
La CCETP a évalué la question de savoir si la Division « V » avait traité les dossiers d'enquête sur les plaintes du public à l'intérieur du délai de 90 jours ouvrables prévu par le protocole d'entente conclu avec la GRC. Le tableau 3 présente le délai moyen de traitement des dossiers de plainte du public, ventilé par résultat.
La Division « V » a considérablement amélioré les délais de traitement des dossiers
Les délais de traitement des dossiers d'enquête se sont déjà améliorés depuis que la CCETP a réalisé son examen préliminaire dans le cadre de l'établissement de la portée de l'enquête (l'examen préliminaire de l'établissement de la portée de la CCETP a porté sur les dossiers de plainte du public pour la période du 1er avril 2015 au 31 mars 2021). La DNPP a envoyé des représentants à la Division « V » à la fin de 2017 pour qu'ils procèdent à un examen interne de la conformitéNote de bas de page 25, ce qui a renforcé le respect du processus prescrit de traitement des plaintes du public et amélioré les délais de traitement des dossiers.
La plupart des dossiers ont été traités à l'intérieur des délais
Les dossiers examinés au cours de cette enquête ont été traités en moyenne en 79 jours ouvrables. La moitié des dossiers ont été traités en 35 jours ouvrables ou moins. Il est à noter que ces statistiques comprennent tous les dossiers, y compris ceux qui ont été retirés, cessés par la GRC ou réglés à l'amiable.
Les dossiers qui aboutissent à une enquête officielle et à un rapport dépassent les délais de deux fois la norme
Il n'est pas surprenant de constater que c'est le traitement des plaintes du public ayant abouti à un rapport d'enquête qui a pris le plus de temps. En moyenne, ces dossiers ont été traités en 194 jours ouvrables, soit plus du double de la norme de 90 jours définie dans le protocole d'entente conclu entre la GRC et la CCETP. Cependant, dans le cas de deux dossiers, leur traitement a pris plus de 365 jours.
Résultat du dossier | Nombre moyen de jours de traitement | Nombre de dossiers |
---|---|---|
Tenue d'une enquête formelle et dépôt du rapport sur la plainte du public |
194 |
16 |
La GRC a cessé l'enquête sur la plainte pour des motifs discrétionnairesNote de bas de page 26 |
56 |
5 |
La GRC a cessé l'enquête sur la plainte pour des motifs non discrétionnairesNote de bas de page 27 |
38 |
5 |
Règlement à l'amiable |
38 |
28 |
Retraits |
53 |
21 |
Tous les types de résultats |
79 |
75 |
Conclusion 11 : La GRC et la Division « V » ne disposent pas d'un processus officiel pour voir à ce que les enquêtes et dossiers de plainte du public soient conformes à la politique nationale ou au Guide
L'enquête de la CCETP a démontré que la DNPP et la Division « V » s'appuyaient toutes les deux sur des systèmes de supervision informels. Les déficiences constatées lors de l'examen par la CCETP des dossiers de plainte du public au sein de la Division « V » démontrent que ces derniers sont insuffisants.
Une vérification interne de la GRC a soulevé des préoccupations au sujet de la supervision informelle de la conformité
L'enquête de la CCETP confirme les conclusions du rapport Vérification de la gestion des politiques de la GRC – Phase 2 selon lesquelles :
- dans tous les secteurs d'activité, la GRC n'a pas établi un processus officiel pour s'assurer que les employés se conforment à la politique nationale ou au Guide;
- la GRC « […] utilisai[t] des activités quotidiennes de gestion pour évaluer de manière informelle le respect des politiques »;
- un tel processus informel ne peut pas assurer la profondeur des renseignements nécessaire à la prise de décision fondée sur des données probantes concernant la formation ainsi que les changements et améliorations des politiques.
Le rapport, publié en octobre 2020, souligne l'importance d'évaluer la conformité aux politiques :
« Les politiques constituent un élément important de la GRC, car elles fournissent une orientation sur la santé et la sécurité, le comportement à adopter et les exigences réglementaires. Par conséquent, il est important de surveiller la conformité aux politiques afin de s'assurer que les membres et les employés suivent l'orientation et prennent des décisions cohérentes. Il est également essentiel de surveiller les politiques afin de déterminer s'il faut les modifier. » [gras ajouté]
Le rôle de la DNPP dans l'évaluation de la conformité à l'échelle nationale est limité
La DNPP suit les dossiers de plainte du public afin de vérifier la rapidité d'exécution et les mises à jour pour les personnes ayant déposé une plainte et les membres de la GRC faisant l'objet de la plainte. Également, pour les enquêtes qui se terminent par le dépôt d'un rapport de plainte du public, la DNPP établit si :
- toutes les allégations ont été pleinement prises en compte;
- toutes les mesures d'enquête nécessaires ont été prises;
- des motifs appuient les conclusions.
Cependant, dans les cas qui aboutissent à un retrait ou un règlement à l'amiable, l'intervention de la DNPP est limitée. Le rôle de la DNPP ne comprend pas une évaluation de la question de savoir si l'enquête ou le dossier de plainte du public est conforme à la politique nationale ou au Guide, ce qui rend difficiles l'identification des problèmes et leur résolution en temps utile.
La supervision de la conformité au sein de la Division « V » n'est pas cohérente
La CCETP a appris qu'au sein de la Division « V » :
- la gestion des plaintes du public relevait en grande partie de la responsabilité du DREE, ce qui n'est que l'une de ses nombreuses fonctions;
- chaque DREE intégrait son propre système de supervision;
- certains DREE examinaient les plaintes du public avec les membres en leur qualité d'experts en la matière ou se créaient des tâches dans le système pour veiller au respect de la norme de service de 90 jours.
La supervision du système de traitement des plaintes du public ne doit pas dépendre de l'officier qui occupe le poste et ne doit pas simplement consister à voir à ce que les délais soient respectés. La Division « V » devrait disposer d'un système qui lui permettrait d'évaluer la conformité des enquêtes et dossiers de plainte du public avec la politique nationale et le Guide.
Sensibilisation du public et perception à l'égard du système de traitement des plaintes du public
La CCETP a examiné la mesure dans laquelle le public connaissait le système de traitement des plaintes, le niveau de confiance du public à l'égard du processus et l'efficacité des stratégies existantes pour atténuer les problèmes courants.
La CCETP a relevé trois principaux problèmes et formule trois recommandations. La mise en œuvre de ces recommandations ferait progresser les efforts de réconciliation avec les collectivités inuites et assurerait la sensibilisation, la crédibilité et l'intégrité nécessaires concernant le processus de traitement des plaintes du public au Nunavut.
La CCETP a examiné :
- le rapport de NVision sur la gestion des plaintes du public par la GRC au Nunavut (30 novembre 2022);
- la Politique fédérale sur l'Inuit Nunangat;
- l'Aaqigiarutiqarniq entre la Gendarmerie royale du Canada et les Inuits (février 2022). Il s'agit d'un document rédigé pour les Services de police autochtones de la Direction générale de la GRC;
- l'article 8 de la Loi sur les langues autochtones, qui appuie « […] la fourniture, dans une langue autochtone, de programmes et de services en ce qui a trait à l'éducation, la santé et l'administration de la justice »;
- le plan de travail de l'ITK et de la GRC;
- le Programme des services de police des Premières Nations et des Inuit, programme fédéral administré par Sécurité publique Canada;
- le rapport de la Yellowknife Women's Society (en anglais seulement).
Recommandation 6 : La GRC et la Division « V » doivent collaborer avec la CCETP pour faire connaître le système de traitement des plaintes du public et en améliorer l'accessibilité
Conclusion 12 : Le système de traitement des plaintes du public n'est pas suffisamment connu et accessible
Le public au Nunavut a une connaissance limitée du système de traitement des plaintes du public, malgré les efforts déployés antérieurement par la GRC et la CCETP. La CCETP a remis à chaque détachement du territoire des brochures et des affiches traduites en inuktitut qui décrivaient son rôle ainsi que le processus de traitement des plaintes du public. Il s'agit d'une étape importante dans l'établissement d'un dialogue avec les collectivités, mais elle est insuffisante puisque les gens ne peuvent obtenir ces renseignements que s'ils se rendent au détachement.
Possibilités d'amélioration de la sensibilisation du public
Les principaux partenaires communautaires et les autres membres du public interrogésNote de bas de page 28 ont suggéré des stratégies de sensibilisation réalistes, comme la publicité :
- à la radio publique, à la télévision locale et dans les médias sociaux (Facebook est beaucoup utilisé au Nunavut);
- dans les édifices gouvernementaux, les arénas et les théâtres.
De plus, le renforcement des liens communautaires, particulièrement avec les collectivités inuites, permettra d'accroître la sensibilisation entre la collectivité et les membres de la GRC qui la serventNote de bas de page 29.
Tenue d'ateliers de sensibilisation au système de traitement des plaintes du public
En se fondant sur les commentaires reçus, NVision a suggéré que la GRC et la CCETP organisent des ateliers en personne à l'intention des dirigeants communautaires et des travailleurs de première ligne afin de les informer sur le processus de traitement des plaintes du public. Ces ateliers aborderaient notamment les points suivants :
- les renseignements qu'il faut donner pour déposer une plainte;
- ce qui se passe une fois qu'une plainte a été déposée;
- la manière dont la GRC traite les renseignements confidentiels;
- le rôle de la CCETP et de la GRC dans le processus.
Recommandation 7 : La GRC doit collaborer avec des groupes dirigés par des Inuits ainsi que des partenaires communautaires et la CCETP pour étudier l'élaboration d'un autre mécanisme de résolution des plaintes adapté à la culture
Recommandation 8 : La GRC doit collaborer avec la CCETP pour étudier les possibilités de créer un portail en ligne qui permettra aux personnes de vérifier l'état de leur plainte
Conclusion 13 : La collectivité ne fait pas confiance au système de traitement des plaintes du public
Il ne suffit pas que la collectivité connaisse l'existence du système de traitement des plaintes du public. La confiance du public est nécessaire pour que des personnes puissent déposer une plainte. Le manque de confiance semble être lié aux trois problèmes ci‑dessous.
Le dépôt d'une plainte du public peut être intimidant pour les membres de la collectivité
Les membres de la GRC et les membres de la collectivité ont souligné que le processus de traitement des plaintes du public pouvait être intimidant pour les particuliers pour les raisons suivantes :
- Dans les petits détachements, le membre de la GRC contre qui ils déposent une plainte peut être la personne qui leur remet le formulaire;
- Les personnes qui ont affaire à la police peuvent avoir des antécédents d'interactions avec la police, ce qui les rend plus vulnérables;
- Comme le précise le rapport de NVision, les gens « craignent des représailles s'ils déposent une plainte contre un agent »;
- Les membres de la GRC n'ont pas tous la formation culturelle nécessaire et ne connaissent pas tous bien l'histoire de la GRC au Nunavut.
Le recours aux services de gendarmes spéciaux inuits en tant qu'enquêteurs ou administrateurs chargés des plaintes du public peut atténuer les problèmes énumérés ci‑dessus et accroître le nombre de membres du public souhaitant déposer une plainte en offrant une ressource adaptée à la culture des membres de la collectivité. [traduction] « Leur [les gendarmes spéciaux inuits] connaissance de la langue, de la culture et des collectivités inuites est essentielle pour rétablir la confiance et travailler à la réconciliation avec les Inuits. Ils agissent comme médiateurs culturels en dissipant la méfiance entre la GRC et les InuitsNote de bas de page 30. » Les personnes pourraient être plus disposées à se présenter et à parler de leur plainte si un gendarme spécial inuit intervenait dans le processus.
En outre, un autre processus de résolution des plaintes adapté à la culture pourrait améliorer la confiance à l'égard du processus de traitement des plaintes du publicNote de bas de page 31. Il pourrait mobiliser la collectivité dans le but de résoudre la plainte d'une manière qui renforcerait la confiance de la collectivité en la GRC. Une approche adaptée à la culture peut être considérée comme plus amicale et axée sur la collectivité, et moins conflictuelle et centrée sur la personne. Elle pourrait également atténuer la crainte de représailles en cas de plainte contre un membre de la GRCNote de bas de page 32. Ce mécanisme doit être élaboré conjointement avec les principaux groupes concernés et adapté aux besoins de la collectivité.
Le nombre de plaintes déposées par le public au cours de la période d'examen de quatre ans a été faible (seulement 75). Il est bien reconnu que la confiance est essentielle à l'efficacité du système de traitement des plaintes du publicNote de bas de page 33. Ce n'est que lorsque les personnes sont convaincues que leur problème sera traité de manière équitable, impartiale et adaptée à la culture qu'elles font appel au système. Le faible nombre de plaintes au Nunavut au cours de la période d'examen de quatre ans peut être attribuable soit à un manque de confiance à l'égard du système, ce qui peut être particulièrement le cas pour les collectivités inuites, soit à un manque de sensibilisation, ou les deuxNote de bas de page 34.
Omission générale de faire le point auprès des personnes sur l'état de leur plainte
Cette omission touche grandement la crédibilité du processus. La recherche de NVision a mis en lumière le fait que les plaignants « avaient l'impression que leur plainte tombait dans l'oreille d'un sourd » et se sentaient découragés de ne pas en connaître l'état. Il est important de mettre en place un système qui permettra de faire des mises à jour substantielles et régulières. Également, ce système doit tenir compte du fait que la connectivité à Internet haute vitesse et à la téléphonie mobile cellulaire n'est pas une réalité dans de nombreuses collectivitésNote de bas de page 35.
NVision a recommandé la mise en place d'un portail en ligne qui permettra aux personnes de suivre l'état de leur plainte
Un portail en ligne permettrait aux personnes de consulter les renseignements sur leur plainte, de connaître l'état de celle‑ci et de lire les mises à jour pour chaque plainte. Elles pourraient ainsi accéder aux renseignements si elles pouvaient avoir recours aux services d'un traducteur et avaient un accès fiable à Internet. Il ne peut toutefois pas s'agir d'une solution autonome. Un système fiable devra prendre en compte les questions de connectivité et d'accessibilité.
La Division « V » ne peut actuellement pas répondre aux plaintes dans d'autres langues
La plupart des habitants du Nunavut parlent l'inuktutNote de bas de page 36; il s'agit de leur première langue, de leur seule langue parlée ou encore de leur langue de préférence. L'enquête de la CCETP et le rapport de NVision ont révélé que les barrières linguistiques constituaient un problème central dans le processus de traitement des plaintes du public parce que les personnes :
- n'avaient pas pu déposer une plainte en inuktitut (ou dans la langue de leur choix);
- avaient été contraintes de faire appel à un traducteur, qui n'était pas toujours disponible;
- n'avaient pas pu donner suite à la plainte : [traduction] « […] les membres de la collectivité ont pu déposer la plainte initiale avec l'aide d'amis ou de membres de la famille bilingues (qui l'avaient traduite de l'inuktut à l'anglais), mais ont fini par la retirer en raison de leur capacité restreinte d'en suivre l'état (leur interprète n'était pas disponible pour leur apporter un soutien continu). »
De plus amples renseignements doivent être transmis en inuktut dans différents formats, et les membres de la collectivité doivent pouvoir se prévaloir des services en inuktutNote de bas de page 37. En outre, le Plan d'action national inuit sur la disparition et les assassinats de femmes et de filles inuites et de personnes 2SLGBTQQIA+ souligne la nécessité pour le gouvernement fédéral de renforcer la capacité en inuktut, y compris au chapitre du maintien de l'ordre.
NVision a recommandé la nomination d'un coordonnateur inuit local des plaintes du public
NVision suggère de confier la gestion des plaintes à un membre inuit, qui :
- aiderait les membres de la collectivité à déposer une plainte plus facilement;
- instaurerait la confiance à l'égard du processus;
- contribuerait à adapter le processus pour qu'il réponde mieux aux besoins d'une collectivité précise.
La Politique sur l'Inuit Nunangat encourage les Inuits à jouer un rôle essentiel
L'un des principes directeurs de cette politique est le suivant : « Les Inuits sont les personnes qui connaissent le mieux les enjeux qui touchent leurs communautés, régions et société; par conséquent, ils doivent jouer un rôle essentiel et exercer des responsabilités croissantes dans la prise de décisions concernant les enjeux qui concernent les Inuits ou l'Inuit Nunangat. » La confiance à l'égard du système de traitement des plaintes du public et la sensibilisation pourraient être renforcées par une représentation. Ce point a été souligné dans le Plan d'action national pour les Inuits (recommandation 6.12), qui appelle notamment à une modification législative afin de rendre obligatoire la présence d'un membre inuit au sein de la CCETP.
Recommandation 9 : La GRC doit élaborer un plan durable pour accroître le recrutement et le maintien en poste d'enquêteurs et d'administrateurs chargés des plaintes du public qui parlent l'inuktitut
Conclusion 14 : Les Inuits ne sont pas suffisamment représentés au sein de la GRC
Le nombre restreint de membres inuits au sein de la Division « V » contribue à la barrière linguistique, au déséquilibre des pouvoirs et au manque de confiance de la part de la collectivité. L'amélioration de la représentation des Inuits à la GRC :
- ferait progresser les efforts de réconciliation avec les collectivités inuites;
- apporterait une expertise sur le plan culturel qui permettrait d'adapter le processus de traitement des plaintes du public et de le faire connaître à des collectivités inuites précises;
- serait conforme au Plan d'action national pour les Inuits, selon lequel la représentation des Inuits est nécessaire sur le plan opérationnel;
- démontrerait le respect commun pour l'histoire et l'importance de l'inuktitut, et en ferait la promotion, ainsi que l'atteinte de l'équité socioéconomique et culturelle entre les Inuits et les autres CanadiensNote de bas de page 38;
- concorderait avec :
- le plan de travail de l'ITK et de la GRC, selon lequel la GRC devrait collaborer avec les organisations inuites de revendication territoriale à la révision de ses stratégies de recrutement et de maintien en poste de membres du personnel inuits,
- le document préparé pour la GRC qui recommande une stratégie de plan d'embauche des InuitsNote de bas de page 39,
- la recommandation formulée dans le rapport de la Yellowknife Women's Society (en anglais seulement) visant à recruter des Autochtones au sein de la GRC.
Le recrutement et le maintien en poste de membres parlant l'inuktut doivent être une priorité
L'enquête de la CCETP a démontré que les membres ne parlant pas l'inuktitut devaient trouver leurs propres solutions de rechange pour bien servir les collectivités. Certains doivent souvent demander de l'aide à des membres de la GRC qui ne sont pas en service ou à des membres du personnel de première ligne qui maîtrisent l'inuktitut (par exemple des fournisseurs de services de santé). Ce problème est exacerbé par le fait que :
- le nombre de membres inuits de la GRC ne cesse de diminuerNote de bas de page 40;
- aucune mesure incitative (par exemple une prime au bilinguisme) n'est offerte aux personnes qui parlent l'inuktut et qui pourraient apporter leur aide dans ces cas.
Le rapport de NVision expose les défis que doivent relever les personnes qui doivent communiquer avec les enquêteurs des plaintes du public ou les personnes chargées de recueillir les plaintes dans une langue autre que leur langue préférée. Le recrutement et le maintien en poste d'enquêteurs et d'administrateurs parlant l'inuktitut sont essentiels pour accroître l'accessibilité du système de traitement des plaintes du public au Nunavut.
Une entrevue menée auprès de l'actuel commandant de la Division « V », qui a entamé ses fonctions en 2022, a révélé que, sous son prédécesseur, la Division avait lancé une initiative de recrutement destinée à faciliter l'embauche de membres et employés inuits. Cette initiative fait suite à la lettre de mandat du ministre de la Sécurité publique qui demande à la GRC d'embaucher plus d'InuitsNote de bas de page 41. La stratégie utilisée comprend :
- la désignation de candidats qualifiés;
- l'amélioration de l'admissibilité grâce à la collaboration avec des organismes de l'extérieur à la présentation d'une formation linguistique et à l'assurance de l'accès aux ordinateurs et à Internet à haute vitesse;
- le mentorat et l'encadrement par la section du recrutement;
- la prise de dispositions pour que les examens oraux soient surveillés par un membre de la GRC.
La Division « V » pourrait envisager le recours à d'autres initiatives pour favoriser le recrutement et le maintien en poste de membres et d'employés inuits
L'enquête a permis de faire quelques suggestions :
- Avoir recours aux services d'agents communautaires inuits et de gendarmes spéciaux inuits – Une entrevue menée auprès d'un représentant du gouvernement fait état d'une initiative conjointe, qui a été financée dans le cadre du Programme des services de police des Premières Nations et des Inuit et qui vise à affecter des agents communautaires inuits dans la plupart des détachements du Nunavut. Les agents communautaires inuits n'exerceraient pas de fonctions générales de maintien de l'ordre, mais agiraient à titre d'agents de liaison entre les collectivités et les détachements locaux. Cependant, une option consisterait à les faire participer aux enquêtes sur les plaintes du public ou à les diriger, en particulier celles qui mettent en cause des Inuits.
- Offrir de nouveau des mesures incitatives pour l'utilisation de l'inuktitut – Lors des entrevues de la CCETP, l'administration de la GRC a soutenu que les primes au bilinguisme ne pouvaient s'appliquer qu'à l'une ou l'autre des deux langues officielles du Canada. Cependant, les entrevues ont révélé qu'à une certaine époque, les membres recevaient une prime s'ils parlaient l'inuktut. Par conséquent, la GRC pourrait collaborer avec le gouvernement territorial à l'étude des possibilités de conclusion d'une entente de partage des coûts qui prévoirait des primes pour les membres parlant l'inuktitut. Ces mesures incitatives seraient conformes à une recommandation formulée dans un document préparé pour la GRC sur la GRC elle‑même et les InuitsNote de bas de page 42.
Conclusion
L'enquête de la CCETP a démontré que des changements étaient nécessaires en vue d'améliorer le processus de traitement des plaintes du public de la GRC au Nunavut. Les recommandations formulées dans le présent rapport visent à rendre ce processus mieux adapté à la culture, plus accessible et mieux connu du public dans le but de renforcer la confiance à son égard, et à améliorer la responsabilisation.
Annexe A : Ce que la CCETP a examiné
La CCETP a enquêté sur l'ensemble des dossiers de plainte du public au sein de la Division « V » au cours de la période d'examen (du 1er avril 2018 au 31 mars 2022). Elle a également examiné les volets ci‑dessous.
Politiques, procédures et lignes directrices
- Politique nationale applicable en matière de plaintes du public (appelée « politique nationale »)
- Guide national sur le traitement des plaintes du public en date du 23 février 2017 (appelé « Guide »)
- Procédures opérationnelles réglementaires de la Division « V » pour les plaintes du public
- Différents documents de référence, notamment les suivants :
- Police Organization and Training (organisation et formation de la police);
- 10 Step Evaluation for Training and Performance Improvement (évaluation en 10 étapes de la formation et de l'amélioration du rendement);
- Police Victim and Witness Interviewing in a Northern Canadian Territory: Measuring Perceptions and Practice (interrogatoire de la police auprès des victimes et des témoins : mesure des perceptions et de la pratique).
Formation
- Formation sur les plaintes du public
- Formation préalable au déploiement dans le Nord
Entrevues
Entrevues auprès des membres de la GRC participant au processus de traitement des plaintes du public au Nunavut
- Commandant
- Officier de l'Administration et du Personnel
- Dirigeant des Relations employeur‑employés
- Sous-officier-conseiller de district
- Officiers hiérarchiques
- Chefs de détachement
- Enquêteurs
Entrevues menées à la Direction nationale des plaintes du public à Ottawa
- Officier responsable
- Examens par le gestionnaire
- Analystes
Des entrevues ont été menées auprès de personnes au Nunavut qui connaissent bien le processus de traitement des plaintes du public de la GRC, notamment un représentant du gouvernement territorial.
Également, la CCETP a conclu un contrat avec NVision Insight Group Inc. (NVision), une société à participation majoritaire autochtone, pour qu'elle mène des recherches communautaires. NVision a désigné et interrogé plusieurs partenaires au Nunavut en raison de leur proximité par rapport au processus de traitement des plaintes du public, y compris des représentants du gouvernement territorial, des représentants d'organisations inuites, des travailleurs communautaires de première ligne et d'anciens membres de la GRC dans le Nord. Un rapport sur les résultats de la recherche, qui comprend des recommandations au sujet de la manière d'améliorer le système de traitement des plaintes du public au Nunavut, a été remis à la CCETP (Traitement des plaintes du public par la GRC au Nunavut, 30 novembre 2022).
Annexe B : Renseignements supplémentaires sur la conformité
Comment la CCETP a établi les critères d'évaluation
La CCETP a utilisé le Guide pour établir 83 critères liés aux enquêtes sur les plaintes du public (ces critères figurent dans les neuf sections énumérées ci‑dessous). Chaque critère a ensuite reçu un niveau d'importance déterminé en fonction du libellé du Guide. La CCETP a défini le bien-fondé d'un dossier de plainte du public en se fondant uniquement sur l'évaluation des critères requis (des mesures doivent être prises). Autrement dit, les critères hautement recommandés ou recommandés n'ont joué aucun rôle dans l'établissement du bien-fondé d'un dossier. Il en découle 67 étapes obligatoires pour les 83 critères du Guide.
Neuf sections du Guide
- Code de déontologie
- Réception et évaluation des plaintes
- Examen de la CCETP
- Enquête formelle
- Règlement à l'amiable
- Refus et cessation
- Mesures correctives
- Incident grave
- Retrait
Libellé dans le Guide | Cote de la CCETP |
---|---|
« Doit être fait » |
Obligatoire |
« Devrait être fait » |
Hautement recommandé |
« Peut être fait » |
Recommandé |
Lorsqu'aucun mot ne se rattache à une mesure |
Obligatoire |
Nombre d'allégations au Nunavut et nature de celles-ci
En tout, 75 dossiers de plainte du public ont été examinés pendant la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2022. Les allégations les plus courantes dans les dossiers de plainte de la Division « V » examinés concernaient l'attitude répréhensible, suivie de la négligence du devoir, du recours abusif à la force et de l'arrestation injustifiée. Ces quatre principales allégations de plainte au Nunavut sont semblables aux plaintes déposées contre la GRC dans son ensemble, mais la proportion d'allégations de recours abusif à la force parmi toutes les allégations est plus élevée au Nunavut qu'au Canada (22 % contre 10 %), tandis que celle des allégations de négligence du devoir est plus faible au Nunavut qu'au Canada (26 % contre 43 %).
Catégorie d'allégation | Nombre d'allégations au Nunavut | Pourcentage du total des allégations au Nunavut | Pourcentage du total des allégations au Canada |
---|---|---|---|
1. Attitude répréhensible |
54 |
31 % |
27 % |
2. Négligence du devoir |
45 |
26 % |
43 % |
3. Recours abusif à la force |
38 |
22 % |
10 % |
4. Arrestation injustifiée |
8 |
5 % |
6 % |
En ce qui concerne les résultats des allégations, la proportion de retraits est beaucoup plus élevée au Nunavut qu'au Canada (27 % contre 11 %), mais la proportion d'allégations appuyées est plus élevée au Nunavut qu'au Canada (12 % contre 7 %).
Résultat | Nombre d'allégations au Nunavut | Pourcentage du total des allégations au Nunavut | Pourcentage du total des allégations au Canada |
---|---|---|---|
Allégations appuyées |
20 |
12 % |
7 % |
Allégations non appuyées |
41 |
24 % |
54 % |
Dossiers réglés à l'amiable |
56 |
32 % |
26 % |
Dossiers cessés |
9 |
5 % |
3 % |
Retraits |
47 |
27 % |
11 % |
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